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  • L’Eunos Cosmo : l’hyper-luxe oublié de Mazda, géniteur de la voiture connectée

    L’Eunos Cosmo : l’hyper-luxe oublié de Mazda, géniteur de la voiture connectée

    L’histoire de l’automobile regorge de modèles dont l’ambition technique a dépassé le succès commercial. L’un des exemples les plus frappants nous vient du Japon des années bulle : la Mazda Eunos Cosmo de génération JC (1990-1995). Au-delà de ses lignes intemporelles et de sa mécanique exotique, ce coupé de Grand Tourisme est un monument d’avant-gardisme technologique, l’ancêtre méconnu de la voiture connectée moderne.

    La tentation du luxe : l’ère des marques jumelles

    À la fin des années 80, l’industrie japonaise est au sommet de son art et de sa richesse. Toyota (Lexus), Nissan (Infiniti) et Honda (Acura) créent leurs divisions de luxe pour cibler les marchés occidentaux, notamment celui des États-Unis, où les restrictions sur le volume d’exportation rendaient plus lucratif l’envoi de véhicules à forte marge.

    Mazda, alors connu pour des voitures audacieuses (MX-5, RX-7), ne fait pas exception. Le constructeur planifiait le lancement d’une marque premium nommée Amati. Le vaisseau amiral de cette nouvelle entité devait être la berline Amati 1000 (finalement lancée comme Mazda Sentia), secondée par ce coupé exceptionnel. Le Eunos Cosmo (Eunos étant l’un des multiples réseaux de distribution de Mazda au Japon, spécialisé dans le luxe et la sportivité) était ainsi le laboratoire roulant de ce luxe japonais d’avant-garde.

    La crise économique japonaise du début des années 90 coupera court au projet Amati, mais le Cosmo fut bien commercialisé sur le marché intérieur, portant l’ADN technique de cette ambition déchue.

    Le Wankel à trois rotors : une signature mécanique unique

    Si le Eunos Cosmo s’est distingué, c’est d’abord par son cœur. Mazda, seul constructeur à s’être obstiné avec le moteur rotatif, a équipé son GT d’une motorisation exclusive : un moteur Wankel tri-rotor 20B-REW.

    Ce bloc, gavé par deux turbocompresseurs, développait 311 ch et 407 Nm de couple. C’était un exploit technique : le Cosmo était capable d’atteindre 100 km/h en seulement 5,3 secondes et une vitesse de pointe de 255 km/h. Ces chiffres lui permettaient de rivaliser directement avec les références allemandes de l’époque, comme la BMW 850i ou la Mercedes SL 500, tout en se contentant d’une cylindrée nettement inférieure. Le revers de cette prouesse fut une soif en carburant légendaire, caractéristique des rotatifs, exacerbée ici par l’architecture tri-rotor.

    L’interface homme-machine : le CCS révolutionnaire

    L’héritage le plus durable du Cosmo réside dans son habitacle. Au centre du tableau de bord trônait le « Car Communication System » (CCS).

    Dès 1990, le CCS proposait :

    1. Un Écran Tactile Central : Pour la première fois de manière aussi complète, le Cosmo intégrait un grand écran tactile pour gérer une majorité des fonctions. Même la climatisation automatique était contrôlée via cet affichage.
    2. La Navigation GPS : L’élément de rupture. Bien que le système, fourni par Mitsubishi Electric, n’était précis qu’à environ 50 mètres (largement suffisant pour l’époque), il faisait du Eunos Cosmo l’une des premières voitures de production au monde à proposer un système de navigation GPS intégré à l’écran central. À titre de comparaison, le système précurseur de Honda, l’Electro Gyrocator (lancé en 1981 sur l’Accord, mais basé sur la navigation inertielle gyroscopique), était une boîte séparée, peu pratique et rapidement retirée du marché.
    3. Divertissement et Communication : L’écran tactile permettait même d’accéder à la télévision (via le tuner analogique de l’époque) et à des fonctions de téléphonie embarquée.

    Malgré son avance technique de dix ans sur certains constructeurs allemands et son style coupé d’une élégance rare, le Cosmo ne fut produit qu’à moins de 9 000 exemplaires jusqu’en 1995. Sa reconnaissance reste en deçà de son statut de véritable pionnier. Le Mazda Eunos Cosmo n’est pas seulement un vestige de l’âge d’or japonais, c’est l’un des premiers véhicules à avoir dessiné la plateforme numérique qui nous est aujourd’hui familière dans nos voitures.

  • Le sacre argenté : pourquoi cette Mercedes-Benz W196 R est la F1 la plus chère de l’histoire

    Le sacre argenté : pourquoi cette Mercedes-Benz W196 R est la F1 la plus chère de l’histoire

    L’histoire, le palmarès, et la rareté sont les trois piliers du culte automobile. Récemment, ces trois forces ont convergé lors d’une vente aux enchères historique, où une monoplace des années 50 est devenue la Formule 1 la plus chère jamais vendue. Il ne s’agit pas de n’importe quelle voiture, mais de la Mercedes-Benz W196 R, pilotée par l’Argentin mythique Juan Manuel Fangio, qui a atteint la somme colossale de 51,155 millions d’euros.

    Un prix digne d’un chef-d’oeuvre

    Cette vente, organisée par RM Sotheby’s à Stuttgart, n’était pas une vente classique ; c’était un événement en soi, la W196 R étant le seul lot proposé. Le prix final, 51,155 millions d’euros, pulvérise l’ancien record pour une Formule 1, établi en 2013 par une autre W196 (version sans carrosserie profilée) vendue à 19 millions de livres sterling. Elle se positionne désormais comme la deuxième voiture la plus chère jamais vendue aux enchères, juste derrière sa cousine : le coupé Mercedes 300 SLR ‘Uhlenhaut’ (135 millions d’euros en 2022).

    Mais qu’est-ce qui rend ce châssis si unique ? C’est le mélange d’une histoire courte, fulgurante et tragique.

    L’ère Fangio et la carrosserie oubliée

    La W196 R a marqué le retour triomphal des Flèches d’Argent en Grand Prix après la Seconde Guerre mondiale, débutant par un doublé au GP de France 1954 (Fangio devant Karl Kling).

    Le châssis vendu (portant le numéro 00009/54) est intimement lié à l’ascension de Fangio :

    • Victoire en 1955 : Elle est la monoplace avec laquelle Fangio a remporté le Grand Prix de Buenos Aires (hors-championnat) au début de la saison 1955.
    • Pilotes de Légende : Bien qu’il ait piloté une version non-streamliner pour ses titres de 1954 et 1955, c’est cette même voiture (châssis 54) qui a été utilisée par Stirling Moss à Monza en 1955, où le Britannique a établi le tour le plus rapide.

    Le fait qu’elle porte la rare carrosserie profilée streamliner (ou stromlinienwagen) ajoute à son mythe. Conçue pour les circuits rapides avec peu de virages (comme Reims), elle s’est rapidement avérée inadaptée aux tracés plus sinueux en raison d’une tendance au sous-virage. Sa courte carrière en Grand Prix (deux courses en 1954 et un retour en 1955) a rendu cette version profilée excessivement rare.

    La destinée du collector : IMS et la tragédie du Mans

    L’histoire de ce châssis est également fascinante par sa destinée après la compétition. Suite au désastre du Mans en 1955, où l’accident de Pierre Levegh causa la mort de 83 spectateurs, Mercedes-Benz se retira de toutes les activités de sport automobile.

    Ce châssis 54, toujours vêtu de sa carrosserie profilée, fut conservé à Stuttgart jusqu’en 1965, date à laquelle Mercedes en fit don au tout nouveau Indianapolis Motor Speedway (IMS) Museum. Il est resté une pièce maîtresse du musée pendant six décennies.

    La vente actuelle était motivée par le besoin du musée d’IMS de sécuriser son avenir financier et de se recentrer sur une collection plus orientée sur l’histoire américaine. Cette monoplace est la première d’une collection de onze véhicules mis en vente, visant à lever près de 100 millions de livres sterling pour la restauration et l’expansion du musée.

    Comme l’a résumé Gord Duff de RM Sotheby’s, la W196 n’est pas qu’une voiture, mais « simplement l’une des voitures de course les plus importantes de l’histoire ». Sa valeur record n’est que la reconnaissance moderne du culte qu’elle a fondé.

  • Spyker : le retour éternel du phénix néerlandais

    Spyker : le retour éternel du phénix néerlandais

    Le cycle est à nouveau complet. Victor Muller, l’entrepreneur néerlandais à la poigne de fer et à la persistance troublante, a une fois de plus annoncé la renaissance imminente de Spyker, le constructeur d’hypercars au destin le plus tourmenté de l’industrie moderne. Si l’annonce réjouit toujours l’âme romantique des passionnés, elle soulève, pour les observateurs avertis, la question fatale : cette fois sera-t-elle la bonne, ou n’est-ce que le dernier acte d’un mythe condamné à se consumer ?

    Une histoire de faillites et de fierté

    L’histoire de Spyker est la négation même de la stabilité. Fondée en 1880 pour des carrosses, elle se lance dans l’automobile pionnière en 1899, mais subit sa première banqueroute dès 1907. Reconstituée, elle se tourne même vers l’aviation durant la Première Guerre mondiale, une inspiration qui nourrira plus tard le design de ses hypercars. Pourtant, après un nouveau sursaut, c’est l’arrêt de mort qui est prononcé en 1922.

    Le véritable mythe moderne prend forme en 1999, lorsque Victor Muller ressuscite la marque, récupérant son logo orné du phénix et sa devise latine : « Nulla tenaci invia est via » (Pour le tenace, aucune route n’est impraticable). C’est le début d’une nouvelle ère flamboyante.


    Le temps de la démesure : C8, F1 et Saab

    La seconde vie de Spyker fut celle de l’extravagance et de l’ambition sans limite :

    • Le Design Aéronautique : Les modèles de l’ère Muller — notamment la C8 et plus tard la C8 Preliator (2016) – ont captivé le monde par leur esthétique. Leur style est un hommage direct aux avions de combat de la Première Guerre, avec des intérieurs spectaculaires faits d’aluminium poli, de cuir matelassé et de manomètres complexes. L’intégration de la mécanique Audi (un V8 4.2L de 525 ch pour la Preliator) garantissait des performances respectables (322 km/h).
    • L’Escapade en F1 : En 2006-2007, Spyker s’offre une incursion éphémère et coûteuse en Formule 1, affirmant une ambition qui dépassait largement ses moyens.
    • L’Erreur Fatale : Le tournant désastreux intervient en 2010 avec l’achat de Saab. Cette opération, largement jugée démesurée, fut un bain de sang financier qui a drainé les ressources du petit constructeur d’hypercars.

    Les années qui ont suivi ont été une suite incessante de tentatives de sauvetage, d’accords avec les créanciers, de mise sous administration contrôlée, et de recours juridiques, aboutissant à une nouvelle banqueroute en 2021 et même à une plainte pour fraude contre Muller.

    Le phénix rechargé, les doutes persistants

    Aujourd’hui, Victor Muller annonce avoir trouvé un accord pour régler les litiges concernant les droits de propriété intellectuelle et les dettes, ouvrant la voie à une nouvelle relance.

    Le mythe du phénix n’a jamais été aussi pertinent. Spyker est condamné à renaître de ses cendres, non pas par nécessité industrielle, mais par la seule volonté de son fondateur, Victor Muller. Pour le spécialiste, l’enthousiasme du design unique (que l’on retrouve dans des détails comme l’inspiration des hélices pour les jantes) est contrebalancé par un historique d’instabilité chronique. Le retour de Spyker est un événement à suivre avec passion, mais surtout, avec une prudence extrême quant à sa viabilité à long terme.

  • Hoon is not dead : Subaru et Hoonigan relancent Gymkhana avec un BRAT de 670 chevaux

    Hoon is not dead : Subaru et Hoonigan relancent Gymkhana avec un BRAT de 670 chevaux

    Le SEMA Show de Las Vegas vient de lever le voile sur un événement que la communauté hoonigan attendait avec impatience : le retour de la série vidéo culte Gymkhana. Après la disparition tragique de son fondateur, le légendaire Ken Block, la pérennité de la franchise – qui cumule plus d’un demi-milliard de vues – était en suspens. L’annonce est sans équivoque : Hoonigan et Subaru Motorsports USA rechargent la machine à faire fumer le pneu, en confiant à Travis Pastrana une machine résolument nouvelle : le Subaru Brataroo 9500 Turbo.

    L’héritage Block, l’esprit Pastrana

    Depuis 2020, Travis Pastrana a repris le flambeau, mais cette nouvelle production marque un tournant, agissant comme un hommage vibrant et nécessaire à la tradition du Gymkhana : transformer la conduite de précision en spectacle chorégraphique et destructeur. Le choix de la Subaru BRAT (Bi-Drive Recreational All-Terrain Transporter) de 1978, un pick-up utilitaire déjà iconique pour sa rareté, est un clin d’œil parfait à l’histoire décalée et rallye de Subaru.

    Le tournage s’est déroulé en Australie, le pays qui a inventé le terme « hoon » (désignant la pratique du drift et des manœuvres agressives dans la rue). Le décor et le casting promettent de perpétuer les standards de la série : destructions massives de pneus, passages au ras du mur et, bien sûr, les sauts démesurés chers à Pastrana.


    Le Brataroo 9500 Turbo : la démesure technique

    Oubliez la mécanique utilitaire des années 70. Le Brataroo 9500 Turbo est une œuvre d’ingénierie extrême conçue par Vermont SportsCar (VSC).

    Sous la carrosserie en fibre de carbone, dont les lignes ont été réimaginées par l’artiste Khyzyl Saleem (The Kyza), se cache une bête de course :

    • Motorisation : Un moteur Boxer turbocompressé de 2,0 litres poussé à 670 ch et 920 Nm de couple. Le rupteur est fixé à plus de 9 500 tr/min, ce qui en fait la voiture Gymkhana la plus rageuse jamais construite.
    • Transmission : La puissance est gérée par la transmission intégrale classique Subaru, mais via une boîte séquentielle SADEV à six rapports et des différentiels de compétition.
    • Châssis : La structure repose sur un châssis VSC intégrant un arceau de sécurité aux dernières normes WRC.

    L’aérodynamique active : voler avec précision

    L’innovation la plus spectaculaire réside dans l’intégration de l’aérodynamique active, indispensable pour les sauts emblématiques de Pastrana. Le Brataroo est conçu pour voler et atterrir avec contrôle :

    • Aubes de Garde-Boue : Les persiennes des ailes avant peuvent pivoter pour ajuster l’assiette de la voiture en l’air.
    • Ailerons Arrière Multiples : La voiture utilise deux ailerons interchangeables. Un grand aileron pour une portance et une stabilité maximales à haute vitesse, et un plus petit pour les manœuvres de destruction de pneus. Les deux ailerons peuvent s’actionner vers le haut pour contrôler le tangage et la rotation lors des phases aériennes.

    Même l’habitacle rend hommage au BRAT original, intégrant un tableau de bord en fibre de carbone avec des accents en grain de bois composite de lin, et un poste radio CB Uniden d’époque. Comme le dit Pastrana, cette voiture est « la plus folle jamais construite » pour cette série. Le Gymkhana, dans sa forme la plus extrême et la plus sophistiquée, est bel et bien de retour.

  • Séisme en endurance : Porsche quitte le WEC, un adieu dorcé par la BoP ?

    Séisme en endurance : Porsche quitte le WEC, un adieu dorcé par la BoP ?

    Le sport automobile mondial vient d’encaisser un choc de taille : Porsche, le constructeur le plus titré aux 24 Heures du Mans, a annoncé son retrait de la catégorie Hypercar du Championnat du Monde d’Endurance (WEC) à l’issue de la saison. C’est plus qu’un départ ; c’est un signal d’alarme sur l’état du championnat, dicté par une combinaison de contraintes financières et, plus directement, de frustrations sportives non dissimulées.

    La priorité au marché nord-américain

    La décision de Porsche Motorsport, dirigée par Thomas Laudenbach, a été prise dans un contexte économique tendu, marqué par un recul des ventes et des bénéfices de la marque. Face à la nécessité de réduire les dépenses en compétition, l’un des trois programmes d’usine devait être sacrifié. La Formula E 2025-2026, nouveau défi électrique, n’était pas négociable.

    Le choix s’est donc porté sur l’un des deux engagements du prototype hybride 963 LMDh, géré par Porsche Penske Motorsport (PPM) : le WEC ou l’IMSA SportsCar Championship aux États-Unis. La raison de la survie de ce dernier est simple et pragmatique : l’Amérique du Nord est le plus grand marché de Porsche. Maintenir la présence dominante en IMSA était stratégiquement vital pour l’image de la marque.

    L’ombre de la Balance of Performance (BoP)

    Si la raison financière a facilité la décision, la justification sportive en est le cœur. Porsche a été remarquablement transparent sur son sentiment de ne pas concourir à armes égales en WEC, contrairement à ce qui se passe en IMSA, où la 963 a été dominante.

    L’objectif initial de la réglementation Hypercar (LMDh/LMH) était de permettre à une même voiture de concourir dans les deux championnats sous une BoP (Balance of Performance) équitable. Or, selon Porsche, cet équilibre a été rompu dans le championnat mondial.

    Thomas Laudenbach, sans prononcer le terme maudit de BoP (dont les discussions publiques sont interdites par le WEC), a été limpide :

    « L’aspect financier est là, ainsi que l’aspect sportif. L’idée originale était de construire une seule voiture et de courir dans les deux championnats avec un terrain de jeu équitable. Cela n’a pas fonctionné partout de la même manière. Cela a eu une influence sur notre décision. »


    La blessure du Mans

    Le point de rupture émotionnel fut sans doute les 24 Heures du Mans de cette année. Malgré une course quasi parfaite de la voiture #6 de Kévin Estre, Laurens Vanthoor et Matt Campbell, la 963 a terminé seconde, derrière la Ferrari 499P. Porsche estime avoir excellé sur tous les critères de la compétition moderne (stratégie, fiabilité, performance des pilotes), mais que la BoP a empêché la victoire.

    Laudenbach a souligné que la #6 aurait dû gagner, estimant qu’il y a des « choses à améliorer » dans l’organisation du WEC. En dépit d’un titre Pilotes WEC remporté l’an dernier et d’une chance de le conserver jusqu’à la finale de 2025 à Bahreïn, le constructeur aux 19 victoires au Mans n’a jamais remporté l’épreuve reine avec la 963. Le signal envoyé est clair : si l’équité n’est pas garantie, même le mythe s’en va.

    Ce retrait est un coup dur pour le WEC, qui voit partir un pilier historique au moment même où il attire de nouveaux constructeurs (Genesis, Ford, McLaren). La crédibilité de la BoP, pilier de cette nouvelle ère de l’endurance, est désormais sur la sellette.

  • L’antidote au carré : au volant du Tonale, le SUV Alfa Romeo

    L’antidote au carré : au volant du Tonale, le SUV Alfa Romeo

    Alfa Romeo redonne un coup de fouet à son SUV compact, le Tonale. Mais si le marché européen continue de lui préférer l’efficacité géométrique de la concurrence allemande, c’est que l’on n’a pas compris la philosophie de ce SUV. Le Tonale n’est pas conçu pour maximiser le volume de coffre ou les pourcentages de vente ; il est taillé pour l’œil, le toucher, et surtout, le plaisir du conducteur. L’antidote italien au SUV premium clinique est là.

    Un design qui ne cède rien au marché

    Le Tonale n’a jamais cherché à ressembler aux autres. Tandis que la plupart des SUV premium adoptent des lignes rigides et fonctionnelles, Alfa Romeo a sculpté le sien avec la passion que l’on attend de la maison de Milan. Le restylage est subtil, confirmant que le design initial était le bon. Les voies légèrement élargies renforcent son assise, lui donnant cette posture athlétique indispensable à un véhicule portant le Biscione.

    Même la contrainte réglementaire est tournée à l’avantage du style. Si la plaque d’immatriculation migre désormais au centre (adieu la tradition déportée, pas merci aux normes européennes), le regard acéré, inspiré des phares de la mythique SZ et RZ Zagato, reste inchangé. L’ajout de nouvelles teintes, comme un ocre particulièrement saillant, et des jantes de 19 ou 20 pouces (existe en plus petit), rappelle que le premier critère d’achat d’une Alfa doit toujours être l’émotion visuelle.

    L’émotion avant le ratio : la magie du châssis

    C’est derrière le volant que le Tonale impose son culte. Face à une concurrence allemande souvent jugée un peu aseptisée en conduite quotidienne, le SUV transalpin délivre une personnalité immédiate.

    La grande force du Tonale réside dans sa direction : d’une rapidité déroutante et d’une précision chirurgicale, elle rend la conduite ludique et engageante, même sur les petites routes secondaires. C’est le genre de direction qui détonne dans le segment, rappelant que l’ADN d’Alfa Romeo est avant tout celui des sensations. Que l’on opte pour les trains roulants McPherson de base (déjà très efficaces) ou pour la suspension électronique Dual Stage Valve des finitions plus cossues, le maintien de caisse est au rendez-vous sans jamais dégrader le confort.

    Bien sûr, la version hybride rechargeable (270 chevaux cumulés) montre ses limites en pure vigueur face à la concurrence. On regrette l’absence en Europe du 2.0 essence de 284 chevaux réservé au marché américain – une mécanique qui collerait parfaitement à l’esprit sportif de ce châssis. Mais le Tonale PHEV se rachète avec un autre atout pour les puristes : sa transmission intégrale permanente, qui peut se révéler un avantage tactique, notamment pour les escapades en montagne. La concurrence peut être plus puissante, plus rapide, mais jamais aussi adorable à conduire.

    L’intérieur : chic, pas clinique

    À l’intérieur, le Tonale assume une ambiance chic et plaisante. Le restylage apporte des touches subtiles comme le nouveau sélecteur rotatif de boîte de vitesses et l’introduction de nouvelles garnitures en cuir rouge ou en Alcantara.

    Si certains puristes allemands pourront souligner un raffinement moins chirurgical des assemblages, l’atmosphère est incontestablement italienne. L’instrumentation numérique est parfaitement lisible, complétée par un écran tactile de 10 pouces. Surtout, les sièges baquets offrent un excellent compromis entre confort pour les longs trajets et maintien en conduite dynamique.

    Le Tonale prouve qu’une voiture peut être une offre premium crédible tout en privilégiant le plaisir de rouler différent. Dans la jungle des SUV compacts, il est l’échappatoire : une ligne séduisante, un intérieur chic, un châssis agile, et un positionnement tarifaire qui ne pénalise pas (notamment grâce à l’hybride rechargeable échappant au malus). En dépit des chiffres de vente, le Tonale est un véhicule qui fait honneur au culte de la conduite italienne.

  • Century : l’héritage d’Akio Toyoda et le luxe « One of One » érigé en marque

    Century : l’héritage d’Akio Toyoda et le luxe « One of One » érigé en marque

    Le Japan Mobility Show (JMS) 2025 n’aura pas seulement été le théâtre de concept-cars futuristes ; il a officialisé une mutation stratégique majeure au sein du Groupe Toyota. Dans une allocution particulièrement émouvante devant les médias, Akio Toyoda a exposé une vision qui dépasse la simple motorisation : celle d’une « entreprise visant à façonner les cent prochaines années depuis le Japon ».

    La légende fondatrice : l’automobile au service de la nation

    L’histoire de Century, lancée en 1967, n’est pas celle d’une simple limousine. Akio Toyoda la replace dans le contexte d’un Japon en pleine reconstruction post-guerre, se préparant aux Jeux Olympiques de Tokyo. Il cite les mots fondateurs de son grand-père, Kiichiro Toyoda : « Il ne s’agit pas seulement de fabriquer des automobiles. Avec des idées et des compétences japonaises, nous devons créer une industrie automobile pour le Japon. »

    Le développement de la première génération, mené par l’ingénieur en chef Kenya Nakamura et le jeune Shoichiro Toyoda (père d’Akio), était guidé par la volonté de concevoir une voiture que le Japon pouvait présenter fièrement sur la scène mondiale : un véhicule qui devait être « sans égal » (To be like no other). Face au scepticisme d’une industrie sans réelle tradition de luxe, Nakamura aurait répondu : « La tradition viendra naturellement. Créons un nouveau genre de voiture de luxe. » La Century est donc née de la fusion audacieuse entre la technologie de pointe d’après-guerre et l’intégration profonde des savoir-faire artisanaux japonais, comme la gravure sur métal Edo pour l’emblème du phénix ou le brocart Nishijin-ori pour le tissu des sièges.

    De l’héritage familial à la mission personnelle

    Pour Akio Toyoda, la Century représente bien plus qu’une lignée de modèles. Il y voit l’incarnation de la philosophie de Kiichiro : « Contribuer au rétablissement pacifique du Japon et à la culture mondiale ». Le nom Century, qui renvoie à la fois au centenaire de l’ère Meiji et à la naissance du fondateur Sakichi Toyoda, symbolise désormais pour Akio l’ambition de « créer les cent prochaines années ».

    Dans un Japon contemporain qui traverse « les trente années perdues », le Président estime que la Century est plus que jamais nécessaire pour raviver la fierté japonaise. En s’appuyant sur les compétences du monozukuri (l’art de la fabrication), la marque est conçue pour exporter « l’esprit du Japon » dans le monde. La marque Century est désormais élevée au statut de « One of One », une entité distincte qui se veut le porte-étendard du Spirit of Japan.

    Le phénix se déploie : la nouvelle offre

    La stratégie de marque se traduit immédiatement par une diversification de la gamme :

    1. La berline classique : l’interprétation classique de la limousine de prestige.
    2. Le SUV Business-Casual : l’ajout controversé mais stratégique pour le marché actuel, déjà lancé.
    3. Le coupé chauffeur : la nouveauté présentée au JMS, caractérisée par une élégance de carrosserie et des portes coulissantes (à l’avant et à l’arrière côté passager). Ce coupé n’est pas destiné au conducteur, mais reste un véhicule à chauffeur, offrant des places arrière spacieuses et entièrement inclinables, même si, comme l’a souligné Akio Toyoda, il est conçu pour être plaisant à conduire le week-end.

    Le phénix, emblème de la Century qui, selon la mythologie japonaise, n’apparaît qu’en période de paix mondiale, devient ainsi la figure de proue d’une ambition renouvelée : faire de la marque Century, par son niveau de finition, sa tradition et sa rareté, le symbole ultime du luxe automobile japonais sur la scène internationale.

  • Louis Schweitzer (1942-2025) : l’homme qui a forgé le Renault du XXIe siècle

    Louis Schweitzer (1942-2025) : l’homme qui a forgé le Renault du XXIe siècle

    Le décès de Louis Schweitzer, PDG du groupe Renault de 1992 à 2005, sonne comme un rappel de la rapidité et de la brutalité des mutations qu’a connues l’industrie automobile depuis trois décennies. Son parcours, atypique pour l’époque — un haut fonctionnaire propulsé à la tête d’un fleuron industriel — fut la synthèse parfaite de la rigueur étatique et de la nécessité d’une vision capitaliste globale. Il n’a pas seulement géré Renault ; il a fondamentalement redéfini son rôle et sa structure.

    La privatisation : condition Sine Qua Non

    La première grande œuvre de Schweitzer fut l’aboutissement de la privatisation en 1996. Cette transformation n’était pas un choix idéologique, mais une nécessité économique et stratégique. En s’extirpant du giron de l’État, Renault obtenait la liberté d’action indispensable pour les investissements massifs en R&D et pour la restructuration drastique qui s’imposait. Ce processus fut concomitant au recentrage de l’activité sur le seul secteur automobile, notamment par la cession progressive des activités véhicules industriels (RVI), marquant la fin du conglomérat et le début d’une focalisation métier essentielle à la survie face à la concurrence germanique et américaine.

    L’anticipation stratégique : le binôme Twingo et Logan

    Sous sa direction, Renault n’a pas seulement produit des voitures, il a créé des segments de marché. La Twingo (1993) fut la manifestation d’un génie marketing, offrant un concept de monospace monocorps urbain audacieux qui ciblait une clientèle désireuse de simplicité et de couleur, rompant avec le classicisme des supermini de l’époque.

    Plus structurel encore fut le projet Logan. Initié comme une solution pour les marchés émergents, le concept de la voiture conçue a priori pour minimiser le coût de production, et non pour maximiser le profit a posteriori, est un modèle d’ingénierie inversée avant l’heure. En 2004, la commercialisation de ce modèle via Dacia ne fut pas perçue comme un simple ajout de gamme, mais comme la création d’un nouveau business model durable. C’est l’héritage Schweitzer qui permet aujourd’hui à Dacia d’être le pilier de la rentabilité du Groupe.

    L’Alliance Renault-Nissan : le coup de maître transcontinental

    L’acte le plus audacieux et le plus structurant de sa carrière demeure l’établissement de l’Alliance Renault-Nissan en 1999. Confronté à l’injonction de la taille critique, Louis Schweitzer a refusé le rôle de proie pour devenir l’architecte d’un partenariat transcontinental. En prenant une participation majoritaire dans Nissan (rachetant de fait ses dettes), il n’a pas seulement sauvé un constructeur japonais en difficulté ; il a créé une structure hybride, dénuée de fusion capitalistique totale, mais reposant sur une mutualisation des plateformes techniques et des investissements en R&D. L’envoi de Carlos Ghosn pour restructurer Nissan fut la mise en application tactique de cette vision, démontrant que les synergies ne seraient pas que financières, mais aussi managériales. Ce mariage de cultures reste, malgré ses turbulences récentes, l’établissement stratégique qui a permis à Renault de se positionner durablement parmi les grands acteurs mondiaux.

  • La légende en rouge : les secrets de la Ferrari 308 de Magnum

    La légende en rouge : les secrets de la Ferrari 308 de Magnum

    Sur l’île d’Hawaï, au début des années 80, une voiture est devenue le symbole mondial d’une décennie d’insouciance : la Ferrari 308 GTS de Thomas Magnum. Mais derrière le mythe, il y a une réalité pleine de contraintes de tournage, de cascades abusives, et de substitution de modèles. Voici les anecdotes qui ont fait de la Ferrari rouge le véritable co-star de la série culte.

    L’échec du coup Porsche et la taille de Tom Selleck

    L’histoire de la Ferrari de Magnum a failli ne jamais s’écrire. Initialement, l’acteur Tom Selleck (qui culmine à 1,93 m) souhaitait que son personnage conduise une Porsche 928. Cependant, Porsche a refusé de modifier le véhicule pour les besoins du tournage. Ferrari, en revanche, a saisi l’opportunité marketing et a accepté de fournir ses modèles. Le reste est entré dans l’histoire de la télévision.

    Ironie du sort, l’acteur avait de sérieuses difficultés à s’insérer dans l’étroit cockpit de la 308. Pour palier sa grande taille, Ferrari a dû retirer le rembourrage des sièges et boulonner les rails de fixation le plus loin possible. Malgré ces efforts, la tête de Selleck dépassait encore largement le pare-brise. C’est pourquoi Magnum est presque toujours filmé décapoté (avec le toit targa retiré), un détail qui est devenu une signature visuelle involontaire.

    Un seul numéro, trois modèles différents

    La voiture de Robin Masters, toujours immatriculée ROBIN 1, n’était pas un modèle unique. Au fil des huit saisons, la production a utilisé pas moins de trois 308 GTS différentes pour les plans rapprochés :

    1. Une 308 GTS de 1979 (à carburateurs, la plus pure).
    2. Une 308 GTSi de 1981 (l’injection, moins puissante mais plus fiable).
    3. Une 308 GTSi Quattrovalvole de 1984 (la version à quatre soupapes par cylindre, la plus moderne et puissante de la série).

    Pour compliquer le tableau, la série a parfois introduit des variantes inattendues. Dans un épisode de la saison six, Magnum a conduit une 308 GTSi Quattrovalvole verte de 1984 (prétendument une autre voiture de la collection de Masters), offrant une rare touche de couleur en rupture avec le rouge omniprésent.

    L’abus à l’écran et les kits cars déguisés

    Derrière les stars rutilantes se cachait une réalité de plateau brutale. La Ferrari de Magnum a subi des sévices incroyables : elle a été écrasée, criblée de balles, parfois même conduite hors des falaises ou explosée (à l’écran). Heureusement, la production disposait toujours d’une voiture de réserve prête à rouler.

    Pour les cascades les plus rudes et les plans larges qui ne nécessitaient pas une Ferrari authentique, la production n’hésitait pas à utiliser des kits cars basés sur la Pontiac Fiero, habilement déguisés en 308. Un sacrifice nécessaire pour le budget et la sécurité des vrais modèles.

    Lorsque la série s’est terminée en 1988, les voitures de production ont été dispersées. L’acteur Larry Manetti (Rick) aurait réussi à en conserver une, et une autre est exposée au Lakeland Motor Museum en Angleterre.

    Au final, si la 308 a fait de Magnum un poster car des années 80, son culte est si fort qu’il a perduré. Le reboot de 2018 de la série a d’ailleurs rendu un hommage direct à cet héritage en donnant au nouveau Magnum une Ferrari 488 Spider rouge et beige. La légende de la Ferrari d’Hawaï est éternelle.

  • Le culte du quotidien : pourquoi la Coccinelle est la Daily Classic parfaite

    Le culte du quotidien : pourquoi la Coccinelle est la Daily Classic parfaite

    Dans la quête perpétuelle du collectionneur pour « le prochain grand coup », il est facile d’oublier que le charme d’une ancienne réside dans sa capacité à rouler. En France, loin des spéculations sur les hypercars des enchères, la Volkswagen Coccinelle représente l’archétype du véhicule culte : facile à vivre, amusant à conduire, et paradoxalement, une machine à défier les modernes.

    La Coccinelle : plus qu’une voiture, un choix de vie

    En Europe, la Coccinelle est un monument de la démocratisation. Au-delà des chiffres de production, la « Cox » est surtout la meilleure porte d’entrée pour rouler en ancienne tous les jours, sans la peur constante de la panne ou du devis exorbitant.

    Pourtant, il faut avouer qu’être passager d’une Cox dans le trafic moderne demande une certaine foi. Sans direction assistée, avec une puissance qui laisse place à une « déficience de couple » et des ceintures de sécurité qui ne sont pas la première ligne de défense, on s’accroche parfois à la poignée du tableau de bord. Mais ces petites frayeurs sont vite balayées par la fierté du décalage.

    Le secret du « Daily Classic » réussi

    Quand on veut une belle Cox, on ne plaisante pas avec l’entretien. La philosophie de restauration est claire : remettre d’abord la voiture dans un état mécanique irréprochable, puis rouler régulièrement. Contrairement aux voitures de musée, la Cox est faite pour être utilisée, pour mélanger le bruit typique des cylindres à l’arrière avec le tumulte de la ville.

    Même si l’on cherche à respecter l’époque, une légère dose de modernité est bienvenue pour le confort d’aujourd’hui. Un allumage électronique, l’amélioration des carburateurs, l’ajout d’un alternateur : ces ajustements cruciaux ne trahissent pas l’âme de la voiture, mais assurent sa fiabilité face aux exigences du trafic moderne. Ce n’est qu’après cela qu’une restauration esthétique complète prend tout son sens.

    L’investissement de la passion

    Aujourd’hui, le marché français reflète la notoriété et le côté culte de la Coccinelle. La période idéale pour un modèle de collection se situe entre les années soixante et le milieu des années soixante-dix. Si les modèles plus anciens offrent une meilleure valeur résiduelle, l’approvisionnement en pièces est devenu une facilité, et non un obstacle. C’est le grand avantage de la Cox : son héritage mondial assure une logistique de pièces presque sans faille.

    La montée en puissance est visible sur les prix. Aujourd’hui, un exemplaire sain à restaurer coûte dix fois plus cher qu’à la meilleure époque. Mais même avec le coût d’une restauration complète, l’investissement reste bien inférieur aux « Youngtimers » plus sophistiqués.

    La Coccinelle, c’est l’essence même de la démocratisation du plaisir (avec une histoire large comme l’hémicycle de l’assemblée). Elle est la preuve que l’on peut rouler avec un morceau d’histoire tous les jours, défier le trafic dans une machine à air et se garer avec fierté, le tout sans verser une goutte de sueur. Parler de destinée, c’est peut-être cela : la voiture du peuple qui est devenue, près d’un siècle plus tard, le classique du peuple.

  • Du « pare-bouse » au cockpit virtuel : l’évolution culte du tableau de bord

    Du « pare-bouse » au cockpit virtuel : l’évolution culte du tableau de bord

    Aujourd’hui, nos voitures nous parlent, nous guident et affichent des écrans haute définition. Pourtant, le terme « tableau de bord » a des origines bien plus rustiques, liées aux chevaux et à la boue. En retraçant l’histoire de cette simple cloison protectrice, on comprend l’incroyable voyage qui a mené l’automobile du simple instrument de déplacement au véritable smart device roulant.

    L’origine inattendue : le « dashboard » du cocher

    Il est amusant de constater que le mot « dashboard » (littéralement « planche de tableau » ou « pare-bouse ») remonte aux calèches et aux chariots. Ce n’était à l’origine qu’une simple cloison destinée à protéger le cocher des débris et de la boue projetés par les sabots des chevaux au trot. Cette cloison servait également à stocker le fouet, les rênes, et le foin des bêtes. Selon le budget du propriétaire, elle était faite de bois, de cuir ou de tôle. Le tableau de bord, initialement, était donc un simple bouclier fonctionnel.

    L’âge du laiton : quand le moteur remplaça le cheval

    Avec l’apparition des premières automobiles à la fin du XIXe siècle, le tableau de bord a entamé sa première mue. Le besoin de protection physique s’est transformé en besoin d’information. Les premiers tableaux de bord ne contenaient que des éléments basiques et mécaniques : le levier de frein, la bouteille en verre pour l’huile de lubrification et, progressivement, un premier bloc d’instruments.

    C’était l’époque de l’élégance brute : le design des véhicules haut de gamme s’affinait, introduisant des matériaux nobles comme le laiton pour les entourages d’instruments. Le simple speedometer et l’odomètre sont rejoints par le compte-tours et l’indicateur de pression. C’est surtout à la fin des années 30, lorsque la voiture est perçue non plus comme un simple outil mais comme un lieu de vie, que l’on voit arriver le chauffage et les premières radios à tubes, préparant le terrain pour la révolution du confort intérieur.

    La révolution du plastique et l’ère du loisir

    L’après-guerre a accéléré la transformation. Le tableau de bord est devenu un espace de design à part entière, gagnant en couleur et en intégration. Mais l’évolution la plus radicale fut l’arrivée de l’industrie du plastique rigide. Ce nouveau matériau a permis de produire en masse les volants, les leviers et les boutons, rendant les intérieurs plus complexes et moins chers à fabriquer.

    Le tableau de bord est alors devenu l’hôte des accessoires du « confort » et du statut social. Si les aérations étaient initialement réservées aux modèles haut de gamme, le standard de l’époque est rapidement devenu le chrome sur les radios et, surtout, l’incontournable allume-cigare et le cendrier : signes que l’on passe désormais du temps dans sa voiture.

    L’assaut numérique : du GPS au cockpit virtuel

    Les années 80 marquent le début de l’explosion technologique. Le tableau de bord se complexifie avec des systèmes de climatisation sophistiqués, des compartiments de rangement, puis l’intégration progressive des premiers systèmes de navigation GPS.

    Dans les années 2010, l’avènement du numérique a tout bousculé. L’infotainment est devenu la norme, et le tableau de bord, jusqu’alors une unité statique, est devenu un écran tactile et une interface logicielle. Devant le conducteur, le tableau de bord numérique – le virtual cockpit – a remplacé les cadrans physiques.

    Cette technologie offre une sécurité accrue, en plaçant la carte de navigation satellite directement dans le champ de vision du conducteur. Plus besoin de détourner le regard vers le centre de la console ! Mieux encore, le conducteur peut désormais personnaliser l’affichage via le volant multifonction : augmenter la taille du compte-tours, faire disparaître le répertoire téléphonique ou afficher la carte en grand. C’est l’ultime évolution : le tableau de bord, né pour arrêter la boue du cheval, est devenu un centre de commande intelligent, où le conducteur est aux manettes de sa propre expérience numérique. Un véritable bond de la charrette au smartphone.

  • La flamme éternelle : les clubs Porsche, là où la passion n’a pas d’âge

    La flamme éternelle : les clubs Porsche, là où la passion n’a pas d’âge

    Plus qu’un simple réseau automobile, la communauté des Porsche Clubs est une famille mondiale. Fondé le 26 mai 1952, ce club rassemble aujourd’hui plus de 240 000 membres répartis dans plus de 700 clubs à travers le monde. Mais au-delà de sa portée globale, c’est l’incroyable amplitude d’âge de ses membres qui témoigne de la profondeur de la légende Porsche. Trois histoires extraordinaires illustrent comment cette passion transgénérationnelle se transmet et se renouvelle.

    Jörg Steidinger : le gardien de la légende à 90 ans

    Après une longue carrière d’orfèvre, Jörg Steidinger, un passionné inconditionnel de la Porsche 356, profite d’une retraite bien méritée. À une époque, il a possédé 15 exemplaires de l’icône refroidie par air. Aujourd’hui, quatre demeurent sous sa garde, la plus ancienne étant un 356 C Cabriolet de 1963 qu’il possède depuis près de 45 ans.

    « J’ai cette voiture depuis presque la moitié de ma vie, » sourit Steidinger. « C’est plus qu’un simple véhicule – c’est une partie de mon histoire. »

    Jörg est un pilier de la communauté, ayant co-fondé le Porsche 356 Club Germany, qui célèbre cette année son 50e anniversaire. Malgré son âge avancé, il insiste sur le fait que ses voitures doivent être conduites pour rester en forme et est reconnaissant d’être encore en mesure de prendre le volant. Il a transmis le « virus Porsche » à ses trois fils, qui hériteront un jour de ses précieuses machines.

    Il note que la plupart des membres ont 45 ans et plus, un fait attribuable au coût des véhicules, mais il est convaincu que la nouvelle génération apporte une « énergie fraîche » dès qu’elle rejoint la communauté.


    Theo Brunt : du fast-food à la Cayman S à 16 ans

    Pour la plupart, la première voiture est un modèle modeste. Pas pour Theo Brunt. Début 2024, il est devenu le plus jeune membre du Porsche Club New Zealand (PCNZ), à seulement 16 ans, en achetant sa toute première voiture : une Porsche Cayman S de 2008 de couleur argent.

    Comment ? En travaillant de longues heures dans un restaurant rapide après l’école pendant 18 mois.

    Le jeune Néo-Zélandais a depuis troqué le monde du poulet frit pour une carrière en ingénierie automobile, après avoir décroché un poste de mécanicien apprenti. Maintenant propriétaire de sa deuxième Cayman, Theo est un visage régulier des événements du PCNZ.

    « Les autres membres étaient évidemment très surpris de voir quelqu’un d’aussi jeune que moi – le prochain membre le plus jeune que j’ai rencontré a la trentaine, » raconte-t-il. « Mais tout le monde a été si accueillant. »

    Sa passion l’a propulsé vers un avenir professionnel précis : il vise des qualifications en ingénierie et en conception assistée par ordinateur, rêvant de travailler chez Porsche ou Manthey.


    Jonathan Webb : un futur ambassadeur à 11 ans

    Le terme « obsessionnel » prend tout son sens avec Jonathan Webb, 11 ans, de Toronto. Grâce au programme Juniors du Porsche Club of America (PCA), Jonathan est déjà un visage familier. Il est passé d’aider son père à préparer sa 911 Carrera 4S (génération 996) pour des expositions à soutenir le personnel du PCA lors d’événements.

    « Les enfants comme Jonathan sont l’avenir de notre club, » confirme Vu Nguyen, directeur exécutif du PCA.

    Jonathan n’est pas timide : il a déjà rencontré Hans-Peter Porsche (fils de Ferry Porsche) et a récemment interviewé le présentateur de télévision américain Chris Jacobs devant la caméra. Il a les yeux rivés sur une Porsche 944 pour sa première voiture, et après avoir appris à vidanger l’huile de la 911 de son père, il se voit poursuivre une carrière dans le sport automobile.

    Le PCA encourage activement ces jeunes membres, leur donnant la liberté de créer les nouvelles traditions du club, assurant que la passion de la marque perdure pour le siècle à venir.