Étiquette : aluminium

  • Audi A2 : 25 ans d’avance sur son temps

    Audi A2 : 25 ans d’avance sur son temps

    En septembre 1999, au Salon de Francfort, Audi levait le voile sur une compacte pas comme les autres. Entièrement en aluminium, profilée comme une goutte d’eau et pensée pour consommer le moins possible, l’A2 incarnait l’idée même d’innovation radicale. Vingt-cinq ans plus tard, la petite Audi est entrée dans l’histoire comme un ovni automobile, incompris à sa sortie mais devenu aujourd’hui un véritable objet de culte.

    La révolution de l’aluminium

    À la fin des années 1990, l’Audi Space Frame n’était pas qu’une signature marketing. Après l’A8, pionnière de la construction en aluminium, Ingolstadt osa l’appliquer à une citadine. Le résultat ? Une coque de seulement 153 kilos, soit environ 40 % plus légère qu’une carrosserie traditionnelle en acier. Un chiffre impressionnant, surtout à une époque où l’automobile commençait déjà à prendre de l’embonpoint.

    Avec ses 3,83 mètres de long et 1,67 mètre de large, l’A2 se plaçait sur le segment des polyvalentes, mais son habitabilité et son coffre planaient un cran au-dessus de la concurrence. Produite à Neckarsulm, dans une usine spécialement aménagée pour elle, l’A2 était un condensé de technologie embarquée dans une silhouette atypique.

    Le rêve du « trois litres »

    L’histoire de l’A2 s’inscrit dans un contexte précis : celui du programme du « trois litres » voulu par le groupe Volkswagen au début des années 1990. L’objectif : concevoir une voiture capable de ne consommer que 3 litres de carburant aux 100 kilomètres. Audi s’y attela avec sérieux, jusqu’à donner naissance en 2001 à la première berline quatre portes de série capable d’atteindre ce seuil, l’A2 1.2 TDI.

    Avec seulement 61 chevaux, un poids limité à 855 kilos et un Cx record de 0,25, elle ne brillait pas par ses performances mais par son efficience. Sa consommation homologuée de 2,99 l/100 km reste encore aujourd’hui un chiffre qui ferait pâlir bien des citadines hybrides modernes.

    Une esthétique clivante

    Comme souvent avec les voitures en avance sur leur temps, le style de l’A2 divisa. Luc Donckerwolke, futur auteur des Lamborghini Murciélago et Gallardo, avait signé une silhouette monovolume compacte, au pavillon haut et aux lignes tendues. Les prototypes Al2, dévoilés en 1997 à Francfort et Tokyo, avaient déjà suscité des réactions contrastées. La version de série ne fit pas exception : adorée par les uns pour sa modernité, jugée ingrate par les autres.

    L’arrivée en 2003 de la série spéciale colour.storm, avec ses teintes vives (Papaya orange, Imola yellow, Misano red…), ses arches de toit noires et son ambiance intérieure assortie, tenta de lui donner un côté plus émotionnel. Mais le public resta frileux.

    Des ventes en demi-teinte

    Sur le plan commercial, l’A2 ne réussit jamais à rencontrer le succès attendu. Malgré une gamme moteur élargie – de la 1.4 essence de 75 ch jusqu’à la 1.6 FSI de 110 ch, capable de dépasser les 200 km/h –, la petite Audi souffrait d’un positionnement délicat. Trop chère pour une compacte (son aluminium se payait au prix fort), pas assez statutaire pour incarner un vrai produit premium, et trop en avance sur une clientèle encore peu sensible aux vertus de l’allègement et de l’aérodynamisme.

    Entre 2000 et 2005, seuls 176 377 exemplaires sortirent des chaînes de Neckarsulm, dont à peine 6 555 en version 1.2 TDI. Une déception pour Audi, qui mit un terme à l’expérience après cinq ans.

    Une seconde vie en youngtimer

    Pourtant, l’histoire ne s’arrête pas là. Car si l’A2 n’a pas trouvé son public à l’époque, elle bénéficie aujourd’hui d’une aura particulière. Ses qualités intrinsèques – fiabilité, économie, modernité – en font une compagne de route encore prisée de nombreux conducteurs. Sa carrosserie en aluminium la protège efficacement de la corrosion, et sa rareté lui donne déjà une certaine valeur sur le marché des collectionneurs.

    De plus en plus de passionnés voient en elle un jalon important de l’histoire automobile récente : un laboratoire roulant qui annonçait, à sa manière, les préoccupations actuelles autour de la réduction du poids, de l’efficacité énergétique et de l’optimisation aérodynamique.

    Vingt-cinq ans après, l’Audi A2 apparaît donc comme une pionnière injustement boudée. Une voiture de conviction, née d’une époque où l’industrie allemande rêvait encore de faire rimer innovation technologique et frugalité énergétique. Aujourd’hui, l’A2 se savoure comme une curiosité devenue icône, témoin d’une audace qu’on aimerait parfois retrouver davantage dans l’automobile contemporaine.

  • Morgan Supersport : quand Malvern fait (vraiment) évoluer sa formule

    Morgan Supersport : quand Malvern fait (vraiment) évoluer sa formule

    Il y a des voitures qu’on excuse. Qu’on juge selon des critères à part. Qui se soustraient aux référentiels habituels parce qu’elles se situent ailleurs : sur le terrain de la nostalgie, du charme rétro ou de la singularité artisanale. Les Morgan en font partie. Du moins, elles en faisaient partie. Car avec la nouvelle Supersport, le petit constructeur de Malvern semble vouloir s’affranchir de ce statut de toléré bienveillant. Enfin.

    L’habit ne fait (plus) le moine

    Esthétiquement, la Supersport reste une Morgan. Une silhouette évoquant l’ère Art déco, des proportions classiques, une identité sans ambiguïté. Pourtant, derrière ces galbes familiers se cache une philosophie renouvelée. Officiellement, la Supersport se présente comme une mise à jour de la Plus Six. Dans les faits, elle la dépasse largement. Le style est affiné, les surfaces modernisées. À bord, l’habitacle conserve un charme rétro assumé, avec une planche de bord dessinée sur mesure, bien qu’écornée par l’intrusion d’éléments BMW comme le volant ou le sélecteur de vitesses automatique, qui jurent dans cet environnement soigné.

    Une base connue, une exécution inédite

    Techniquement, la Supersport repose sur la même architecture aluminium CX que les Plus Six et Plus Four. Le moteur vient également de Munich : un six-cylindres en ligne turbo de 3,0 litres (code B58), bien connu des amateurs de Z4 ou de Toyota GR Supra. Fort de 335 ch et 500 Nm, il propulse les 1 170 kg de la Supersport avec vigueur. Le 0 à 100 km/h est abattu en 3,9 secondes, et la vitesse de pointe atteint 267 km/h. Rien que du très sérieux.

    Mais la vraie surprise vient du comportement dynamique. Là où les anciennes Morgan réclamaient une indulgence permanente – direction floue, suspensions archaïques, châssis flexibles – la Supersport change la donne. Le châssis est nettement plus rigide, la direction plus directe, la tenue de route bien plus rassurante. Pour la première fois, une Morgan moderne donne envie d’attaquer, sans appréhension. Ce n’est pas (encore) une Porsche, mais c’est enfin une voiture de conduite, pas seulement de balade.

    Un tournant stratégique

    Avec cette Supersport, Morgan ne se contente pas de séduire ses fidèles clients. Il s’agit clairement d’un produit pensé pour élargir le spectre. Son positionnement tarifaire, autour de 120 000 €, la place frontalement face à une Porsche 911 Carrera. Le constructeur assume ce choix : certains puristes préféreront sans doute rester fidèles aux modèles plus classiques de la gamme. Mais pour tous ceux qui ont toujours rêvé d’une Morgan capable de rivaliser avec des sportives sérieuses sur des critères objectifs, le moment est venu.

    Ce qui manque encore

    Tout n’est pas parfait pour autant. L’absence de boîte manuelle – alors même que BMW propose une version six vitesses parfaitement compatible – est regrettable sur une voiture aussi orientée plaisir de conduite. Les sièges, étroits, ne conviendront pas à toutes les morphologies. Et l’intégration de certains éléments techniques d’origine BMW manque encore de finesse. Autant de points perfectibles, mais qui ne ternissent pas l’impression générale : la Supersport est la meilleure Morgan jamais produite. Et ce n’est pas rien.

    La révélation d’un potentiel

    Pendant des décennies, Morgan a cultivé une forme d’exotisme britannique, mêlant charme désuet et performances marginales. Avec la Supersport, la marque montre enfin qu’elle peut être prise au sérieux, sans renier son identité. Le style est toujours là, la tradition aussi. Mais le fond a changé. Plus rigide, plus précise, plus rapide, plus engageante, cette nouvelle Morgan n’est plus une voiture qu’on aime malgré ses défauts. C’est une voiture qu’on aime pour ses qualités. Et cela, c’est une vraie révolution à Malvern.