Étiquette : Jeep Compass

  • Essai Jeep Compass : le baroudeur doit faire ses preuves sur asphalte

    Essai Jeep Compass : le baroudeur doit faire ses preuves sur asphalte

    La troisième génération du Jeep Compass arrive sur le marché européen avec une double ambition : s’imposer sur le segment C et réussir sa transition vers l’électrique. Le constructeur américain a confié sa production à l’usine italienne de Melfi, et si son style évoque bien un SUV tout droit sorti des Appalaches, sa structure repose sur une architecture moderne conçue pour le marché européen : la plateforme STLA Medium.

    Ce premier essai de la version 100 % électrique de 213 ch et 74 kWh (net) pose la question fondamentale pour les puristes : comment ce nouveau Compass, fabriqué en Italie, concilie-t-il l’héritage tout-terrain de Jeep avec cette base technique moderne ?

    Une ingénierie globale, des choix européens

    Le passage à la plateforme STLA Medium implique un partage technique et une rationalisation des chaînes de traction.

    • Motorisations variées : Le nouveau Compass est lancé avec une gamme complète incluant une motorisation hybride essence (145 ch), une hybride rechargeable (195 ch), et deux versions 100 % électriques, offrant 500 et 650 km d’autonomie (selon la version). Le PHEV et le 4×4 arriveront dans quelques mois.
    • Le paradoxe du 4×4 électrique : Fait notable, la seule version à bénéficier de la transmission intégrale est la variante 100 % électrique de 375 ch. Le modèle est équipé d’un second moteur électrique garantissant des capacités de franchissement de haut niveau. Cependant, l’absence de 4×4 sur les autres motorisations (thermiques et hybrides rechargeables) dès le lancement est un signal clair que cette génération de Compass priorise l’efficacité et l’utilisation routière sur le Vieux Continent.

    Un intérieur identitaire et fonctionnel

    Malgré l’architecture partagée, Jeep a réussi à imposer une ambiance intérieure singulière. L’environnement et la position de conduite sont soignés. L’ergonomie est très satisfaisante :

    • Technologie de bord : On retrouve deux grands écrans (10,25 pouces pour l’instrumentation et 16 pouces pour le multimédia).
    • Commandes bien pensées : Le volant multifonction et la commande de boîte rotative participent au plaisir d’utilisation. Les palettes derrière le volant permettent d’ajuster la régénération au freinage, et un bouton spécifique permet de désactiver facilement les aides à la conduite non souhaitées, un détail bien accueilli.
    • Ambiance baroudeur : Les différents modes de conduite sont accessibles via le fameux sélecteur rouge Selec-Terrain. Sur cette version deux roues motrices, les modes (Auto, Sport, Sand/Mud, Snow) ajustent la puissance de crête et la calibration de l’ESP.

    L’habitacle fait preuve d’une grande praticité, offrant pas moins de 34 dm³ de rangements à l’avant, souvent dotés de tapis antidérapants. Les places arrière, avec leur plancher plat, progressent en confort pour trois passagers. La finition est en progrès, même si la présence de certains plastiques durs empêche le Compass de se hisser au niveau des meilleurs du segment en matière de luxe perçu.

    Sur la route : précision et masse

    Sur l’asphalte, le Compass électrique de 213 ch est plus ferme que d’autres véhicules basés sur cette même plateforme (davantage qu’un C5 Aircross), ce qui se traduit par une précision de conduite agréable. L’insonorisation est efficace, les bruits d’air n’apparaissant qu’au-delà de 140 km/h (la vitesse de pointe est limitée à 180 km/h).

    Côté recharge, l’unité accepte jusqu’à 160 kW sur borne rapide, permettant de passer de 20 à 80 % de charge en 30 minutes.

    Dans cette version 100 % électrique, le Compass se révèle plaisant à conduire, confortable et très bien équipé (la version First Edition est disponible à 44 990 €). Malgré son style évocateur, il n’est pas un vrai baroudeur dans sa configuration de lancement. Il s’agit avant tout d’un excellent SUV compact électrique européen. Et comme la clientèle privilégie souvent le style aux réelles capacités, il a tout pour plaire dès les versions 2 roues motrices !

  • La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    Loin des clichés de la Motor Valley et du Piémont, c’est au cœur de la Basilicate, entre les oliviers et les collines, que se joue depuis trente ans une histoire essentielle de l’automobile européenne. L’usine de Melfi, née d’un pari politique, est devenue le laboratoire de Stellantis et, surtout, le pivot mondial de la marque Jeep.

    Melfi : le pari ambitieux du Sud industriel

    Pour comprendre le rôle actuel de l’usine de Melfi – aujourd’hui vitrine de la nouvelle Jeep Compass électrique – il faut remonter au début des années 1990. Le site, un complexe d’acier et de verre de près de deux millions de mètres carrés, a été inauguré par Fiat comme un geste fort : faire entrer le sud de l’Italie, traditionnellement moins industrialisé que le Nord, dans la modernité.

    Melfi n’était pas un choix par défaut ; c’était un pari politique et social visant à rééquilibrer la production italienne au-delà de Turin. Les modèles qui y sont nés, de la Fiat Punto à la Lancia Ypsilon, ont marqué l’entrée dans l’automobile pour toute une génération européenne. L’usine a prouvé la rigueur de ses ouvriers et la précision de ses ingénieurs, incarnant une Italie industrielle capable de grande échelle et de qualité. Melfi est rapidement passée du statut d’usine satellite à celui de monument de la résilience industrielle.

    L’allégeance à l’aigle américain : quand Jeep dépasse Détroit

    Le véritable tournant, et ce qui nous intéresse au premier chef, arrive en 2014. Après l’arrêt de la production des modèles historiques, Melfi faisait face au spectre du déclin. Mais FCA, sous l’impulsion de Sergio Marchionne, a pris une décision radicale : faire de ce site italien le berceau d’une icône américaine, la Jeep Renegade.

    Ce fut la première Jeep de l’histoire à être produite en dehors du continent nord-américain. Ce choix stratégique a permis à Jeep de se positionner au cœur du marché européen, avec des coûts de logistique réduits et une réactivité accrue. En associant l’ADN américain de liberté et de capacité tout-terrain à la précision italienne de l’assemblage et du design, Melfi a façonné une identité à part. En une décennie, plus de 2,3 millions de Jeep – incluant les premières versions de la Compass et ses déclinaisons hybrides rechargeables 4xe – sont sorties des chaînes du Sud, prouvant que le mythe Jeep pouvait s’épanouir sous un ciel italien.

    Du V12 aux Watts : Melfi, laboratoire de la « liberté de production »

    Aujourd’hui, l’usine s’adapte à une nouvelle révolution : l’électrification. La nouvelle génération de la Jeep Compass, conçue sur la plateforme STLA Medium, n’est plus seulement un véhicule produit en Italie ; elle est la vitrine d’un savoir-faire industriel unique en pleine transition énergétique.

    Le concept clé réside dans la « liberté de production » : la plateforme modulaire permet d’assembler, sur la même ligne, des versions hybrides, hybrides rechargeables et 100 % électriques. Cette flexibilité est vitale dans un marché européen imprévisible, permettant à Stellantis d’adapter son mix industriel presque instantanément, sans rupture.

    Melfi est donc devenue un véritable laboratoire technologique pour le groupe, testant des procédés de pointe (contrôle qualité par caméras haute résolution, peinture « 4-Wet » à faible impact environnemental) et visant l’autonomie énergétique.

    L’héritage ouvrier, moteur de la culture voiture

    Au-delà des chiffres techniques (jusqu’à 375 chevaux et 650 km d’autonomie pour la nouvelle Compass), ce qui fascine, c’est la dimension humaine et culturelle. L’usine emploie plus de 4,600 personnes, dont l’ancienneté moyenne dépasse vingt ans. Ces ouvriers et ingénieurs sont les héritiers de l’histoire industrielle initiée par la Punto, et sont aujourd’hui les artisans de l’électrique.

    La fierté qui émane de ces équipes n’est pas seulement celle du travail bien fait, elle est celle d’une région qui, souvent sous-estimée, a prouvé sa capacité à s’adapter sans renier son héritage. En voyant la nouvelle Compass sortir de Melfi, le passionné ne regarde pas seulement un SUV global. Il voit le résultat d’une histoire de trente ans, où le pragmatisme du Sud italien s’est marié à l’icône de l’aventure américaine, assurant ainsi la pérennité du culte Jeep pour la génération électrique.