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  • Elon Musk à Washington : un crash-test grandeur nature de la gouvernance par l’ingénierie

    Elon Musk à Washington : un crash-test grandeur nature de la gouvernance par l’ingénierie

    La rumeur prétendait qu’il allait « hacker » l’administration fédérale comme il a bouleversé l’automobile et l’aérospatial. Elon Musk, promu « employé gouvernemental spécial » pour une mission de 130 jours à la tête d’un improbable « Department of Government Efficiency » (DOGE, comme la crypto qu’il chérit tant), a livré un spectacle à mi-chemin entre la farce technocratique et le drame bureaucratique.

    Dans le rôle de la promesse de rationalisation, Musk s’est engagé à sabrer 2 000 milliards de dollars de dépenses publiques. À l’arrivée, selon les chiffres même de son équipe (discutables, comme souvent), le gain serait de 175 milliards… mais les coupes brutales auraient coûté, net, 135 milliards en pertes économiques et sociales, d’après plusieurs analyses indépendantes.

    Parmi les victimes prioritaires de cette croisade : USAID, l’agence d’aide internationale, quasiment démantelée. 80 % de ses programmes supprimés, des conséquences directes sur les pays qui survivent grâce aux subventions des pays occidentaux, Etats-Unis en tête. Le tout pour satisfaire une vision froide de la performance étatique, où chaque dollar doit être justifié comme sur un tableur Excel. Une approche qui, transposée à Tesla, aurait sans doute condamné la Model S dès son lancement.

    L’homme qui voulait coder la politique

    Musk à Washington, c’est une sorte de crossover entre House of Cards et Silicon Valley. Sauf que cette fois, le héros autoproclamé s’est brûlé les ailes. Il faut dire que l’homme arrive avec une aura de démiurge industriel : Tesla, SpaceX, Neuralink… et cette capacité rare à tordre le réel par la volonté. Mais ce pouvoir se heurte ici à une matière plus rétive : la démocratie représentative, les contre-pouvoirs, les contraintes sociales.

    Les décisions furent expéditives, souvent chaotiques. Licenciements de fonctionnaires en masse, arrêt brutal de programmes sans évaluation d’impact, management sous MDMA – littéralement, selon des accusations non confirmées mais abondamment relayées. L’homme le plus riche du monde, entouré d’un cercle de fidèles souvent plus proches du culte que du cabinet ministériel, a confondu la Maison-Blanche avec un plateau de lancement SpaceX.

    Un échec programmé

    Pourquoi a-t-il échoué ? Pas faute d’ambition, mais plutôt à cause de son absence de modestie politique. Matt Bai, dans le Washington Post, résume crûment : « Il a échoué parce que ses idées étaient si désespérément petites. » La révolution qu’on attendait s’est résumée à une purge sans vision, à des slogans libertariens usés jusqu’à la corde. Les programmes de « marionnettes transgenres au Guatemala », moqués dans les médias conservateurs, sont devenus des cibles faciles – mais symboliques – d’un Musk en quête de totems à brûler.

    Sa plus grande réussite ? Avoir humilié le fonctionnement gouvernemental autant que lui-même. À coups de tweets absurdes, de provocations esthétiques (saluts douteux, tenues enfantines, chaînes en or), et d’une gestion RH qu’on croirait tirée d’un roman de Michel Houellebecq.

    Une leçon pour l’automobile

    Que retenir de ce détour politique pour le monde de l’automobile ? Peut-être ceci : la disruption n’est pas un système de gouvernement. Ce qui fonctionne pour forcer un secteur à évoluer – batteries, propulsion électrique, conquête spatiale – ne fonctionne pas nécessairement pour gérer la complexité humaine. Le Musk qui a fait rêver les amateurs de technologies en abaissant le coût des lancements orbitaux et en industrialisant l’électrique se révèle incapable de structurer une action publique cohérente.

    Le parallèle avec les difficultés actuelles de Tesla est tentant. Alors que ses ventes fléchissent, que la concurrence chinoise grignote ses parts de marché, que les promesses de conduite autonome s’éternisent, Musk semble de plus en plus tenté par la fuite en avant idéologique plutôt que la consolidation industrielle. Il lui sera sans doute plus difficile de convaincre les investisseurs, désormais que sa réputation de visionnaire s’est noyée dans les eaux troubles de la politique.

    Un retour à la réalité

    À l’heure du départ, Musk quitte Washington avec un goût amer. Dace Potas, dans USA Today, note qu’il a fait « un effort sincère » pour réduire la taille de l’État… mais qu’il a été utilisé comme paravent par des Républicains trop heureux de le laisser s’empoisonner avec un projet impossible. Le projet de loi budgétaire final, qu’il a lui-même appelé une « abomination répugnante », contient un déficit supplémentaire de 3 600 milliards de dollars.

    Peut-être qu’un jour, ses fusées atteindront Mars. Mais à Washington, Elon Musk a surtout prouvé qu’on ne gouverne pas un pays comme on assemble une Model Y.

    Et si Musk avait raison ?

    Sans chercher à s’enfermer dans une posture systématiquement anti-Musk, ne perçoit-on pas ici un symptôme révélateur de la politique occidentale contemporaine ? Aux États-Unis comme en Europe, les gouvernements semblent paralysés par un immobilisme entretenu à la fois par une classe politique installée et par les fameux « partenaires sociaux », souvent arc-boutés sur la défense d’un statu quo dans lequel ils trouvent leur équilibre, sinon leur intérêt.

    En tentant, à sa manière, de réécrire les règles de la politique américaine, Musk s’est heurté à un mur. Syndicats, gardiens de l’orthodoxie institutionnelle, forces médiatiques et mouvances idéologiques diverses – de ce qu’il qualifie lui-même de « bien-pensance » à une gauche américaine qu’il considère plus dogmatique que réformiste – ont rapidement transformé son projet en champ de bataille. Pris dans les contradictions de son propre discours et confronté à des résistances bien enracinées, il a été politiquement broyé.

    En France, la start-up nation a été sacrifiée de la même manière. L’immobilisme reste et restera roi.

  • Porsche LMP2000 : la victoire volée qui donna naissance à la Carrera GT

    Porsche LMP2000 : la victoire volée qui donna naissance à la Carrera GT

    Et si Porsche n’avait jamais abandonné son projet LMP2000 ?
    À l’heure où Le Mans s’apprête à fêter sa 93e édition, difficile de ne pas se replonger dans cette histoire oubliée : celle d’une Porsche conçue pour gagner, tuée dans l’œuf, dont les restes mécaniques servirent à créer l’une des supercars les plus charismatiques des années 2000 — la Carrera GT.

    À la fin des années 1990, la marque allemande est pourtant au sommet. En juin 1998, la 911 GT1-98 décroche la seizième victoire de Porsche aux 24 Heures du Mans. Allan McNish, Laurent Aiello et Stéphane Ortelli offrent au constructeur ce succès dans une voiture qui, bien qu’ultra-performante, reste encore vaguement liée à la silhouette de la 911. En interne, le constat est clair : pour rester au sommet, il faut changer d’approche.

    Naissance d’une idée

    Herbert Ampferer, alors directeur de Porsche Motorsport, veut rompre avec la logique du GT travesti. Fini le bricolage entre 993, 996 et éléments de course : place à un vrai prototype. Mais il doit convaincre un homme : Wendelin Wiedeking, le puissant patron de Porsche.

    La réponse de ce dernier est cinglante : « Et qu’est-ce que cela changerait si nous gagnions une 17e fois ? » Une victoire de plus n’apporterait pas grand-chose selon lui. Pourtant, Ampferer obtient le droit de prendre une année sabbatique en 1999 pour concevoir une toute nouvelle voiture, avec une liberté technique totale : ainsi naît le projet LMP2000, également connu en interne sous le code 9R3.

    Un V10 secret venu de la F1

    Le cœur de cette voiture n’est autre qu’un V10 atmosphérique de 5,5 litres, dérivé d’un moteur de Formule 1 jamais utilisé. Ce bloc avait été développé dans le plus grand secret par une poignée d’ingénieurs de Weissach au milieu des années 1990. Il s’agissait alors pour Porsche de prouver — après l’humiliation du V12 Footwork de 1991 — qu’elle savait concevoir un moteur F1 compétitif.

    Résultat : un V10 léger, compact, puissant et musical, jamais aligné en Grand Prix, mais parfait pour les exigences d’un prototype d’endurance moderne. Norbert Singer, le légendaire ingénieur de Porsche, est chargé de concevoir le châssis ouvert qui accueillera ce bijou mécanique. Un LMP pur et dur, loin des compromis des GT1 des années précédentes.

    Les essais de la dernière chance

    En novembre 1999, deux pilotes montent dans le cockpit de la LMP2000 sur la piste d’essai de Weissach : Bob Wollek, vétéran à la recherche de sa première victoire au général au Mans à 56 ans, et Allan McNish, tout juste vainqueur avec Porsche en 1998. Les deux hommes sont impressionnés par la voiture. Wollek parle d’une « fusée », McNish voit son avenir s’écrire en lettres d’argent et de carbone. Il a même un contrat de trois ans dans sa mallette.

    Sauf que tout est déjà fini.

    En coulisses, Wiedeking a tranché. Le projet LMP est mort-né. Il ne verra jamais Le Mans. Porsche annonce en décembre 1998 son retrait de l’édition 1999, mais ce qui semblait être une pause stratégique est en réalité un abandon. Pourquoi ? Officiellement, pour concentrer les ressources sur un autre projet stratégique : le développement du futur SUV Cayenne. Officieusement, une ambition plus discrète se dessine.

    La légende naît d’un sacrifice

    Wiedeking pose une nouvelle question à Ampferer : « Quelle est la plus grande marque de voitures de sport au monde ? » Sa réponse est évidente : Porsche. Et le patron de conclure : « Alors prouve-le. Construis une supercar. »

    Ainsi débute la gestation de ce qui deviendra la Carrera GT. Le V10 du LMP2000 est repris presque à l’identique, en version civilisée. L’architecture en carbone, les enseignements aérodynamiques, la philosophie technique — tout vient du prototype sacrifié. La Carrera GT est dévoilée en concept en 2000 avant de devenir réalité en 2003. Et le monde découvre une Porsche sans compromis, à boîte manuelle, au châssis pur, à l’ADN de compétition bien réel.

    Renaissance tardive et révélations

    Pendant deux décennies, la 9R3 reste cachée, reléguée à quelques clichés flous. Il faut attendre l’approche de son 25e anniversaire pour que Porsche ressorte la LMP2000 du musée, la remette en route et offre à McNish un tour de piste en 2024, cette fois aux côtés de Timo Bernhard. Le prototype fonctionne encore à merveille. Le moteur V10 hurle comme au premier jour.

    Avec le recul, certains y voient une manœuvre stratégique pour laisser le champ libre à Audi, alors en pleine montée en puissance en endurance. En 1999, Audi débarque au Mans, et rapidement, la domination commence. Porsche, de son côté, reste à l’écart jusqu’à 2014. La théorie du pacte secret n’a jamais été prouvée. Mais dans un groupe VW encore peu structuré, dirigé par Ferdinand Piëch, petit-fils de Ferdinand Porsche, on peut comprendre que certaines portes se soient ouvertes… ou fermées.

    Un fantasme d’ingénieur, un mythe avorté

    Le Porsche LMP2000 n’a jamais pris le départ d’une course. Il n’a jamais franchi la ligne droite des Hunaudières, ni attaqué les virages Porsche à pleine charge. Et pourtant, il symbolise une philosophie entière : celle d’un constructeur capable de concevoir le meilleur prototype de son époque… puis de tout arrêter au dernier moment, pour mieux rediriger ses efforts vers la route.

    La 9R3 n’est pas la Porsche oubliée. Elle est la Porsche fantôme, celle dont la disparition a permis une résurrection routière exceptionnelle. À la croisée des chemins entre la course et la route, elle incarne une question restée en suspens : que se serait-il passé si elle avait couru ?

  • Essai Lancia Ypsilon HF : renaissance foudroyante

    Essai Lancia Ypsilon HF : renaissance foudroyante

    Parmi les vignes et les collines entre Milan et Turin, le centre d’essai de Balocco bruisse à nouveau de l’écho d’un nom mythique : HF. Cette fois-ci, c’est au tour de la Lancia Ypsilon HF, compacte électrique de 280 chevaux, d’écrire une nouvelle page de la légende.

    Nous avons eu le privilège de découvrir la plus radicale des Ypsilon au cœur même du complexe Stellantis à Balocco, sur le tout nouveau tracé baptisé « Pista Lancia HF », un circuit conçu spécifiquement pour mettre à l’épreuve les futures sportives de la marque. Loin d’être un simple exercice de style, cette version électrisée du badge HF propulse Lancia dans une ère nouvelle, tout en ravivant un glorieux passé.

    Un circuit pour un retour au sommet

    Pour son grand retour dans l’univers des sportives compactes, Lancia n’a pas lésiné sur les moyens. Balocco, site emblématique du développement des véhicules italiens depuis les années 60, a été le théâtre d’un développement intensif de la Ypsilon HF : 100 000 km de tests, 1 500 heures de roulage, et plus de 100 pneus sacrifiés. De quoi transformer une citadine élégante en une compacte affûtée comme une lame de rallye.

    Le circuit, avec ses virages serrés, ses courbes rapides, ses changements de dénivelé et ses zones à faible adhérence, est un terrain de jeu idéal pour juger du potentiel dynamique de cette nouvelle Lancia. Et le verdict est sans appel : cette Ypsilon HF, avec ses 280 chevaux, son couple de 345 Nm et son différentiel Torsen, est un concentré d’adrénaline à taille urbaine.

    Une fiche technique d’exception

    Première Ypsilon à mériter vraiment le badge HF depuis des décennies, cette version s’offre un arsenal technique impressionnant. La puissance provient d’un moteur électrique alimenté par une batterie lithium-ion de 54 kWh (400V), garantissant jusqu’à 370 km d’autonomie WLTP. Les performances sont dignes de GTI thermiques bien connues : 0 à 100 km/h en 5,6 s, 180 km/h en pointe.

    Mais c’est sur le comportement routier que cette HF impressionne : caisse abaissée de 20 mm, voies élargies de 30 mm, rigidification du châssis (+67 % à l’avant, +153 % à l’arrière), et un freinage Alcon à étriers 4 pistons et disques de 355 mm. Le tout est complété par une direction précise et naturelle, un grip remarquable et une motricité redoutable, même en relances musclées sur sol glissant.

    Lancia réinvente son style sportif

    La Ypsilon HF revendique son appartenance à la lignée des Delta et Fulvia HF avec un style affûté : jantes de 18 pouces, boucliers spécifiques, diffuseur arrière, passages de roue musclés. Les feux arrière ronds évoquent la Stratos, tandis que le profil tendu incarne le langage stylistique Pu+Ra de la marque.

    L’habitacle n’est pas en reste : sièges sport en Econyl à motif « cannelloni », volant en cuir perforé, interface S.A.L.A. aux teintes évolutives du bleu à l’orange, pédalier en aluminium, éclairage d’ambiance et technologies dernier cri — conduite semi-autonome de niveau 2, Apple CarPlay/Android Auto sans fil, recharge à induction, etc. Un vrai cocon technologique au service du plaisir de conduite.

    L’esprit HF pour tous ?

    Lancia ne s’arrête pas là. Pour accompagner cette renaissance, la marque propose également une version plus accessible baptisée Ypsilon HF Line, disponible en motorisation hybride à partir de 27 800 €. Elle reprend certains attributs esthétiques de sa grande sœur électrique et offre un compromis intéressant pour ceux qui cherchent un style affirmé sans basculer dans la radicalité.

    Le retour d’un emblème

    Ce renouveau s’accompagne d’un logo HF réinterprété, toujours orné de l’Elefantino Rosso, mais modernisé dans ses lignes et ses couleurs. Un clin d’œil appuyé à l’héritage de la Squadra Corse et à ces années où Lancia dominait les spéciales de rallye avec panache.

    Ce badge HF, né en 1960 pour distinguer les clients les plus fidèles de la marque, devient aujourd’hui le porte-étendard du retour à la performance. Un retour validé par un certain Miki Biasion, pilote double champion du monde avec Lancia, qui a suivi le développement de cette HF électrique de près.

    Un futur électrisant pour Lancia

    Avec cette Ypsilon HF, Lancia ne se contente pas d’un hommage nostalgique. Elle propose une vision contemporaine de la sportivité, où électrification rime avec sensations, efficacité et caractère. À 42 400 € (ou 325 euros / mois), la compacte transalpine vient bousculer le segment, en s’imposant comme la plus puissante et la plus expressive des petites voitures européennes.

    Sur la Pista HF de Balocco, c’est tout l’esprit Lancia qui est revenu vrombir, en silence mais avec éclat. La renaissance est en marche — et elle s’annonce diablement excitante.

  • Mission impossible : sauver la petite voiture ?

    Mission impossible : sauver la petite voiture ?

    Face à l’envolée des prix, à l’inflation technologique et aux normes toujours plus contraignantes, la petite voiture européenne est-elle vouée à disparaître ? Pas si l’on en croit les voix de plus en plus nombreuses qui s’élèvent pour défendre une approche plus sobre, plus pragmatique. Au sommet « Future of the Car » organisé par le Financial Times, Luca de Meo (Renault) et John Elkann (Stellantis) ont lancé un cri d’alarme.


    Le constat est sans appel : les voitures deviennent de plus en plus grandes, lourdes, complexes… et inaccessibles. Un paradoxe au cœur de l’industrie automobile européenne, où l’on prône la décarbonation, mais où l’on contraint progressivement à l’abandon des véhicules légers, simples et abordables.

    Lors du dernier sommet Future of the Car, organisé par le Financial Times, deux figures majeures de l’industrie, Luca de Meo (CEO du groupe Renault) et John Elkann (président de Stellantis), ont uni leurs voix pour dénoncer cette dérive. En toile de fond, une question : la transition écologique justifie-t-elle de tourner le dos à la voiture populaire ?

    Trop lourdes, trop chères, trop complexes

    Depuis plus d’une décennie, la petite voiture est attaquée de toutes parts. Pour répondre aux exigences de sécurité, aux normes environnementales et aux attentes technologiques, les constructeurs doivent embarquer toujours plus d’équipements, souvent coûteux. Le résultat ? Des citadines devenues des mini-crossover à plus de 25 000 €.

    Et ce n’est pas un hasard si les segments A et B se vident progressivement. Rares sont les modèles restants sous les 4 mètres de long et sous les 15 000 €. Là où autrefois une Peugeot 106, une Fiat Panda ou une Clio proposaient une mobilité accessible, les plateformes modernes et les batteries imposantes ont eu raison de ces équilibres économiques fragiles.

    Dacia, la résistance tranquille

    Mais certains résistent encore et toujours à l’envahisseur technologique. À commencer par Dacia, la filiale frugale de Renault, dont la stratégie devient un cas d’école. Pour Denis Le Vot, patron de la marque roumaine, ce moment est clé : « Les réglementations nous poussent dans une direction où la mobilité abordable disparaît. »

    Le discours de Le Vot résonne comme un écho au plaidoyer de de Meo et Elkann. Oui, la voiture doit être plus propre. Oui, la sécurité est primordiale. Mais comment préserver ces fondamentaux sans détruire la base même de l’automobile européenne : l’accès pour tous à une mobilité individuelle ?

    Dacia a fait un choix fort : ne pas courir après les cinq étoiles Euro NCAP, simplifier les équipements, mutualiser les coûts à travers l’(ex)Alliance. Cela a permis à la marque d’afficher des prix de vente réalistes — et une rentabilité insolente. Le message est clair : il existe une autre voie.

    Cycle de vie plutôt que pot d’échappement

    Derrière cette fronde des constructeurs européens, c’est aussi une remise en question de la grille d’analyse des émissions qui se profile. Faut-il continuer à juger une voiture uniquement sur ses rejets d’échappement ? Pour de Meo comme pour Elkann, cette approche est obsolète. Il faut désormais prendre en compte l’ensemble du cycle de vie : fabrication, usage, recyclage, mix énergétique.

    Un exemple ? Une Dacia Jogger hybride consommant peu, utilisée pendant 15 ans dans un pays où l’électricité reste carbonée, pourrait in fine avoir un meilleur bilan carbone qu’un petit VE rechargé au charbon ou produit avec une batterie imposante et peu recyclée.

    Luca de Meo plaide ainsi pour un retour au principe de neutralité technologique, longtemps pilier des politiques européennes, mais mis à mal par des choix qui favorisent unilatéralement l’électrique.

    Une bifurcation nécessaire ?

    La vraie question est peut-être celle-ci : la voiture peut-elle encore être un bien populaire en Europe ? Si la logique actuelle se poursuit — avec un bannissement progressif du thermique, des exigences croissantes en termes d’assistances électroniques et une électrification sans compromis — la réponse est non.

    Les industriels appellent à une pause, voire une bifurcation stratégique. Pas pour abandonner les objectifs climatiques, mais pour y répondre de manière plus réaliste. En valorisant des véhicules optimisés, sobres, réparables, produits localement avec des matériaux mieux recyclés. Bref, des voitures pensées pour durer, pas pour impressionner.

    Des mots aux actes ?

    Cette convergence de vues entre Renault et Stellantis — pourtant concurrents féroces — n’est pas anodine. Elle reflète un changement de paradigme en gestation, où l’on ne pourra plus opposer systématiquement « vert » et « accessible ».

    Le message est bien passé jusqu’à Bruxelles : la Commission européenne planche désormais sur une révision des critères de performance environnementale, avec une possible intégration de l’analyse de cycle de vie dans les politiques à venir.

    Sera-ce suffisant pour sauver la petite voiture ? Peut-être. À condition que la réglementation cesse de récompenser la sophistication technologique pour se recentrer sur l’essentiel : permettre à chacun de se déplacer, proprement, simplement, sans se ruiner.

  • Porsche 963 RSP : l’hommage ultime à la légende Martini et à Roger Penske

    Porsche 963 RSP : l’hommage ultime à la légende Martini et à Roger Penske

    Un seul exemplaire. Une seule route. Une seule marque capable d’un tel exercice de style et de passion : Porsche. En recréant une version routière de sa 963, la firme de Stuttgart ressuscite à la fois le mythe de la 917 de route de 1974 et célèbre son alliance historique avec Roger Penske. Le genre de projet dont rêvent les ingénieurs… et les enfants qu’ils étaient autrefois.


    Tout commence par une légende. En 1974, le comte Gregorio Rossi di Montelera, héritier de la dynastie Martini & Rossi, convainc Porsche de lui construire une 917 homologuée pour la route. Il la conduit lui-même de Stuttgart à Paris, sur routes ouvertes, avec des plaques d’immatriculation de l’Alabama – l’unique État américain prêt à certifier un engin aussi extravagant pour un usage civil. C’est cette folle aventure qui inspire aujourd’hui Porsche pour créer la 963 RSP, une réinterprétation moderne de la course sur route, à la croisée du passé et du futur.

    Une 963 pour la rue… mais pas pour tout le monde

    Basée sur le prototype engagé en endurance, la Porsche 963 RSP (pour Roger Searle Penske) est un projet Sonderwunsch – littéralement « souhait spécial » – mené conjointement par Porsche Classic et l’équipe de Penske Racing. Pas question ici de concept-car statique : la 963 RSP roule vraiment sur route ouverte, avec un véritable certificat de circulation émis par les autorités françaises, grâce au soutien de l’Automobile Club de l’Ouest (ACO). On parle ici d’un véhicule d’endurance engagé dans le Championnat du Monde FIA WEC, capable de plus de 300 km/h en ligne droite, et pourtant adapté pour… aller chercher le pain.

    Détails d’orfèvre

    Visuellement, la RSP reprend la livrée argentée de la 917 du Comte Rossi, avec des détails spécifiques : élargisseurs d’ailes, modifications aérodynamiques pour couvrir les roues, logos Michelin façon années 1970, badges émaillés Porsche à l’ancienne. Même les jantes OZ forgées de 18 pouces sont chaussées de pneus pluie, plus tolérants sur route ouverte.

    À l’intérieur, la sellerie mêle cuir brun clair et Alcantara, avec une assise en carbone climatisée et un appuie-tête intégré. Mention spéciale pour le porte-gobelet imprimé en 3D, capable de maintenir un mug Porsche lors d’un roulage… musclé. Un clin d’œil raffiné au luxe discret de l’univers Porsche, mais sans trahir l’ADN brutal de la course.

    Préparation routière : entre artisanat et ingénierie de haut vol

    Pour s’aventurer hors du circuit, la 963 RSP a bénéficié d’une préparation complète : hauteur de caisse relevée au maximum, amortisseurs Multimatic DSSV assouplis, reprogrammation du logiciel de contrôle pour autoriser le fonctionnement des phares et des feux arrière, ajout d’un klaxon… et d’un système d’immatriculation. Même le système hybride a été modifié : toujours animé par le V8 4.6 biturbo de 680 chevaux, il a été ajusté pour fonctionner avec du carburant routier standard, tandis que le moteur électrique (MGU) a été calibré pour une réponse plus douce en ville.

    Un hommage à deux légendes

    Ce projet unique salue deux figures majeures de l’histoire Porsche. D’un côté, le Comte Rossi, esthète et passionné, qui n’a pas hésité à braver les lois pour faire rouler une voiture de course sur route. De l’autre, Roger Penske, surnommé The Captain, qui collabore avec Porsche depuis plus de 50 ans. « Je voulais que cette voiture reste fidèle à ses origines, avec le moins de modifications possible. Ce fut un vrai défi, mais le résultat est aussi brut et excitant que la 917 », affirme Penske.

    La voiture a été dévoilée à quelques jours des 24 Heures du Mans 2025, dans les rues de la ville sarthoise, conduite par Timo Bernhard. Le pilote allemand, vainqueur du Mans et ambassadeur Porsche, n’a pas caché son émotion : « Rouler en pleine rue avec une 963, à côté d’une 917… c’était irréel. Plus douce, plus confortable, elle reste une vraie voiture de course. Une expérience que je n’oublierai jamais. »

    Inaccessible mais pas impensable

    La 963 RSP ne sera pas produite en série. Un seul exemplaire sera conservé, probablement dans les réserves de Porsche Museum ou exposé lors d’événements officiels. Il ne s’agit pas d’une évolution homologuée pour la route de la 963 mais d’un exercice de style, de technique et de mémoire.

    En ces temps de transition énergétique, où les supercars deviennent silencieuses et les émotions lissées, Porsche prouve qu’il reste encore possible de faire battre le cœur des passionnés. Le constructeur ne s’adresse pas seulement à ses clients, mais aussi à ceux qui connaissent par cœur les numéros 917, 956, 962… et qui rêvent, encore aujourd’hui, de croiser une voiture de course sur le périphérique.

  • Jeep Avenger 4xe : la nouvelle génération du plaisir tout-terrain

    Jeep Avenger 4xe : la nouvelle génération du plaisir tout-terrain

    Dans les ornières de l’histoire : Jeep fait revivre l’esprit 4×4 à Forest Hill

    Il y a des marques qui se contentent de capitaliser sur leur image, et d’autres qui la font vivre. Jeep appartient indéniablement à la seconde catégorie. En organisant la Jeep Academy sur le domaine de Forest Hill, dans les Yvelines, la marque américaine offre bien plus qu’un essai traditionnel de la nouvelle Avenger 4xe : elle propose une plongée concrète dans l’ADN du franchissement, cette culture 4×4 qu’elle a inventée et qu’elle continue de transmettre, génération après génération.

    Avenger 4xe : les gènes du franchissement

    L’Avenger, c’est d’abord une promesse d’accessibilité. Premier modèle Jeep conçu spécifiquement pour le marché européen, il vise un public plus large, moins habitué aux grands espaces que les acheteurs de Wrangler ou Grand Cherokee. Mais avec l’arrivée de la transmission intégrale électrifiée 4xe, l’Avenger change de catégorie. Il cesse d’être un simple SUV urbain stylé pour revendiquer sa place dans la galaxie des véritables Jeep.

    Sous le capot, on retrouve une chaîne de traction hybride, avec un moteur thermique et une machine électrique intégrée à la boîte de vitesses entraînant les roues avant, assisté par un moteur électrique sur l’essieu arrière, le tout piloté par une électronique de gestion capable de répartir intelligemment le couple selon les besoins. Résultat : une motricité impressionnante, y compris sur des surfaces meubles ou fortement inclinées. Le tout sans arbre de transmission central, ce qui réduit la complexité mécanique tout en libérant de l’espace dans l’habitacle.

    Jeep Academy : un terrain de jeu grandeur nature

    Le cadre du test n’a rien d’anodin. Le domaine de Forest Hill, tout proche de Mantes-la-Jolie, abrite un centre d’essai tout-terrain parfaitement balisé. Entre les sous-bois, les zones rocailleuses, les bourbiers et les devers serrés, chaque obstacle semble conçu pour rappeler que le 4×4, ce n’est pas juste une question de traction : c’est une expérience complète, physique, sensorielle et… ludique.

    Encadrés par des instructeurs expérimentés, les participants à la Jeep Academy apprennent à faire corps avec le relief, à anticiper les pertes d’adhérence, à gérer l’inertie sans brutalité. Pas besoin d’être un expert en franchissement : les différentes aides à la conduite (Hill Descent Control, modes Snow, Mud et Sand) rendent l’ensemble extrêmement rassurant. Ce qui frappe, c’est à quel point le plaisir prend le dessus sur l’appréhension. On découvre que passer une bosse à l’aveugle ou escalader une butte glissante n’est plus un défi angoissant, mais un jeu d’adresse grandeur nature.

    L’ADN Jeep en héritage

    Ce qui rend cette expérience unique, c’est que Jeep ne s’appuie pas uniquement sur la technique ou le marketing. Elle s’appuie sur une histoire, celle d’un constructeur qui a inventé le 4×4 moderne. Depuis les premiers Willys MB de la Seconde Guerre mondiale jusqu’au Wrangler Rubicon en passant par le mythique Cherokee des années 1980, Jeep a toujours été à la pointe de l’innovation en matière de transmission intégrale.

    Et même si l’Avenger 4xe semble, à première vue, très éloignée de ces modèles mythiques, on retrouve en elle la même philosophie d’exploration et de liberté maîtrisée. Cette petite Jeep européenne est peut-être plus discrète, plus policée, mais elle a hérité de ce que la marque a de plus précieux : la capacité d’aller là où les autres ne vont pas. Et de le faire sans frime.

    Une démocratisation maîtrisée

    L’Avenger 4xe ouvre clairement une nouvelle étape dans la démocratisation du tout-terrain. Là où un Wrangler peut intimider par sa taille ou son prix, l’Avenger permet de goûter au franchissement dans une enveloppe compacte et accessible. Elle s’adresse à une génération qui ne rêve pas forcément de grands road trips dans l’Utah, mais qui a envie de sortir des sentiers battus, au sens propre comme au figuré.

    Le plus remarquable, c’est que cette mutation s’opère sans trahir l’ADN Jeep. Mieux : elle l’enrichit. Car en misant sur une solution technique moderne, à la fois électrifiée et efficace, Jeep montre qu’on peut encore innover dans le domaine du 4×4. Sans tomber dans la caricature ni céder au greenwashing.

    L’aventure, à portée de main

    L’essai de la Jeep Avenger 4xe sur le domaine de Forest Hill n’est pas qu’une démonstration technique. C’est un retour à l’essence même de ce que signifie conduire une Jeep : sortir, explorer, s’amuser. Le tout dans un cadre sécurisé, pédagogique et enthousiasmant. Une belle façon de rappeler qu’au-delà des modes et des moteurs, l’automobile reste avant tout une affaire de sensations. Et que celles que procure une vraie Jeep, même compacte, sont toujours aussi uniques.

    Et le prix ? Une journée à la Jeep Academy, c’est 300 euros. Une vie en Jeep Avenger 4xe, c’est à partir de 32 000 euros.

  • Le cortège de l’Italie : quand la Lancia Flaminia incarne l’élégance du pouvoir

    Le cortège de l’Italie : quand la Lancia Flaminia incarne l’élégance du pouvoir

    Chaque année, le 2 juin, Rome se transforme en une vaste scène protocolaire pour célébrer la Festa della Repubblica. C’est une tradition bien ancrée, mais aussi une vitrine de ce que l’Italie chérit : la continuité, le prestige et le raffinement. En ouverture du défilé militaire de 2025, le Président de la République, Sergio Mattarella, n’a pas dérogé à la règle. Il a pris place, comme ses prédécesseurs depuis plus de six décennies, à bord de la Lancia Flaminia présidentielle, fleuron de l’élégance italienne.

    Une berline d’apparat depuis 1961

    Présentée en 1957 au Salon de Genève, la Lancia Flaminia avait été pensée pour succéder à l’Aurelia dans un registre plus statutaire, plus bourgeois, avec une sophistication mécanique à la hauteur des ambitions du constructeur turinois. Dès 1961, cette berline à moteur V6 devient le véhicule officiel du chef de l’État italien. Elle n’a jamais quitté ce rôle. À travers les âges, elle a accompagné les gestes protocolaires des présidents, mais aussi salué les grands de ce monde : de la reine Elizabeth II à John Fitzgerald Kennedy, en passant par Charles de Gaulle.

    La version présidentielle, baptisée Flaminia 335 (du nom de son empattement allongé de 335 cm), a été carrossée par Pinin Farina dans une configuration découvrable, répondant à des exigences de visibilité et de représentation. Giovanni Gronchi, président de 1955 à 1962, sera le premier à l’adopter officiellement, inscrivant ainsi la Flaminia dans l’imaginaire politique italien.

    Cinq purs-sangs pour l’État

    Cinq exemplaires spécifiques seront construits entre 1961 et 1962 pour les Scuderie del Quirinale, chacun portant le nom d’un cheval de course : Belfiore, Belmonte, Belvedere, Belsito, Baiardo. Quatre d’entre eux sont encore conservés en Italie, magnifiquement restaurés, dans un état de présentation irréprochable. Deux – Belfiore et Belvedere – sont encore en service pour les cérémonies officielles. Les autres sont exposés dans les musées : Belmonte au Museo Nazionale dell’Automobile à Turin, Belsito au Musée des véhicules militaires de Rome. Tous arborent une teinte bleu nuit, un intérieur en cuir noir Connolly, une sellerie arrière à cinq places dont deux strapontins, et un système d’interphonie pour les échanges entre dignitaire et chauffeur.

    Par son usage limité, par le soin extrême porté à leur préservation, ces Flaminia sont devenues plus que de simples voitures : elles sont des objets rituels, des artefacts de l’institution. Leurs apparitions publiques sont rares, solennelles, millimétrées. À chaque cortège, elles rappellent que la République italienne, tout en se tournant vers l’avenir, n’oublie rien de son passé.

    Une source d’inspiration pour le futur de Lancia

    Le lien entre cette voiture d’État et l’avenir de la marque Lancia n’a rien de symbolique. Depuis plusieurs mois, le constructeur annonce son grand retour, avec un programme produit ambitieux porté par Stellantis. À Turin, les designers ont puisé dans l’histoire pour façonner la nouvelle identité stylistique de la marque. Neuf modèles du passé ont servi de matrice. Parmi eux, bien sûr, la Flaminia.

    Sa ligne fluide, son architecture statutaire, son équilibre entre classicisme et modernité ont directement inspiré les traits des futures Lancia. Une philosophie baptisée « Progressive Classic » par les designers, qui consiste à réinterpréter des canons historiques dans un langage contemporain, sans céder à la nostalgie.

    La Nouvelle Gamma en ligne de mire

    Premier modèle à incarner ce renouveau sur le segment des grandes berlines : la Nouvelle Lancia Gamma. Un nom chargé d’histoire, pour un véhicule conçu comme le nouveau vaisseau amiral de la marque. Produite à partir de 2026 à Melfi (dans l’usine lucanienne emblématique du savoir-faire automobile italien), la Gamma marquera un tournant stratégique. Elle sera disponible en versions 100 % électrique et hybride, avec l’ambition d’allier durabilité, technologie de pointe et raffinement italien.

    Mais au-delà de ses caractéristiques techniques, c’est un rôle symbolique que la Gamma est appelée à jouer : incarner, dans le monde d’aujourd’hui, ce que représentait la Flaminia dans les années 1960. Une synthèse entre la culture du luxe à l’italienne et l’engagement pour une mobilité plus responsable. Une voiture d’image, de prestige, de vision.

    Une stratégie au service du Made in Italy

    À travers la Gamma, c’est tout le Made in Italy que Lancia entend remettre sur le devant de la scène. La marque mise sur une renaissance enracinée dans le territoire national, au cœur du projet de relance des usines italiennes porté par Stellantis. Dans ce cadre, le rôle de Lancia dépasse le simple marché automobile : elle redevient une vitrine culturelle, esthétique et industrielle de l’Italie contemporaine.

    Alors que la Flaminia continue de sillonner les pavés du Quirinal les jours de fête nationale, sa silhouette intemporelle trace une ligne directe vers le futur. Un futur où la République ne renonce pas à l’élégance, et où la modernité se nourrit de mémoire.

  • Bien choisir son huile moteur : un geste simple pour prolonger la vie de son véhicule

    Bien choisir son huile moteur : un geste simple pour prolonger la vie de son véhicule

    Dans le monde de l’entretien automobile, peu de gestes ont autant d’impact que le choix d’une huile moteur adaptée à son véhicule. Pourtant, nombre d’automobilistes sous-estiment encore l’importance de cette opération, reléguée au second plan derrière les pneus, les freins ou la batterie. Une erreur qui peut coûter cher sur le long terme, tant la lubrification joue un rôle clé dans la durabilité et la performance du moteur. L’huile moteur est bien plus qu’un simple fluide : elle lubrifie les pièces mobiles du moteur, réduit les frottements, aide à évacuer la chaleur, nettoie les dépôts de combustion et protège contre la corrosion. En clair, une huile inadaptée ou usagée peut entraîner une surconsommation, une perte de puissance, voire des casses moteur.

    Où acheter son huile moteur ?

    Sur Internet, de nombreux sites proposent des huiles moteur, mais tous ne se valent pas. Pour ceux qui souhaitent un large choix, des prix compétitifs et la garantie de trouver l’huile adaptée à leur véhicule, la section dédiée à l’huile moteur sur Mister-Auto.com est une référence. Le site propose une sélection complète de lubrifiants, classés par type (minérale, synthétique, semi-synthétique), viscosité (5W30, 10W40…), normes (ACEA, API, constructeurs) et usage (véhicules essence, diesel, hybrides…). Un moteur de recherche intelligent permet même de trouver l’huile idéale en renseignant la marque, le modèle et la motorisation de son véhicule.

    Adapter l’huile moteur à son usage

    Le choix de l’huile ne doit pas se faire au hasard. Une citadine essence qui roule majoritairement en ville n’aura pas les mêmes besoins qu’un SUV diesel utilisé pour des trajets autoroutiers ou un utilitaire soumis à des charges lourdes. Les huiles synthétiques, plus performantes à froid et plus stables à haute température, sont recommandées pour les motorisations récentes ou les conditions de conduite exigeantes. À l’inverse, une huile minérale peut suffire pour des moteurs plus anciens ou faiblement sollicités.

    Par ailleurs, les normes fixées par les constructeurs (VW 507.00, MB 229.51, PSA B71 2290…) ne sont pas là pour décorer : elles garantissent que l’huile respecte les tolérances mécaniques spécifiques à chaque bloc moteur. Il est donc primordial de vérifier la compatibilité du produit avec les exigences du carnet d’entretien.

    Un entretien régulier, c’est moins de risques

    Au-delà du choix, la fréquence de vidange est elle aussi cruciale. Même une huile de très haute qualité perd ses propriétés au fil du temps, sous l’effet des températures extrêmes, des suies et des résidus de combustion. Les constructeurs recommandent en général une vidange tous les 15 000 à 30 000 km selon les moteurs et les usages, mais les conditions réelles (trajets courts, démarrages fréquents, climat chaud ou poussiéreux) peuvent justifier des intervalles plus courts.

    Un bon entretien passe aussi par le remplacement systématique du filtre à huile, souvent négligé. Un filtre encrassé peut obstruer le circuit et entraîner une baisse de pression, voire une absence de lubrification dans les zones les plus sensibles.

    Pour aller plus loin

    Pour les curieux ou les amateurs de mécanique qui souhaitent comprendre plus en détail le fonctionnement des huiles moteur et leurs classifications, on recommande cet excellent dossier publié sur Caradisiac, qui revient sur les différents types d’huiles, leurs spécificités et les bonnes pratiques à adopter.

  • Citroën et flex-office : quand le Garage Marbeuf réinvente l’art du bureau

    Citroën et flex-office : quand le Garage Marbeuf réinvente l’art du bureau

    Autrefois cathédrale Art déco dédiée à l’automobile française triomphante, l’ancienne concession Citroën du 32-34 rue Marbeuf entame une nouvelle vie. Transformé en immeuble de bureaux par la foncière Gecina, ce bâtiment emblématique du Triangle d’or parisien mêle mémoire industrielle et exigences contemporaines. Reportage dans ce que l’on pourrait bien appeler la Rolls des bureaux parisiens.

    À première vue, la spectaculaire façade vitrée du 32-34 rue Marbeuf, dans le très chic 8e arrondissement de Paris, pourrait passer pour une audace contemporaine. Pourtant, derrière ses lignes pures et sa transparence affirmée, c’est une véritable pièce du patrimoine automobile français qui s’offre une nouvelle jeunesse. Avant de devenir « Icône », son nouveau nom de baptême, ce bâtiment fut, dans l’entre-deux-guerres, le premier garage Citroën de la capitale, une vitrine monumentale du génie d’André Citroën et de l’optimisme industriel des années 20.

    Conçu par Albert Laprade entre 1926 et 1929, le « Garage Marbeuf » n’était pas un simple atelier mécanique ou une banale concession. Il s’agissait d’un temple Art déco de 19 mètres de haut, un espace spectaculaire où les voitures trônaient comme des œuvres d’art, avec un atrium baigné de lumière et des structures métalliques typées Eiffel en hommage au modernisme de l’époque. Longtemps défiguré par des rénovations successives, le bâtiment avait fini par se fondre dans l’anonymat d’immeubles de bureaux sans âme. Jusqu’à ce que Gecina décide, en pleine pandémie, de lui redonner son éclat.

    Une réinvention post-Covid

    Dès 2020, la foncière parisienne imagine un projet aussi ambitieux qu’audacieux : réhabiliter ce lieu emblématique en y injectant les nouvelles attentes du bureau post-Covid. Luminosité, espaces extérieurs, circulation fluide, modularité… L’objectif est clair : faire du retour au bureau une expérience désirable. « Il fallait que les gens aient envie de revenir travailler sur place. Il fallait créer un lieu vivant, ouvert, lumineux, chaleureux », explique Beñat Ortega, directeur général de Gecina.

    Pour cette métamorphose, le cabinet PCA-Stream, dirigé par Philippe Chiambaretta, a relevé le défi architectural avec une attention rare pour le passé du site. Le résultat : une restauration magistrale de l’ossature Eiffel, la suppression des faux plafonds, des façades allégées et des fenêtres redessinées pour magnifier la lumière. L’atrium central, anciennement obstrué, retrouve ses 14 mètres de hauteur et se pare d’un double escalier monumental en spirale, façon Chambord, mêlant prestige et fonctionnalité.

    De la DS à l’open space

    Le projet, fort d’un investissement de plus de 200 millions d’euros, redonne un souffle contemporain à un espace historiquement dédié à l’automobile. Si autrefois les DS, Traction Avant ou Rosalie s’y exposaient en majesté, ce sont désormais plus de 1000 salariés qui pourront s’y croiser au quotidien. Sur les 10.800 m² de surface, répartis sur dix niveaux, les bureaux s’organisent autour de l’atrium et s’ouvrent vers l’extérieur via 1700 m² de terrasses végétalisées.

    Des détails pensés pour favoriser les nouveaux usages du travail : mobilier extérieur équipé de prises électriques, vues imprenables sur la tour Eiffel, larges espaces collaboratifs, circulation fluide… Même les anciennes rampes menant aux parkings ont été réinterprétées : désormais, ce sont 200 emplacements vélo qui remplacent les places automobiles d’antan. Une évolution logique dans un Paris qui regarde vers la mobilité douce, sans renier son passé motorisé.

    Un héritage automobile respecté

    Là où d’autres auraient rasé pour reconstruire, Gecina et PCA-Stream ont préféré respecter et révéler le patrimoine, assumant la filiation entre industrie automobile et architecture tertiaire. Le résultat n’est pas un pastiche mais une synthèse réussie : l’ancien Garage Marbeuf devient un immeuble de bureaux haut de gamme, fidèle à son ADN d’origine — la modernité.

    Le clin d’œil au passé n’est jamais appuyé, mais perceptible : la monumentalité des volumes, la lumière naturelle, la transparence et la logique constructive font écho aux valeurs qui animaient Citroën dans les années 30. À quelques centaines de mètres, le C42, autre flagship historique de la marque aux chevrons, a été fermé en 2018 et remplacé par une enseigne de sportswear. Le bâtiment de la rue Marbeuf, lui, demeure un témoin vivant de l’épopée automobile française, même s’il a troqué ses carrosseries étincelantes contre des écrans d’ordinateur.

    Luxe et confidentialité

    Le bâtiment n’aura pas mis longtemps à séduire. Un locataire unique – pour l’heure non dévoilé – a réservé l’intégralité des espaces, signe de l’attractivité de ce lieu d’exception. Si le montant du bail est tenu confidentiel, les connaisseurs du marché tertiaire estiment que les loyers y atteindront les plus hauts standards du quartier, déjà le plus cher de Paris. Une adresse comme celle-ci ne se vend pas : elle se garde, assure-t-on chez Gecina.

    Le 32-34 rue Marbeuf est bien plus qu’un immeuble de bureaux. C’est un symbole de transformation urbaine réussie, un hommage discret à l’histoire industrielle de Paris et une démonstration de ce que peut être l’architecture de bureau du XXIe siècle : respectueuse du passé, adaptée aux besoins du présent, et prête à accueillir l’avenir.

    Ici, Citroën ne rugit plus, mais inspire encore.

  • Glickenhaus 007s : une Hypercar de 1 000 ch pour la route, sans compromis

    Glickenhaus 007s : une Hypercar de 1 000 ch pour la route, sans compromis

    Si vous pensez qu’une voiture de route doit nécessairement être civilisée, confortable et discrète, passez votre chemin. Si en revanche, vous avez déjà songé à prendre l’apéro à Francorchamps après un détour par la supérette du coin, la Glickenhaus 007s est faite pour vous. Mi-prototype d’endurance, mi-fantasme d’ingénieur, cette Le Mans Hypercar homologuée pour la route redéfinit les contours de l’automobile extrême.

    Une Le Mans sur plaques minéralogiques

    La Glickenhaus 007s n’est pas née d’un coup marketing ou d’un délire de designer : elle est directement dérivée de la SCG 007 LMH qui s’est illustrée aux 24 Heures du Mans, à Spa et à Monza. Jim Glickenhaus, son créateur, producteur de cinéma et passionné d’endurance, n’en est pas à son coup d’essai. Mais ici, il pousse le curseur encore plus loin : offrir une vraie voiture de course, capable d’aller chercher le pain… à condition que le dépôt soit au bout d’une route sinueuse et bien dégagée.

    Sous sa carrosserie aux proportions extrêmes et au traitement aérodynamique radical, la 007s cache un V8 6,2 litres atmosphérique en position centrale-arrière, délivrant 1 000 ch et 737 lb-ft (environ 1 000 Nm) de couple aux seules roues arrière, via une boîte manuelle robotisée à 7 rapports. Le poids ? 1 550 kg, soit à peine plus qu’une Ferrari SF90, mais avec une aérodynamique de prototype du Mans.

    Pas qu’un show car

    Contrairement à d’autres supercars « route-circuit », la Glickenhaus 007s a été pensée pour fonctionner au quotidien, ou presque. Testée dans le trafic urbain et en conditions estivales, elle conserve pourtant ses attributs de course : suspension avant à double triangulation, suspension arrière pushrod, barres anti-roulis réglables, freins de course, jantes monobloc forgées à fixation centrale, pneus slicks en option… et portes papillon à commande hydraulique, pour une touche de théâtre bien méritée.

    Elle est même capable de franchir les ralentisseurs, grâce à un système de nose lift. Et pour les plus pointilleux, sachez qu’elle dispose aussi d’un vrai système de climatisation, capable de lutter contre la chaleur d’un été texan.

    Un cockpit de course… sans concessions

    L’habitacle, entièrement en fibre de carbone, aligne deux écrans rouges pour la navigation et la télémétrie, un volant digne de la F1, des commodos en alu fraisé, et une position de conduite très « prototype ». Mais l’ergonomie n’a pas été sacrifiée : les commandes essentielles sont à portée de main, et la transformation en mode piste est un jeu d’enfant.

    Grâce aux vérins pneumatiques embarqués, on peut lever la voiture, retirer les roues de route, monter les slicks, ajuster les lois d’amortissement, la hauteur de caisse, la cartographie moteur et l’aéro. En quelques minutes, la 007s passe du bitume au vibreur sans broncher.

    Un nouveau paradigme du track day

    « Ce n’est pas juste une voiture pour arriver sur le circuit et scotcher des croix sur les phares », explique Jim Glickenhaus. « C’est une manière de redéfinir l’expérience du track day : plus accessible, plus exaltante, plus gratifiante. »

    Et il faut bien le reconnaître : dans un monde où les hypercars sont de plus en plus technologiques, numériques, voire électrifiées, la proposition Glickenhaus fait l’effet d’un uppercut. Un gros V8 atmosphérique, une boîte à l’ancienne, une aérodynamique active, et un rapport poids/puissance inférieur à 1,6 kg/ch. Sans assistance, sans simulateur onboard, sans IA de stabilisation.

    Le rêve américain, sauce endurance

    La Glickenhaus 007s n’est ni une Ferrari, ni une Bugatti, ni une Koenigsegg. C’est un OVNI. Un manifeste. La vision d’un passionné convaincu qu’une voiture de route peut être à la fois un monstre de performances et un objet de passion brute. Elle ne cherche pas la polyvalence, mais l’expérience. Et en cela, elle incarne peut-être mieux que toutes les autres ce que signifie vraiment conduire une voiture de course sur route ouverte.

    Quant à son prix ou sa production ? Aucune information officielle n’a encore filtré, mais l’on sait que SCG (Scuderia Cameron Glickenhaus) prévoit une fabrication très limitée. Les candidats devront être aussi fortunés que motivés – et probablement un peu fous.

    À l’heure où la réglementation environnementale, les aides à la conduite et les limites de bruit resserrent la bride autour des voitures sportives, la Glickenhaus 007s arrive comme une déflagration. Homologuée, délirante, authentique. Un baroud d’honneur ? Peut-être. Un chef-d’œuvre ? Sans doute. Une voiture que vous croiserez à la boulangerie ? Jamais.

    Et c’est justement pour ça qu’on l’aime.

  • Mokka GSE Rally : Opel électrise le rallye avec un prototype de 280 ch

    Mokka GSE Rally : Opel électrise le rallye avec un prototype de 280 ch

    Alors qu’Opel s’apprête à donner une nouvelle impulsion à sa griffe sportive GSe (pour Grand Sport electric), la marque allemande dévoile un prototype spectaculaire et radicalement électrique : le Mokka GSE Rally. Fidèle à l’ADN de la compétition, cette étude de style survoltée anticipe ce que pourrait être un futur programme client pour amateurs de glisse silencieuse… et de performances très sérieuses.

    GSe : le sport à l’heure électrique

    Depuis son retour en grâce, Opel capitalise sur ses racines sportives pour moderniser son image dans l’ère du tout électrique. Avec GSe, le constructeur réinterprète la sportivité à travers la sobriété, l’efficacité et la technologie. Et si la route est bien balisée pour des modèles de série dynamiques comme l’Astra GSe, le terrain de jeu s’élargit aujourd’hui au domaine de la compétition avec ce Mokka GSE Rally, véritable manifeste technologique taillé pour la terre, la poussière et les chronos.

    Un moteur de série… musclé pour la compétition

    Sous le capot, ou plutôt au cœur de l’architecture du Mokka GSE Rally, Opel a conservé la batterie de 54 kWh issue du modèle de série. Mais le moteur électrique, lui, a été revu pour délivrer 280 chevaux et 345 Nm de couple. Des chiffres dignes d’une voiture de Rally4, catégorie très en vogue dans les formules de promotion. Pour exploiter cette cavalerie silencieuse, le Mokka adopte une boîte de vitesses de compétition, un différentiel autobloquant multidisque, ainsi que des arbres de transmission renforcés. Un arsenal technique qui place ce prototype à des années-lumière de la paisible version route.

    Châssis de pointe et aides électroniques déconnectées

    Le châssis allégé a été profondément remanié. À l’avant, une suspension McPherson renforcée avec coupelles uniball assure précision et endurance, tandis qu’à l’arrière, Opel a opté pour un essieu rigide équipé de ressorts et d’amortisseurs spécifiques. Le tout signé Bilstein, gage d’un savoir-faire reconnu dans le monde du rallye.

    À la différence des voitures de série, aucune aide à la conduite électronique n’est conservée : pas d’ABS, pas d’ESP, ni même de correcteur de trajectoire. C’est l’expérience de la Corsa Rally Electric, utilisée en compétition-client depuis 2021, qui a permis de développer un logiciel de gestion moteur/batterie optimisé pour les conditions extrêmes : recherche d’efficacité, maintien de la température et gestion fine de la puissance sont au programme.

    Un style 100 % rallye

    Visuellement, le Mokka GSE Rally ne fait aucun mystère de ses intentions. Le prototype reçoit une livrée noire mate parsemée d’inscriptions blanches et jaunes – dont un ironique “OMG! GSE” sur les flancs –, des étriers de freins jaunes à l’avant et des jantes arrière assorties, un capot frappé du nom du concept, ainsi qu’une prise d’air de toit très évocatrice. L’ensemble affirme une identité sportive assumée, bien loin de la sobriété habituelle des SUV compacts de grande série.

    À bord, la dotation répond aux normes de la FIA : arceau homologué, baquets de compétition avec harnais six points, plancher protégé, coffre batterie sécurisé, et même un système d’extinction non conducteur relié à un Master Alarm Indicator. Opel a pensé à tout pour garantir sécurité et performance dans un contexte de compétition réelle.

    Le signal d’un engagement futur ?

    Officiellement, ce Mokka GSE Rally reste un prototype sans vocation commerciale immédiate. Mais il en dit long sur les ambitions de la marque dans le monde du sport automobile électrique. À l’image de la Corsa Rally Electric qui s’est déjà fait une place sur les spéciales européennes, ce nouveau modèle pourrait poser les bases d’un futur championnat accessible, durable et spectaculaire.

    Dans un contexte où les disciplines historiques comme le WRC amorcent elles aussi leur transition énergétique, Opel semble vouloir jouer un rôle de pionnier à son échelle. En mettant au point une voiture aussi démonstrative, techniquement crédible et visuellement réussie, le constructeur envoie un signal fort : la compétition client peut aussi être électrique, et le plaisir de pilotage ne dépend pas du rugissement d’un moteur thermique.

  • Fiat Tris : le mini camion qui veut électriser la micromobilité

    Fiat Tris : le mini camion qui veut électriser la micromobilité

    Et si le futur de la mobilité urbaine ne reposait pas sur quatre roues mais sur trois ? C’est le pari un peu fou – ou plutôt radicalement pragmatique – que fait Fiat avec le Tris, un minuscule utilitaire électrique à trois roues. Conçu pour les livraisons du dernier kilomètre et pensé dès l’origine pour répondre aux contraintes des villes densément peuplées, le Tris illustre une tendance que les constructeurs généralistes commencent à prendre au sérieux : la micromobilité utilitaire.

    En dévoilant le Tris dans sa gamme Fiat Professional, la marque italienne réinvestit un territoire qu’elle connaît bien : celui des véhicules simples, robustes et accessibles, taillés pour les usages quotidiens des petites entreprises. Mais cette fois, elle le fait avec une vision post-pétrole. Moins d’un an après le centenaire du Lingotto, Fiat offre à son public une vision électrifiée et minimaliste du camion de quartier. Avec ce Tris, la marque ne parle pas seulement d’électromobilité. Elle reparle enfin au peuple.

    Trois roues, une mission

    Le Fiat Tris ne cherche pas à séduire par la puissance ou les performances. Il revendique, au contraire, une humilité assumée. Son moteur électrique développe… 12 chevaux. Sa vitesse maximale ? 45 km/h, soit juste de quoi suivre un vélo cargo électrique en descente. Et pourtant, ce n’est pas un jouet. C’est un véhicule utilitaire à part entière, capable d’embarquer une palette standard dans sa benne et de parcourir jusqu’à 90 km avec une batterie de 6,9 kWh seulement.

    L’engin ne fait que 3,18 mètres de long, ce qui en fait l’un des plus petits utilitaires jamais proposés par une marque généraliste. Mais derrière ce gabarit lilliputien, Fiat promet un outil sérieux : temps de recharge réduit à moins de cinq heures sur une simple prise domestique, charge utile généreuse, et modularité à toute épreuve. Le Tris pourra recevoir différents types de caisses ou de bennes : plateau, cellule isotherme, module pour la livraison de colis, voire même vivier pour la vente ambulante de poissons.

    Le retour de l’esprit Piaggio

    Ce Tris n’est pas sans rappeler un autre héros italien à trois roues : le mythique Piaggio Ape, longtemps compagnon des artisans, marchands ambulants et livreurs de fleurs du sud de l’Europe. Là où le petit tricycle motorisé né en 1948 proposait un prolongement du scooter Vespa, le Tris revendique, lui, une filiation avec les véhicules utilitaires modernes, tout en renouant avec cette simplicité pragmatique qui a fait le succès de tant d’icônes populaires.

    La grande différence ? Le Tris est entièrement électrique, silencieux, propre, et surtout connecté. Il embarque un combiné numérique de 5,7 pouces, des phares à LED, un système de charge intelligente et surtout une compatibilité avec les services de gestion de flotte de Fiat Professional, y compris la géolocalisation et l’entretien à distance. Autrement dit : ce minuscule camion n’a rien à envier à un Ducato sur le plan technologique.

    Une ambition : conquérir le Sud

    Officiellement, le Tris est destiné aux marchés du Moyen-Orient et de l’Afrique, là où les besoins en mobilité légère sont souvent couverts par des moyens informels, et où les contraintes de coûts et de maintenance rendent les véhicules simples bien plus pertinents que les SUV suréquipés. Mais Fiat ne cache pas non plus son intérêt pour l’Europe du Sud, où les villes étroites, les zones à faibles émissions et les besoins logistiques locaux constituent un terrain fertile pour ce type de véhicule.

    Rome, Naples, Marseille, Lisbonne, Athènes… Autant de villes qui pourraient voir dans le Tris une alternative crédible aux véhicules utilitaires traditionnels, souvent trop gros, trop lourds, et désormais bannis des centres historiques.

    Quand la micromobilité devient sérieuse

    Depuis le lancement de la Citroën Ami en 2020, les grandes marques de Stellantis se sont doucement rapprochées du terrain de jeu de la micromobilité. Mais là où l’Ami, puis l’Opel Rocks-e, s’adressaient surtout à des particuliers (urbains, jeunes, ou sans permis), le Tris va plus loin : il professionnalise l’approche, en ciblant ouvertement les acteurs de la livraison urbaine, de la restauration mobile ou des artisans de proximité.

    Et Fiat n’est pas seule sur ce créneau. En quelques mois, on a vu apparaître des projets comme le Telo aux États-Unis, le Slate au Japon, ou encore une multitude de camionnettes électriques venues d’Inde ou de Chine, souvent vendues sous des noms inconnus mais selon un principe identique : trois roues, une caisse, un moteur électrique, et beaucoup d’idées.

    Mais Fiat a pour elle un réseau, une image, une histoire. Et un CEO, Olivier François, qui résume ainsi l’ambition du Tris : « Alors que les villes grandissent et que le besoin d’une mobilité propre et accessible devient urgent, nous avons vu une opportunité d’offrir quelque chose de radicalement simple et profondément utile. »

    Et en France ?

    Pour l’instant, aucune commercialisation n’est prévue dans l’Hexagone. Fiat préfère tester son concept sur des marchés moins réglementés, avec des contraintes de vitesse plus souples et des attentes différentes. Mais il ne fait aucun doute que les collectivités, les plateformes de livraison, voire les autoentrepreneurs urbains pourraient voir d’un bon œil l’arrivée d’un tel engin.

    Le Fiat Tris n’est pas un gadget. Ce n’est pas un scooter déguisé. Ce n’est pas non plus une utopie de designer déconnecté du terrain. C’est un véritable outil de travail, conçu avec rigueur, pensé pour un usage réel, et chargé de symboles.

    Il dit quelque chose de notre époque : que l’innovation ne passe pas toujours par le plus grand, le plus puissant ou le plus connecté. Parfois, innover, c’est faire moins, faire plus simple, et le faire bien.

    Et si le futur du véhicule utilitaire, c’était ça : un trois-roues Fiat à batterie de 6,9 kWh ? Il ne manque plus qu’un sticker « Tris, c’est la vie » sur la lunette arrière…