Auteur/autrice : Rédaction

  • Le culte du quotidien : pourquoi la Coccinelle est la Daily Classic parfaite

    Le culte du quotidien : pourquoi la Coccinelle est la Daily Classic parfaite

    Dans la quête perpétuelle du collectionneur pour « le prochain grand coup », il est facile d’oublier que le charme d’une ancienne réside dans sa capacité à rouler. En France, loin des spéculations sur les hypercars des enchères, la Volkswagen Coccinelle représente l’archétype du véhicule culte : facile à vivre, amusant à conduire, et paradoxalement, une machine à défier les modernes.

    La Coccinelle : plus qu’une voiture, un choix de vie

    En Europe, la Coccinelle est un monument de la démocratisation. Au-delà des chiffres de production, la « Cox » est surtout la meilleure porte d’entrée pour rouler en ancienne tous les jours, sans la peur constante de la panne ou du devis exorbitant.

    Pourtant, il faut avouer qu’être passager d’une Cox dans le trafic moderne demande une certaine foi. Sans direction assistée, avec une puissance qui laisse place à une « déficience de couple » et des ceintures de sécurité qui ne sont pas la première ligne de défense, on s’accroche parfois à la poignée du tableau de bord. Mais ces petites frayeurs sont vite balayées par la fierté du décalage.

    Le secret du « Daily Classic » réussi

    Quand on veut une belle Cox, on ne plaisante pas avec l’entretien. La philosophie de restauration est claire : remettre d’abord la voiture dans un état mécanique irréprochable, puis rouler régulièrement. Contrairement aux voitures de musée, la Cox est faite pour être utilisée, pour mélanger le bruit typique des cylindres à l’arrière avec le tumulte de la ville.

    Même si l’on cherche à respecter l’époque, une légère dose de modernité est bienvenue pour le confort d’aujourd’hui. Un allumage électronique, l’amélioration des carburateurs, l’ajout d’un alternateur : ces ajustements cruciaux ne trahissent pas l’âme de la voiture, mais assurent sa fiabilité face aux exigences du trafic moderne. Ce n’est qu’après cela qu’une restauration esthétique complète prend tout son sens.

    L’investissement de la passion

    Aujourd’hui, le marché français reflète la notoriété et le côté culte de la Coccinelle. La période idéale pour un modèle de collection se situe entre les années soixante et le milieu des années soixante-dix. Si les modèles plus anciens offrent une meilleure valeur résiduelle, l’approvisionnement en pièces est devenu une facilité, et non un obstacle. C’est le grand avantage de la Cox : son héritage mondial assure une logistique de pièces presque sans faille.

    La montée en puissance est visible sur les prix. Aujourd’hui, un exemplaire sain à restaurer coûte dix fois plus cher qu’à la meilleure époque. Mais même avec le coût d’une restauration complète, l’investissement reste bien inférieur aux « Youngtimers » plus sophistiqués.

    La Coccinelle, c’est l’essence même de la démocratisation du plaisir (avec une histoire large comme l’hémicycle de l’assemblée). Elle est la preuve que l’on peut rouler avec un morceau d’histoire tous les jours, défier le trafic dans une machine à air et se garer avec fierté, le tout sans verser une goutte de sueur. Parler de destinée, c’est peut-être cela : la voiture du peuple qui est devenue, près d’un siècle plus tard, le classique du peuple.

  • Du « pare-bouse » au cockpit virtuel : l’évolution culte du tableau de bord

    Du « pare-bouse » au cockpit virtuel : l’évolution culte du tableau de bord

    Aujourd’hui, nos voitures nous parlent, nous guident et affichent des écrans haute définition. Pourtant, le terme « tableau de bord » a des origines bien plus rustiques, liées aux chevaux et à la boue. En retraçant l’histoire de cette simple cloison protectrice, on comprend l’incroyable voyage qui a mené l’automobile du simple instrument de déplacement au véritable smart device roulant.

    L’origine inattendue : le « dashboard » du cocher

    Il est amusant de constater que le mot « dashboard » (littéralement « planche de tableau » ou « pare-bouse ») remonte aux calèches et aux chariots. Ce n’était à l’origine qu’une simple cloison destinée à protéger le cocher des débris et de la boue projetés par les sabots des chevaux au trot. Cette cloison servait également à stocker le fouet, les rênes, et le foin des bêtes. Selon le budget du propriétaire, elle était faite de bois, de cuir ou de tôle. Le tableau de bord, initialement, était donc un simple bouclier fonctionnel.

    L’âge du laiton : quand le moteur remplaça le cheval

    Avec l’apparition des premières automobiles à la fin du XIXe siècle, le tableau de bord a entamé sa première mue. Le besoin de protection physique s’est transformé en besoin d’information. Les premiers tableaux de bord ne contenaient que des éléments basiques et mécaniques : le levier de frein, la bouteille en verre pour l’huile de lubrification et, progressivement, un premier bloc d’instruments.

    C’était l’époque de l’élégance brute : le design des véhicules haut de gamme s’affinait, introduisant des matériaux nobles comme le laiton pour les entourages d’instruments. Le simple speedometer et l’odomètre sont rejoints par le compte-tours et l’indicateur de pression. C’est surtout à la fin des années 30, lorsque la voiture est perçue non plus comme un simple outil mais comme un lieu de vie, que l’on voit arriver le chauffage et les premières radios à tubes, préparant le terrain pour la révolution du confort intérieur.

    La révolution du plastique et l’ère du loisir

    L’après-guerre a accéléré la transformation. Le tableau de bord est devenu un espace de design à part entière, gagnant en couleur et en intégration. Mais l’évolution la plus radicale fut l’arrivée de l’industrie du plastique rigide. Ce nouveau matériau a permis de produire en masse les volants, les leviers et les boutons, rendant les intérieurs plus complexes et moins chers à fabriquer.

    Le tableau de bord est alors devenu l’hôte des accessoires du « confort » et du statut social. Si les aérations étaient initialement réservées aux modèles haut de gamme, le standard de l’époque est rapidement devenu le chrome sur les radios et, surtout, l’incontournable allume-cigare et le cendrier : signes que l’on passe désormais du temps dans sa voiture.

    L’assaut numérique : du GPS au cockpit virtuel

    Les années 80 marquent le début de l’explosion technologique. Le tableau de bord se complexifie avec des systèmes de climatisation sophistiqués, des compartiments de rangement, puis l’intégration progressive des premiers systèmes de navigation GPS.

    Dans les années 2010, l’avènement du numérique a tout bousculé. L’infotainment est devenu la norme, et le tableau de bord, jusqu’alors une unité statique, est devenu un écran tactile et une interface logicielle. Devant le conducteur, le tableau de bord numérique – le virtual cockpit – a remplacé les cadrans physiques.

    Cette technologie offre une sécurité accrue, en plaçant la carte de navigation satellite directement dans le champ de vision du conducteur. Plus besoin de détourner le regard vers le centre de la console ! Mieux encore, le conducteur peut désormais personnaliser l’affichage via le volant multifonction : augmenter la taille du compte-tours, faire disparaître le répertoire téléphonique ou afficher la carte en grand. C’est l’ultime évolution : le tableau de bord, né pour arrêter la boue du cheval, est devenu un centre de commande intelligent, où le conducteur est aux manettes de sa propre expérience numérique. Un véritable bond de la charrette au smartphone.

  • La flamme éternelle : les clubs Porsche, là où la passion n’a pas d’âge

    La flamme éternelle : les clubs Porsche, là où la passion n’a pas d’âge

    Plus qu’un simple réseau automobile, la communauté des Porsche Clubs est une famille mondiale. Fondé le 26 mai 1952, ce club rassemble aujourd’hui plus de 240 000 membres répartis dans plus de 700 clubs à travers le monde. Mais au-delà de sa portée globale, c’est l’incroyable amplitude d’âge de ses membres qui témoigne de la profondeur de la légende Porsche. Trois histoires extraordinaires illustrent comment cette passion transgénérationnelle se transmet et se renouvelle.

    Jörg Steidinger : le gardien de la légende à 90 ans

    Après une longue carrière d’orfèvre, Jörg Steidinger, un passionné inconditionnel de la Porsche 356, profite d’une retraite bien méritée. À une époque, il a possédé 15 exemplaires de l’icône refroidie par air. Aujourd’hui, quatre demeurent sous sa garde, la plus ancienne étant un 356 C Cabriolet de 1963 qu’il possède depuis près de 45 ans.

    « J’ai cette voiture depuis presque la moitié de ma vie, » sourit Steidinger. « C’est plus qu’un simple véhicule – c’est une partie de mon histoire. »

    Jörg est un pilier de la communauté, ayant co-fondé le Porsche 356 Club Germany, qui célèbre cette année son 50e anniversaire. Malgré son âge avancé, il insiste sur le fait que ses voitures doivent être conduites pour rester en forme et est reconnaissant d’être encore en mesure de prendre le volant. Il a transmis le « virus Porsche » à ses trois fils, qui hériteront un jour de ses précieuses machines.

    Il note que la plupart des membres ont 45 ans et plus, un fait attribuable au coût des véhicules, mais il est convaincu que la nouvelle génération apporte une « énergie fraîche » dès qu’elle rejoint la communauté.


    Theo Brunt : du fast-food à la Cayman S à 16 ans

    Pour la plupart, la première voiture est un modèle modeste. Pas pour Theo Brunt. Début 2024, il est devenu le plus jeune membre du Porsche Club New Zealand (PCNZ), à seulement 16 ans, en achetant sa toute première voiture : une Porsche Cayman S de 2008 de couleur argent.

    Comment ? En travaillant de longues heures dans un restaurant rapide après l’école pendant 18 mois.

    Le jeune Néo-Zélandais a depuis troqué le monde du poulet frit pour une carrière en ingénierie automobile, après avoir décroché un poste de mécanicien apprenti. Maintenant propriétaire de sa deuxième Cayman, Theo est un visage régulier des événements du PCNZ.

    « Les autres membres étaient évidemment très surpris de voir quelqu’un d’aussi jeune que moi – le prochain membre le plus jeune que j’ai rencontré a la trentaine, » raconte-t-il. « Mais tout le monde a été si accueillant. »

    Sa passion l’a propulsé vers un avenir professionnel précis : il vise des qualifications en ingénierie et en conception assistée par ordinateur, rêvant de travailler chez Porsche ou Manthey.


    Jonathan Webb : un futur ambassadeur à 11 ans

    Le terme « obsessionnel » prend tout son sens avec Jonathan Webb, 11 ans, de Toronto. Grâce au programme Juniors du Porsche Club of America (PCA), Jonathan est déjà un visage familier. Il est passé d’aider son père à préparer sa 911 Carrera 4S (génération 996) pour des expositions à soutenir le personnel du PCA lors d’événements.

    « Les enfants comme Jonathan sont l’avenir de notre club, » confirme Vu Nguyen, directeur exécutif du PCA.

    Jonathan n’est pas timide : il a déjà rencontré Hans-Peter Porsche (fils de Ferry Porsche) et a récemment interviewé le présentateur de télévision américain Chris Jacobs devant la caméra. Il a les yeux rivés sur une Porsche 944 pour sa première voiture, et après avoir appris à vidanger l’huile de la 911 de son père, il se voit poursuivre une carrière dans le sport automobile.

    Le PCA encourage activement ces jeunes membres, leur donnant la liberté de créer les nouvelles traditions du club, assurant que la passion de la marque perdure pour le siècle à venir.

  • « Classic with a Twist » : la MINI Paul Smith Edition, quand la culture anglaise se réinvente

    « Classic with a Twist » : la MINI Paul Smith Edition, quand la culture anglaise se réinvente

    Deux icônes britanniques, MINI et Paul Smith, portent leur partenariat historique à un niveau supérieur. Loin d’une simple édition limitée, la nouvelle MINI Paul Smith Edition est une déclaration de style qui fusionne l’héritage automobile de MINI et la devise du designer : « Classic with a twist ». De Londres à Tokyo, c’est un hommage vibrant à l’optimisme, à l’artisanat et aux détails inattendus qui fait son entrée dans la nouvelle famille de modèles.

    La collaboration entre MINI et Sir Paul Smith ne date pas d’hier, témoignant d’une alchimie créative durable : commencée en 1998 avec une série limitée de la Classic Mini, elle a récemment culminé avec la MINI Recharged électrique en 2022. L’édition Paul Smith s’applique désormais à toute la nouvelle famille MINI Cooper (3, 5 portes et Cabriolet), qu’elle soit thermique ou électrique. Pour le designer, cette nouvelle création est « un réel privilège et une merveilleuse opportunité » d’injecter de nouvelles couleurs et des détails inattendus qui célèbrent l’esprit indépendant des deux marques. C’est l’essence même du style Paul Smith, où l’élégance classique est toujours détournée par une touche de malice.

    L’extérieur de cette édition est immédiatement reconnaissable grâce à un jeu de couleurs et d’accents qui rendent hommage à l’histoire et à la patrie de Paul Smith. Deux teintes de carrosserie sont spécifiques à cette édition : le Statement Grey, une réinterprétation moderne de la couleur de la Mini Austin Seven de 1959, et Inspired White, un clin d’œil contemporain au Beige de la Classic Mini. Le classique Midnight Black Metallic est également disponible pour un style plus sobre. Quelle que soit la couleur de la carrosserie, le vert profond Nottingham Green — un hommage à la ville natale de Sir Paul — habille les coques de rétroviseurs, la grille de calandre octogonale et les centres de roues. Cette teinte sert également de couleur de base pour l’une des deux options de toit.

    Sur le toit, la célèbre bande rayée de Paul Smith, une de ses caractéristiques centrales (la Signature Stripe), est positionnée à l’arrière côté conducteur. L’alternative est un toit à rayures plus subtiles, mates et brillantes, en Jet Black. La finition est poussée : des jantes en aluminium de 18 pouces Night Flash Spoke noires et le logo MINI redessiné en Black Blue complètent la composition. La touche finale pour le culte ? La signature manuscrite de Paul Smith est apposée sur la poignée de coffre arrière.

    À l’intérieur, l’approche est celle de « l’élégance et de la retenue », typique du caractère britannique, avec des touches de couleur qui apparaissent là où on les attend le moins. L’ambiance est moderne, avec des surfaces tricotées en noir sur le tableau de bord et les panneaux de porte. Les sièges sport Nightshade Blue sont en Vescin (un pas-cuir végétal) et intègrent du textile tricoté sur les épaules et les appuie-tête. La palette vive du Signature Stripe est traduite en surpiqûres décoratives sur le volant, apportant le contraste cher au designer.

    L’esprit joueur de Paul Smith se révèle dans les détails cachés, incarnant le fameux « twist ». Lorsque la porte s’ouvre, le conducteur et le passager sont accueillis par une projection lumineuse au sol affichant un « Hello » manuscrit. De même, la devise du designer, « Every day is a new beginning », est inscrite sur le seuil de porte, reflétant l’état d’esprit positif des deux marques. Enfin, un graphique de « lapin » stylisé et dessiné à la main par Paul Smith décore les tapis de sol. Cette nouvelle MINI Paul Smith Edition est une célébration de la culture du design. Elle rappelle que l’automobile, même dans sa version moderne, reste une plateforme d’expression où l’histoire, la créativité et le souci du détail peuvent donner naissance à un véritable culte.

  • Châssis n°001 et 469 km : la Saab 9-4X « neuve » qui défie le temps

    Châssis n°001 et 469 km : la Saab 9-4X « neuve » qui défie le temps

    La fin de Saab fut un déchirement pour la culture automobile. Aujourd’hui, un fantôme industriel se matérialise pour les collectionneurs : le tout premier exemplaire produit du crossover 9-4X, la voiture qui symbolise la dernière tentative de renaissance suédoise. Un mythe, avec seulement 469 kilomètres au compteur, vient d’être mis aux enchères.

    Le chant du cygne, resté neuf

    La Saab 9-4X est bien plus qu’un simple crossover ; elle est le point final d’une lignée d’ingénierie scandinave unique. Née sous la tutelle de General Motors (GM), développée pour s’attaquer aux BMW X3 et Volvo XC60, la 9-4X n’a pas eu le temps de vivre. Sa production, lancée en avril 2011 au Mexique, a été stoppée net quelques mois plus tard par la faillite de Saab. Au total, moins de 900 exemplaires ont été assemblés, faisant de la 9-4X un modèle d’une rareté sidérante.

    Mais si la Saab 9-4X est déjà un collector par essence, le lot actuellement mis en vente relève de la relique industrielle. Il s’agit du châssis numéro 001.

    La fierté dans le garage chauffé

    Mis aux enchères par la succession de son unique propriétaire, un passionné Saab disparu, cet exemplaire n’a littéralement jamais roulé. Il affiche un incroyable 469 kilomètres au compteur et conserve l’odeur du neuf.

    Achetée lors de la vente aux enchères de faillite en 2013, cette 9-4X n’a pas été acquise pour être conduite, mais pour être sanctuarisée. Son propriétaire l’a maintenue dans un garage chauffé, prenant soin de la démarrer et de la faire rouler légèrement tous les trois mois. Un rituel d’entretien pour un objet de culte, qui a permis de conserver le moteur V6 3.0 XWD de 265 chevaux dans un état de fonctionnement impeccable. L’inspection le confirme : le moteur tourne « parfaitement », la boîte automatique (Aisin-Warner) passe bien les rapports, et la carrosserie argentée est sans défaut, le dessous de caisse ne montrant qu’une « légère oxydation » sur quelques composants en alliage.

    Cet acte de préservation est la plus belle preuve de dévotion à la marque suédoise. C’est l’histoire d’un passionné qui a choisi de figer le temps pour l’ultime projet de Saab.

    Le détail qui tue : la plaque de faillite

    Pour le collectionneur averti, les détails abondent. Le véhicule porte toujours la plaque « Sold for Saab Bankruptcy » (« Vendu pour la faillite de Saab ») dans le compartiment moteur. De plus, bien qu’étant un modèle de l’année 2012, il n’a été enregistré pour la première fois qu’en juin 2022, principalement pour des raisons d’assurance, soulignant à quel point il est resté à l’abri.

    Son design, inspiré du concept Aero X, avec les phares « ice-block », le tableau de bord orienté vers le conducteur et la fonction Night Panel chère à Saab, rappelle ce que l’ingénierie suédoise essayait d’accomplir avant d’être éteinte.

    Le châssis n°001 de la 9-4X est aujourd’hui une anomalie. Il est plus qu’une voiture, c’est une capsule temporelle qui renferme la promesse de ce que Saab aurait pu devenir sur le segment des SUV premium. Avec une estimation de valeur atteignant les 500 000 SEK (environ 42 000 €), cette vente est une occasion unique et peut-être la dernière de posséder une Saab « neuve » — et la seule de son espèce au monde.

  • 100 ans d’héritage : la fusion Škoda-Laurin & Klement, acte de naissance d’un futur géant

    100 ans d’héritage : la fusion Škoda-Laurin & Klement, acte de naissance d’un futur géant

    Le 12 septembre 1925 marquait une date décisive pour l’industrie automobile tchèque : le constructeur de Mladá Boleslav, Laurin & Klement (L&K), s’associait au puissant groupe industriel Škoda basé à Pilsen. Cent ans plus tard, cette fusion n’est pas seulement un anniversaire historique ; elle est l’acte fondateur de la résilience, de l’innovation et de l’expansion mondiale qui définissent aujourd’hui la marque Škoda.

    Alors que L&K célébrait ses 30 ans d’existence et ses 20 ans de production automobile, elle était confrontée, comme beaucoup d’entreprises post-Première Guerre mondiale, à des difficultés économiques et, en 1924, à un incendie dévastateur. Les fondateurs, Václav Laurin et Václav Klement, cherchaient alors un partenaire stratégique solide.

    Un partenariat stratégique vital

    Le choix s’est porté sur le groupe industriel et d’armement Škoda, déjà un acteur majeur dont l’histoire remontait à 1859 et qui, sous la direction de l’ingénieur Emil Škoda, était devenu la plus grande entreprise industrielle d’Autriche-Hongrie.

    La fusion, approuvée le 20 juillet 1925 avec un échange d’actions de 2:1 (L&K/Škoda), garantissait la continuité du développement et de la production automobile à Mladá Boleslav.

    Au moment de l’accord :

    • L&K employait 1 125 personnes.
    • Škoda Plzeň comptait plus de 30 000 employés.

    Ce nouveau chapitre permit à l’usine automobile d’intégrer un ambitieux programme d’investissement, introduisant la production à la chaîne et des technologies de pointe, renforçant sa position juste avant l’arrivée de la crise économique mondiale.

    L’héritage L&K : des chiffres qui parlent

    L’esprit de L&K — fait d’innovation, de précision et de passion — est resté l’ADN de Škoda, symbolisé par les finitions les plus luxueuses de la marque.

    PériodeEffectif MondialProduction Automobile
    1925 (L&K)≈ 1 800 (estimé)833 voitures
    1991 (Intégration VW)16 974 employés172 074 voitures
    2024 (Année Passée)≈ 40 000 employés> 926 000 livraisons mondiales

    L’intégration au Groupe Volkswagen en 1991 a donné à Škoda l’impulsion nécessaire pour une modernisation et une expansion globale, perpétuant la croissance initiée un siècle plus tôt.

    La signature du sommet de la gamme aujourd’hui

    Bien que Laurin & Klement ait été officiellement retiré du Registre du Commerce en tant que fabricant indépendant en décembre 1925, son nom et son emblématique logo Art Nouveau vivent toujours.

    Depuis 1995 et la Škoda Felicia Laurin & Klement, cette désignation marque les plus hauts niveaux de finition de la gamme Škoda, offrant des équipements haut de gamme. Le savoir-faire est également célébré par les succès de Škoda Motorsport, qui s’inscrivent dans une tradition de course entamée en 1901. Même le nouveau complexe de bureaux de l’entreprise porte le nom de Laurin & Klement Kampus.

    Pour marquer le 130e anniversaire de l’histoire de Škoda Auto, les étudiants de l’École professionnelle Škoda Auto ont récemment modifié une Škoda Superb Combi en un véhicule d’escorte pour les courses cyclistes, baptisé significativement L&K 130. Le lien entre l’héritage d’hier et la performance de demain est plus vivant que jamais.

  • Du Quadrifoglio à la Gazzella : l’histoire secrète d’amour entre Alfa Romeo et les Carabinieri

    Du Quadrifoglio à la Gazzella : l’histoire secrète d’amour entre Alfa Romeo et les Carabinieri

    La livrée bleu nuit et rouge des Carabinieri est l’une des plus respectées d’Italie. Mais au-delà de l’uniforme, une autre couleur incarne le culte de l’intervention rapide : le Quadrifoglio Verde. La livraison récente d’une Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio (et, pour la première fois, d’une Maserati) pour le transport urgent d’organes, n’est pas un simple partenariat commercial. C’est le prolongement d’une tradition qui a débuté il y a plus de 70 ans, façonnant le mythe de la « Gazzella ».

    La naissance de la « Gazzella »

    L’histoire commence après la Seconde Guerre mondiale, lorsque le corps des Carabinieri, cherchant à se moderniser et à s’équiper de véhicules rapides pour les interventions d’urgence, s’est tourné vers le fleuron de l’industrie nationale. La première collaboration officielle avec Alfa Romeo a lieu en 1951 avec la 1900 M « Matta », un 4×4 robuste.

    Cependant, la véritable légende, le terme qui est entré dans le jargon populaire pour désigner les véhicules d’intervention rapide, est apparue un an plus tard. En 1952, la berline Alfa Romeo 1900 devint la toute première « Gazzella » (Gazelle). Ce surnom, emprunté à la rapidité de l’animal, était parfaitement justifié par la performance de l’Alfa Romeo, bien supérieure à la moyenne du parc automobile de l’époque.

    L’âge d’or : le mythe de la Giulia

    Le point culminant de cette alliance a été atteint dans les années 1960 avec la Giulia. De 1963 à 1968, la berline Alfa Romeo fut le véhicule d’intervention par excellence.

    La Giulia n’était pas seulement rapide ; elle était compacte, maniable et possédait une motorisation de course, permettant aux Carabinieri de mener des poursuites efficaces même dans les ruelles étroites des villes italiennes. Elle est devenue l’icône de la police italienne, le symbole visuel de la loi en action, capable d’allier performance sportive et devoir civique. Sa postérité est immense : la Giulia est sans doute l’Alfa Romeo la plus associée à l’image du Carabinieri en uniforme.

    Une tradition ininterrompue

    Depuis la Giulia, le partenariat entre le constructeur de Milan et le Corps militaire s’est poursuivi sans jamais s’interrompre, témoignant de l’excellence et de la fiabilité des modèles Alfa Romeo sous la contrainte opérationnelle :

    • Alfetta : Le modèle des années 1970 et 1980 a perpétué la tradition de la berline rapide.
    • Les 90, 75 et 155 : Elles ont porté le relais dans les années 1980 et 1990.
    • Les 156 et 159 : Elles ont équipé le corps au début du XXIe siècle, conservant une esthétique sportive même sous livrée institutionnelle.

    À chaque génération, l’Alfa Romeo des Carabinieri est devenue bien plus qu’une simple voiture de fonction : c’est un outil de fierté nationale et d’efficacité opérationnelle.

    La Quadrifoglio 2025 : l’héritage au service de la vie

    La livraison de cette semaine ancre ce culte dans la modernité. La nouvelle Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio, sortie de l’usine de Cassino, est l’héritière directe de la « Gazzella » des années 60, mais avec une puissance et une technologie sans précédent.

    Avec son moteur V6 biturbo de 520 chevaux, son différentiel autobloquant mécanique et sa propulsion, cette Giulia n’est pas destinée à patrouiller, mais à accomplir la mission la plus noble : le transport urgent d’organes et de sang. La vitesse et la fiabilité de la Quadrifoglio, initialement conçues pour la performance sur piste, sont ici directement mises au service de la communauté.

    Comme l’a souligné le Général C.A. Salvatore Luongo, Commandant Général des Carabinieri, cette collaboration représente un « alignement des objectifs au service de la communauté », où la fiabilité des véhicules devient « un outil vital pour sauver des vies ». L’alliance entre la performance automobile italienne et l’efficacité institutionnelle n’a jamais été aussi essentielle.

    Et pour la première fois, la Maserati MCPURA (un coupé V6 Nettuno de 630 chevaux) rejoint la flotte des urgences. Si l’entrée d’un Trident est historique, c’est bien la présence continue du Quadrifoglio qui confirme : plus de sept décennies après la première « Gazzella », le cœur d’Alfa Romeo continue de battre au rythme des missions les plus urgentes de l’Italie.

  • La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    Loin des clichés de la Motor Valley et du Piémont, c’est au cœur de la Basilicate, entre les oliviers et les collines, que se joue depuis trente ans une histoire essentielle de l’automobile européenne. L’usine de Melfi, née d’un pari politique, est devenue le laboratoire de Stellantis et, surtout, le pivot mondial de la marque Jeep.

    Melfi : le pari ambitieux du Sud industriel

    Pour comprendre le rôle actuel de l’usine de Melfi – aujourd’hui vitrine de la nouvelle Jeep Compass électrique – il faut remonter au début des années 1990. Le site, un complexe d’acier et de verre de près de deux millions de mètres carrés, a été inauguré par Fiat comme un geste fort : faire entrer le sud de l’Italie, traditionnellement moins industrialisé que le Nord, dans la modernité.

    Melfi n’était pas un choix par défaut ; c’était un pari politique et social visant à rééquilibrer la production italienne au-delà de Turin. Les modèles qui y sont nés, de la Fiat Punto à la Lancia Ypsilon, ont marqué l’entrée dans l’automobile pour toute une génération européenne. L’usine a prouvé la rigueur de ses ouvriers et la précision de ses ingénieurs, incarnant une Italie industrielle capable de grande échelle et de qualité. Melfi est rapidement passée du statut d’usine satellite à celui de monument de la résilience industrielle.

    L’allégeance à l’aigle américain : quand Jeep dépasse Détroit

    Le véritable tournant, et ce qui nous intéresse au premier chef, arrive en 2014. Après l’arrêt de la production des modèles historiques, Melfi faisait face au spectre du déclin. Mais FCA, sous l’impulsion de Sergio Marchionne, a pris une décision radicale : faire de ce site italien le berceau d’une icône américaine, la Jeep Renegade.

    Ce fut la première Jeep de l’histoire à être produite en dehors du continent nord-américain. Ce choix stratégique a permis à Jeep de se positionner au cœur du marché européen, avec des coûts de logistique réduits et une réactivité accrue. En associant l’ADN américain de liberté et de capacité tout-terrain à la précision italienne de l’assemblage et du design, Melfi a façonné une identité à part. En une décennie, plus de 2,3 millions de Jeep – incluant les premières versions de la Compass et ses déclinaisons hybrides rechargeables 4xe – sont sorties des chaînes du Sud, prouvant que le mythe Jeep pouvait s’épanouir sous un ciel italien.

    Du V12 aux Watts : Melfi, laboratoire de la « liberté de production »

    Aujourd’hui, l’usine s’adapte à une nouvelle révolution : l’électrification. La nouvelle génération de la Jeep Compass, conçue sur la plateforme STLA Medium, n’est plus seulement un véhicule produit en Italie ; elle est la vitrine d’un savoir-faire industriel unique en pleine transition énergétique.

    Le concept clé réside dans la « liberté de production » : la plateforme modulaire permet d’assembler, sur la même ligne, des versions hybrides, hybrides rechargeables et 100 % électriques. Cette flexibilité est vitale dans un marché européen imprévisible, permettant à Stellantis d’adapter son mix industriel presque instantanément, sans rupture.

    Melfi est donc devenue un véritable laboratoire technologique pour le groupe, testant des procédés de pointe (contrôle qualité par caméras haute résolution, peinture « 4-Wet » à faible impact environnemental) et visant l’autonomie énergétique.

    L’héritage ouvrier, moteur de la culture voiture

    Au-delà des chiffres techniques (jusqu’à 375 chevaux et 650 km d’autonomie pour la nouvelle Compass), ce qui fascine, c’est la dimension humaine et culturelle. L’usine emploie plus de 4,600 personnes, dont l’ancienneté moyenne dépasse vingt ans. Ces ouvriers et ingénieurs sont les héritiers de l’histoire industrielle initiée par la Punto, et sont aujourd’hui les artisans de l’électrique.

    La fierté qui émane de ces équipes n’est pas seulement celle du travail bien fait, elle est celle d’une région qui, souvent sous-estimée, a prouvé sa capacité à s’adapter sans renier son héritage. En voyant la nouvelle Compass sortir de Melfi, le passionné ne regarde pas seulement un SUV global. Il voit le résultat d’une histoire de trente ans, où le pragmatisme du Sud italien s’est marié à l’icône de l’aventure américaine, assurant ainsi la pérennité du culte Jeep pour la génération électrique.

  • Le ballet logistique : quand la « Beast » et son cortège défient les lois du Grand Tourisme

    Le ballet logistique : quand la « Beast » et son cortège défient les lois du Grand Tourisme

    La voiture du président des États-Unis (POTUS) est l’ultime expression du secret, de la puissance, et de la démesure. Mais l’histoire la plus fascinante n’est pas celle de son blindage ou de son V8 : c’est celle de son voyage. Quand la « Beast » quitte la Maison-Blanche, l’interstate ne suffit plus.

    La Cadillac présidentielle, affectueusement surnommée la « Beast » (la Bête) par la presse et le grand public, est bien plus qu’une limousine. C’est une forteresse roulante, un symbole national, et une œuvre d’ingénierie qui éclipse presque tous les autres véhicules blindés au monde. Pourtant, au-delà de ses spécifications classifiées, la question de sa mobilité intercontinentale reste l’une des plus spectaculaires. Que le commandant en chef se déplace pour une brève allocution domestique ou une visite diplomatique à l’étranger, le Service Secret n’utilise pas le réseau routier pour le transport longue distance. La réponse est simple, mais spectaculaire : la « Beast » vole.

    Pour le Service Secret américain, déplacer le cortège présidentiel relève d’une logistique militaire de très haute précision, menée en collaboration avec l’Armée de l’Air. On ne parle pas de faire la queue aux douanes ou de prendre l’autoroute. On parle de mobiliser les géants du transport lourd : les Boeing C-17 Globemaster III. Ces transporteurs lourds sont l’épine dorsale du déménagement présidentiel. Un seul C-17 est typiquement désigné pour la tâche la plus noble : il est responsable d’acheminer deux limousines présidentielles (les fameuses « Beasts », car il y a toujours un double en service) ainsi qu’une paire de Chevrolet Suburbans blindés qui composent l’essentiel du cortège. D’autres C-17 suivent pour le reste des véhicules de support et de communication, selon les besoins de la mission.

    Imaginez la scène, digne d’un film d’action, mais réelle : une fois à bord du C-17, les deux « Beasts » sont méticuleusement positionnées nez à queue au centre de la soute. Les Suburbans blindés, souvent presque aussi lourds que les limousines, sont quant à eux arrimés sur la rampe de chargement. Cette rampe, une fois repliée et verrouillée, forme une descente notable vers la cabine. L’arrimage des véhicules est une opération vitale, car le poids total, bien que classifié, exige une parfaite répartition. Environ quarante agents du Service Secret accompagnent leur cargaison, leurs bagages simplement sanglés au sol. Le vol n’est pas de tout repos : les agents s’installent sur des sièges d’appoint le long de la carlingue, même s’il est fréquent qu’ils optent pour s’allonger, par nécessité, directement sur le plancher de la soute pour le repos.

    Le gouvernement refuse obstinément de divulguer le poids exact des limousines et des Suburbans blindés – secret défense oblige. Cependant, les professionnels savent que la charge totale est très inférieure aux environ 77,5 tonnes de capacité du C-17. C’est là que la culture de la sur-ingénierie et de la discrétion prend tout son sens. Si l’Armée de l’Air mobilise un transporteur intercontinental pour seulement deux voitures, c’est que la « Beast » ne représente pas seulement une charge physique, mais une priorité logistique absolue. Ce n’est pas le tonnage qui dicte le choix, mais la nécessité de la présence immédiate, discrète et inébranlable du symbole automobile le plus sécurisé au monde, à tout moment et en tout point du globe.

    La prochaine fois que vous verrez la « Beast » à l’étranger, rappelez-vous que ce n’est pas une simple berline de luxe qui s’est garée là : c’est un véritable ballet aérien qui a été orchestré pour que ce mythe automobile soit toujours prêt à rouler.

  • L’archive révélée : le plan 1:1 de la Lamborghini 350 GT, autopsie d’une naissance culte

    L’archive révélée : le plan 1:1 de la Lamborghini 350 GT, autopsie d’une naissance culte

    Parfois, le plus grand trésor d’une marque n’est pas le métal poli, mais le papier jauni.

    À l’heure où les designers automobiles travaillent sur des moniteurs 3D et où le « pixel » a remplacé le « crayon », l’annonce faite par Lamborghini Polo Storico lors de l’événement Auto e Moto d’Epoca prend une saveur toute particulière pour les amoureux de la culture automobile. Le département Héritage de Sant’Agata Bolognese célèbre son dixième anniversaire en exposant la plus ancienne 350 GT survivante (châssis n°2), mais surtout, en levant le voile sur une relique fondatrice : un dessin technique à l’échelle 1:1 de l’aménagement intérieur de la 350 GT, daté de 1963.

    Ce n’est pas un simple croquis. C’est l’acte de naissance, tracé à la main, de l’ADN Gran Turismo de Lamborghini.

    Le trait de crayon contre le pixel

    En 1963, l’ordinateur n’est pas l’outil du designer. Le processus de création d’une automobile de luxe passait par des planches à dessin gigantesques, souvent à l’échelle réelle (1:1), pour valider les volumes, l’ergonomie et la faisabilité technique.

    Ce document, décrit par Lamborghini comme le plus ancien de ses archives historiques, n’est pas là pour faire joli. Il est le témoin d’une collaboration intense entre un jeune constructeur ambitieux, Ferruccio Lamborghini, et le maître-carrossier Carrozzeria Touring, concepteur de la fameuse carrosserie Superleggera de la 350 GT.

    Le plan 1:1 de l’habitacle de la 350 GT est une véritable autopsie du luxe italien des années 60 :

    1. L’ergonomie de la défiance : Il révèle comment les ingénieurs de l’époque ont articulé l’espace intérieur autour du puissant V12 de Giotto Bizzarrini, positionné longitudinalement à l’avant. C’est sur ce papier que les cotes exactes du volant, du pédalier et de la console centrale ont été fixées, définissant le confort et la position de conduite exigés par Ferruccio Lamborghini, pour faire mieux et plus civilisé que la concurrence de Maranello.
    2. L’âme du détail : Il témoigne de l’importance du tableau de bord. La position des compteurs Jaeger, les interrupteurs à bascule, le levier de vitesse… Chaque élément était méticuleusement positionné. Un dessin 1:1 permettait aux artisans de visualiser précisément la disposition des luxueuses selleries en cuir et des boiseries, avant même que le premier panneau d’aluminium ne soit frappé.
    3. Le symbole de la rigueur: Ce document est la preuve palpable de la rigueur industrielle qui a présidé aux débuts de Lamborghini. Il fallait convertir la vision sauvage du prototype 350 GTV en un produit fini, industrialisable par Touring. Le plan est la passerelle entre l’idée artistique et la réalité mécanique.

    Polo Storico : Le gardien du geste

    L’exposition de ce dessin souligne le rôle essentiel du Polo Storico. Leur mission va au-delà de la restauration des automobiles (comme le montre le travail de certification de la 350 GT n°2). Elle englobe la sauvegarde du patrimoine immatériel et technique de la marque.

    En préservant et en étudiant de tels documents, le Polo Storico ne fait pas que raconter l’histoire. Il offre aux collectionneurs et aux historiens un accès privilégié au processus créatif. Dans un monde automobile dématérialisé, ce plan papier, avec ses annotations et ses cotes, est un véritable artefact de la culture voiture, le souvenir d’un temps où l’échelle 1:1 était la seule réalité virtuelle possible.

    C’est là que réside le culte : dans la capacité à remonter le temps, non pas seulement pour voir le résultat final, mais pour observer la main et l’intention qui ont donné naissance à la légende Lamborghini.

    Le dessin 1:1 de la 350 GT n’est pas un simple document, c’est le plan de la grandeur à venir.

  • L’homme qui tondait l’élégance : le secret de l’artisanat de Masashi Nakayama chez Mazda

    L’homme qui tondait l’élégance : le secret de l’artisanat de Masashi Nakayama chez Mazda

    Dans un monde où l’intelligence artificielle et les raccourcis numériques dominent le design, Masashi Nakayama, directeur général de la division Design de Mazda, défend un artisanat exigeant. Pour lui, la création d’une automobile véritablement spéciale commence en roulant les manches et en plongeant les mains dans la glaise. Beaucoup de glaise.

    Cette approche tactile, presque méditative, est au cœur de l’esthétique épurée et élégante qui caractérise les Mazda contemporaines.

    L’apologie de la glaise et du temps long

    Le secret de Mazda réside dans son attachement au modèle physique. Nakayama le confirme sans détour : « Nous produisons beaucoup plus de modèles en argile que les autres constructeurs automobiles ». Il précise même que Mazda consomme la plus grande quantité d’argile au monde, utilisant une argile personnalisée et unique.

    Ce n’est pas une simple lubie. Ce choix, qui valorise le temps long, est le chemin vers des voitures de série d’une élégance exceptionnelle. L’approche est si valorisée que les concurrents cherchent régulièrement à débaucher les modeleurs de Mazda, jugés parmi les meilleurs du secteur.

    • L’Iconic SP : Le concept-car très acclamé Iconic SP – qui pourrait influencer toute une génération de modèles de production – est né de cinq modèles en argile au quart, suivis de trois modèles grandeur nature qui ont évolué sur une période considérable.

    Vue de près, la forme basse et agile de l’Iconic SP est remarquable par sa douceur. Il n’y a aucune arête vive ni coupure discordante ; le design est une leçon de retenue et de bon goût, de ses phares escamotables ultra-minces à la colonne vertébrale centrale du capot qui définit sa symétrie.

    Du MX-5 au Zen du tondeur

    Masashi Nakayama, qui a pris les rênes du design en 2021 après une carrière chez Mazda débutée en 1989 (lancement du premier MX-5), est un homme de l’ombre. Il symbolise l’esprit de curiosité et d’engagement de la marque.

    Il a été impliqué dans la renaissance du XXIe siècle, signant des intérieurs emblématiques (Mazda 3 Mk1, RX-8) et, de manière atypique, en étant à la fois chef designer et chef de programme pour l’actuelle MX-5 de quatrième génération. Pour lui, la principale qualification pour ce poste était de « montrer de l’amour au MX-5 ».

    Son approche s’ancre dans un héritage artisanal fort :

    • Héritage Artisanal : Son grand-père était un charpentier de temple capable de façonner des structures complexes sans utiliser de clous.
    • Philosophie de Hiroshima : Ayant grandi dans une ville qui a « tout perdu » puis s’est reconstruite à partir de zéro, il a développé un état d’esprit unique qui mélange « la philosophie dynamique de la recherche d’une haute efficacité avec la philosophie statique de l’exercice de la prudence et de l’attention ». Pour lui, la vitesse d’une voiture de sport n’est pas tout.

    Cet état d’esprit se manifeste dans son plus grand plaisir personnel : tondre la pelouse avec une tondeuse manuelle. Pour lui, entretenir son vaste gazon (120 m²) est un « art qui implique de travailler avec la nature », une métaphore parfaite de son approche du design automobile.

    La quête de l’expérience utilisateur unique

    Nakayama ne nie pas la pression de la rapidité, surtout face aux start-ups chinoises. Mais il insiste : « Je pense que notre processus a en fait une valeur plus forte, à cause du temps pris ».

    Sa philosophie s’étend jusqu’à l’expérience utilisateur. S’il n’est pas opposé au design moderne, il refuse que Mazda se contente des solutions tierces par défaut (comme Apple CarPlay ou Android Auto). Il souhaite passionnément que la marque développe une expérience utilisateur unique, sans faire appel à des entreprises externes pour la créer.

    L’Iconic SP pourrait concrétiser cette vision. Bien qu’il se refuse à donner des détails sur la production, le directeur technique de Mazda, Ryuichi Umeshita, a révélé qu’une version de production s’orienterait vers un plus grand VE doté d’un prolongateur d’autonomie à moteur rotatif, un digne « successeur de la RX-7 ».

    Avec l’engagement de Nakayama pour le geste juste, il y a de l’espoir que ce futur modèle conserve le corps aux surfaces lisses, les phares escamotables et les portes à ouverture vers le ciel — la magie subtile que seule l’approche artisanale de Mazda peut offrir.

  • Toyota crée Century : une marque encore plus exclusive que Lexus

    Toyota crée Century : une marque encore plus exclusive que Lexus

    Alors que la plupart des constructeurs cherchent à simplifier leurs gammes ou à fusionner leurs multiples labels, Toyota choisit une voie inverse. Le géant japonais s’apprête à lancer une nouvelle marque de prestige baptisée Century, positionnée au-dessus de Lexus. Oui, au-dessus. Un mouvement audacieux qui propulse Toyota dans un univers habituellement réservé à Rolls-Royce ou Bentley.

    Un nom chargé d’histoire

    Le nom Century n’est pas inconnu : il s’agit de la limousine officielle du gouvernement japonais depuis 1967, un modèle mythique souvent associé à l’empereur, au Premier ministre et… à la Yakuza. Véritable symbole du pouvoir nippon, la Century a toujours incarné la discrétion et le raffinement à la japonaise.

    Sa première génération célébrait le centenaire de la naissance de Sakichi Toyoda, fondateur du groupe. La deuxième génération, lancée en 1997, reste célèbre pour avoir inauguré le seul moteur V12 jamais produit par un constructeur japonais : un 5,0 litres atmosphérique de 48 soupapes, conçu exclusivement pour ce modèle. Un moteur unique, aussi feutré que noble, resté au catalogue pendant plus de vingt ans.

    Aujourd’hui, Toyota veut capitaliser sur ce prestige pour en faire un véritable label automobile, à part entière.

    Century, la « Rolls japonaise » devient marque

    « Jusqu’à présent, la place de la Century dans notre gamme n’était pas clairement définie », reconnaît Akio Toyoda, président du groupe. « Lexus a toujours joué le rôle du fils aîné, responsable et ambitieux, tandis que Toyota était le cadet, plus populaire. Mais je me suis demandé : pourquoi ne pas aller au-delà, créer quelque chose au-dessus de Lexus ? »

    L’idée a séduit les stratèges de la marque. Car si Lexus a su s’imposer comme alternative crédible aux marques premium européennes, Toyota estime qu’il reste une marge au sommet, celle du luxe d’apparat, du véhicule de représentation, presque d’exception. C’est là que Century interviendra : non pas comme une gamme luxueuse de plus, mais comme une marque à part entière, synonyme d’exclusivité absolue.

    Lexus libérée, Century magnifiée

    Simon Humphreys, Chief Branding Officer de Toyota, précise la stratégie :

    « En un sens, cela donne plus de liberté à Lexus, qui peut poursuivre sa quête d’innovation et d’expérimentation. La marque Century, elle, vise le sommet, l’ultra-luxe, l’unique. »

    En clair : Lexus reste le laboratoire du design et de la technologie, tandis que Century devient le fleuron du savoir-faire artisanal japonais. On peut s’attendre à des voitures fabriquées en très petites séries, avec un niveau de finition rivalisant avec Bentley, voire Rolls-Royce.

    Pas de modèle révélé (encore), mais des ambitions affichées

    Toyota n’a pas encore dévoilé de modèle Century 100 % inédit, mais tout indique que la marque démarrera autour d’une grande berline chauffée à blanc de prestige, destinée à concurrencer directement les références britanniques et allemandes. La future limousine conserverait l’esprit sobre et solennel de la Century historique, avec une motorisation hybride ou 100 % électrique, et une production strictement limitée au Japon.

    L’introduction d’un SUV Century en 2023 — sur base de Lexus TX — semble avoir servi de ballon d’essai. Le lancement de la marque confirme que Toyota assume pleinement son ambition de s’installer dans la sphère de l’ultra-luxe, un terrain qu’aucun constructeur japonais n’avait véritablement osé investir jusqu’ici.

    Toyota, empire du rationnel et du pragmatisme, s’aventure ici sur un terrain presque philosophique : le luxe émotionnel et culturel, incarné par le raffinement, la patience et la perfection de l’artisanat japonais. Dans un monde automobile dominé par la performance et la technologie, Century incarne une autre idée du prestige — celle du wa, l’harmonie et la discrétion.

    Et si Lexus fut, en son temps, la réponse japonaise à Mercedes, Century pourrait bien être la réponse nippone à Rolls-Royce.