Depuis son lancement dans les années 1980, la BMW M5 s’est imposée comme la référence ultime de la Série 5. Puissance démesurée, comportement affûté, aura mythique : elle a toujours incarné le sommet de la gamme. Mais avec le temps, le statut de Q-car — cette élégance discrète qui cachait une mécanique volcanique — s’est dilué. Les dernières générations sont devenues si extrêmes qu’elles en perdent une partie de leur charme originel. Plus lourdes, plus complexes, difficilement exploitables au quotidien… et désormais proposées à plus de 110 000 €. De quoi redonner une vraie légitimité aux versions dites « inférieures », bien plus vivables.
La surprise d’un parking : une 550i au lieu d’une banale 520d
C’est en apercevant, dans un simple parking, une Série 5 Touring E61 chaussée de jantes imposantes qu’un doute est né. De loin, on pense à une sobre 520d. Mais en s’approchant, la découverte est autrement plus enthousiasmante : il s’agit d’une 550i. Un modèle pour lequel beaucoup ont toujours eu un faible. Pourquoi ? Parce qu’il concentre presque toutes les qualités d’une M5… sans ses excès.
Quand la M5 se montrait trop excessive
Au milieu des années 2000, la M5 E60 faisait figure de bête sauvage. Un V10 5,0 litres hurlant à 8250 tr/min, une boîte robotisée SMG mal-aimée et une soif insatiable pour le sans-plomb 98. Lors d’un essai presse en 2005, l’auto n’avait tenu qu’une centaine de kilomètres sur un circuit routier avant qu’une équipe d’assistance ne soit contrainte de refaire le plein, son réservoir étant identique à celui d’une 520d. Puissante, démoniaque, mais peu adaptée au quotidien.
Face à elle, la 550i jouait la carte du V8 atmosphérique de 4,8 litres. Moins extrême, plus souple, bien plus endurante sur route, et disponible avec une boîte automatique classique ou même une manuelle. Avec ses 361 chevaux, elle offrait des performances largement suffisantes, un confort accru et, surtout, une discrétion bienvenue face aux regards indiscrets… ou à l’attention des forces de l’ordre.
L’attrait des secondes lignes
La 550i Touring E61 n’est pas un cas isolé. Dans l’histoire automobile, les modèles juste en dessous du sommet ont souvent un charme particulier.
- Volkswagen Golf GTI vs Golf R : la GTI se montre plus légère, plus joueuse, moins coûteuse à entretenir.
- Peugeot 205 XS vs 205 GTi : la XS, avec son 1.4 vif et sa boîte courte, exige de conserver l’élan, offrant une expérience de pilotage plus pure qu’une GTi.
- Ford Fiesta XR2i vs RS Turbo : quand la XR2i reste homogène et agréable, la RS Turbo sombre dans un torque steer caricatural.
- Audi R8 V8 vs V10 : plus équilibrée et plus agile, la version huit cylindres séduit les puristes davantage que sa déclinaison V10 trop lourde.
- BMW M340i vs M3 : aujourd’hui, la M340i s’impose comme l’héritière spirituelle de la fameuse 335d reprogrammée, en conjuguant performances de haut niveau et polyvalence.
Dans chaque cas, les versions « en dessous » parviennent à séduire par leur authenticité, leur facilité d’usage et leur rapport plaisir/quotidien imbattable.
La rareté comme ultime atout
Il existe aussi un paradoxe de la collection : la star survit souvent mieux que son ombre.
L’éloge de l’underdog
Les versions phares brillent par leurs chiffres de puissance, leurs performances brutes et leur statut. Mais elles s’avèrent souvent trop chères, trop lourdes, trop compliquées, trop tape-à-l’œil. Les variantes juste en dessous, elles, combinent équilibre, discrétion et authenticité. Elles incarnent ce que l’automobile peut avoir de plus attachant : de la performance suffisante, du plaisir de conduite réel, et ce petit supplément d’âme qui naît quand on choisit l’underdog.
Alors oui, toutes nos félicitations à la BMW 550i Touring E61, et à toutes ces « secondes meilleures » qui, au quotidien, se révèlent parfois bien plus désirables que les reines de la gamme.