Auteur/autrice : Rédaction

  • 100 ans d’héritage : la fusion Škoda-Laurin & Klement, acte de naissance d’un futur géant

    100 ans d’héritage : la fusion Škoda-Laurin & Klement, acte de naissance d’un futur géant

    Le 12 septembre 1925 marquait une date décisive pour l’industrie automobile tchèque : le constructeur de Mladá Boleslav, Laurin & Klement (L&K), s’associait au puissant groupe industriel Škoda basé à Pilsen. Cent ans plus tard, cette fusion n’est pas seulement un anniversaire historique ; elle est l’acte fondateur de la résilience, de l’innovation et de l’expansion mondiale qui définissent aujourd’hui la marque Škoda.

    Alors que L&K célébrait ses 30 ans d’existence et ses 20 ans de production automobile, elle était confrontée, comme beaucoup d’entreprises post-Première Guerre mondiale, à des difficultés économiques et, en 1924, à un incendie dévastateur. Les fondateurs, Václav Laurin et Václav Klement, cherchaient alors un partenaire stratégique solide.

    Un partenariat stratégique vital

    Le choix s’est porté sur le groupe industriel et d’armement Škoda, déjà un acteur majeur dont l’histoire remontait à 1859 et qui, sous la direction de l’ingénieur Emil Škoda, était devenu la plus grande entreprise industrielle d’Autriche-Hongrie.

    La fusion, approuvée le 20 juillet 1925 avec un échange d’actions de 2:1 (L&K/Škoda), garantissait la continuité du développement et de la production automobile à Mladá Boleslav.

    Au moment de l’accord :

    • L&K employait 1 125 personnes.
    • Škoda Plzeň comptait plus de 30 000 employés.

    Ce nouveau chapitre permit à l’usine automobile d’intégrer un ambitieux programme d’investissement, introduisant la production à la chaîne et des technologies de pointe, renforçant sa position juste avant l’arrivée de la crise économique mondiale.

    L’héritage L&K : des chiffres qui parlent

    L’esprit de L&K — fait d’innovation, de précision et de passion — est resté l’ADN de Škoda, symbolisé par les finitions les plus luxueuses de la marque.

    PériodeEffectif MondialProduction Automobile
    1925 (L&K)≈ 1 800 (estimé)833 voitures
    1991 (Intégration VW)16 974 employés172 074 voitures
    2024 (Année Passée)≈ 40 000 employés> 926 000 livraisons mondiales

    L’intégration au Groupe Volkswagen en 1991 a donné à Škoda l’impulsion nécessaire pour une modernisation et une expansion globale, perpétuant la croissance initiée un siècle plus tôt.

    La signature du sommet de la gamme aujourd’hui

    Bien que Laurin & Klement ait été officiellement retiré du Registre du Commerce en tant que fabricant indépendant en décembre 1925, son nom et son emblématique logo Art Nouveau vivent toujours.

    Depuis 1995 et la Škoda Felicia Laurin & Klement, cette désignation marque les plus hauts niveaux de finition de la gamme Škoda, offrant des équipements haut de gamme. Le savoir-faire est également célébré par les succès de Škoda Motorsport, qui s’inscrivent dans une tradition de course entamée en 1901. Même le nouveau complexe de bureaux de l’entreprise porte le nom de Laurin & Klement Kampus.

    Pour marquer le 130e anniversaire de l’histoire de Škoda Auto, les étudiants de l’École professionnelle Škoda Auto ont récemment modifié une Škoda Superb Combi en un véhicule d’escorte pour les courses cyclistes, baptisé significativement L&K 130. Le lien entre l’héritage d’hier et la performance de demain est plus vivant que jamais.

  • Du Quadrifoglio à la Gazzella : l’histoire secrète d’amour entre Alfa Romeo et les Carabinieri

    Du Quadrifoglio à la Gazzella : l’histoire secrète d’amour entre Alfa Romeo et les Carabinieri

    La livrée bleu nuit et rouge des Carabinieri est l’une des plus respectées d’Italie. Mais au-delà de l’uniforme, une autre couleur incarne le culte de l’intervention rapide : le Quadrifoglio Verde. La livraison récente d’une Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio (et, pour la première fois, d’une Maserati) pour le transport urgent d’organes, n’est pas un simple partenariat commercial. C’est le prolongement d’une tradition qui a débuté il y a plus de 70 ans, façonnant le mythe de la « Gazzella ».

    La naissance de la « Gazzella »

    L’histoire commence après la Seconde Guerre mondiale, lorsque le corps des Carabinieri, cherchant à se moderniser et à s’équiper de véhicules rapides pour les interventions d’urgence, s’est tourné vers le fleuron de l’industrie nationale. La première collaboration officielle avec Alfa Romeo a lieu en 1951 avec la 1900 M « Matta », un 4×4 robuste.

    Cependant, la véritable légende, le terme qui est entré dans le jargon populaire pour désigner les véhicules d’intervention rapide, est apparue un an plus tard. En 1952, la berline Alfa Romeo 1900 devint la toute première « Gazzella » (Gazelle). Ce surnom, emprunté à la rapidité de l’animal, était parfaitement justifié par la performance de l’Alfa Romeo, bien supérieure à la moyenne du parc automobile de l’époque.

    L’âge d’or : le mythe de la Giulia

    Le point culminant de cette alliance a été atteint dans les années 1960 avec la Giulia. De 1963 à 1968, la berline Alfa Romeo fut le véhicule d’intervention par excellence.

    La Giulia n’était pas seulement rapide ; elle était compacte, maniable et possédait une motorisation de course, permettant aux Carabinieri de mener des poursuites efficaces même dans les ruelles étroites des villes italiennes. Elle est devenue l’icône de la police italienne, le symbole visuel de la loi en action, capable d’allier performance sportive et devoir civique. Sa postérité est immense : la Giulia est sans doute l’Alfa Romeo la plus associée à l’image du Carabinieri en uniforme.

    Une tradition ininterrompue

    Depuis la Giulia, le partenariat entre le constructeur de Milan et le Corps militaire s’est poursuivi sans jamais s’interrompre, témoignant de l’excellence et de la fiabilité des modèles Alfa Romeo sous la contrainte opérationnelle :

    • Alfetta : Le modèle des années 1970 et 1980 a perpétué la tradition de la berline rapide.
    • Les 90, 75 et 155 : Elles ont porté le relais dans les années 1980 et 1990.
    • Les 156 et 159 : Elles ont équipé le corps au début du XXIe siècle, conservant une esthétique sportive même sous livrée institutionnelle.

    À chaque génération, l’Alfa Romeo des Carabinieri est devenue bien plus qu’une simple voiture de fonction : c’est un outil de fierté nationale et d’efficacité opérationnelle.

    La Quadrifoglio 2025 : l’héritage au service de la vie

    La livraison de cette semaine ancre ce culte dans la modernité. La nouvelle Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio, sortie de l’usine de Cassino, est l’héritière directe de la « Gazzella » des années 60, mais avec une puissance et une technologie sans précédent.

    Avec son moteur V6 biturbo de 520 chevaux, son différentiel autobloquant mécanique et sa propulsion, cette Giulia n’est pas destinée à patrouiller, mais à accomplir la mission la plus noble : le transport urgent d’organes et de sang. La vitesse et la fiabilité de la Quadrifoglio, initialement conçues pour la performance sur piste, sont ici directement mises au service de la communauté.

    Comme l’a souligné le Général C.A. Salvatore Luongo, Commandant Général des Carabinieri, cette collaboration représente un « alignement des objectifs au service de la communauté », où la fiabilité des véhicules devient « un outil vital pour sauver des vies ». L’alliance entre la performance automobile italienne et l’efficacité institutionnelle n’a jamais été aussi essentielle.

    Et pour la première fois, la Maserati MCPURA (un coupé V6 Nettuno de 630 chevaux) rejoint la flotte des urgences. Si l’entrée d’un Trident est historique, c’est bien la présence continue du Quadrifoglio qui confirme : plus de sept décennies après la première « Gazzella », le cœur d’Alfa Romeo continue de battre au rythme des missions les plus urgentes de l’Italie.

  • La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    Loin des clichés de la Motor Valley et du Piémont, c’est au cœur de la Basilicate, entre les oliviers et les collines, que se joue depuis trente ans une histoire essentielle de l’automobile européenne. L’usine de Melfi, née d’un pari politique, est devenue le laboratoire de Stellantis et, surtout, le pivot mondial de la marque Jeep.

    Melfi : le pari ambitieux du Sud industriel

    Pour comprendre le rôle actuel de l’usine de Melfi – aujourd’hui vitrine de la nouvelle Jeep Compass électrique – il faut remonter au début des années 1990. Le site, un complexe d’acier et de verre de près de deux millions de mètres carrés, a été inauguré par Fiat comme un geste fort : faire entrer le sud de l’Italie, traditionnellement moins industrialisé que le Nord, dans la modernité.

    Melfi n’était pas un choix par défaut ; c’était un pari politique et social visant à rééquilibrer la production italienne au-delà de Turin. Les modèles qui y sont nés, de la Fiat Punto à la Lancia Ypsilon, ont marqué l’entrée dans l’automobile pour toute une génération européenne. L’usine a prouvé la rigueur de ses ouvriers et la précision de ses ingénieurs, incarnant une Italie industrielle capable de grande échelle et de qualité. Melfi est rapidement passée du statut d’usine satellite à celui de monument de la résilience industrielle.

    L’allégeance à l’aigle américain : quand Jeep dépasse Détroit

    Le véritable tournant, et ce qui nous intéresse au premier chef, arrive en 2014. Après l’arrêt de la production des modèles historiques, Melfi faisait face au spectre du déclin. Mais FCA, sous l’impulsion de Sergio Marchionne, a pris une décision radicale : faire de ce site italien le berceau d’une icône américaine, la Jeep Renegade.

    Ce fut la première Jeep de l’histoire à être produite en dehors du continent nord-américain. Ce choix stratégique a permis à Jeep de se positionner au cœur du marché européen, avec des coûts de logistique réduits et une réactivité accrue. En associant l’ADN américain de liberté et de capacité tout-terrain à la précision italienne de l’assemblage et du design, Melfi a façonné une identité à part. En une décennie, plus de 2,3 millions de Jeep – incluant les premières versions de la Compass et ses déclinaisons hybrides rechargeables 4xe – sont sorties des chaînes du Sud, prouvant que le mythe Jeep pouvait s’épanouir sous un ciel italien.

    Du V12 aux Watts : Melfi, laboratoire de la « liberté de production »

    Aujourd’hui, l’usine s’adapte à une nouvelle révolution : l’électrification. La nouvelle génération de la Jeep Compass, conçue sur la plateforme STLA Medium, n’est plus seulement un véhicule produit en Italie ; elle est la vitrine d’un savoir-faire industriel unique en pleine transition énergétique.

    Le concept clé réside dans la « liberté de production » : la plateforme modulaire permet d’assembler, sur la même ligne, des versions hybrides, hybrides rechargeables et 100 % électriques. Cette flexibilité est vitale dans un marché européen imprévisible, permettant à Stellantis d’adapter son mix industriel presque instantanément, sans rupture.

    Melfi est donc devenue un véritable laboratoire technologique pour le groupe, testant des procédés de pointe (contrôle qualité par caméras haute résolution, peinture « 4-Wet » à faible impact environnemental) et visant l’autonomie énergétique.

    L’héritage ouvrier, moteur de la culture voiture

    Au-delà des chiffres techniques (jusqu’à 375 chevaux et 650 km d’autonomie pour la nouvelle Compass), ce qui fascine, c’est la dimension humaine et culturelle. L’usine emploie plus de 4,600 personnes, dont l’ancienneté moyenne dépasse vingt ans. Ces ouvriers et ingénieurs sont les héritiers de l’histoire industrielle initiée par la Punto, et sont aujourd’hui les artisans de l’électrique.

    La fierté qui émane de ces équipes n’est pas seulement celle du travail bien fait, elle est celle d’une région qui, souvent sous-estimée, a prouvé sa capacité à s’adapter sans renier son héritage. En voyant la nouvelle Compass sortir de Melfi, le passionné ne regarde pas seulement un SUV global. Il voit le résultat d’une histoire de trente ans, où le pragmatisme du Sud italien s’est marié à l’icône de l’aventure américaine, assurant ainsi la pérennité du culte Jeep pour la génération électrique.

  • Le ballet logistique : quand la « Beast » et son cortège défient les lois du Grand Tourisme

    Le ballet logistique : quand la « Beast » et son cortège défient les lois du Grand Tourisme

    La voiture du président des États-Unis (POTUS) est l’ultime expression du secret, de la puissance, et de la démesure. Mais l’histoire la plus fascinante n’est pas celle de son blindage ou de son V8 : c’est celle de son voyage. Quand la « Beast » quitte la Maison-Blanche, l’interstate ne suffit plus.

    La Cadillac présidentielle, affectueusement surnommée la « Beast » (la Bête) par la presse et le grand public, est bien plus qu’une limousine. C’est une forteresse roulante, un symbole national, et une œuvre d’ingénierie qui éclipse presque tous les autres véhicules blindés au monde. Pourtant, au-delà de ses spécifications classifiées, la question de sa mobilité intercontinentale reste l’une des plus spectaculaires. Que le commandant en chef se déplace pour une brève allocution domestique ou une visite diplomatique à l’étranger, le Service Secret n’utilise pas le réseau routier pour le transport longue distance. La réponse est simple, mais spectaculaire : la « Beast » vole.

    Pour le Service Secret américain, déplacer le cortège présidentiel relève d’une logistique militaire de très haute précision, menée en collaboration avec l’Armée de l’Air. On ne parle pas de faire la queue aux douanes ou de prendre l’autoroute. On parle de mobiliser les géants du transport lourd : les Boeing C-17 Globemaster III. Ces transporteurs lourds sont l’épine dorsale du déménagement présidentiel. Un seul C-17 est typiquement désigné pour la tâche la plus noble : il est responsable d’acheminer deux limousines présidentielles (les fameuses « Beasts », car il y a toujours un double en service) ainsi qu’une paire de Chevrolet Suburbans blindés qui composent l’essentiel du cortège. D’autres C-17 suivent pour le reste des véhicules de support et de communication, selon les besoins de la mission.

    Imaginez la scène, digne d’un film d’action, mais réelle : une fois à bord du C-17, les deux « Beasts » sont méticuleusement positionnées nez à queue au centre de la soute. Les Suburbans blindés, souvent presque aussi lourds que les limousines, sont quant à eux arrimés sur la rampe de chargement. Cette rampe, une fois repliée et verrouillée, forme une descente notable vers la cabine. L’arrimage des véhicules est une opération vitale, car le poids total, bien que classifié, exige une parfaite répartition. Environ quarante agents du Service Secret accompagnent leur cargaison, leurs bagages simplement sanglés au sol. Le vol n’est pas de tout repos : les agents s’installent sur des sièges d’appoint le long de la carlingue, même s’il est fréquent qu’ils optent pour s’allonger, par nécessité, directement sur le plancher de la soute pour le repos.

    Le gouvernement refuse obstinément de divulguer le poids exact des limousines et des Suburbans blindés – secret défense oblige. Cependant, les professionnels savent que la charge totale est très inférieure aux environ 77,5 tonnes de capacité du C-17. C’est là que la culture de la sur-ingénierie et de la discrétion prend tout son sens. Si l’Armée de l’Air mobilise un transporteur intercontinental pour seulement deux voitures, c’est que la « Beast » ne représente pas seulement une charge physique, mais une priorité logistique absolue. Ce n’est pas le tonnage qui dicte le choix, mais la nécessité de la présence immédiate, discrète et inébranlable du symbole automobile le plus sécurisé au monde, à tout moment et en tout point du globe.

    La prochaine fois que vous verrez la « Beast » à l’étranger, rappelez-vous que ce n’est pas une simple berline de luxe qui s’est garée là : c’est un véritable ballet aérien qui a été orchestré pour que ce mythe automobile soit toujours prêt à rouler.

  • L’archive révélée : le plan 1:1 de la Lamborghini 350 GT, autopsie d’une naissance culte

    L’archive révélée : le plan 1:1 de la Lamborghini 350 GT, autopsie d’une naissance culte

    Parfois, le plus grand trésor d’une marque n’est pas le métal poli, mais le papier jauni.

    À l’heure où les designers automobiles travaillent sur des moniteurs 3D et où le « pixel » a remplacé le « crayon », l’annonce faite par Lamborghini Polo Storico lors de l’événement Auto e Moto d’Epoca prend une saveur toute particulière pour les amoureux de la culture automobile. Le département Héritage de Sant’Agata Bolognese célèbre son dixième anniversaire en exposant la plus ancienne 350 GT survivante (châssis n°2), mais surtout, en levant le voile sur une relique fondatrice : un dessin technique à l’échelle 1:1 de l’aménagement intérieur de la 350 GT, daté de 1963.

    Ce n’est pas un simple croquis. C’est l’acte de naissance, tracé à la main, de l’ADN Gran Turismo de Lamborghini.

    Le trait de crayon contre le pixel

    En 1963, l’ordinateur n’est pas l’outil du designer. Le processus de création d’une automobile de luxe passait par des planches à dessin gigantesques, souvent à l’échelle réelle (1:1), pour valider les volumes, l’ergonomie et la faisabilité technique.

    Ce document, décrit par Lamborghini comme le plus ancien de ses archives historiques, n’est pas là pour faire joli. Il est le témoin d’une collaboration intense entre un jeune constructeur ambitieux, Ferruccio Lamborghini, et le maître-carrossier Carrozzeria Touring, concepteur de la fameuse carrosserie Superleggera de la 350 GT.

    Le plan 1:1 de l’habitacle de la 350 GT est une véritable autopsie du luxe italien des années 60 :

    1. L’ergonomie de la défiance : Il révèle comment les ingénieurs de l’époque ont articulé l’espace intérieur autour du puissant V12 de Giotto Bizzarrini, positionné longitudinalement à l’avant. C’est sur ce papier que les cotes exactes du volant, du pédalier et de la console centrale ont été fixées, définissant le confort et la position de conduite exigés par Ferruccio Lamborghini, pour faire mieux et plus civilisé que la concurrence de Maranello.
    2. L’âme du détail : Il témoigne de l’importance du tableau de bord. La position des compteurs Jaeger, les interrupteurs à bascule, le levier de vitesse… Chaque élément était méticuleusement positionné. Un dessin 1:1 permettait aux artisans de visualiser précisément la disposition des luxueuses selleries en cuir et des boiseries, avant même que le premier panneau d’aluminium ne soit frappé.
    3. Le symbole de la rigueur: Ce document est la preuve palpable de la rigueur industrielle qui a présidé aux débuts de Lamborghini. Il fallait convertir la vision sauvage du prototype 350 GTV en un produit fini, industrialisable par Touring. Le plan est la passerelle entre l’idée artistique et la réalité mécanique.

    Polo Storico : Le gardien du geste

    L’exposition de ce dessin souligne le rôle essentiel du Polo Storico. Leur mission va au-delà de la restauration des automobiles (comme le montre le travail de certification de la 350 GT n°2). Elle englobe la sauvegarde du patrimoine immatériel et technique de la marque.

    En préservant et en étudiant de tels documents, le Polo Storico ne fait pas que raconter l’histoire. Il offre aux collectionneurs et aux historiens un accès privilégié au processus créatif. Dans un monde automobile dématérialisé, ce plan papier, avec ses annotations et ses cotes, est un véritable artefact de la culture voiture, le souvenir d’un temps où l’échelle 1:1 était la seule réalité virtuelle possible.

    C’est là que réside le culte : dans la capacité à remonter le temps, non pas seulement pour voir le résultat final, mais pour observer la main et l’intention qui ont donné naissance à la légende Lamborghini.

    Le dessin 1:1 de la 350 GT n’est pas un simple document, c’est le plan de la grandeur à venir.

  • L’homme qui tondait l’élégance : le secret de l’artisanat de Masashi Nakayama chez Mazda

    L’homme qui tondait l’élégance : le secret de l’artisanat de Masashi Nakayama chez Mazda

    Dans un monde où l’intelligence artificielle et les raccourcis numériques dominent le design, Masashi Nakayama, directeur général de la division Design de Mazda, défend un artisanat exigeant. Pour lui, la création d’une automobile véritablement spéciale commence en roulant les manches et en plongeant les mains dans la glaise. Beaucoup de glaise.

    Cette approche tactile, presque méditative, est au cœur de l’esthétique épurée et élégante qui caractérise les Mazda contemporaines.

    L’apologie de la glaise et du temps long

    Le secret de Mazda réside dans son attachement au modèle physique. Nakayama le confirme sans détour : « Nous produisons beaucoup plus de modèles en argile que les autres constructeurs automobiles ». Il précise même que Mazda consomme la plus grande quantité d’argile au monde, utilisant une argile personnalisée et unique.

    Ce n’est pas une simple lubie. Ce choix, qui valorise le temps long, est le chemin vers des voitures de série d’une élégance exceptionnelle. L’approche est si valorisée que les concurrents cherchent régulièrement à débaucher les modeleurs de Mazda, jugés parmi les meilleurs du secteur.

    • L’Iconic SP : Le concept-car très acclamé Iconic SP – qui pourrait influencer toute une génération de modèles de production – est né de cinq modèles en argile au quart, suivis de trois modèles grandeur nature qui ont évolué sur une période considérable.

    Vue de près, la forme basse et agile de l’Iconic SP est remarquable par sa douceur. Il n’y a aucune arête vive ni coupure discordante ; le design est une leçon de retenue et de bon goût, de ses phares escamotables ultra-minces à la colonne vertébrale centrale du capot qui définit sa symétrie.

    Du MX-5 au Zen du tondeur

    Masashi Nakayama, qui a pris les rênes du design en 2021 après une carrière chez Mazda débutée en 1989 (lancement du premier MX-5), est un homme de l’ombre. Il symbolise l’esprit de curiosité et d’engagement de la marque.

    Il a été impliqué dans la renaissance du XXIe siècle, signant des intérieurs emblématiques (Mazda 3 Mk1, RX-8) et, de manière atypique, en étant à la fois chef designer et chef de programme pour l’actuelle MX-5 de quatrième génération. Pour lui, la principale qualification pour ce poste était de « montrer de l’amour au MX-5 ».

    Son approche s’ancre dans un héritage artisanal fort :

    • Héritage Artisanal : Son grand-père était un charpentier de temple capable de façonner des structures complexes sans utiliser de clous.
    • Philosophie de Hiroshima : Ayant grandi dans une ville qui a « tout perdu » puis s’est reconstruite à partir de zéro, il a développé un état d’esprit unique qui mélange « la philosophie dynamique de la recherche d’une haute efficacité avec la philosophie statique de l’exercice de la prudence et de l’attention ». Pour lui, la vitesse d’une voiture de sport n’est pas tout.

    Cet état d’esprit se manifeste dans son plus grand plaisir personnel : tondre la pelouse avec une tondeuse manuelle. Pour lui, entretenir son vaste gazon (120 m²) est un « art qui implique de travailler avec la nature », une métaphore parfaite de son approche du design automobile.

    La quête de l’expérience utilisateur unique

    Nakayama ne nie pas la pression de la rapidité, surtout face aux start-ups chinoises. Mais il insiste : « Je pense que notre processus a en fait une valeur plus forte, à cause du temps pris ».

    Sa philosophie s’étend jusqu’à l’expérience utilisateur. S’il n’est pas opposé au design moderne, il refuse que Mazda se contente des solutions tierces par défaut (comme Apple CarPlay ou Android Auto). Il souhaite passionnément que la marque développe une expérience utilisateur unique, sans faire appel à des entreprises externes pour la créer.

    L’Iconic SP pourrait concrétiser cette vision. Bien qu’il se refuse à donner des détails sur la production, le directeur technique de Mazda, Ryuichi Umeshita, a révélé qu’une version de production s’orienterait vers un plus grand VE doté d’un prolongateur d’autonomie à moteur rotatif, un digne « successeur de la RX-7 ».

    Avec l’engagement de Nakayama pour le geste juste, il y a de l’espoir que ce futur modèle conserve le corps aux surfaces lisses, les phares escamotables et les portes à ouverture vers le ciel — la magie subtile que seule l’approche artisanale de Mazda peut offrir.

  • Toyota crée Century : une marque encore plus exclusive que Lexus

    Toyota crée Century : une marque encore plus exclusive que Lexus

    Alors que la plupart des constructeurs cherchent à simplifier leurs gammes ou à fusionner leurs multiples labels, Toyota choisit une voie inverse. Le géant japonais s’apprête à lancer une nouvelle marque de prestige baptisée Century, positionnée au-dessus de Lexus. Oui, au-dessus. Un mouvement audacieux qui propulse Toyota dans un univers habituellement réservé à Rolls-Royce ou Bentley.

    Un nom chargé d’histoire

    Le nom Century n’est pas inconnu : il s’agit de la limousine officielle du gouvernement japonais depuis 1967, un modèle mythique souvent associé à l’empereur, au Premier ministre et… à la Yakuza. Véritable symbole du pouvoir nippon, la Century a toujours incarné la discrétion et le raffinement à la japonaise.

    Sa première génération célébrait le centenaire de la naissance de Sakichi Toyoda, fondateur du groupe. La deuxième génération, lancée en 1997, reste célèbre pour avoir inauguré le seul moteur V12 jamais produit par un constructeur japonais : un 5,0 litres atmosphérique de 48 soupapes, conçu exclusivement pour ce modèle. Un moteur unique, aussi feutré que noble, resté au catalogue pendant plus de vingt ans.

    Aujourd’hui, Toyota veut capitaliser sur ce prestige pour en faire un véritable label automobile, à part entière.

    Century, la « Rolls japonaise » devient marque

    « Jusqu’à présent, la place de la Century dans notre gamme n’était pas clairement définie », reconnaît Akio Toyoda, président du groupe. « Lexus a toujours joué le rôle du fils aîné, responsable et ambitieux, tandis que Toyota était le cadet, plus populaire. Mais je me suis demandé : pourquoi ne pas aller au-delà, créer quelque chose au-dessus de Lexus ? »

    L’idée a séduit les stratèges de la marque. Car si Lexus a su s’imposer comme alternative crédible aux marques premium européennes, Toyota estime qu’il reste une marge au sommet, celle du luxe d’apparat, du véhicule de représentation, presque d’exception. C’est là que Century interviendra : non pas comme une gamme luxueuse de plus, mais comme une marque à part entière, synonyme d’exclusivité absolue.

    Lexus libérée, Century magnifiée

    Simon Humphreys, Chief Branding Officer de Toyota, précise la stratégie :

    « En un sens, cela donne plus de liberté à Lexus, qui peut poursuivre sa quête d’innovation et d’expérimentation. La marque Century, elle, vise le sommet, l’ultra-luxe, l’unique. »

    En clair : Lexus reste le laboratoire du design et de la technologie, tandis que Century devient le fleuron du savoir-faire artisanal japonais. On peut s’attendre à des voitures fabriquées en très petites séries, avec un niveau de finition rivalisant avec Bentley, voire Rolls-Royce.

    Pas de modèle révélé (encore), mais des ambitions affichées

    Toyota n’a pas encore dévoilé de modèle Century 100 % inédit, mais tout indique que la marque démarrera autour d’une grande berline chauffée à blanc de prestige, destinée à concurrencer directement les références britanniques et allemandes. La future limousine conserverait l’esprit sobre et solennel de la Century historique, avec une motorisation hybride ou 100 % électrique, et une production strictement limitée au Japon.

    L’introduction d’un SUV Century en 2023 — sur base de Lexus TX — semble avoir servi de ballon d’essai. Le lancement de la marque confirme que Toyota assume pleinement son ambition de s’installer dans la sphère de l’ultra-luxe, un terrain qu’aucun constructeur japonais n’avait véritablement osé investir jusqu’ici.

    Toyota, empire du rationnel et du pragmatisme, s’aventure ici sur un terrain presque philosophique : le luxe émotionnel et culturel, incarné par le raffinement, la patience et la perfection de l’artisanat japonais. Dans un monde automobile dominé par la performance et la technologie, Century incarne une autre idée du prestige — celle du wa, l’harmonie et la discrétion.

    Et si Lexus fut, en son temps, la réponse japonaise à Mercedes, Century pourrait bien être la réponse nippone à Rolls-Royce.

  • Heico Sportiv : ces Volvo qui n’en sont pas vraiment

    Heico Sportiv : ces Volvo qui n’en sont pas vraiment

    Et si ces Volvo qui vous doublent sur l’autoroute n’étaient pas tout à fait d’origine ?

    Vous avez sans doute déjà croisé une Volvo au look plus agressif que d’habitude, avec un petit badge Heico à l’arrière. Et vous vous êtes peut-être demandé : « Mais c’est quoi, cette marque ? Une nouvelle division sportive ? Une filiale cachée de Volvo ? »
    Rassurez-vous, vous n’êtes pas le seul à vous poser la question. Et non, Heico n’est pas un constructeur. C’est un préparateur allemand — mais pas n’importe lequel.

    Une histoire née dans un garage… devenu référence

    Tout commence en 1983, quand Holger Hedtke rachète une concession Volvo en Allemagne. Comme beaucoup de concessionnaires passionnés, il ne se contente pas de vendre et entretenir les voitures : il commence à les modifier, les préparer, les faire courir.

    L’équipe se distingue rapidement en compétition, au point de collaborer officiellement avec Volvo Allemagne dans plusieurs championnats de tourisme. L’aventure durera jusqu’en 2001, année où Ford — propriétaire de Volvo à l’époque — décide de se retirer du sport automobile.

    Mais pour Heico, ce n’est pas la fin. C’est même le début de ce qu’il est devenu aujourd’hui : le préparateur de référence pour les amateurs de Volvo sportives.

    Heico Sportiv, le préparateur qui sublime les Volvo

    Depuis plus de 20 ans, Heico Sportiv conçoit, fabrique et vend des pièces pour rendre les Volvo plus performantes et plus expressives — sans jamais trahir leur philosophie.
    Leur gamme couvre à peu près tout : reprogrammations moteur, suspensions sport, systèmes de freinage renforcés, jantes spécifiques, kits aérodynamiques subtils et même éléments intérieurs.

    Le tout avec une rigueur toute allemande : certification TÜV et label VDAT, gages de qualité et de conformité. Autrement dit, monter un kit Heico, c’est comme si Volvo l’avait fait elle-même.

    Pourquoi Heico séduit autant aujourd’hui

    Il y a deux raisons à ce regain d’intérêt. D’abord, Volvo s’est assagie. Exit les 850 T-5, V70 R ou S60 Polestar. Aujourd’hui, la seule vraie sportive de la gamme, c’est le XC60 Polestar Engineered.

    Résultat : ceux qui veulent retrouver un peu de l’esprit des anciennes Volvo survitaminées se tournent naturellement vers Heico.

    Et puis il y a la question de la vitesse de pointe. Depuis 2020, toutes les Volvo sont électroniquement limitées à 180 km/h. Une décision cohérente avec la politique de sécurité du constructeur… mais frustrante pour certains conducteurs allemands.

    Heico propose donc une mise à jour logicielle permettant de relever cette limite à 220 km/h. Ce n’est pas anodin : 40 km/h de plus sur une Autobahn dégagée, ça change tout.

    Combien coûte une Volvo by Heico ?

    Tout dépend de votre modèle et de votre ambition. Heico ne transforme pas complètement les voitures comme Alpina le fait pour BMW. On est plus proche de Brabus ou ABT, avec des préparations modulables.

    Pour une XC90, on peut facilement dépenser 10 000 € d’améliorations, entre les jantes, la cartographie moteur et les détails esthétiques.

    Mais Heico pense aussi aux budgets plus raisonnables : un badge coûte à peine une centaine d’euros, et l’upgrade de vitesse de pointe autour de 2 000 €.

    Peut-on transformer sa propre Volvo en Heico ?

    Bonne nouvelle : oui. Heico propose des pièces aussi bien pour les modèles récents que pour des Volvo âgées de 10 à 15 ans.
    Et inutile de passer par une nouvelle homologation : même modifiée, votre voiture reste une Volvo sur la carte grise.
    Dans l’esprit, Heico pour Volvo, c’est ce que Brabus est pour Mercedes, AC Schnitzer pour BMW ou ABT pour Audi : la touche de caractère que la marque ne propose plus elle-même.

    Heico, c’est un peu la face cachée de Volvo. Un préparateur passionné, fidèle à la philosophie scandinave mais prêt à lui injecter une dose d’adrénaline bien allemande.
    Une manière élégante de concilier rigueur nordique et sportivité teutonne, pour ceux qui trouvent les Volvo modernes un peu trop sages.

  • La légende continue : Timo Bernhard ranime l’héritage de Porsche à la Carrera Panamericana 2025

    La légende continue : Timo Bernhard ranime l’héritage de Porsche à la Carrera Panamericana 2025

    La Carrera Panamericana, le rallye historique mythique du Mexique, a célébré cette année son 75e anniversaire avec un invité d’honneur de taille : Timo Bernhard. L’ambassadeur de la marque et légende moderne de l’endurance, vainqueur au Mans et au Nürburgring, a pris le volant d’une Porsche 911 GT3 aux côtés du copilote mexicain Patrice Spitalier, renforçant le lien profond et historique entre Porsche et cette course légendaire.

    La participation de Bernhard est un puissant rappel de l’héritage laissé par les pionniers de Porsche. Dès les années 1950, des figures comme Hans Herrmann, qui mena la première équipe officielle Porsche avec la 550 Spyder en 1954, ou Herbert Linge, dont le travail mécanique exceptionnel fut salué par le gouvernement mexicain, ont établi la réputation internationale de la marque sur les routes mexicaines.

    « Je sais par l’histoire de Porsche que ‘La Carrera’ était une course majeure mettant en vedette des pilotes Porsche exceptionnels, » confie Timo Bernhard. « Le lien historique entre Porsche et La Carrera Panamericana se perpétue non seulement dans la compétition, mais aussi dans les noms de modèles emblématiques comme la 911 Carrera et la Panamera

    L’objectif : célébrer l’héritage, plus que la compétition

    Surnommée « La Pana », cette épreuve était, dans sa version originale (1950-1954), l’une des compétitions routières les plus exigeantes au monde, où la précision et la durabilité des voitures Porsche ont jeté les bases de leur réputation internationale.

    Si la course a été relancée en 1988 en tant que rallye historique, la présence de Timo Bernhard en 2025 visait avant tout à rendre hommage à cet héritage.

    « J’adore personnellement le rallye et j’ai remporté plusieurs victoires au classement général en Allemagne. Cette fois, cependant, je n’étais pas concentré sur la compétition ou les résultats, mais plutôt sur la mise en valeur de l’héritage fascinant de Porsche pour les spectateurs, » explique Bernhard.

    Timo Bernhard : un palmarès légendaire

    Au cours de plus de deux décennies en tant que pilote d’usine officiel Porsche, Timo Bernhard s’est imposé comme l’un des coureurs les plus complets de sa génération.

    • Double Champion FIA WEC (2015 et 2017).
    • Victoire aux 24 Heures du Mans en 2017 (avec la Porsche 919 Hybrid).
    • Cinq victoires aux 24 Heures du Nürburgring.

    Il fait partie du cercle très fermé des pilotes ayant réalisé la « triple couronne » de l’endurance (victoires à Le Mans, Daytona et Sebring). Fidèle à la marque depuis sa sélection en tant que Junior en 1999, son lien avec Porsche est indéfectible.

    Succès récents en terre mexicaine

    La relation de Bernhard avec le Mexique n’était pas nouvelle. Il a déjà triomphé à deux reprises aux 6 Heures de Mexico (manche du WEC) en 2016 et 2017 au volant de la Porsche 919 Hybrid, aux côtés de coéquipiers tels que Mark Webber et Brendon Hartley.

    « J’ai de très bons souvenirs du Mexique… et un taux de victoire de 100 % là-bas ! » se souvient Bernhard. « J’ai découvert le Mexique comme un pays avec une incroyable passion pour le sport automobile. »

    Le rallye de 2025 a ainsi permis à la légende de l’endurance de renouveler ce lien spécial avec les fans locaux, tout en inscrivant un nouveau chapitre dans la longue et fructueuse histoire partagée entre Porsche et La Carrera Panamericana.

  • Quand le passé inspire l’avenir électrique : Škoda ressuscite la 110 R

    Quand le passé inspire l’avenir électrique : Škoda ressuscite la 110 R

    Plus d’un demi-siècle après sa naissance, la mythique Škoda 110 R retrouve la lumière – mais cette fois sous le signe du kilowatt et de la fibre de carbone. À l’heure où l’électrification rebat les cartes du design automobile, le constructeur tchèque dévoile une réinterprétation audacieuse de son célèbre coupé, véritable icône des années 1970. Une création purement stylistique, signée Richard Švec, qui illustre la manière dont Škoda articule désormais son patrimoine et sa vision du futur.

    Le souffle du passé, la rigueur du présent

    Depuis plusieurs années, le département design de Škoda s’amuse à revisiter ses modèles les plus marquants – un exercice d’équilibre entre nostalgie et modernité, mené sous le label « Modern Solid ». Après la Felicia Fun et la Favorit, c’est donc la 110 R qui passe à la moulinette du XXIe siècle. Le résultat : un coupé électrique au regard perçant, aux volumes tendus, qui assume ses origines tout en s’affranchissant de tout effet rétro.

    Pour Richard Švec, designer au sein de l’équipe de modélisation numérique de Škoda Auto, l’enjeu était clair : « Je ne voulais pas recréer le passé, mais traduire son esprit dans un langage contemporain. » Cette approche, typique du design industriel moderne, consiste moins à copier qu’à faire résonner : retrouver la pureté et la justesse d’une silhouette d’époque, mais en exploitant les nouvelles contraintes techniques et esthétiques liées à l’électrification.

    Une 110 R pensée dès le départ comme électrique

    Le concept 110 R 2025 n’est pas une simple étude de style plaquée sur une plateforme thermique. Dès le premier trait de crayon, le projet a été pensé pour accueillir une motorisation électrique et une architecture à propulsion – un clin d’œil fidèle à la disposition mécanique du modèle original. Cette fidélité technique s’accompagne d’un soin particulier apporté à la gestion des volumes : les prises d’air latérales, autrefois destinées au refroidissement du moteur arrière, sont ici conservées mais redéfinies pour ventiler le pack de batteries.

    L’absence de moteur thermique a permis d’épurer les surfaces et d’affirmer les lignes. Le capot nervuré, les ailes légèrement galbées et la poupe ramassée évoquent la sportivité d’une époque où les proportions dictaient la performance. La filiation avec la 130 RS – version compétition de la 110 R et héroïne des rallyes – se lit dans les passages de roues évasés, le renfort visible de l’arceau et les jantes à fixation centrale.

    L’aérodynamique comme signature

    En bon concept du XXIe siècle, la 110 R rebootée met la technologie au service du style. Les rétroviseurs traditionnels disparaissent au profit de caméras à faible traînée, tandis que les projecteurs, dissimulés sous des volets coulissants, ne s’exposent qu’en fonctionnement. Une solution inédite qui renforce le caractère monolithique du museau tout en optimisant l’aérodynamique.

    L’identité lumineuse adopte le nouveau langage « Tech-loop » inauguré par le concept Vision O : une signature graphique circulaire qui relie les optiques avant et arrière, enserrant un bandeau noir intégrant capteurs et badge Škoda rétroéclairé. À l’arrière, le logo illuminé flotte comme une sculpture, rappelé jusque dans les moyeux de roues et gravé dans les vitres latérales. Une mise en scène presque artistique de la marque.

    Un exercice de style à haute valeur symbolique

    Aucune production n’est envisagée – et c’est peut-être mieux ainsi. Ce genre d’étude a pour vocation de nourrir la réflexion interne, d’affiner les codes et de maintenir vivant le lien entre le passé et le futur. Chez Škoda, le design s’enrichit en permanence de références à une histoire que peu de constructeurs d’Europe centrale peuvent revendiquer : celle d’une marque populaire devenue compétitive sur la scène internationale.

    La 110 R originale, produite à Kvasiny entre 1970 et 1980, avait déjà cette double nature. Élégante et accessible, elle abritait un petit quatre-cylindres de 1 107 cm³ développant 62 ch pour un poids plume de 880 kg. Capable d’atteindre 145 km/h, elle incarnait à la fois la voiture de sport du peuple et la base technique idéale pour le développement de prototypes de compétition. De la 200 RS à la mythique 130 RS, c’est tout un pan de la légende Škoda qui en découla.

    Le patrimoine, matière première du futur

    En revisitant cette lignée, Škoda confirme que la mémoire n’est pas une contrainte mais une ressource. Dans une industrie parfois obsédée par la rupture, la marque tchèque préfère miser sur la continuité et la réinvention. La 110 R 2025 n’est pas une réplique, c’est une conversation entre deux époques : celle du moteur arrière et celle du moteur zéro émission.

    Et si elle ne roulera peut-être jamais, elle dit beaucoup de ce que sera la Škoda de demain : une marque capable d’unir la rigueur de la conception allemande, la créativité d’Europe de l’Est et une authenticité qui ne cherche pas à se maquiller en luxe. En somme, une manière très tchèque d’aborder le futur – avec humilité, mais avec panache.

  • Le prix de l’émotion : quand l’Europe veut un retour aux voitures abordables

    Le prix de l’émotion : quand l’Europe veut un retour aux voitures abordables

    Le coût d’une automobile neuve en Europe atteint des sommets. La faute n’est pas uniquement aux taxes, mais aux exigences techniques de plus en plus drastiques imposées aux véhicules. Face à cette inflation, une idée audacieuse émerge au niveau de l’Union Européenne : la création d’une nouvelle catégorie de véhicules plus abordables.

    L’objectif : mettre sur le marché de nouvelles voitures neuves dont le prix tournerait autour de 15 000 euros. C’est un pas vers l’accessibilité, même si l’inflation fait qu’un tel prix reste supérieur à l’équivalent d’il y a dix ans (environ 13 000 euros).

    L’Inspiration Japonaise : Le Modèle « Kei-Car »

    L’initiative, baptisée Small Affordable Cars, est soutenue par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et propulsée par des constructeurs comme Stellantis.

    La source d’inspiration est à chercher au Japon, avec ses célèbres Kei-cars. Ces « voitures légères » jouissent d’avantages fiscaux et d’assurance importants au Japon grâce à des spécifications rigoureuses :

    • Dimensions : longueur maximale de 3,4 mètres.
    • Moteur : cylindrée limitée à 660 cc.
    • Puissance : maximum de 64 ch.

    Le compromis crucial : sécurité contre coût

    Pour atteindre le prix de 15 000 euros, le compromis se fera inévitablement sur les techniques et la législation.

    Depuis l’été dernier, toutes les voitures neuves doivent respecter les exigences du règlement GSR II, incluant des dispositifs coûteux tels que l’assistance au maintien de voie, la caméra de recul ou les capteurs de stationnement. Une partie de ces exigences pourrait être levée pour cette nouvelle catégorie de petites voitures.

    La contrepartie de cette accessibilité implique des contraintes d’usage :

    • Vitesse : ces voitures légères et moins sophistiquées pourraient être dotées d’un limiteur de vitesse à 110 km/h.
    • Freinage : étant plus petites et moins rapides, la réglementation sur le freinage (taille des freins et poussières de freins) pourrait également être assouplie.

    Design et curiosité : à quoi ressembleront les futures citadines ?

    Le design des futures citadines européennes s’inspirera sans doute de la grande variété des Kei-cars japonaises, qui célèbrent le pragmatisme avec une touche de style.

    Si beaucoup de Kei-cars sont « assez mignonnes et anguleuses », le segment ne manque pas de curiosité et d’émotion :

    • Le Fun : La Honda N One est un exemple courant de Kei-car. La Honda S660, un petit cabriolet sport qui coûtait environ 16 000 euros au Japon, prouve que ces contraintes peuvent donner naissance à des véhicules ludiques.
    • Le Pratique : Il existe des versions plus étroites du Suzuki Jimny respectant ces critères, ou même l’adorable Suzuki Alto Lapin. Il y a même des petits campers pour ceux qui aiment « dormir en position fœtale ».

    L’Europe pourrait ainsi se doter d’une nouvelle génération de véhicules qui conjuguent l’urgence économique à une esthétique urbaine décomplexée, rappelant que la passion automobile peut aussi résider dans la petite taille et l’ingéniosité.

  • L’ère des prompts : quand l’intelligence artificielle s’invite à la planche à dessin

    L’ère des prompts : quand l’intelligence artificielle s’invite à la planche à dessin

    L’automobile est l’une des dernières formes d’art industriel où la main et l’imagination humaines règnent en maîtres. Mais le vent tourne. L’intelligence artificielle, jadis reléguée aux algorithmes, s’installe désormais dans les studios de design. La question n’est plus de savoir si l’IA sera utilisée, mais si elle peut supplanter – ou du moins transformer radicalement – le rôle du designer.

    Le consensus est riche en nuances : si l’IA s’avère un outil d’une vitesse stupéfiante, le « savoir et émotion » qui guide la création d’un chef-d’œuvre reste profondément humain.

    La Vitesse du Flash et le Piège du Générique

    L’attrait initial de l’IA réside dans sa rapidité. Simon Loasby, directeur du Hyundai Design Centre, se souvient avoir créé une image d’un yacht (pour inspirer l’Ioniq 9) en seulement « 40 secondes » le temps de parcourir la distance entre deux feux rouges. L’effet est immédiat et impressionnant.

    Cette vélocité est particulièrement utile dans les phases initiales de la création :

    • Recherche Précoce : Pour la phase de recherche très précoce, les planches d’influence, le choix des matériaux et des couleurs, l’IA est « excellente » selon Robin Page, directeur du design chez Bentley Motors.
    • Détails Précis : Elle est également très efficace pour les composants spécifiques comme les jantes.

    Cependant, cette rapidité cache un défaut fondamental soulevé par des esprits créatifs comme Mitja Borkert, directeur du design chez Lamborghini : les créations de l’IA sont souvent « un peu génériques » et n’offrent « rien de nouveau ».

    L’explication est simple : l’IA fonctionne en puisant dans d’immenses bases de données d’images déjà publiées numériquement, mélangeant des variations existantes. Elle est capable d’imiter, comme un designer humain s’inspirerait d’un modèle iconique des années 70 pour moderniser un phare LED, mais elle manque du bond imaginatif nécessaire pour créer un modèle entièrement inédit.

    « Je reviens à la remarque d’Einstein : ‘La connaissance n’est rien sans l’imagination.’ Et l’IA n’est rien sans l’imagination pour l’utiliser. » — Marek Reichman, Chief Creative Officer chez Aston Martin.

    Le Défi de la Propriété Intellectuelle et du Contrôle

    Pour les constructeurs, l’enjeu dépasse la seule créativité. Il touche à la confidentialité et à l’élégance de la marque.

    • Le Danger de l’Open Source : Les outils d’IA les plus puissants sont des plateformes open source. Utiliser ces plateformes pour des travaux confidentiels est impossible pour des constructeurs qui protègent jalousement leurs futurs designs.
    • L’IA Captive : La solution adoptée par Stellantis et Hyundai est le développement d’une IA interne (captive). Chez Stellantis, par exemple, cette IA est entraînée avec leurs propres esquisses, travaux précédents et designs de marque. Ralph Gilles, l’un des chief design officers de Stellantis, y voit « un designer supplémentaire » capable de générer des idées auxquelles l’équipe n’aurait pas pensé.

    Cette approche permet de guider l’IA selon la signature et le style de la marque, transformant l’outil en un assistant plutôt qu’en un simple générateur d’images.

    La Mutation du Processus Créatif

    L’impact le plus concret de l’IA est peut-être de modifier le rythme et la structure du processus de design.

    Brett Patterson, designer indépendant, note qu’avant l’IA, le processus passait par des cycles d’esquisses brutes. Aujourd’hui, la « hero image » (l’image de présentation finale) peut émerger dès le tout début du processus. Une fois la direction validée, le design complet peut être affiné par les méthodes plus familières d’esquisse et de modélisation.

    L’IA ne remplacera pas le designer, mais elle est en train de redéfinir la manière dont le design est fait. Comme le résume justement Simon Loasby : « L’IA ne va pas nous prendre nos emplois, mais quelqu’un qui utilise l’IA le fera, nous devons donc utiliser ces nouveaux outils ». L’automobile, en tant qu’art, continuera d’être l’affaire d’humains dotés d’une curiosité et d’une imagination cultivées.