Étiquette : André Citroën

  • Il y a cent ans, Citroën illuminait la Tour Eiffel : la plus grande publicité lumineuse du monde

    Il y a cent ans, Citroën illuminait la Tour Eiffel : la plus grande publicité lumineuse du monde

    Paris, été 1925. Alors que la capitale s’apprête à briller de mille feux pour l’Exposition internationale des Arts Décoratifs, un nom éclaire la nuit. CITROËN. En lettres de feu de 20 mètres de haut, le constructeur automobile s’empare littéralement de la Tour Eiffel, transformant le monument le plus emblématique de France en un totem publicitaire sans précédent. Une audace technique, artistique et marketing inégalée, qui fête cette année son centenaire.

    Citroën, la démesure pour ADN

    André Citroën n’est pas un industriel comme les autres. En un peu plus d’une décennie, il révolutionne la production automobile en France, impose son nom comme une marque à part entière – chose rare à l’époque – et forge son image autour de l’innovation, de la conquête et de l’avant-garde. L’Exposition des Arts Décoratifs, qui s’ouvre à Paris en avril 1925, constitue une vitrine rêvée pour affirmer cette modernité.

    Mais Citroën ne veut pas seulement être présent sur les stands du Grand Palais ou de l’Esplanade des Invalides. Il veut frapper les esprits. Marquer l’époque. Et pour cela, il mise sur l’emblème ultime du Paris moderne : la Tour Eiffel.

    Jacopozzi, l’ingénieur de l’illusion

    L’homme à qui Citroën confie ce projet fou est Fernand Jacopozzi, un ingénieur d’origine italienne devenu le maître incontesté de l’éclairage urbain. Révélé durant la Première Guerre mondiale par ses trompe-l’œil lumineux destinés à leurrer l’aviation allemande avec un « faux Paris » entre Villepinte et Sevran, Jacopozzi s’est reconverti après l’Armistice dans la mise en lumière des grands bâtiments de la capitale.

    En 1925, il rêve d’habiller la Tour Eiffel de lumière, mais se heurte aux réticences des pouvoirs publics et à la frilosité des industriels. Louis Renault décline. Les grandes entreprises françaises passent leur tour. Citroën, d’abord hésitant, finit par se laisser convaincre par la portée symbolique d’un tel geste. À condition que le nom de la marque soit visible. Et gigantesque.

    Une prouesse technique

    Les travaux commencent en mai 1925. En six semaines seulement, Jacopozzi et ses équipes transforment la Dame de fer en cathédrale électrique. 250 000 ampoules de six couleurs différentes sont installées sur trois des quatre faces de la Tour, pour éviter toute interférence avec les antennes de transmission. Les lettres CITROËN, conçues dans un style Art déco affirmé, mesurent 20 mètres de haut chacune. Elles scintillent chaque soir, visibles jusqu’à 40 kilomètres à la ronde.

    Pour acheminer l’électricité, un canal souterrain de 400 mètres est creusé afin d’y loger 32 câbles haute tension. Une station électrique est construite pour l’occasion, équipée de 14 transformateurs. L’ensemble du dispositif pèse 25 tonnes. Pour l’installation, on fait appel à des gabiers de la Marine nationale et à des acrobates de cirque, capables d’évoluer sans filet sur la structure métallique.

    L’inauguration a lieu le 4 juillet 1925 à 22 heures. Dès la première illumination, c’est un choc. La foule massée au Trocadéro acclame cette vision futuriste d’un Paris devenu capitale mondiale de la modernité industrielle.

    Un coup de pub planétaire

    Ce qui devait être une opération ponctuelle devient un rendez-vous annuel. Chaque nouvelle édition de l’illumination met en avant un modèle de la gamme Citroën : la B14, la C6, la C4 puis la Traction Avant en 1934. Les animations se complexifient. En 1928, les lettres CITROËN alternent avec des figures graphiques mouvantes. En 1933, une horloge géante de 20 mètres de diamètre est ajoutée, suivie en 1934 d’un thermomètre lumineux capable d’afficher la température ambiante à un degré près.

    Citroën pousse même l’audace jusqu’à s’inscrire dans l’histoire : en 1927, c’est l’éclairage de la Tour Eiffel qui guide Charles Lindbergh au terme de sa traversée de l’Atlantique. L’aviateur américain, accueilli en héros à Paris, salue André Citroën lors d’une réception donnée au quai de Javel. La boucle est bouclée.

    Un investissement colossal… mais rentable

    Officiellement, l’éclairage coûtait à Citroën environ un million de francs par an – une somme astronomique pour l’époque. Mais le retour sur investissement est inestimable. La marque devient un phénomène de société. Elle incarne le progrès, l’audace, la vitesse et la France moderne. Elle est la première à comprendre que l’automobile n’est pas qu’un objet mécanique, mais aussi un symbole culturel et émotionnel.

    La Ville de Paris, d’abord bienveillante, augmente progressivement les taxes liées à cette publicité géante. En 1926, la redevance est multipliée par six. En 1932, le ton se durcit. Mais Citroën tient bon, jusqu’à ce que les difficultés financières, puis le rachat par Michelin en 1935, mettent un terme à l’opération.

    Pendant dix ans, Citroën aura inscrit son nom dans le ciel de Paris, chaque soir, de la tombée de la nuit à minuit. Une décennie durant laquelle la Tour Eiffel fut autant un monument qu’un média.

    L’héritage Jacopozzi

    Après la disparition de cette illumination légendaire, le souvenir reste vivace. En 2009, pour le lancement de la troisième génération de C3, Citroën finance un spectacle son et lumière sur la Tour Eiffel, inspiré de l’œuvre de Jacopozzi. Mais cette fois, le nom de la marque est soigneusement évité : la publicité directe sur le monument est désormais interdite.

    Le PSG, en 2017, a brièvement affiché le visage de Neymar sur un écran géant sous le premier étage. Mais cette tentative de récupération commerciale n’a pas la puissance symbolique de l’œuvre de Citroën.

    Aujourd’hui encore, le record de la plus grande publicité lumineuse jamais réalisée reste attribué à cette épopée des années 1920-30. Et Citroën peut s’enorgueillir d’avoir été non seulement un constructeur automobile, mais un pionnier du marketing visuel et de la communication de marque.

    Une leçon de vision

    Cent ans plus tard, l’histoire de la Tour Eiffel Citroën résonne comme une leçon. Elle rappelle qu’une marque forte ne se contente pas de vendre des produits. Elle construit un imaginaire. Elle ose l’exceptionnel. Et parfois, elle écrit son nom dans le ciel.

  • Paris. Station Javel-André Citroën

    Paris. Station Javel-André Citroën

    Paris, le 8 juin 2018. Station Javel-André Citroën

    Paris, le 8 juin 2018. Tout rentre dans l’ordre sur la ligne 10 du métropolitain. Pour les passionnés d’automobile, Javel, c’est Citroën. Javel, c’est l’usine, le belle, la grande, au coeur de Paris, quand notre capitale était pleine d’industries et d’ouvriers, pleine de bruits et d’odeurs. L’usine qui a vu les Type A, les Traction Avant, les DS et les HY, entre autres.

    Il aura donc fallu plus de 80 ans pour que la station Javel s’appelle Citroën, là où s’est écrite une belle page de l’histoire de la marque.

    Après un premier partenariat dans les années 80, la RATP, qui gère le métro parisien, et Citroën, retrouvent un chemin commun avec cette station Javel, qui se voit accolée en cette année 2018 le nom d’André Citroën, un an avant le centenaire de la marque. « Station Javel-André Citroën » on entend déjà la voix dans les hauts-parleurs du métro, avec le petit lapin Serge qui nous dit qu’on risque de se faire pincer très fort. Un nom historique pour une station ouverte le 30 septembre 1913, qui devient alors le prolongement de la ligne 8.

    Cette fois, Citroën a pris le pouvoir dans cette station aux carrelages blancs. Surface lisse et biseautée d’un idéal touristique, d’une salle de bain de province. Dans cette ambiance de bloc opératoire, rythmée par les tremblements des passages du métro blanc et vert jade, les modèles les plus importants de la marque y sont cités, tout comme ses grandes dates, aux travers de larges fresques colorés. On y retrouve les antiques Méhari, les GS, les Traction Avant, les DS, 2CV et autres HY bien mis en valeur, un peu comme chez Citroën Origins. De belles couleurs, de belles photos studio pour un patrimoine enfin assumé, enfin retrouvé, enfin utilisé.

    Je n’aime pas trop le métro. Mais un de ces quatre, j’irai voir Javel-André Citroën.

    Bonne journée chez vous,
    Jean-Charles

    Au coeur de la station de métro Javel-André Citroën, l’histoire de Citroën est présentée, avec ses modèles phare et ses grandes dates.
    Au coeur de la station de métro Javel-André Citroën, l’histoire de Citroën est présentée, avec ses modèles phare et ses grandes dates.
    Au coeur de la station de métro Javel-André Citroën, l’histoire de Citroën est présentée, avec ses modèles phare et ses grandes dates.
    Au coeur de la station de métro Javel-André Citroën, l’histoire de Citroën est présentée, avec ses modèles phare et ses grandes dates.
    Au coeur de la station de métro Javel-André Citroën, l’histoire de Citroën est présentée, avec ses modèles phare et ses grandes dates.
  • Citroën s’empare de la Tour Eiffel

    Citroën s’empare de la Tour Eiffel

    Des trois grands fondateurs des marques automobiles françaises, deux sont nés dans Paris. Louis Renault et André Citroën sont des enfants de la rive droite. Ils ont grandi en voyant la Tour Eiffel s’élever… Mais un seul a su y écrire son nom.

    Nous sommes à quelques semaines de l’ouverture de l’exposition internationale des Arts Décoratifs de 1925. L’évènement est immense pour Fernand Jacopozzi. Cet Italien naturalisé français est un héros de guerre. En 1918, il remporte un appel d’offres lancé par Clemenceau pour « dessiner » un faux Paris de nuit. L’idée du Tigre est de faire croire aux aviateurs adverses que Paris est autre part. Jacopozzi propose plusieurs dessins. Ce qui devient « le faux objectif de l’Orme de Morlu » débute par une fausse Gare de l’Est située entre Sevran et Villepinte. Les bâtiments en bois sont recouverts de toiles peintes qui imitent le verre des usines. Il enchaine avec le dessin d’une fausse Gare du Nord et détaille un faux Saint-Denis et un faux Aubervilliers destinés à recevoir les bombardements ennemis. Il utilise des lampes de différentes couleurs pour rappeler les Champs-Élysées. Mieux, il met au point un système d’éclairage pour simuler un train en marche. La réalisation est une merveille, mais l’expérience tourne court. L’Allemagne recule et n’a plus les moyens d’attaquer Paris. Armistice.

    Fernand Jacopozzi est un maître de l’illumination. Après la guerre, il multiplie les initiatives pour éclairer Paris. Pour 1925, il rêve de Tour Eiffel. Mais, face au coût d’un tel projet, il doit trouver un partenaire. Jacopozzi approche Louis Renault et d’autres industriels. Tous refusent. André Citroën hésite, mais il finit par accepter le défi.

    Les travaux commencent le 27 mai 1925

    Pour éviter de parasiter les antennes de la Tour, seules trois faces sont illuminées : Trocadero, Grenelle et Bourbonnais. Le côté Champs de Mars reste noir.

    Après six semaines de travaux, la Tour Eiffel s’illumine le 4 juillet 1925 à 22h00 sur sa première face. La foule est déjà immense pour admirer les lettres CITROEN. À la fin du mois, le spectacle est complet avec les trois faces recouvertes de 250 000 lampes électriques de six couleurs différentes. Les lettres CITROEN, façon art déco, mesurent chacune 20 mètres de hauteur !

    Fernand Jacopozzi réalise une prouesse technique. Il fait creuser un caniveau de 400 mètres de long pour acheminer les 32 câbles d’une puissance totale de 1200 kW et 12000 V. Une station électrique est spécialement aménagée avec 14 transformateurs 220/110V. Au total, l’éclairage pèse 25 tonnes. Et pour l’installation, on a fait appel à des acrobates de cirque ou des gabiers de la marine qui n’avaient pas peur du vide.

    Éphémère, le coup de pub revient chaque année. En 1926, Jacopozzi propose une illumination fontaine en amenant 125 000 lampes supplémentaires côté Trocadero. La Ville de Paris prend conscience de l’impact de l’opération et multiplie par six fois la taxe pour autoriser l’éclairage.

    L’année suivante, la foudre s’abat sur la Tour Eiffel. Aucun problème avec la météo, c’est le nouveau projet pharaonique de l’illuminé Jacopozzi. Citroën ne peut plus suivre les délires budgétaires de son partenaire, mais la Ville de Paris accepte de revenir sur ses prétentions tarifaires pour faire perdurer l’expérience. Bonne pioche, cette année-là, Lindbergh se sert de l’éclairage de la Tour Eiffel, visible à 40 km, pour se repérer au terme de sa traversée de l’Atlantique en avion. Après avoir posé son Spirit of Saint-Louis au Bourget, il est invité à fêter son exploit au quai de Javel. Encore un coup de pub !

    Chez Renault, la pilule passe mal. Et André Citroën continue malgré un investissement exorbitant. En 1928, c’est la nouvelle C6 qui est mise en valeur durant le Salon de l’Auto organisé au Grand Palais. L’illumination est constituée de cinq rangées de lampes de 600 bougies. Elle clignote, en alternance avec les dessins des années précédentes. Chaque soir est un spectacle.

    L’année suivante, la Tour Eiffel et Citroën fêtent la C4. Jusqu’en 1935 et le « rachat » de Citroën par Michelin, la tour de 300 mètres fait la publicité du constructeur du quai de Javel. En 1933, le record de la plus grande horloge du monde est battu avec un cadran de 20 mètres de diamètre. Un an plus tard, Jacopozzi y ajoute un thermomètre constitué de mille lampes rouges et blanches pour afficher des températures de -12 à +33°C. Cette même année, Citroën choisit de communiquer sur la nouvelle Traction Avant 7 CV.

    Plusieurs autres grandes marques françaises se sont servies du symbole parisien : Air France, Alain Afflelou, la Samaritaine et quelques autres ont acheté des publicités sur la Tour… Jusqu’à ce que le PSG ne débourse « au moins 50 000 euros » la semaine dernière pour un petit écran situé sous le premier étage destiné à accueillir Neymar Jr.

    L’œuvre de l’artiste Jacopozzi a tellement marqué Paris qu’un spectacle d’une dizaine de minutes a été commandé pour fêter les 90 ans de Citroën et les 120 ans de la Tour Eiffel, pour le lancement de la nouvelle C3, tout en évitant soigneusement d’y réécrire Citroën. Dans ce nouveau siècle, la publicité aurait pu choquer…

  • Podcast : le récit de la Croisière Noire Citroën

    Podcast : le récit de la Croisière Noire Citroën

    Années 20. Imaginez une colonne de huit véhicules autochenilles Kegresse, lancée entre l’Algérie et Madagascar. Cette épopée se nomme la Croisière Noire. Soutenue par la présidence de la république française, elle ouvre la route, crée la route entre les colonies françaises. Georges-Marie Haardt, bras droit d’André Citroën prend la tête de cette croisière historique qui s’étalera du 28 octobre 1924 au 26 juin 1925, sur plus de 28000 kilomètres à travers l’Afrique noire.

    Cette croisière fut le thème de l’émission Au coeur de l’histoire, sur Europe 1, le 2 septembre dernier. L’historien et journaliste Franck Ferrand nous emmène sur les traces de Haardt, Louis Audouin-Dubreuil son adjoint et quatorze hommes. Durant une heure, il nous raconte, avec son invité le journaliste Marc Menant, les petites histoires de la grande histoire. Un récit passionnant. Podcast disponible ci dessous, via iTunes.

     

    La Croisière Noire Citroën : le podcast de Au coeur de l'histoire.

  • 80 ans de Traction Avant

    80 ans de Traction Avant

    Le 18 avril 1934 fut l’une des journées les plus importantes de l’histoire de Citroën. Réputé pour être un entrepreneur très ambitieux, André Citroën est devenu un industriel innovant en présentant la Traction Avant. Mais ce fut aussi le début de la fin de sa propre aventure.

    Pour la première fois, une voiture de grande série n’était pas pourvue d’un châssis classique. Et sa coque autoporteuse recevait une transmission aux roues avant. Déjà connue, cette technique était encore une fantaisie pour les autres constructeurs. Surtout : cette « Type 7 » se parait d’une carrosserie très originale, voire « moderne ».

    Une fois l’effet de la présentation dissipé, la Type 7 étonne. La coque autoporteuse et l’absence d’arbre de transmission révolutionnent la conduite. Le confort et la tenue de route relèguent les voitures du début des années 30 au stade de l’antiquité.

    Et pourtant : si l’idée est géniale, la réalisation est proche de la catastrophe. Le moteur 4 cylindres de 1 303 cm3 est trop peu puissant au goût des premiers clients. Et la fiabilité – surtout de la boîte mécanique – est trop souvent prise en défaut.

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    En quelques mois, la Type 7 évolue en Type 7 B puis en Type 7 S et les Type 11 et Type 22 arrivent le 1er octobre 1934.

    Cette Type 22 est le modèle de luxe dont rêve André Citroën. Proposée en berline, limousine, familiale, faux-cabriolet et roadster, elle reçoit un moteur V8 de 3 822 cm3 sous un capot plus long. L’aménagement intérieur est très flatteur… Mais la 22 CV ne sera jamais fiabilisée. A tel point que cette version haut-de-gamme n’entrera jamais en production. Citroën croule alors sous les dettes. Le projet est abandonné. Et tout s’effondre.

    Ce coup d’arrêt dans l’ascension fulgurante d’André Citroën se transforme en trou noir. L’un des fournisseurs de la marque porte ses créances devant les tribunaux. Il ne faudra que quelques semaines pour faire tomber André Citroën. Le 21 décembre 1934, Citroën est liquidé.

    Principal créancier de l’entreprise, Edouard Michelin se voit obligé de reprendre Citroën. Le nouveau conseil d’administration prend sa première décision : limoger André Citroën. Le créateur ne s’en remettra pas. Attaqué par un ulcère, il meurt le 3 juillet 1935.

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    Mais l’histoire de Citroën continue. Michelin apporte de nouvelles méthodes et Citroën parvient à gommer les défauts de la Traction Avant. Le modèle qui a précipité la fin d’André va sauver Citroën.

    Juste avant la guerre, les ventes commencent à progresser. La Traction Avant devient l’un des symboles de la France du début des années 40. Et lorsque la production reprend le 15 juin 1945, la Traction débute une seconde carrière pleine de succès durant encore douze ans ! Un culte…

  • « Le moteur flottant va-t-il sauver André Citroën de la noyade ? »

    « Le moteur flottant va-t-il sauver André Citroën de la noyade ? »

    André Citroën aimait adapter les solutions imaginés par ses concurrents pour faire progresser rapidement sa marque. Lorsqu’il découvre le concept du moteur flottant chez Chrysler, il s’empresse de le faire adopter sur la gamme C4-C6… Pour le plus grand bonheur du Canard Enchaîné !

    Au début des années 30, André Citroën rentre des Etats-Unis avec une nouvelle licence de poche. Chez Chrysler, il avait découvert le principe de moteur flottant. Conquis, il avait acquis les droits de l’utilisation du brevet pour le faire appliquer à ses modèles de haut-de-gamme.

    Le moteur n’est plus fixé au châssis. Flottant, il repose simplement sur deux supports métal/caoutchouc placé à l’avant et à l’arrière du bloc. L’oscillation, si elle est permise, est contenue par un ressort à lames placé sous la boîte de vitesses.

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    L’innovation étonne… Et la presse s’en amuse. Nous sommes en avril 1932, Le Merle Blanc titre « Le ferblantier de Javel surnage en équipant ses moteurs de bouées » et Le Canard Enchaîné ajoute « Le moteur flottant va-t-il sauver André Citroën de la noyade ? ».

    André Citroën apprécie ces échos qui lui donnent une publicité gratuite et relancent les ventes – pour quelques mois – des C4 et C6 avant l’arrivée des Rosalie.

    Mais les titres moqueurs décrivent aussi une lourde réalité. André Citroën organise une véritable fuite en avant. La communication et l’innovation font crouler la marque sous les dettes. En décembre 1934, Citroën est liquidée, reprise par Michelin. André, mis à la porte, n’y survivra pas.

     

  • Citation : Louis Renault

    Citation : Louis Renault

    Citation de Louis Renault, fondateur de Renault, au sujet de la progression de Citroën sur le marché français : « Je suis très heureux d’avoir Monsieur Citroën comme concurrent, car il fait travailler et oblige à la lutte. »

    Cette phrase de Louis Renault date de 1934. Elle était destinée à François Lehideux, le nouveau directeur général de Renault et l’époux de Françoise Renault, la nièce du fondateur de la marque.

    Elle fut la conséquence directe d’une vaste campagne d’investissements lancée par  Citroën au cœur de la crise du début des années 30. André Citroën avait fait reconstruire ses usines du Quai Javel pour les mettre au niveau des installations américaines et il avait orchestré le lancement de la Traction Avant au prix de lourds crédits qui mèneront bientôt le constructeur parisien à la faillite.

    Photo : Robert Doisneau immortalise une rencontre entre Louis Renault et André Citroën lors du Salon de Paris 1934 sous la verrière du Grand Palais.