Catégorie : Histoire & Culture

  • Hoon is not dead : Subaru et Hoonigan relancent Gymkhana avec un BRAT de 670 chevaux

    Hoon is not dead : Subaru et Hoonigan relancent Gymkhana avec un BRAT de 670 chevaux

    Le SEMA Show de Las Vegas vient de lever le voile sur un événement que la communauté hoonigan attendait avec impatience : le retour de la série vidéo culte Gymkhana. Après la disparition tragique de son fondateur, le légendaire Ken Block, la pérennité de la franchise – qui cumule plus d’un demi-milliard de vues – était en suspens. L’annonce est sans équivoque : Hoonigan et Subaru Motorsports USA rechargent la machine à faire fumer le pneu, en confiant à Travis Pastrana une machine résolument nouvelle : le Subaru Brataroo 9500 Turbo.

    L’héritage Block, l’esprit Pastrana

    Depuis 2020, Travis Pastrana a repris le flambeau, mais cette nouvelle production marque un tournant, agissant comme un hommage vibrant et nécessaire à la tradition du Gymkhana : transformer la conduite de précision en spectacle chorégraphique et destructeur. Le choix de la Subaru BRAT (Bi-Drive Recreational All-Terrain Transporter) de 1978, un pick-up utilitaire déjà iconique pour sa rareté, est un clin d’œil parfait à l’histoire décalée et rallye de Subaru.

    Le tournage s’est déroulé en Australie, le pays qui a inventé le terme « hoon » (désignant la pratique du drift et des manœuvres agressives dans la rue). Le décor et le casting promettent de perpétuer les standards de la série : destructions massives de pneus, passages au ras du mur et, bien sûr, les sauts démesurés chers à Pastrana.


    Le Brataroo 9500 Turbo : la démesure technique

    Oubliez la mécanique utilitaire des années 70. Le Brataroo 9500 Turbo est une œuvre d’ingénierie extrême conçue par Vermont SportsCar (VSC).

    Sous la carrosserie en fibre de carbone, dont les lignes ont été réimaginées par l’artiste Khyzyl Saleem (The Kyza), se cache une bête de course :

    • Motorisation : Un moteur Boxer turbocompressé de 2,0 litres poussé à 670 ch et 920 Nm de couple. Le rupteur est fixé à plus de 9 500 tr/min, ce qui en fait la voiture Gymkhana la plus rageuse jamais construite.
    • Transmission : La puissance est gérée par la transmission intégrale classique Subaru, mais via une boîte séquentielle SADEV à six rapports et des différentiels de compétition.
    • Châssis : La structure repose sur un châssis VSC intégrant un arceau de sécurité aux dernières normes WRC.

    L’aérodynamique active : voler avec précision

    L’innovation la plus spectaculaire réside dans l’intégration de l’aérodynamique active, indispensable pour les sauts emblématiques de Pastrana. Le Brataroo est conçu pour voler et atterrir avec contrôle :

    • Aubes de Garde-Boue : Les persiennes des ailes avant peuvent pivoter pour ajuster l’assiette de la voiture en l’air.
    • Ailerons Arrière Multiples : La voiture utilise deux ailerons interchangeables. Un grand aileron pour une portance et une stabilité maximales à haute vitesse, et un plus petit pour les manœuvres de destruction de pneus. Les deux ailerons peuvent s’actionner vers le haut pour contrôler le tangage et la rotation lors des phases aériennes.

    Même l’habitacle rend hommage au BRAT original, intégrant un tableau de bord en fibre de carbone avec des accents en grain de bois composite de lin, et un poste radio CB Uniden d’époque. Comme le dit Pastrana, cette voiture est « la plus folle jamais construite » pour cette série. Le Gymkhana, dans sa forme la plus extrême et la plus sophistiquée, est bel et bien de retour.

  • Century : l’héritage d’Akio Toyoda et le luxe « One of One » érigé en marque

    Century : l’héritage d’Akio Toyoda et le luxe « One of One » érigé en marque

    Le Japan Mobility Show (JMS) 2025 n’aura pas seulement été le théâtre de concept-cars futuristes ; il a officialisé une mutation stratégique majeure au sein du Groupe Toyota. Dans une allocution particulièrement émouvante devant les médias, Akio Toyoda a exposé une vision qui dépasse la simple motorisation : celle d’une « entreprise visant à façonner les cent prochaines années depuis le Japon ».

    La légende fondatrice : l’automobile au service de la nation

    L’histoire de Century, lancée en 1967, n’est pas celle d’une simple limousine. Akio Toyoda la replace dans le contexte d’un Japon en pleine reconstruction post-guerre, se préparant aux Jeux Olympiques de Tokyo. Il cite les mots fondateurs de son grand-père, Kiichiro Toyoda : « Il ne s’agit pas seulement de fabriquer des automobiles. Avec des idées et des compétences japonaises, nous devons créer une industrie automobile pour le Japon. »

    Le développement de la première génération, mené par l’ingénieur en chef Kenya Nakamura et le jeune Shoichiro Toyoda (père d’Akio), était guidé par la volonté de concevoir une voiture que le Japon pouvait présenter fièrement sur la scène mondiale : un véhicule qui devait être « sans égal » (To be like no other). Face au scepticisme d’une industrie sans réelle tradition de luxe, Nakamura aurait répondu : « La tradition viendra naturellement. Créons un nouveau genre de voiture de luxe. » La Century est donc née de la fusion audacieuse entre la technologie de pointe d’après-guerre et l’intégration profonde des savoir-faire artisanaux japonais, comme la gravure sur métal Edo pour l’emblème du phénix ou le brocart Nishijin-ori pour le tissu des sièges.

    De l’héritage familial à la mission personnelle

    Pour Akio Toyoda, la Century représente bien plus qu’une lignée de modèles. Il y voit l’incarnation de la philosophie de Kiichiro : « Contribuer au rétablissement pacifique du Japon et à la culture mondiale ». Le nom Century, qui renvoie à la fois au centenaire de l’ère Meiji et à la naissance du fondateur Sakichi Toyoda, symbolise désormais pour Akio l’ambition de « créer les cent prochaines années ».

    Dans un Japon contemporain qui traverse « les trente années perdues », le Président estime que la Century est plus que jamais nécessaire pour raviver la fierté japonaise. En s’appuyant sur les compétences du monozukuri (l’art de la fabrication), la marque est conçue pour exporter « l’esprit du Japon » dans le monde. La marque Century est désormais élevée au statut de « One of One », une entité distincte qui se veut le porte-étendard du Spirit of Japan.

    Le phénix se déploie : la nouvelle offre

    La stratégie de marque se traduit immédiatement par une diversification de la gamme :

    1. La berline classique : l’interprétation classique de la limousine de prestige.
    2. Le SUV Business-Casual : l’ajout controversé mais stratégique pour le marché actuel, déjà lancé.
    3. Le coupé chauffeur : la nouveauté présentée au JMS, caractérisée par une élégance de carrosserie et des portes coulissantes (à l’avant et à l’arrière côté passager). Ce coupé n’est pas destiné au conducteur, mais reste un véhicule à chauffeur, offrant des places arrière spacieuses et entièrement inclinables, même si, comme l’a souligné Akio Toyoda, il est conçu pour être plaisant à conduire le week-end.

    Le phénix, emblème de la Century qui, selon la mythologie japonaise, n’apparaît qu’en période de paix mondiale, devient ainsi la figure de proue d’une ambition renouvelée : faire de la marque Century, par son niveau de finition, sa tradition et sa rareté, le symbole ultime du luxe automobile japonais sur la scène internationale.

  • Louis Schweitzer (1942-2025) : l’homme qui a forgé le Renault du XXIe siècle

    Louis Schweitzer (1942-2025) : l’homme qui a forgé le Renault du XXIe siècle

    Le décès de Louis Schweitzer, PDG du groupe Renault de 1992 à 2005, sonne comme un rappel de la rapidité et de la brutalité des mutations qu’a connues l’industrie automobile depuis trois décennies. Son parcours, atypique pour l’époque — un haut fonctionnaire propulsé à la tête d’un fleuron industriel — fut la synthèse parfaite de la rigueur étatique et de la nécessité d’une vision capitaliste globale. Il n’a pas seulement géré Renault ; il a fondamentalement redéfini son rôle et sa structure.

    La privatisation : condition Sine Qua Non

    La première grande œuvre de Schweitzer fut l’aboutissement de la privatisation en 1996. Cette transformation n’était pas un choix idéologique, mais une nécessité économique et stratégique. En s’extirpant du giron de l’État, Renault obtenait la liberté d’action indispensable pour les investissements massifs en R&D et pour la restructuration drastique qui s’imposait. Ce processus fut concomitant au recentrage de l’activité sur le seul secteur automobile, notamment par la cession progressive des activités véhicules industriels (RVI), marquant la fin du conglomérat et le début d’une focalisation métier essentielle à la survie face à la concurrence germanique et américaine.

    L’anticipation stratégique : le binôme Twingo et Logan

    Sous sa direction, Renault n’a pas seulement produit des voitures, il a créé des segments de marché. La Twingo (1993) fut la manifestation d’un génie marketing, offrant un concept de monospace monocorps urbain audacieux qui ciblait une clientèle désireuse de simplicité et de couleur, rompant avec le classicisme des supermini de l’époque.

    Plus structurel encore fut le projet Logan. Initié comme une solution pour les marchés émergents, le concept de la voiture conçue a priori pour minimiser le coût de production, et non pour maximiser le profit a posteriori, est un modèle d’ingénierie inversée avant l’heure. En 2004, la commercialisation de ce modèle via Dacia ne fut pas perçue comme un simple ajout de gamme, mais comme la création d’un nouveau business model durable. C’est l’héritage Schweitzer qui permet aujourd’hui à Dacia d’être le pilier de la rentabilité du Groupe.

    L’Alliance Renault-Nissan : le coup de maître transcontinental

    L’acte le plus audacieux et le plus structurant de sa carrière demeure l’établissement de l’Alliance Renault-Nissan en 1999. Confronté à l’injonction de la taille critique, Louis Schweitzer a refusé le rôle de proie pour devenir l’architecte d’un partenariat transcontinental. En prenant une participation majoritaire dans Nissan (rachetant de fait ses dettes), il n’a pas seulement sauvé un constructeur japonais en difficulté ; il a créé une structure hybride, dénuée de fusion capitalistique totale, mais reposant sur une mutualisation des plateformes techniques et des investissements en R&D. L’envoi de Carlos Ghosn pour restructurer Nissan fut la mise en application tactique de cette vision, démontrant que les synergies ne seraient pas que financières, mais aussi managériales. Ce mariage de cultures reste, malgré ses turbulences récentes, l’établissement stratégique qui a permis à Renault de se positionner durablement parmi les grands acteurs mondiaux.

  • La légende en rouge : les secrets de la Ferrari 308 de Magnum

    La légende en rouge : les secrets de la Ferrari 308 de Magnum

    Sur l’île d’Hawaï, au début des années 80, une voiture est devenue le symbole mondial d’une décennie d’insouciance : la Ferrari 308 GTS de Thomas Magnum. Mais derrière le mythe, il y a une réalité pleine de contraintes de tournage, de cascades abusives, et de substitution de modèles. Voici les anecdotes qui ont fait de la Ferrari rouge le véritable co-star de la série culte.

    L’échec du coup Porsche et la taille de Tom Selleck

    L’histoire de la Ferrari de Magnum a failli ne jamais s’écrire. Initialement, l’acteur Tom Selleck (qui culmine à 1,93 m) souhaitait que son personnage conduise une Porsche 928. Cependant, Porsche a refusé de modifier le véhicule pour les besoins du tournage. Ferrari, en revanche, a saisi l’opportunité marketing et a accepté de fournir ses modèles. Le reste est entré dans l’histoire de la télévision.

    Ironie du sort, l’acteur avait de sérieuses difficultés à s’insérer dans l’étroit cockpit de la 308. Pour palier sa grande taille, Ferrari a dû retirer le rembourrage des sièges et boulonner les rails de fixation le plus loin possible. Malgré ces efforts, la tête de Selleck dépassait encore largement le pare-brise. C’est pourquoi Magnum est presque toujours filmé décapoté (avec le toit targa retiré), un détail qui est devenu une signature visuelle involontaire.

    Un seul numéro, trois modèles différents

    La voiture de Robin Masters, toujours immatriculée ROBIN 1, n’était pas un modèle unique. Au fil des huit saisons, la production a utilisé pas moins de trois 308 GTS différentes pour les plans rapprochés :

    1. Une 308 GTS de 1979 (à carburateurs, la plus pure).
    2. Une 308 GTSi de 1981 (l’injection, moins puissante mais plus fiable).
    3. Une 308 GTSi Quattrovalvole de 1984 (la version à quatre soupapes par cylindre, la plus moderne et puissante de la série).

    Pour compliquer le tableau, la série a parfois introduit des variantes inattendues. Dans un épisode de la saison six, Magnum a conduit une 308 GTSi Quattrovalvole verte de 1984 (prétendument une autre voiture de la collection de Masters), offrant une rare touche de couleur en rupture avec le rouge omniprésent.

    L’abus à l’écran et les kits cars déguisés

    Derrière les stars rutilantes se cachait une réalité de plateau brutale. La Ferrari de Magnum a subi des sévices incroyables : elle a été écrasée, criblée de balles, parfois même conduite hors des falaises ou explosée (à l’écran). Heureusement, la production disposait toujours d’une voiture de réserve prête à rouler.

    Pour les cascades les plus rudes et les plans larges qui ne nécessitaient pas une Ferrari authentique, la production n’hésitait pas à utiliser des kits cars basés sur la Pontiac Fiero, habilement déguisés en 308. Un sacrifice nécessaire pour le budget et la sécurité des vrais modèles.

    Lorsque la série s’est terminée en 1988, les voitures de production ont été dispersées. L’acteur Larry Manetti (Rick) aurait réussi à en conserver une, et une autre est exposée au Lakeland Motor Museum en Angleterre.

    Au final, si la 308 a fait de Magnum un poster car des années 80, son culte est si fort qu’il a perduré. Le reboot de 2018 de la série a d’ailleurs rendu un hommage direct à cet héritage en donnant au nouveau Magnum une Ferrari 488 Spider rouge et beige. La légende de la Ferrari d’Hawaï est éternelle.

  • Le culte du quotidien : pourquoi la Coccinelle est la Daily Classic parfaite

    Le culte du quotidien : pourquoi la Coccinelle est la Daily Classic parfaite

    Dans la quête perpétuelle du collectionneur pour « le prochain grand coup », il est facile d’oublier que le charme d’une ancienne réside dans sa capacité à rouler. En France, loin des spéculations sur les hypercars des enchères, la Volkswagen Coccinelle représente l’archétype du véhicule culte : facile à vivre, amusant à conduire, et paradoxalement, une machine à défier les modernes.

    La Coccinelle : plus qu’une voiture, un choix de vie

    En Europe, la Coccinelle est un monument de la démocratisation. Au-delà des chiffres de production, la « Cox » est surtout la meilleure porte d’entrée pour rouler en ancienne tous les jours, sans la peur constante de la panne ou du devis exorbitant.

    Pourtant, il faut avouer qu’être passager d’une Cox dans le trafic moderne demande une certaine foi. Sans direction assistée, avec une puissance qui laisse place à une « déficience de couple » et des ceintures de sécurité qui ne sont pas la première ligne de défense, on s’accroche parfois à la poignée du tableau de bord. Mais ces petites frayeurs sont vite balayées par la fierté du décalage.

    Le secret du « Daily Classic » réussi

    Quand on veut une belle Cox, on ne plaisante pas avec l’entretien. La philosophie de restauration est claire : remettre d’abord la voiture dans un état mécanique irréprochable, puis rouler régulièrement. Contrairement aux voitures de musée, la Cox est faite pour être utilisée, pour mélanger le bruit typique des cylindres à l’arrière avec le tumulte de la ville.

    Même si l’on cherche à respecter l’époque, une légère dose de modernité est bienvenue pour le confort d’aujourd’hui. Un allumage électronique, l’amélioration des carburateurs, l’ajout d’un alternateur : ces ajustements cruciaux ne trahissent pas l’âme de la voiture, mais assurent sa fiabilité face aux exigences du trafic moderne. Ce n’est qu’après cela qu’une restauration esthétique complète prend tout son sens.

    L’investissement de la passion

    Aujourd’hui, le marché français reflète la notoriété et le côté culte de la Coccinelle. La période idéale pour un modèle de collection se situe entre les années soixante et le milieu des années soixante-dix. Si les modèles plus anciens offrent une meilleure valeur résiduelle, l’approvisionnement en pièces est devenu une facilité, et non un obstacle. C’est le grand avantage de la Cox : son héritage mondial assure une logistique de pièces presque sans faille.

    La montée en puissance est visible sur les prix. Aujourd’hui, un exemplaire sain à restaurer coûte dix fois plus cher qu’à la meilleure époque. Mais même avec le coût d’une restauration complète, l’investissement reste bien inférieur aux « Youngtimers » plus sophistiqués.

    La Coccinelle, c’est l’essence même de la démocratisation du plaisir (avec une histoire large comme l’hémicycle de l’assemblée). Elle est la preuve que l’on peut rouler avec un morceau d’histoire tous les jours, défier le trafic dans une machine à air et se garer avec fierté, le tout sans verser une goutte de sueur. Parler de destinée, c’est peut-être cela : la voiture du peuple qui est devenue, près d’un siècle plus tard, le classique du peuple.

  • Du « pare-bouse » au cockpit virtuel : l’évolution culte du tableau de bord

    Du « pare-bouse » au cockpit virtuel : l’évolution culte du tableau de bord

    Aujourd’hui, nos voitures nous parlent, nous guident et affichent des écrans haute définition. Pourtant, le terme « tableau de bord » a des origines bien plus rustiques, liées aux chevaux et à la boue. En retraçant l’histoire de cette simple cloison protectrice, on comprend l’incroyable voyage qui a mené l’automobile du simple instrument de déplacement au véritable smart device roulant.

    L’origine inattendue : le « dashboard » du cocher

    Il est amusant de constater que le mot « dashboard » (littéralement « planche de tableau » ou « pare-bouse ») remonte aux calèches et aux chariots. Ce n’était à l’origine qu’une simple cloison destinée à protéger le cocher des débris et de la boue projetés par les sabots des chevaux au trot. Cette cloison servait également à stocker le fouet, les rênes, et le foin des bêtes. Selon le budget du propriétaire, elle était faite de bois, de cuir ou de tôle. Le tableau de bord, initialement, était donc un simple bouclier fonctionnel.

    L’âge du laiton : quand le moteur remplaça le cheval

    Avec l’apparition des premières automobiles à la fin du XIXe siècle, le tableau de bord a entamé sa première mue. Le besoin de protection physique s’est transformé en besoin d’information. Les premiers tableaux de bord ne contenaient que des éléments basiques et mécaniques : le levier de frein, la bouteille en verre pour l’huile de lubrification et, progressivement, un premier bloc d’instruments.

    C’était l’époque de l’élégance brute : le design des véhicules haut de gamme s’affinait, introduisant des matériaux nobles comme le laiton pour les entourages d’instruments. Le simple speedometer et l’odomètre sont rejoints par le compte-tours et l’indicateur de pression. C’est surtout à la fin des années 30, lorsque la voiture est perçue non plus comme un simple outil mais comme un lieu de vie, que l’on voit arriver le chauffage et les premières radios à tubes, préparant le terrain pour la révolution du confort intérieur.

    La révolution du plastique et l’ère du loisir

    L’après-guerre a accéléré la transformation. Le tableau de bord est devenu un espace de design à part entière, gagnant en couleur et en intégration. Mais l’évolution la plus radicale fut l’arrivée de l’industrie du plastique rigide. Ce nouveau matériau a permis de produire en masse les volants, les leviers et les boutons, rendant les intérieurs plus complexes et moins chers à fabriquer.

    Le tableau de bord est alors devenu l’hôte des accessoires du « confort » et du statut social. Si les aérations étaient initialement réservées aux modèles haut de gamme, le standard de l’époque est rapidement devenu le chrome sur les radios et, surtout, l’incontournable allume-cigare et le cendrier : signes que l’on passe désormais du temps dans sa voiture.

    L’assaut numérique : du GPS au cockpit virtuel

    Les années 80 marquent le début de l’explosion technologique. Le tableau de bord se complexifie avec des systèmes de climatisation sophistiqués, des compartiments de rangement, puis l’intégration progressive des premiers systèmes de navigation GPS.

    Dans les années 2010, l’avènement du numérique a tout bousculé. L’infotainment est devenu la norme, et le tableau de bord, jusqu’alors une unité statique, est devenu un écran tactile et une interface logicielle. Devant le conducteur, le tableau de bord numérique – le virtual cockpit – a remplacé les cadrans physiques.

    Cette technologie offre une sécurité accrue, en plaçant la carte de navigation satellite directement dans le champ de vision du conducteur. Plus besoin de détourner le regard vers le centre de la console ! Mieux encore, le conducteur peut désormais personnaliser l’affichage via le volant multifonction : augmenter la taille du compte-tours, faire disparaître le répertoire téléphonique ou afficher la carte en grand. C’est l’ultime évolution : le tableau de bord, né pour arrêter la boue du cheval, est devenu un centre de commande intelligent, où le conducteur est aux manettes de sa propre expérience numérique. Un véritable bond de la charrette au smartphone.

  • La flamme éternelle : les clubs Porsche, là où la passion n’a pas d’âge

    La flamme éternelle : les clubs Porsche, là où la passion n’a pas d’âge

    Plus qu’un simple réseau automobile, la communauté des Porsche Clubs est une famille mondiale. Fondé le 26 mai 1952, ce club rassemble aujourd’hui plus de 240 000 membres répartis dans plus de 700 clubs à travers le monde. Mais au-delà de sa portée globale, c’est l’incroyable amplitude d’âge de ses membres qui témoigne de la profondeur de la légende Porsche. Trois histoires extraordinaires illustrent comment cette passion transgénérationnelle se transmet et se renouvelle.

    Jörg Steidinger : le gardien de la légende à 90 ans

    Après une longue carrière d’orfèvre, Jörg Steidinger, un passionné inconditionnel de la Porsche 356, profite d’une retraite bien méritée. À une époque, il a possédé 15 exemplaires de l’icône refroidie par air. Aujourd’hui, quatre demeurent sous sa garde, la plus ancienne étant un 356 C Cabriolet de 1963 qu’il possède depuis près de 45 ans.

    « J’ai cette voiture depuis presque la moitié de ma vie, » sourit Steidinger. « C’est plus qu’un simple véhicule – c’est une partie de mon histoire. »

    Jörg est un pilier de la communauté, ayant co-fondé le Porsche 356 Club Germany, qui célèbre cette année son 50e anniversaire. Malgré son âge avancé, il insiste sur le fait que ses voitures doivent être conduites pour rester en forme et est reconnaissant d’être encore en mesure de prendre le volant. Il a transmis le « virus Porsche » à ses trois fils, qui hériteront un jour de ses précieuses machines.

    Il note que la plupart des membres ont 45 ans et plus, un fait attribuable au coût des véhicules, mais il est convaincu que la nouvelle génération apporte une « énergie fraîche » dès qu’elle rejoint la communauté.


    Theo Brunt : du fast-food à la Cayman S à 16 ans

    Pour la plupart, la première voiture est un modèle modeste. Pas pour Theo Brunt. Début 2024, il est devenu le plus jeune membre du Porsche Club New Zealand (PCNZ), à seulement 16 ans, en achetant sa toute première voiture : une Porsche Cayman S de 2008 de couleur argent.

    Comment ? En travaillant de longues heures dans un restaurant rapide après l’école pendant 18 mois.

    Le jeune Néo-Zélandais a depuis troqué le monde du poulet frit pour une carrière en ingénierie automobile, après avoir décroché un poste de mécanicien apprenti. Maintenant propriétaire de sa deuxième Cayman, Theo est un visage régulier des événements du PCNZ.

    « Les autres membres étaient évidemment très surpris de voir quelqu’un d’aussi jeune que moi – le prochain membre le plus jeune que j’ai rencontré a la trentaine, » raconte-t-il. « Mais tout le monde a été si accueillant. »

    Sa passion l’a propulsé vers un avenir professionnel précis : il vise des qualifications en ingénierie et en conception assistée par ordinateur, rêvant de travailler chez Porsche ou Manthey.


    Jonathan Webb : un futur ambassadeur à 11 ans

    Le terme « obsessionnel » prend tout son sens avec Jonathan Webb, 11 ans, de Toronto. Grâce au programme Juniors du Porsche Club of America (PCA), Jonathan est déjà un visage familier. Il est passé d’aider son père à préparer sa 911 Carrera 4S (génération 996) pour des expositions à soutenir le personnel du PCA lors d’événements.

    « Les enfants comme Jonathan sont l’avenir de notre club, » confirme Vu Nguyen, directeur exécutif du PCA.

    Jonathan n’est pas timide : il a déjà rencontré Hans-Peter Porsche (fils de Ferry Porsche) et a récemment interviewé le présentateur de télévision américain Chris Jacobs devant la caméra. Il a les yeux rivés sur une Porsche 944 pour sa première voiture, et après avoir appris à vidanger l’huile de la 911 de son père, il se voit poursuivre une carrière dans le sport automobile.

    Le PCA encourage activement ces jeunes membres, leur donnant la liberté de créer les nouvelles traditions du club, assurant que la passion de la marque perdure pour le siècle à venir.

  • Du Quadrifoglio à la Gazzella : l’histoire secrète d’amour entre Alfa Romeo et les Carabinieri

    Du Quadrifoglio à la Gazzella : l’histoire secrète d’amour entre Alfa Romeo et les Carabinieri

    La livrée bleu nuit et rouge des Carabinieri est l’une des plus respectées d’Italie. Mais au-delà de l’uniforme, une autre couleur incarne le culte de l’intervention rapide : le Quadrifoglio Verde. La livraison récente d’une Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio (et, pour la première fois, d’une Maserati) pour le transport urgent d’organes, n’est pas un simple partenariat commercial. C’est le prolongement d’une tradition qui a débuté il y a plus de 70 ans, façonnant le mythe de la « Gazzella ».

    La naissance de la « Gazzella »

    L’histoire commence après la Seconde Guerre mondiale, lorsque le corps des Carabinieri, cherchant à se moderniser et à s’équiper de véhicules rapides pour les interventions d’urgence, s’est tourné vers le fleuron de l’industrie nationale. La première collaboration officielle avec Alfa Romeo a lieu en 1951 avec la 1900 M « Matta », un 4×4 robuste.

    Cependant, la véritable légende, le terme qui est entré dans le jargon populaire pour désigner les véhicules d’intervention rapide, est apparue un an plus tard. En 1952, la berline Alfa Romeo 1900 devint la toute première « Gazzella » (Gazelle). Ce surnom, emprunté à la rapidité de l’animal, était parfaitement justifié par la performance de l’Alfa Romeo, bien supérieure à la moyenne du parc automobile de l’époque.

    L’âge d’or : le mythe de la Giulia

    Le point culminant de cette alliance a été atteint dans les années 1960 avec la Giulia. De 1963 à 1968, la berline Alfa Romeo fut le véhicule d’intervention par excellence.

    La Giulia n’était pas seulement rapide ; elle était compacte, maniable et possédait une motorisation de course, permettant aux Carabinieri de mener des poursuites efficaces même dans les ruelles étroites des villes italiennes. Elle est devenue l’icône de la police italienne, le symbole visuel de la loi en action, capable d’allier performance sportive et devoir civique. Sa postérité est immense : la Giulia est sans doute l’Alfa Romeo la plus associée à l’image du Carabinieri en uniforme.

    Une tradition ininterrompue

    Depuis la Giulia, le partenariat entre le constructeur de Milan et le Corps militaire s’est poursuivi sans jamais s’interrompre, témoignant de l’excellence et de la fiabilité des modèles Alfa Romeo sous la contrainte opérationnelle :

    • Alfetta : Le modèle des années 1970 et 1980 a perpétué la tradition de la berline rapide.
    • Les 90, 75 et 155 : Elles ont porté le relais dans les années 1980 et 1990.
    • Les 156 et 159 : Elles ont équipé le corps au début du XXIe siècle, conservant une esthétique sportive même sous livrée institutionnelle.

    À chaque génération, l’Alfa Romeo des Carabinieri est devenue bien plus qu’une simple voiture de fonction : c’est un outil de fierté nationale et d’efficacité opérationnelle.

    La Quadrifoglio 2025 : l’héritage au service de la vie

    La livraison de cette semaine ancre ce culte dans la modernité. La nouvelle Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio, sortie de l’usine de Cassino, est l’héritière directe de la « Gazzella » des années 60, mais avec une puissance et une technologie sans précédent.

    Avec son moteur V6 biturbo de 520 chevaux, son différentiel autobloquant mécanique et sa propulsion, cette Giulia n’est pas destinée à patrouiller, mais à accomplir la mission la plus noble : le transport urgent d’organes et de sang. La vitesse et la fiabilité de la Quadrifoglio, initialement conçues pour la performance sur piste, sont ici directement mises au service de la communauté.

    Comme l’a souligné le Général C.A. Salvatore Luongo, Commandant Général des Carabinieri, cette collaboration représente un « alignement des objectifs au service de la communauté », où la fiabilité des véhicules devient « un outil vital pour sauver des vies ». L’alliance entre la performance automobile italienne et l’efficacité institutionnelle n’a jamais été aussi essentielle.

    Et pour la première fois, la Maserati MCPURA (un coupé V6 Nettuno de 630 chevaux) rejoint la flotte des urgences. Si l’entrée d’un Trident est historique, c’est bien la présence continue du Quadrifoglio qui confirme : plus de sept décennies après la première « Gazzella », le cœur d’Alfa Romeo continue de battre au rythme des missions les plus urgentes de l’Italie.

  • La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    La Basilicate réinventée : comment l’usine de Melfi a bâti l’avenir global de Jeep

    Loin des clichés de la Motor Valley et du Piémont, c’est au cœur de la Basilicate, entre les oliviers et les collines, que se joue depuis trente ans une histoire essentielle de l’automobile européenne. L’usine de Melfi, née d’un pari politique, est devenue le laboratoire de Stellantis et, surtout, le pivot mondial de la marque Jeep.

    Melfi : le pari ambitieux du Sud industriel

    Pour comprendre le rôle actuel de l’usine de Melfi – aujourd’hui vitrine de la nouvelle Jeep Compass électrique – il faut remonter au début des années 1990. Le site, un complexe d’acier et de verre de près de deux millions de mètres carrés, a été inauguré par Fiat comme un geste fort : faire entrer le sud de l’Italie, traditionnellement moins industrialisé que le Nord, dans la modernité.

    Melfi n’était pas un choix par défaut ; c’était un pari politique et social visant à rééquilibrer la production italienne au-delà de Turin. Les modèles qui y sont nés, de la Fiat Punto à la Lancia Ypsilon, ont marqué l’entrée dans l’automobile pour toute une génération européenne. L’usine a prouvé la rigueur de ses ouvriers et la précision de ses ingénieurs, incarnant une Italie industrielle capable de grande échelle et de qualité. Melfi est rapidement passée du statut d’usine satellite à celui de monument de la résilience industrielle.

    L’allégeance à l’aigle américain : quand Jeep dépasse Détroit

    Le véritable tournant, et ce qui nous intéresse au premier chef, arrive en 2014. Après l’arrêt de la production des modèles historiques, Melfi faisait face au spectre du déclin. Mais FCA, sous l’impulsion de Sergio Marchionne, a pris une décision radicale : faire de ce site italien le berceau d’une icône américaine, la Jeep Renegade.

    Ce fut la première Jeep de l’histoire à être produite en dehors du continent nord-américain. Ce choix stratégique a permis à Jeep de se positionner au cœur du marché européen, avec des coûts de logistique réduits et une réactivité accrue. En associant l’ADN américain de liberté et de capacité tout-terrain à la précision italienne de l’assemblage et du design, Melfi a façonné une identité à part. En une décennie, plus de 2,3 millions de Jeep – incluant les premières versions de la Compass et ses déclinaisons hybrides rechargeables 4xe – sont sorties des chaînes du Sud, prouvant que le mythe Jeep pouvait s’épanouir sous un ciel italien.

    Du V12 aux Watts : Melfi, laboratoire de la « liberté de production »

    Aujourd’hui, l’usine s’adapte à une nouvelle révolution : l’électrification. La nouvelle génération de la Jeep Compass, conçue sur la plateforme STLA Medium, n’est plus seulement un véhicule produit en Italie ; elle est la vitrine d’un savoir-faire industriel unique en pleine transition énergétique.

    Le concept clé réside dans la « liberté de production » : la plateforme modulaire permet d’assembler, sur la même ligne, des versions hybrides, hybrides rechargeables et 100 % électriques. Cette flexibilité est vitale dans un marché européen imprévisible, permettant à Stellantis d’adapter son mix industriel presque instantanément, sans rupture.

    Melfi est donc devenue un véritable laboratoire technologique pour le groupe, testant des procédés de pointe (contrôle qualité par caméras haute résolution, peinture « 4-Wet » à faible impact environnemental) et visant l’autonomie énergétique.

    L’héritage ouvrier, moteur de la culture voiture

    Au-delà des chiffres techniques (jusqu’à 375 chevaux et 650 km d’autonomie pour la nouvelle Compass), ce qui fascine, c’est la dimension humaine et culturelle. L’usine emploie plus de 4,600 personnes, dont l’ancienneté moyenne dépasse vingt ans. Ces ouvriers et ingénieurs sont les héritiers de l’histoire industrielle initiée par la Punto, et sont aujourd’hui les artisans de l’électrique.

    La fierté qui émane de ces équipes n’est pas seulement celle du travail bien fait, elle est celle d’une région qui, souvent sous-estimée, a prouvé sa capacité à s’adapter sans renier son héritage. En voyant la nouvelle Compass sortir de Melfi, le passionné ne regarde pas seulement un SUV global. Il voit le résultat d’une histoire de trente ans, où le pragmatisme du Sud italien s’est marié à l’icône de l’aventure américaine, assurant ainsi la pérennité du culte Jeep pour la génération électrique.

  • Le ballet logistique : quand la « Beast » et son cortège défient les lois du Grand Tourisme

    Le ballet logistique : quand la « Beast » et son cortège défient les lois du Grand Tourisme

    La voiture du président des États-Unis (POTUS) est l’ultime expression du secret, de la puissance, et de la démesure. Mais l’histoire la plus fascinante n’est pas celle de son blindage ou de son V8 : c’est celle de son voyage. Quand la « Beast » quitte la Maison-Blanche, l’interstate ne suffit plus.

    La Cadillac présidentielle, affectueusement surnommée la « Beast » (la Bête) par la presse et le grand public, est bien plus qu’une limousine. C’est une forteresse roulante, un symbole national, et une œuvre d’ingénierie qui éclipse presque tous les autres véhicules blindés au monde. Pourtant, au-delà de ses spécifications classifiées, la question de sa mobilité intercontinentale reste l’une des plus spectaculaires. Que le commandant en chef se déplace pour une brève allocution domestique ou une visite diplomatique à l’étranger, le Service Secret n’utilise pas le réseau routier pour le transport longue distance. La réponse est simple, mais spectaculaire : la « Beast » vole.

    Pour le Service Secret américain, déplacer le cortège présidentiel relève d’une logistique militaire de très haute précision, menée en collaboration avec l’Armée de l’Air. On ne parle pas de faire la queue aux douanes ou de prendre l’autoroute. On parle de mobiliser les géants du transport lourd : les Boeing C-17 Globemaster III. Ces transporteurs lourds sont l’épine dorsale du déménagement présidentiel. Un seul C-17 est typiquement désigné pour la tâche la plus noble : il est responsable d’acheminer deux limousines présidentielles (les fameuses « Beasts », car il y a toujours un double en service) ainsi qu’une paire de Chevrolet Suburbans blindés qui composent l’essentiel du cortège. D’autres C-17 suivent pour le reste des véhicules de support et de communication, selon les besoins de la mission.

    Imaginez la scène, digne d’un film d’action, mais réelle : une fois à bord du C-17, les deux « Beasts » sont méticuleusement positionnées nez à queue au centre de la soute. Les Suburbans blindés, souvent presque aussi lourds que les limousines, sont quant à eux arrimés sur la rampe de chargement. Cette rampe, une fois repliée et verrouillée, forme une descente notable vers la cabine. L’arrimage des véhicules est une opération vitale, car le poids total, bien que classifié, exige une parfaite répartition. Environ quarante agents du Service Secret accompagnent leur cargaison, leurs bagages simplement sanglés au sol. Le vol n’est pas de tout repos : les agents s’installent sur des sièges d’appoint le long de la carlingue, même s’il est fréquent qu’ils optent pour s’allonger, par nécessité, directement sur le plancher de la soute pour le repos.

    Le gouvernement refuse obstinément de divulguer le poids exact des limousines et des Suburbans blindés – secret défense oblige. Cependant, les professionnels savent que la charge totale est très inférieure aux environ 77,5 tonnes de capacité du C-17. C’est là que la culture de la sur-ingénierie et de la discrétion prend tout son sens. Si l’Armée de l’Air mobilise un transporteur intercontinental pour seulement deux voitures, c’est que la « Beast » ne représente pas seulement une charge physique, mais une priorité logistique absolue. Ce n’est pas le tonnage qui dicte le choix, mais la nécessité de la présence immédiate, discrète et inébranlable du symbole automobile le plus sécurisé au monde, à tout moment et en tout point du globe.

    La prochaine fois que vous verrez la « Beast » à l’étranger, rappelez-vous que ce n’est pas une simple berline de luxe qui s’est garée là : c’est un véritable ballet aérien qui a été orchestré pour que ce mythe automobile soit toujours prêt à rouler.

  • L’archive révélée : le plan 1:1 de la Lamborghini 350 GT, autopsie d’une naissance culte

    L’archive révélée : le plan 1:1 de la Lamborghini 350 GT, autopsie d’une naissance culte

    Parfois, le plus grand trésor d’une marque n’est pas le métal poli, mais le papier jauni.

    À l’heure où les designers automobiles travaillent sur des moniteurs 3D et où le « pixel » a remplacé le « crayon », l’annonce faite par Lamborghini Polo Storico lors de l’événement Auto e Moto d’Epoca prend une saveur toute particulière pour les amoureux de la culture automobile. Le département Héritage de Sant’Agata Bolognese célèbre son dixième anniversaire en exposant la plus ancienne 350 GT survivante (châssis n°2), mais surtout, en levant le voile sur une relique fondatrice : un dessin technique à l’échelle 1:1 de l’aménagement intérieur de la 350 GT, daté de 1963.

    Ce n’est pas un simple croquis. C’est l’acte de naissance, tracé à la main, de l’ADN Gran Turismo de Lamborghini.

    Le trait de crayon contre le pixel

    En 1963, l’ordinateur n’est pas l’outil du designer. Le processus de création d’une automobile de luxe passait par des planches à dessin gigantesques, souvent à l’échelle réelle (1:1), pour valider les volumes, l’ergonomie et la faisabilité technique.

    Ce document, décrit par Lamborghini comme le plus ancien de ses archives historiques, n’est pas là pour faire joli. Il est le témoin d’une collaboration intense entre un jeune constructeur ambitieux, Ferruccio Lamborghini, et le maître-carrossier Carrozzeria Touring, concepteur de la fameuse carrosserie Superleggera de la 350 GT.

    Le plan 1:1 de l’habitacle de la 350 GT est une véritable autopsie du luxe italien des années 60 :

    1. L’ergonomie de la défiance : Il révèle comment les ingénieurs de l’époque ont articulé l’espace intérieur autour du puissant V12 de Giotto Bizzarrini, positionné longitudinalement à l’avant. C’est sur ce papier que les cotes exactes du volant, du pédalier et de la console centrale ont été fixées, définissant le confort et la position de conduite exigés par Ferruccio Lamborghini, pour faire mieux et plus civilisé que la concurrence de Maranello.
    2. L’âme du détail : Il témoigne de l’importance du tableau de bord. La position des compteurs Jaeger, les interrupteurs à bascule, le levier de vitesse… Chaque élément était méticuleusement positionné. Un dessin 1:1 permettait aux artisans de visualiser précisément la disposition des luxueuses selleries en cuir et des boiseries, avant même que le premier panneau d’aluminium ne soit frappé.
    3. Le symbole de la rigueur: Ce document est la preuve palpable de la rigueur industrielle qui a présidé aux débuts de Lamborghini. Il fallait convertir la vision sauvage du prototype 350 GTV en un produit fini, industrialisable par Touring. Le plan est la passerelle entre l’idée artistique et la réalité mécanique.

    Polo Storico : Le gardien du geste

    L’exposition de ce dessin souligne le rôle essentiel du Polo Storico. Leur mission va au-delà de la restauration des automobiles (comme le montre le travail de certification de la 350 GT n°2). Elle englobe la sauvegarde du patrimoine immatériel et technique de la marque.

    En préservant et en étudiant de tels documents, le Polo Storico ne fait pas que raconter l’histoire. Il offre aux collectionneurs et aux historiens un accès privilégié au processus créatif. Dans un monde automobile dématérialisé, ce plan papier, avec ses annotations et ses cotes, est un véritable artefact de la culture voiture, le souvenir d’un temps où l’échelle 1:1 était la seule réalité virtuelle possible.

    C’est là que réside le culte : dans la capacité à remonter le temps, non pas seulement pour voir le résultat final, mais pour observer la main et l’intention qui ont donné naissance à la légende Lamborghini.

    Le dessin 1:1 de la 350 GT n’est pas un simple document, c’est le plan de la grandeur à venir.

  • Toyota crée Century : une marque encore plus exclusive que Lexus

    Toyota crée Century : une marque encore plus exclusive que Lexus

    Alors que la plupart des constructeurs cherchent à simplifier leurs gammes ou à fusionner leurs multiples labels, Toyota choisit une voie inverse. Le géant japonais s’apprête à lancer une nouvelle marque de prestige baptisée Century, positionnée au-dessus de Lexus. Oui, au-dessus. Un mouvement audacieux qui propulse Toyota dans un univers habituellement réservé à Rolls-Royce ou Bentley.

    Un nom chargé d’histoire

    Le nom Century n’est pas inconnu : il s’agit de la limousine officielle du gouvernement japonais depuis 1967, un modèle mythique souvent associé à l’empereur, au Premier ministre et… à la Yakuza. Véritable symbole du pouvoir nippon, la Century a toujours incarné la discrétion et le raffinement à la japonaise.

    Sa première génération célébrait le centenaire de la naissance de Sakichi Toyoda, fondateur du groupe. La deuxième génération, lancée en 1997, reste célèbre pour avoir inauguré le seul moteur V12 jamais produit par un constructeur japonais : un 5,0 litres atmosphérique de 48 soupapes, conçu exclusivement pour ce modèle. Un moteur unique, aussi feutré que noble, resté au catalogue pendant plus de vingt ans.

    Aujourd’hui, Toyota veut capitaliser sur ce prestige pour en faire un véritable label automobile, à part entière.

    Century, la « Rolls japonaise » devient marque

    « Jusqu’à présent, la place de la Century dans notre gamme n’était pas clairement définie », reconnaît Akio Toyoda, président du groupe. « Lexus a toujours joué le rôle du fils aîné, responsable et ambitieux, tandis que Toyota était le cadet, plus populaire. Mais je me suis demandé : pourquoi ne pas aller au-delà, créer quelque chose au-dessus de Lexus ? »

    L’idée a séduit les stratèges de la marque. Car si Lexus a su s’imposer comme alternative crédible aux marques premium européennes, Toyota estime qu’il reste une marge au sommet, celle du luxe d’apparat, du véhicule de représentation, presque d’exception. C’est là que Century interviendra : non pas comme une gamme luxueuse de plus, mais comme une marque à part entière, synonyme d’exclusivité absolue.

    Lexus libérée, Century magnifiée

    Simon Humphreys, Chief Branding Officer de Toyota, précise la stratégie :

    « En un sens, cela donne plus de liberté à Lexus, qui peut poursuivre sa quête d’innovation et d’expérimentation. La marque Century, elle, vise le sommet, l’ultra-luxe, l’unique. »

    En clair : Lexus reste le laboratoire du design et de la technologie, tandis que Century devient le fleuron du savoir-faire artisanal japonais. On peut s’attendre à des voitures fabriquées en très petites séries, avec un niveau de finition rivalisant avec Bentley, voire Rolls-Royce.

    Pas de modèle révélé (encore), mais des ambitions affichées

    Toyota n’a pas encore dévoilé de modèle Century 100 % inédit, mais tout indique que la marque démarrera autour d’une grande berline chauffée à blanc de prestige, destinée à concurrencer directement les références britanniques et allemandes. La future limousine conserverait l’esprit sobre et solennel de la Century historique, avec une motorisation hybride ou 100 % électrique, et une production strictement limitée au Japon.

    L’introduction d’un SUV Century en 2023 — sur base de Lexus TX — semble avoir servi de ballon d’essai. Le lancement de la marque confirme que Toyota assume pleinement son ambition de s’installer dans la sphère de l’ultra-luxe, un terrain qu’aucun constructeur japonais n’avait véritablement osé investir jusqu’ici.

    Toyota, empire du rationnel et du pragmatisme, s’aventure ici sur un terrain presque philosophique : le luxe émotionnel et culturel, incarné par le raffinement, la patience et la perfection de l’artisanat japonais. Dans un monde automobile dominé par la performance et la technologie, Century incarne une autre idée du prestige — celle du wa, l’harmonie et la discrétion.

    Et si Lexus fut, en son temps, la réponse japonaise à Mercedes, Century pourrait bien être la réponse nippone à Rolls-Royce.