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Essai Tesla Model S P85D : Californication

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Essai Tesla Model S P85D : Californication

Enfin ! Durant des années, durant des dizaines d’essais, durant des milliers de kilomètres, j’ai regretté que l’automobile n’ait pas entamé sa révolution. Et enfin, un entrepreneur digne des héros du début du XXe siècle a pensé une automobile sans copier les automobiles : voici la Tesla Model S.

Non, la Tesla Model S n’est pas si différente. Ce n’est pas un prototype, pas une voiture volante, ni une voiture de course. C’est une automobile très normale, mais imaginée par un homme qui n’a pas grandi dans l’industrie traditionnelle.

C’est là toute la force du projet d’Elon Musk. S’il a su s’entourer de personnes très compétentes, souvent du sérail, et développer un vrai constructeur automobile, il a conservé un œil extérieur à l’industrie automobile. La différence, car il y en a une, se fait sur des détails.

L’ami Jay Leno disait récemment que pour imposer une nouvelle technologie, il ne fallait pas se mettre au niveau de ce qui existait, mais clairement être supérieur. C’est la raison pour laquelle il a acheté une P90D, une voiture électrique meilleure qu’une « berline allemande ».

Meilleure qu’une berline allemande

La majorité des constructeurs, quelque soit leur origine, rêve qu’un petrolhead comme Jay Leno achète l’une de leurs voitures et écrive qu’elle est meilleure qu’une berline allemande !

Est-ce vraiment le cas ? Oui, très largement sur de nombreux points. Non, pas franchement sur d’autres… C’est aussi ce qui rassure. Cette Tesla n’est pas un mirage, c’est une vraie voiture.

Physiquement, un châssis en aluminium, des sièges en cuir, quatre pneus Michelin Pilot Sport, un volant et des essuie-glaces font de la P85D que j’ai testée un modèle tout à fait normal… Mais il lui manque beaucoup d’autres choses : le bruit du moteur, ses vibrations, une boîte de vitesses.

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Tous ces éléments qui me faisaient dire il y a quelques mois que l’industrie automobile s’était littéralement foutue de nous durant des décennies en nous proposant des moteurs à combustion interne et des boîtes de vitesses manuelles. En 2015, comme en 1915 !

Il y a bien eu des farfelus qui ont proposé des prototypes… Il y a bien une percée des boîtes automatiques à double embrayage… Mais il fallait un emblème pour montrer que l’idée du 4 cylindres 2,0 litres boite 5 était définitivement enterré.

Voici donc la Tesla P85D ! Pour sortir du lot, ce second modèle de la gamme du constructeur californien (après le Roadster) propose deux moteurs capables de développer 515 kW (700 chevaux). Cette capacité est toute théorique, mais elle déplace tout simplement le corps des passages : vers l’avant en accélération et vers l’arrière en les projetant contre leur siège.

En conduite normale, on ne dépasse que très rarement les 30 kWh pour avancer dans la circulation. Pour comparer avec une Renault ZOE, j’étais plutôt dans les 10 kWh et ma victoire au classement de la consommation du Rallye Monte-Carlo ZENN 2015 me faisait plus souvent rouler sous les 4 kWh.

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Pour passer de 0 à 100 km/h en moins de quatre secondes, la Model S P85D doit donner beaucoup d’énergie à ses deux moteurs. Cette ressource vient d’une énorme batterie de plus d’une demi-tonne coincée sous le plancher. D’une capacité théorique de 85 kWh, elle doit permettre de parcourir 400 kilomètres en chaque recharge (plutôt 300 km pour un conducteur « inouï », du nom du mode qui permet de profiter de la pleine capacité des moteurs.

400 kilomètres, c’est largement suffisant pour traverser l’Europe en faisant des pauses de 40 minutes face à des Superchargers déployés à des endroits stratégiques pour recharger 80 % de la batterie. Avec une prise domestique traditionnelle, il faudra compter un jour et demi.

La suspension pneumatique permet de jouer avec la hauteur de caisse (Tu entends, Citroën ?), mais le niveau sonore en mouvement est assez élevé pour une voiture dite « silencieuse ». L’autre énorme point fort de cette Model S est sa transmission.

En mode « insane », en réclamant les 700 chevaux sur les quatre roues, les Michelin Pilot Sport ne gâchent pas la moindre particule des près de 1000 Nm transmis. Et c’est peut-être là qu’est la plus grande prouesse technique de la Model S P85D.

Pourtant, la Model S P85D n’est pas une voiture sportive. Elle est conçue pour donner de l’émotion à ses occupants, voire pour flamber auprès des voisins, pas pour concurrencer les berlines les plus sportives (encore qu’elles ne sont pas non plus menées à leur limite !).

Tesla est un constructeur californien, les autres viennent de Detroit… Vous saisissez la différence ?

Techniquement, la Tesla Model S est donc une voiture du XXIe siècle (c’est pour dire si les autres sont en retard !). A l’intérieur, un écran de 17 pouces éclipse tout le reste.

Alors que l’on teste encore des voitures dotées d’écran multimédia de 5 pouces, Tesla arrive avec un écran vertical de 43 centimètres. Mieux, il est parfaitement intégré au centre de la planche de bord et d’une facilité de prise en main incroyable pour quelqu’un qui aurait déjà touché (au moins une fois) le moindre smartphone ou une tablette.

L’OS se sert d’un noyau Linux pour afficher une partie d’infodivertissement et les réglages de la voiture. Une carte SIM 3G fournie par Orange permet de rester connecté à Internet et la voiture peut également se connecter à un réseau WiFi. Tout ceci s’avère très vite indispensable. Et mieux : les mises à jour du système se font Over-The-Air, comme iOs ou Android.

En jouant avec l’écran, on sent que Tesla possède un coup d’avance sur l’ensemble des autres constructeurs automobiles. La température de l’habitacle est modifiée en un geste, le toit ouvrant est intégralement pilotable, comme l’affichage tête haute.

Avec une interface aussi large, il est possible de scinder l’écran en deux pour afficher des fenêtres différentes ou de profiter des 17 pouces pour naviguer sur internet ou de la navigation.

Un easter egg permet de modifier sa Model S en Lotus Esprit sous-marine. Elon Musk se prend pour James Bond !

Derrière le volant, les compteurs sont également issus d’un large écran qui récupère la plupart des infos nécessaires. Et, typique d’un vrai programme issu d’une entreprise IT, l’équivalent d’un Ctrl+Alt+Suppr autorise une réinitialisation du système. Par bonheur, ça n’a jamais planté durant l’essai !

Cet écran éclipse des matériaux trop américains pour être comparés aux finitions allemandes. La différence de culture entre les trois grands pôles mondiaux (Europe, Etats-Unis et Japon) va au-delà de l’industrie automobile. Un Américain voudra du fonctionnel, parfois imposant, voire franc, sans chichi. C’est remarquable dans la Model S.

Mais il reste encore quelques imperfections pour une voiture aussi enivrante. Sous la pluie, le toit ouvrant (fermé) laissait des gouttes tomber sur le siège passager.

Toujours au rayon IT, les mises à jour OTA permettent de découvrir de nouvelles technologies en montant, un matin, dans sa voiture. Comme avec l’arrivée d’un nouveau dessert Android ou d’un énième iOs, des applications peuvent s’ajouter au package déjà installé. Quel genre d’applications ? La conduite autonome par exemple ! La Model S possède tous les radars et la capacité d’agir sur l’accélération, le freinage et la direction. Il ne suffirait que d’une nouvelle implantation logicielle pour qu’elle devienne autonome. Et ce sera gratuit !

Voiture de l’Année !

La Tesla Model S mérite sans conteste le titre de voiture de l’année. Quoi ? Elle ne l’a pas eu ? Ah mince, elle a été devancée par la Peugeot 308 et la BMW i3 en 2014. Rappelons que ce prix est décerné par un jury composé de 58 journalistes européens… Peut-être que Tesla est trop californien et que cette Model S était trop chère.

Peut-être aussi qu’une majorité de ces spécialistes n’avaient pas compris que le marché avait besoin d’entrer dans une nouvelle ère. Et qu’une voiture d’exception a encore le droit d’être affichée à un tarif conséquent.

Ah et au fait : même avec un prix d’appel à 76 300 euros en France, on vend plus de deux fois plus de Tesla Model S que de BMW i3… du nez je vous dis !

Quelques données

Modèle essayé : Tesla Model S P85D
Tarif : 114 600 euros
Options : diffuseur arrière en fibre de carbone (1 100 euros), pilotage automatique (2 700 euros), intérieur et éclairage premium (3 300 euros), suspension Smart Air (2 700 euros), son très haute fidélité (2 700 euros), pack climat glacial (1 100 euros). Total : 128 200 euros
Moteur : deux moteurs électriques équivalent à 262 chevaux à l’avant et 510 chevaux à l’arrivée
Couple max : 967 Nm
Transmission : quatre roues motrices
0 à 100 km/h : 3,3 secondes
Vitesse maximale : 250 km/h
Autonomie (NEDC) : 491 km
Emissions de CO2 : 0 g / km
L / l / h (mm) : 4 970 / 1 964 / 1 430
Poids : 2 239 kg
Volume du coffre : 744 / 1 792 litres

Author: Rédaction

Rédaction AUTOcult.fr



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