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Le prochain Grand Prix de France sera organisé à Paris

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Le prochain Grand Prix de France sera organisé à Paris

Ce qu’il y a de bien avec la France (terme bien générique qui nous regroupe tous), c’est qu’elle ne déçoit jamais. Vous savez : ce petit côté hautain et suffisant qui met à mal notre position dans chaque négociation.

La France, sans entrer dans des considérations trop politiques, est un grand pays centralisé dans lequel l’État manœuvre au cœur d’une version évoluée (de façon erratique) de la collectivisation.

Si le Grand Prix de France est installé au Castellet – pour la seconde fois –, c’est grâce à Paul Ricard. Cet industriel de l’alcool a voulu un circuit de très, très haut niveau, pour prouver à ses « amis » politiques qu’il était possible de créer des structures très sûres (entre autres). Il a tout payé de A à Z pour convaincre Bernie Ecclestone de signer un contrat et inviter les camions des Lotus, Ferrari, Brabham, McLaren, Tyrrell, BRM ou Matra à s’installer en Provence. Les pilotes, Jackie Stewart en tête, furent totalement convaincus par la réalisation de Paul Ricard et le Grand Prix a eu lieu d’abord tous les deux ans, avant d’être présent chaque année au calendrier jusqu’en 1990. Une poignée de mains et un chèque et c’était réglé.

Sans refaire toute l’histoire, le second septennat de François Mitterrand a tué le Circuit Paul Ricard pour promouvoir la Nièvre du futur Premier Ministre Pierre Bérégovoy. Tout le monde a grogné, sauf le financier de la F1 qui recevait le chèque signé au plus haut sommet de l’Etat. Deal. Une poignée de mains et un chèque et c’était réglé. Mais Saint-Parize-le-Châtel, c’est le bout du monde dans les années 1990 ! L’autoroute promise n’arrive pas et l’ambiance de plus en plus glamour de la F1 (même à l’époque) vit assez mal l’absence totale de ville à caractère international et les longues soirées avec les vaches. Ce qui peut être accepté ailleurs ne l’est pas en France.

La France s’est désintéressée de son Grand Prix et de la F1 et tout s’est effondré. Les promoteurs ont quitté le navire et la FFSA a tenté une perfusion durant quelques années avant de jeter l’éponge.

Durant des années, des projets plus ou moins farfelus ont tenté de faire revenir la F1 dans l’Hexagone : retour à Magny-Cours, Disneyland Paris, Paris intramuros… Mais c’est finalement sur le Circuit Paul Ricard que les politiques ont porté leur choix pour remettre la France au calendrier. Abandonné, devenu base d’essais, le circuit du Castellet reste presque parfait pour la sécurité, mais critiquable sur bien des points. Comme ailleurs, les accès sont compliqués, comme ailleurs, les attentes sont interminables pour accéder au moindre service dès que l’on s’approche de la jauge, comme ailleurs, il n’y a pas de grande ville adossée au paddock. Le Circuit Paul Ricard étant un circuit européen, il souffre de quasiment tous les mêmes mots que les circuits européens.

A l’approche du terme du contrat entre le GIP (encore un truc très français qui permet à l’État et aux collectivités de financer des projets avec le soutien d’entreprises privées, mais toujours avec un contrôle politique), le jeu de la critique a atteint un niveau supérieur. Comment peut-on concevoir que la F1 vienne sur un circuit qui porte le nom d’un alcool fort (alors que la F1 s’affiche avec Heineken), comment peut-on accepter de mettre autant de temps à accéder à l’enceinte sportive (vous n’imaginez même pas pour Silverstone), comment peut-on être aussi loin de villes touristiques (les Autrichiens s’en amusent et les Britanniques – encore eux – présentent Marseille comme un coupe gorge et préfèrent la Côte d’Azur et Nice, hein Nice, vous comprenez les dernières sorties !) ?

Mais le vrai problème est uniquement d’ordre financier. La France étant la France et le GIP étant dirigé par des politiques, il y a une certaine idée de la puissance de notre vieux pays. L’idée est, certes, partagée par la direction de la F1, mais elle n’est pas évaluée de la même manière.

Que le Groupe Renault, deux pilotes et de nombreux partenaires d’écuries (mais aucun de la F1) soient originaires de France n’est qu’un argument de plus pour la FOM pour que le promoteur d’un Grand Prix paie « son » juste prix.

Que l’évènement soit redevenu populaire, avec de (petites) tribunes pleines de drapeaux frénétiquement agités, n’est qu’un argument de plus pour la FOM pour que le promoteur d’un Grand Prix paie « son » juste prix.

Finalement, c’est une négociation. La F1 vend son produit à un tarif exorbitant que beaucoup acceptent de payer. Aujourd’hui, la France ne l’accepte pas. Tout est question de ne pas trop vexer son interlocuteur afin de ne pas rompre les discussions. Car la France peut vivre sans F1, la F1 peut vivre sans la France. Ceux qui perdront le plus sont les spectateurs et les partenaires français directement impliqués en F1. Et comme les spectateurs ne peuvent pas couvrir les dépenses d’un Grand Prix, le GIP a fait venir près de la moitié des dirigeants du CAC40 au Castellet pour surfer sur l’extraordinaire vague mondiale que vit la F1.

Car la F1 vit un âge d’or et abuse de cette position dominante. Pour avoir le droit à la F1, il faut apporter à la F1. Et ça se compte en dizaines de millions de dollars.

Et voilà pourquoi le prochain Grand Prix de France sera organisé à Paris : soit dans une salle de réunion avec des dirigeants d’entreprises capables de sortir ces dizaines de millions d’euros, soit avec un circuit dans Paris pour convaincre Domenicali et ses « conseillers » que cette option (dont tout le monde rêve secrètement) serait la plus rentable pour la F1. Au calendrier en 2027, le temps que la Maire prenne sa retraite ?

Author: Rédaction

Rédaction AUTOcult.fr