Étiquette : Cinéma

  • Le taxi au cinéma, ou quand la voiture devient théâtre de l’instant

    Le taxi au cinéma, ou quand la voiture devient théâtre de l’instant

    Il y a, au cinéma, un lieu sans murs, sans fenêtres, sans racines. Un espace en mouvement, né du trajet, de la transition d’un point à un autre. C’est le taxi. Comme tous les lieux de passage, il ne se définit que par ce qu’il relie. Il n’a pas de passé, pas d’avenir. Il ne possède que cet instant incertain où deux vies, croisées par hasard ou nécessité, partagent un même cap.

    Le taxi n’est pas qu’un moyen de transport. C’est un décor. Un microcosme narratif que les cinéastes exploitent avec une précision presque chirurgicale. Car tout y est comprimé : l’espace, le temps, les mots. Le récit devient plus dense, plus intime. Impossible de s’échapper ou de se distraire. Les paroles échangées dans cet habitacle étroit résonnent avec un poids qu’elles n’auraient pas ailleurs, étouffées dans le vacarme du quotidien. En taxi, on parle peu, mais on dit beaucoup.

    Le conducteur, lui, connaît la ville comme un livre qu’il relit chaque jour. Personnage paradoxal, il est omniprésent et pourtant en retrait. Il ne s’attarde nulle part. Satellite solitaire, il gravite autour d’une cité qui ne le reconnaît pas, mais qui se dévoile à lui, nuit après nuit, feu rouge après virage. Il observe tout, entend tout, parle peu. Dans son silence se concentre un savoir particulier : des bribes de vie, des confessions involontaires, des anecdotes inattendues.

    C’est pourquoi, au cinéma, le chauffeur de taxi devient une figure récurrente, à la fois discrète et puissante. Il est celui qui accompagne sans être accompagné, qui guide sans imposer, qui regarde sans juger. Un témoin sans voix, un spectateur sans scène – et, pour cela même, un formidable levier narratif.

    Dans un monde de plus en plus compartimenté, le taxi demeure l’un des derniers lieux de promiscuité obligée. Deux inconnus y partagent un espace clos, un temps défini, une direction imposée. Et c’est dans cette proximité non choisie que s’ouvrent des fissures. On y saisit parfois des vérités ténues, des répliques fugaces, aussitôt oubliées mais d’un poids équivalent à tout un film.

    Travis et les autres : les figures du chauffeur au cinéma

    L’un des portraits les plus iconiques de cette figure est sans doute celui de Travis Bickle dans Taxi Driver (1976). Sous la direction de Martin Scorsese, Robert De Niro campe un vétéran solitaire errant dans le New York des années 70, dévastée par la nuit, la violence et la corruption. Sa Checker Marathon devient une cellule de réclusion mobile, son habitacle un sanctuaire de paranoïa et de fureur purificatrice. Travis est le conducteur comme figure messianique, témoin muet qui, peu à peu, bascule dans la folie rédemptrice.

    À Rome, quelques années plus tard, Alberto Sordi propose un contrepoint tendre et désabusé avec Il tassinaro (1983). Il y campe un chauffeur romain, affable et goguenard, traversant une capitale en mutation, embarquant des passagers imaginaires ou bien réels – parmi lesquels un certain Federico Fellini. Une déclaration d’amour à l’Italie populaire, prise entre nostalgie et désenchantement.

    Le taxi, dans ces films, devient alors plus qu’un décor : un révélateur. Il projette sur ses vitres les mutations d’une société, les ombres d’une époque.

    Dans l’habitacle, un théâtre minimaliste

    Le langage du cinéma s’adapte à cet espace. Dans un taxi, la caméra est contrainte : elle observe de biais, se reflète dans un rétroviseur, capte des néons qui glissent sur la vitre. L’image est étroite, et c’est précisément cette contrainte qui crée de nouvelles possibilités narratives. Une posture, un soupir, une phrase suspendue suffisent à dire l’essentiel. Le taxi devient une scène d’écoute et d’attente. Un théâtre du non-événement, où pourtant tout peut arriver.

    C’est ce que sublime Jim Jarmusch dans Night on Earth (1991). Cinq villes, cinq chauffeurs, cinq passagers. Los Angeles, New York, Paris, Rome, Helsinki : cinq trajectoires nocturnes, saisies comme autant de petites tragédies ordinaires. Dans l’habitacle, les langues se délient, les regards se croisent, les histoires surgissent. Film d’atmosphère et d’instants suspendus, Night on Earth est un hommage au miracle fragile de l’interaction humaine.

    Quand le taxi devient métaphore

    Dans le cinéma d’Europe de l’Est, Taxi Blues (1990) de Pavel Lounguine offre une vision rude et poignante de la Russie post-soviétique. Un chauffeur bourru, un musicien bohème. Deux mondes inconciliables réunis par un trajet. Entre choc des cultures, tension sociale et utopie avortée, le taxi devient un champ de bataille miniature. Le film remporta le prix de la mise en scène à Cannes.

    Plus récemment, dans Collateral (2004), Michael Mann transforme le taxi en piège mental. Tom Cruise, tueur glacial, embarque Jamie Foxx, chauffeur ordinaire, dans une virée nocturne aux allures de cauchemar. La ville de Los Angeles se reflète sur les vitres, comme un mirage dangereux. À l’intérieur, le taxi devient cage, confessionnal, lieu de transformation brutale.

    Mais c’est peut-être Jafar Panahi qui, avec Taxi Téhéran (2015), pousse l’usage du taxi cinématographique à son paroxysme symbolique. Banni de faire du cinéma, le réalisateur iranien filme en cachette depuis l’habitacle de sa propre voiture. Chaque passager devient une voix du peuple, une parcelle de vérité. Le taxi se mue en manifeste politique, en geste de résistance, en éloge de l’humanité ordinaire.

    Le taxi, une figure menacée

    Aujourd’hui, le chauffeur de taxi persiste, dernier artisan d’un métier de proximité, ultime confident d’une ville qui change trop vite pour être comprise.

    Il n’est ni optimisé, ni efficient. Mais c’est précisément cela qui le rend précieux. Il peut encore surprendre. Il peut encore raconter. Il nous rappelle que le déplacement n’est pas qu’un besoin logistique, mais une expérience humaine, parfois existentielle.

    Le cinéma, inlassablement, revient à cette figure périphérique. Non pour ce qu’elle fait, mais pour ce qu’elle permet. Car le taxi, c’est le royaume du pendant. Ni le départ, ni l’arrivée. Juste ce moment suspendu, fragile et éphémère. Et c’est souvent là, dans cet interstice oublié, que le cinéma touche sa vérité la plus simple – et la plus profonde.

  • Quand l’essence coûtait plus cher qu’aujourd’hui : plongée dans Tchao Pantin et le vrai pouvoir d’achat des automobilistes

    Quand l’essence coûtait plus cher qu’aujourd’hui : plongée dans Tchao Pantin et le vrai pouvoir d’achat des automobilistes

    Dans une scène anodine, mais révélatrice du film Tchao Pantin (1983), Coluche est pompiste : en arrière-plan, le prix du super est affiché à 4,82 francs. À l’heure où le SP95-E10 est à 1,809 € le litre dans le même quartier, cette image d’archive nous offre une occasion précieuse de mesurer l’évolution du pouvoir d’achat automobile. Le prix de l’essence a-t-il vraiment augmenté ? Le conducteur moyen a-t-il perdu en liberté ? En fouillant les archives de l’INSEE et les statistiques de salaires, la réponse pourrait surprendre.

    1983 : quand un plein pesait lourd

    Convertir les francs en euros ne suffit pas pour comprendre. En 1983, le litre d’essence super était à 4,82 francs, soit 0,73 euro. Mais cette simple conversion trahit une réalité plus complexe. Car depuis 1983, l’inflation cumulée est d’environ 184 % selon les indices officiels. Ce qui signifie que ces 0,73 euro de 1983 équivalent aujourd’hui à 2,09 € en euros constants.

    Le litre de SP95-E10 est aujourd’hui vendu 1,809 € dans le même quartier parisien. En d’autres termes, le prix réel de l’essence a baissé.

    Mais cette baisse n’a de sens que si on l’intègre au contexte du pouvoir d’achat. Pour cela, comparons ce que représentait un plein de 50 litres pour un salarié payé au SMIC ou au salaire médian.

    SMIC et essence : le duel de toujours

    • En 1983, le SMIC net mensuel avoisinait 2 390 francs, soit 364,40 €. Un plein de 50 litres coûtait alors 241 francs, soit 10,08 % du SMIC.

    • En 2025, avec un SMIC net estimé à 1 400 €, le même plein coûte 90,45 €, soit 6,46 % du SMIC.

    Même dynamique du côté du salaire médian :

    • En 1983, estimé à 3 300 francs (503,20 €), un plein coûtait 7,3 % du revenu médian.

    • En 2025, pour un salaire médian de 1 900 €, le même plein revient à 4,75 %.

    Dans les deux cas, le coût du carburant pèse bien moins sur les revenus aujourd’hui qu’il y a 40 ans.

    Une liberté d’usage retrouvée

    À l’époque, une Renault 5 TL affichait une consommation moyenne de 7 à 8 litres aux 100 km. Aujourd’hui, une Citroën C3 ou une Peugeot 208 plafonnent à 5 litres, voire moins. Non seulement l’essence coûte moins cher en euros constants, mais les voitures consomment aussi moins, augmentant encore le pouvoir d’achat effectif lié à la mobilité.

    On pourrait objecter que le coût d’achat des voitures a explosé, mais il faut rappeler qu’en 1983, la voiture neuve n’était pas une évidence non plus. En proportion du revenu, une voiture neuve populaire coûtait environ un an de SMIC. C’est encore à peu près le cas aujourd’hui, selon les modèles et les remises.

    Le mirage de la nostalgie

    En 1983, les voitures étaient plus simples, les carburants au plomb, et l’entretien plus fréquent. Le rêve d’indépendance automobile se heurtait alors à une réalité bien plus coûteuse en proportion. Les stations-service étaient omniprésentes, mais le plein représentait un vrai sacrifice financier.

    Aujourd’hui, les prix à la pompe font encore régulièrement la une, mais ils sont trompeurs si on les isole du contexte. En proportion des revenus, rouler coûte moins cher qu’avant. Et si les débats sur la voiture électrique, les taxes ou les ZFE monopolisent l’actualité, il faut parfois se tourner vers le passé pour relativiser. L’automobiliste des années 1980, entre carburant plombé, freinage aléatoire et corrosion accélérée, n’avait pas vraiment plus de liberté que celui de 2025.

    Tchao fantasmes ?

    Tchao Pantin, au-delà de sa portée sociale, témoigne aussi d’un monde disparu : celui de la pompe à essence de quartier, du litre à moins de 5 francs… et d’un Paris où la voiture restait le refuge des solitaires. Aujourd’hui, la réalité est plus nuancée. Le prix affiché n’est pas toute l’histoire. Le vrai indicateur, c’est ce qu’il reste dans la poche une fois le plein fait.

    Et à ce petit jeu, les chiffres sont formels : l’automobiliste d’aujourd’hui est plus libre qu’hier. Peut-être pas dans sa tête. Mais certainement dans son porte-monnaie.

  • « C’était un Rendez-vous » : une course folle à travers Paris

    « C’était un Rendez-vous » : une course folle à travers Paris

    Claude Lelouch, l’un des cinéastes les plus audacieux de son époque, a réalisé en 1976 un court métrage devenu légendaire, « C’était un Rendez-vous ». Ce film, qui capture une course effrénée à travers les rues désertes de Paris, est souvent cité comme l’un des meilleurs films de voiture de l’histoire du cinéma. Sa réalisation, mystérieuse et controversée, a longtemps fasciné les amateurs de cinéma et les passionnés de l’automobile.

    La genèse d’une idée folle

    Après avoir terminé le tournage de « Si c’était à refaire » avec Catherine Deneuve, Claude Lelouch se retrouve avec quelques mètres de pellicule inutilisés. Il décide alors de les utiliser pour un projet audacieux : filmer une course à grande vitesse à travers Paris. L’itinéraire qu’il choisit est emblématique, partant de la Porte Dauphine pour finir au Sacré-Cœur, en passant par des lieux emblématiques comme l’Arc de Triomphe, la Place de la Concorde, Le Louvre et l’Opéra.

    Une réalisation technique ingénieuse

    Pour réaliser ce court métrage, Lelouch fixe une caméra Caméflex à l’avant de sa voiture, une Mercedes 450 SEL. Bien que la rumeur ait longtemps couru que la voiture utilisée était une Ferrari, c’est bien la Mercedes de Lelouch qui traverse Paris à une vitesse vertigineuse. Lelouch post-synchronise toutefois le bruit d’une Ferrari 275 GTB pour ajouter une sensation de vitesse et de puissance à la séquence.

    Lelouch n’est pas seul dans cette aventure. Son chef-opérateur est assis à côté de lui, contrôlant l’ouverture et la mise au point de la caméra avec une petite télécommande. Pour garantir la sécurité à un point particulièrement dangereux du parcours, Lelouch place un assistant, Elie Chouraqui, à la sortie du tunnel du Louvre. Cependant, le talkie-walkie censé avertir Lelouch en cas de danger ne fonctionne pas, rendant la course encore plus périlleuse.

    Un film sans trucage

    Ce qui rend « C’était un Rendez-vous » particulièrement impressionnant, c’est l’absence totale de trucages. Lelouch conduit vraiment à des vitesses dépassant les 200 km/h, brûlant 18 feux rouges et évitant de justesse piétons et véhicules. Le film capture la véritable folie et l’adrénaline de cette course illégale, réalisée tôt le matin pour minimiser les risques.

    Les conséquences et l’immortalité

    Après la projection du film, Lelouch est arrêté et interrogé par la police. Initialement, il prétend qu’un pilote de F1 était au volant, mais finit par avouer la vérité. Lelouch raconte dans sa biographie que son permis de conduire lui est retiré, puis rendu immédiatement après grâce à l’intervention d’un commissaire impressionné par le film.

    Malgré son illégalité et les risques énormes encourus, « C’était un Rendez-vous » est acclamé pour sa réalisation audacieuse et son intensité. Le court métrage de huit minutes reste une œuvre intemporelle qui évoque la liberté et la folie de son réalisateur. Lelouch lui-même admet que ce film reflète sa propre folie et son désir de braver les interdits.

    L’influence durable

    « C’était un Rendez-vous » a influencé de nombreux cinéastes. John Frankenheimer l’a étudié en détail pour les scènes de poursuite de « Ronin », tandis que Christopher McQuarrie s’en est inspiré pour la séquence parisienne de « Mission: Impossible – Fallout ». Pour Lelouch, cependant, ce film est avant tout une déclaration d’amour. L’objectif de cette course à travers Paris est de rejoindre sa fiancée de l’époque, Gunilla Friden, qui apparaît dans la dernière image du film.

    Un héritage cinématographique

    Le court métrage « C’était un Rendez-vous » reste une œuvre phare dans l’histoire du cinéma, non seulement pour sa réalisation technique audacieuse mais aussi pour l’émotion brute et la passion qu’il capture. Lelouch a réussi à transformer un simple trajet en voiture en une déclaration intense d’amour et de liberté.

    Ce film est disponible gratuitement sur le site du CNC jusqu’à samedi, offrant aux nouvelles générations l’opportunité de découvrir ou redécouvrir cette course folle à travers Paris. « C’était un Rendez-vous » est un rappel poignant de l’époque où le cinéma pouvait être une aventure dangereuse, mais incroyablement captivante.

    En fin de compte, « C’était un Rendez-vous » n’est pas seulement un film de voiture ; c’est une œuvre d’art qui transcende les genres, racontant une histoire d’amour passionnée avec une ville, une voiture et une femme. C’est une célébration de la liberté, de l’audace et de l’ingéniosité, qui continue d’inspirer et de fasciner plus de quarante ans après sa réalisation.

  • Manta Manta : Deutsche Qualität

    Manta Manta : Deutsche Qualität

    En Allemagne, Manta Manta est le film culte d’une génération d’automobilistes : la représentation de l’amour d’un style de vie totalement tourné vers l’automobile avec tous ses codes.

    Le résumé :
    Bertie est très fier de sa voiture, une Opel Manta qu’il a bricolée et gonflée lui-même. Une fois de plus, il vient de battre un concurrent lors d’une course effrénée. Dans l’euphorie de la victoire, il accepte un pari avec Axel, propriétaire d’une Mercedes. Il joue ses économies sur cette course. Et cela pourrait bien lui coûter sa petite amie, Uschi, car cet argent doit leur permettre de s’installer ensemble dans un nouvel appartement. Mais Bertie est dans une période de malchance : le moteur de sa voiture lâche, et Uschi flirte avec Helmut, qui roule en Ferrari…

    Au box-office allemand, le film a réalisé 1,2 million d’entrées. Lors de sa première diffusion TV, 11,48 millions de téléspectateurs étaient au rendez-vous !

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  • Cars : un morceau de culture automobile

    Cars : un morceau de culture automobile

    Comment entrer dans le mythe automobile ? Faire rêver les enfants, les imprégner d’une marque qu’ils aimeront toute leur vie : voilà l’idée simple de Cars, le film d’animation de Pixar dont l’influence ira grandissante durant encore des années et des années.

    John Lasseter est à l’origine du projet. En compagnie de Joe Ranft – scénariste de Toy Story – il commence à imaginer un film d’animation autour de l’automobile en 1998. À cette époque, les deux hommes de Pixar voient le documentaire Divided Highways sur la construction d’une autoroute américaine et l’incidence sur les petites villes des régions traversées : « Nous avons commencé à songer à ce que cela devait être de vivre dans ces lieux que le passage de l’autoroute avait plongés dans l’oubli. »

    À sa genèse, le projet prend le nom de « Route 66 », mère de toutes les routes américaines, durement touchée par le déploiement du réseau autoroutier avant de vivre un revival spectaculaire. Mais le titre devait être différent pour éviter de trop coller à une émission de télévision qui cartonnait aux États-Unis dans les années 1960.

    Pour John Lasseter, cet objectif de réaliser un film d’animation sur l’automobile ne date pas tout à fait de 1998. Tout petit, il rendait déjà visite à son père qui gérait le service de pièces détachées d’une concession Chevrolet.

    Et si l’équipe du film s’est doucement constituée avant de partir en périple sur la Route 66 durant neuf jours pour s’imprégner de l’ambiance des petites villes oubliées de l’Ouest américain, une ville a vraisemblablement davantage marqué Lasseter que les autres : Kanab. J’y suis allé en mars dernier lors de l’essai du nouveau Land Rover Discovery, après un passage dans le parc naturel de Zion.

    La légende raconte que John Lasseter avait l’habitude de traverser cette ville de 3 500 habitants lorsqu’il se rendait dans sa résidence sur les rives du lac Powell, jusqu’à s’en inspirer pour créer Radiator Springs dans le premier épisode de Cars. Kanab avait déjà largement accueilli Hollywood avant même la naissance du directeur artistique de Pixar. À l’époque du cinéma muet, le western Deadwood Coach y avait été filmé. Par la suite, deux cents films ont été tournés dans la région, de Josey Wales hors-la-loi de Clint Eastwood à La Planète des Singes et, plus récemment, John Carter.

    Pour le visiteur, la traversée de Kanab est fidèle à l’expérience de Flash McQueen. Rien ne rappelle vraiment Radiator Springs, pas plus que le passage de John Wayne, Johnny Cash, Franck Sinatra ou Dean Martin. Non, vraiment, lorsque l’on entre dans Kanab, il n’est pas question de s’y arrêter.

    Il faut se resituer : nous sommes entre l’Utah et l’Arizona. Il gèle en hiver et la température dépasse les 40°C l’été. Nous sommes au milieu de rien, uniquement contemplés par des pierres usées par le temps.

    C’est la force de Cars : faire vivre une partie de la culture américaine au cœur d’un conte pour enfants. Le Rookie qui ne pense qu’à la vitesse, qu’à la gloire et la victoire se trouve confronter à une vie qu’il ne connait pas. Où le temps – le chrono – n’a qu’une valeur très relative. Où l’amitié et l’entraide s’avèrent d’une redoutable efficacité.

    Susie le petit coupé bleu

    Dans le dessin, John Lasseter s’est inspiré de Susie, le Petit Coupé Bleu, une création de 1952. Les yeux du personnage ne sont pas simplement placés à la place des phares, ils occupent la totalité du pare-brise. C’est une manière de le rendre plus expressif, mais aussi un casse-tête pour les animateurs qui doivent jouer avec cette nouvelle dimension et un écart entre la bouche (calandre) et les yeux (pare-brise).

    Le reste est une succession d’hommages. À Joe Ranft, dont on a parlé au début, qui est mort en 2005 dans un accident de la circulation… À Glenn McQueen également, un autre animateur de Pixar mort en 2002. Le nom de Lightning McQueen lui est dédié, même s’il est évidement que McQueen évoque bien d’autres souvenirs aux amoureux de la culture automobile. La plaque d’immatriculation de Fillmore est « 51237 » soit la date de naissance de George Carlin (12 mai 1937) qui lui prête sa voix. Dans les premiers scénarios, Lightning McQueen (Flash en français) devait porter le numéro 57 (année de naissance de Lasseter). Il est devenu 95, en référence à l’année de sortie de Toy Story. Et les pneus de Lightning, un placement produit ? Lightyear fait référence à Goodyear, mais aussi et surtout à Buzz Lightyear, l’un des principaux personnages de Toy Story, toujours Toy Story. Et encore Toy Story ? Le sponsor Dinoco est déjà visible dans l’immense succès de Pixar : c’est la station-service où Woody et Buzz montent dans la voiture de Pizza Planet (aussi présente dans Cars).

    Encore des hommages ? Lors de la première course de Cars, le King dépasse une voiture au 294e tour. Elle est blanche, frappée du logo Apple et elle porte le numéro 84 de l’année du lancement de Macintosh… Un clin d’œil à son compère Steve Jobs. Et la plaque de Mater (aussi le numéro du train qui manque d’entrer en collision avec McQueen) ? A113, le numéro de la salle fréquentée par John Lasseter, Brad Pitt et beaucoup d’autres dans l’université California Institute of Arts. A113 est aussi marqué sur un avion de Cars 2 (ainsi que dans un nombre incroyable de séries et de films hollywoodiens).

    Cars 2 a imposé une réflexion totalement différente. C’est un film d’espionnage sous fond de sport automobile. Au-delà des dizaines d’easter-eggs 100 % Pixar (The Incredibles, Toy Story, Brave, Ratatouille, 926 nouveaux personnages ont été modélisés pour créer des figurants et des villes ont été « voiturisées ». À Tokyo, à Paris, à Porto Corsa ou Londres, les bâtiments sont construits à partir de pièces de véhicules et de moteurs. Les Citroën 2 CV et DS sont présentes dans la capitale française, une Topolino dessine le rocher de la Riviera et Big Ben devient Big Bentley à Londres.

    Dans Cars 3, qu’il vous faudra découvrir, vous aurez encore l’occasion de chercher le camion de livraison Pizza Planet, l’inscription A113 (si vous voulez briller en société, regardez du côté du bureau de Sterling !), le carrosse de Cendrillon (Pixar appartient désormais à Disney), le ballon Pixar (très, trop transformé) et pour les fans de Nascar, les vrais pilotes engagés en course (Bubba Wallace est Bubba Wheelhouse, Daniel Suarez est Daniel Swervez, Chase Elliott est Chase Racelott et Ryan Blaney est Ryan Inside Laney. Et aussi quelques références au prochain film de Pixar « Coco »…

    Côté voix, Lewis Hamilton, Darrell Walltrip, Jeff Gordon et Richard Petty reviennent et un instant émouvant vient de la reprise d’un enregistrement de Paul Newman. Mais le concept est beaucoup moins poussé que dans le premier épisode qui avait réservé des places à Michael Schumacher, Jeremy Clarkson, Jay Leno, Mario Andretti…

    Rendez-vous en salles et attention au big one. (et promis, on parle bientôt du design de Sterling !)

  • Sophia Loren au Rally del Cinema 1956

    Sophia Loren au Rally del Cinema 1956

    Imaginez Sophia Loren engagée en compétition automobile. Au volant d’une rutillante Mercedes 300 SL, rien que ça. C’est pourtant ce qu’il s’est passé, en 1956, au « Rally del Cinema », à Rome. Ce rallye n’est vraisemblablement ce qu’on appelle de nos jours un rallye. C’était à l’époque un évènement organisé tel une balade, un rallye de régularité, un rendez-vous glamour et people pour les acteurs et actrices du cinéma italien des années 50. Sur le tracé, comme au départ de Rome ou à l’arrivée à SanRemo, la foule est présente en masse pour apercevoir leurs stars favorites. Parfois sur le parcours, des barrages sont mis en place par les fans pour approcher les acteurs.

    Il faut dire qu’à cette époque, Roma et la CineCitta sont parmi des endroits au monde les plus en vus pour le tournage de films ainsi que leur production.Rossano Brazzi, Nino Conti, Isa Miranda, Maria Frau, Sandro Pallavicini, Elena Giusti, Alberto Farnese, Pamela Matthews, Cesare Danova. Ces noms ne sont pas forcément connus aujourd’hui mais à l’époque, il y a plus de 60 ans, ils étaient de véritables stars du cinéma italien. Heureusement pour notre (ma) petite culture, Sophia Loren est présente sur ce rallye. Engagée au volant d’une rutillante Mercedes-Benz 300 SL Gullwing coupé, elle y est LA star.

    Sophia Loren Gullwing Mercedes
    Sophia Loren, Gullwing Mercedes 300 SL

    Photo : Club ACI Storico / ACI.

  • Cinéma : la BMW 2002 Turbo du film Dikkenek

    Cinéma : la BMW 2002 Turbo du film Dikkenek

    Certains films sont cultes. OSS 117, le grand détournement, le vélo de Ghislain Lambert, The Big Lebowski, Retour vers le futur et Dikkenek. Ce drôle de film réalisé par le Belge Olivier Van Hoofstadt met en scène des acteurs de haut vol dans leur domaine. Au programme, François Damiens, Jean-Luc Couchard, Jérémie Rénier, Florence Foresti, Catherine Jacob, Dominique Pinon, Marion Cotillard et Mélanie Laurent jouent leur rôle dans un scénario des plus loufoques. Ce film, qui se joue entre Bruxelles et Anderlecht, nous permet de voir une BMW 2002 turbo, modèle rare au cinéma.

    Produit de 1973 et 1975, la BMW 2002 Turbo est mue par un 4 cylindres 1,990 cc à injection, gavé du turbo KKK, développant 170 ch. La 2002 Turbo est une propulsion, équipée d’une boîte manuelle à 4 vitesses. D’extérieur, la 2002 T est blanche, bardée de liserés bleus turquoises, bleus marine et rouge, en bas de caisse le tout rappelant les couleurs officiels de M Power et BMW Motorsport. Pour la petite histoire, (et ce n’est pas le cas dans la 2002 Turbo du film), sur le bouclier avant, était inscrit le logotype « 2002 turbo » à l’envers, de façon à ce que le conducteur qui précédait la 2002 T voyait écrit à l’endroit « 2002 turbo » dans son rétroviseur. Tout une histoire à l’époque.

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    BMW 2002 Turbo Dikkenek 01

    Dans ce film, on pourra voir une autre BMW, la 645 CI. On trouvera aussi une Mercedes-Benz, la SLC de Claudy Focan, mais aussi sa Toyota Celica. Une Ford GT40 aura aussi sa place dans le scénario.

     

    Une scène du film a été coupé au montage. La voici, mettant en avant la BMW 2002 Turbo.

    https://www.youtube.com/watch?v=ggCCFUpE69c

  • Le Mans 1970, avec Steve McQueen : le film en version intégrale

    Le Mans 1970, avec Steve McQueen : le film en version intégrale

    Y-a-t-il film plus mythique que « Le Mans » avec Steve McQueen ? A l’origine voulu comme un documentaire, la production CBS poussait, afin d’élargir le public, que le film soit scénarisé. En résulte une drôle d’histoire d’amour au milieu des Porsche 917K et Ferrari 512S. Le voici dans sa version intégrale. Prenez votre temps et un Red Bull. Vous risqueriez de vous endormir, mais n’en ratez pas le premier quart du film. L’ambiance monte en intensité jusqu’au départ des 24 heures du Mans. Prenez ce film avec patience, profitez de lui en vous éloignant du scénario. Profitez des images tel un documentaire, plein d’archives et de témoignages d’une époque révolue. Pour tout vous dire, je n’ai jamais su regarder ce film d’une seule traite, mais il n’en reste pas moins un de mes films favoris.

     

    https://www.youtube.com/watch?v=VYIcc9IBZj4

  • _CULT – la Ferrari 250 GT SWB California Spider de Alain Delon

    _CULT – la Ferrari 250 GT SWB California Spider de Alain Delon

    La Ferrari 250 GT SWB California Spider de Alain Delon : elle sera l’une des stars du salon Retromobile de Paris, organisé à la Porte de Versailles du 4 au 8 février prochains. Nous vous en avions parlé lors de la révélation de l’extraordinaire collection Baillon, forte de 60 automobiles des débuts de l’automobile aux années 70. Cette Ferrari mérite bien un zoom.

    L’historique et la « traçabilité » de cette Ferrari sont exceptionnels. Il s’agit là du châssis n° 2935GT, du moteur n° 2935, ayant pour numéro interne n° 610 E, avec la boîte de vitesses n° 8.61 et le pont n° 383F. Oui, à Maranello comme chez ArtCurial et AUTOcult, on aime la précision.

    Pièce rare s’il en est, ce sublime cabriolet est d’une des 37 California Spider SWB « phares carénés » construite. Elle est ici entièrement originale, jamais restaurée, avec son lot de bord, ses guides d’époque et sa carte grise française.

    Il s’agit d’un châssis court, de couleur bleu foncé, hard-top bleu foncé, intérieur simili noir. Il fut terminée le 27 septembre 1961 avant son envoi dans la foulée de Maranello à l’importateur Ferrari de l’époque Franco-Britannic Autos, à Paris. Elle sera exposée la deuxième semaine du Salon de l’Auto 1961. L’acteur Gérard Blain l’achète et l’immatricule dans la semaine suivant le Salon à son nom et adresse (9 rue de Siam, Paris XVIe arrondissement), sous le numéro 88 LR 75. Delon, amateur du cheval cabré qui se serait souvent rendu à Maranello, lui rachète en 1963, la voiture n’a que deux ans et un faible kilométrage. Elle passe d’une immatriculation française à l’immatriculation monégasque 4452 MC le 23 mai 1963. Les plaques d’immatriculation monégasques d’époque et papiers aux noms d’Alain Delon ont d’ailleurs été retrouvé durant les recherches d’historique. Passerons deux autres propriétaires parisiens pour cette Ferrari un peu spéciale. En 1971, celle qu’on appelle « 2935GT », du numéro de son châssis, devient propriété de Jacques Baillon, l’aujourd’hui célèbre collectionneur.

    Cette Ferrari sera vendue aux enchères lors de la vente ArtCurial lors de la vente 2651, à Rétromobile, hall 2.1, le 6 février 2015 prochain à 14h00. Il s’agira de l’évènement de ce salon consacré à l’automobile ancienne.

     

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    Alain Delon;Shirley Maclaine

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    Alain Delon, Ferrari 250 GT SWB California Spider_6

    COLECTION BAILLON NIORT 17 / 11 /2014

    1961 Ferrari 250 GT SWB California Spider, Collection Baillon - © Artcurial

     

  • Cinéma : la Peugeot 504 de Ghislain Lambert

    Cinéma : la Peugeot 504 de Ghislain Lambert

    2000, sort sur les écrans un film franco-belge déroutant réalisé par Philippe Harel : Le Vélo de Ghislain Lambert.

    Au milieu des années 70, Ghislain Lambert, né le même jour qu’Eddy Merckx avec huit minutes d’écart, est un coureur cycliste belge dont l’ambition est de devenir un champion. Il parvient à intégrer une grande équipe mais comme porteur d’eau. Déterminé dans son rêve de victoire et de gloire sportive, Ghislain Lambert attend patiemment son tour, mettant en place des stratagèmes plus ou moins légaux, plus ou moins efficaces.

    Tel est le synopsis de ce film où fourmillent de nombreux détails et références historiques. L’automobile a sa part belle. On retrouve de nombreuses voitures d’époque, avec un zoom particulier sur la Peugeot 504. Si les équipes cyclistes Magicrème et Epedex sont inventées de toutes pièces, les livrées habillant ces Peugeot 504 sont très réalistes et ressemblent bien à celles de l’époque.

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    Photos : exclusivelo, HELIOCOURTIL / http://forum.tontonvelo.com, productions AF Production / Les Productions Lazennec / StudioCanal / TF1 Films Production.
  • _CULT – la Jaguar XKSS de Steve McQueen

    _CULT – la Jaguar XKSS de Steve McQueen

    Ces photos ne nous appartiennent pas, certes, mais les laisser dormir dans nos archives nous angoissaient particulièrement. Steve McQueen possédait une des 16 Jaguar XKSS produites, version routière de la Jaguar Type D, vainqueur par trois fois des 24 Heures du Mans en 1955, 1956 et 1957. A son volant, Steve McQueen déambulait à vives allures dans les rues de Los Angeles, alors bien moins fréquentées qu’aujourd’hui. 1967, il vend cette XKSS. Deux ans plus tard, il la rachète, tant elle lui manque. Il la gardera jusqu’à sa mort, en 1980.

     

  • Cinéma : Duel de Steven Spielberg

    Cinéma : Duel de Steven Spielberg

    Duel est le premier long métrage de Steven Spielberg. Une première œuvre qui fait encore référence. Un western mécanique qui a reçu le Grand Prix du Festival International du Film Fantastique d’Avoriaz en 1973.

    Oui, pour ceux qui rêveraient de grandes envolées fantastiques, il est nécessaire de se souvenir que c’est un premier film et qu’il date de 1971.

    Duel reprend certaines méthodes cinématographiques des westerns. Peu de personnages, de forts caractères mais le minimum de dialogues. Le camion est un acteur à lui seul. Il évoque la crainte par sa puissance, sa folie destructrice et son absence d’âme.

    A l’inverse, David Mann est l’anti-héros au volant d’une Plymouth Valiant. Celui qui n’a rien demandé à personne, qui ne sort pas du lot. Tout est efficace, les plans, le rythme, la mise en scène, l’intensité. Un premier film qui jette les bases de ce que sera, plus tard, Les Dents de la Mer.

    Le scénario est inspiré d’une aventure survenue à Richard Matheson. Le 22 novembre 1963, il conduit sur une route californienne lorsqu’il apprend, à la radio, l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy. Choqué, Matheson fait une embardée. Un camion arrive derrière lui et tente de l’écraser avant de disparaître à vive allure.