Catégorie : Constructeurs

  • Porsche 911 Spirit 70 : un hommage vibrant au sport automobile des années 1970

    Porsche 911 Spirit 70 : un hommage vibrant au sport automobile des années 1970

    Avec la présentation de la Porsche 911 Spirit 70, la marque de Stuttgart continue de dérouler le fil de son programme Heritage Design, entamé en 2020. Cette nouvelle déclinaison, profondément marquée par l’ADN du sport automobile des années 1970, s’inscrit dans une lignée prestigieuse, aux côtés de la 911 Targa 4S Heritage Design Edition et de la 911 Sport Classic.

    Une filiation revendiquée

    Chaque modèle du Heritage Design est conçu comme une capsule temporelle, distillant les grandes époques du design Porsche. Après avoir célébré les années 1950 et 1960 avec la Targa, puis les années 1960 et début 1970 avec la Sport Classic, Porsche s’attaque ici à une décennie charnière pour le sport automobile : les années 1970. Une époque où les circuits vibraient au rythme des prototypes sauvages et des livrées bariolées, où la visibilité devenait un enjeu vital à haute vitesse.

    La 911 Spirit 70 transpose cet esprit avec élégance : trois bandes noires en finition silk gloss parcourent son capot, évoquant les autocollants de sécurité utilisés autrefois pour rendre les voitures plus visibles dans les rétroviseurs lors des courses endiablées. Sur les flancs, un graphisme décoratif affiche fièrement le nom Porsche, surmonté du chiffre 70 en lettrage noir brillant, clin d’œil appuyé aux sept décennies de passion sportive de la marque.

    Des détails exclusifs inspirés du passé

    Au centre du capot avant trône l’emblématique blason Porsche, reprenant avec minutie le dessin historique de 1963. Sur les ailes avant, les badges dorés « Porsche Exclusive Manufaktur » soulignent l’appartenance de la Spirit 70 à cette collection ultra-sélective. Plus bas, la grille du coffre arbore le badge Porsche Heritage, dont la typographie et la forme rappellent les récompenses millésimées attribuées aux Porsche 356 ayant dépassé les 100 000 kilomètres dans les années 1950.

    Si l’héritage visuel est soigneusement entretenu, la Spirit 70 n’en oublie pas pour autant de s’ancrer dans la modernité stylistique. La teinte exclusive Olive Neo, développée spécialement pour ce modèle, offre une profondeur saisissante, mêlant nuances vert profond et reflets bronze discrets. Ce jeu de couleurs se prolonge dans le traitement gris-or des bas de caisse et des boucliers, ainsi que sur les jantes Sport Classic inspirées du légendaire design « Fuchs ».

    Le soft-top et l’encadrement du pare-brise, tous deux peints en noir, viennent souligner l’allure sportive du cabriolet. Une fois la capote repliée, la silhouette de la Spirit 70 dévoile des lignes de roadster de compétition, rappelant les modèles Porsche engagés en endurance.

    Un habitacle au parfum de paddock

    À bord, Porsche poursuit son hommage à l’univers du sport automobile. L’habitacle est dominé par le motif textile Pasha, célèbre pour ses damiers dynamiques évoquant des drapeaux agités au vent sur les lignes droites des circuits. Pour la Spirit 70, la marque a revisité ce motif historique en combinant un textile spécial et des fils floqués, renforçant la dimension sportive et tactile.

    Ce motif Pasha s’étend aux panneaux centraux des portes et aux coques des rétroviseurs, débordant même jusque dans la boîte à gants pour ceux qui souhaitent pousser la personnalisation. En standard, l’intérieur reçoit une finition en cuir Club Basalt Black, rehaussée de surpiqûres décoratives en Olive Neo, clin d’œil subtil à la livrée extérieure.

    Les sièges sport, réglables électriquement en 18 directions, garantissent un maintien parfait en conduite dynamique. Face au conducteur, l’écran de 12,65 pouces affiche ses aiguilles et ses graduations en format analogique, avec des chiffres verts, ressuscitant ainsi le charme rétro des compteurs de la Porsche 356.

    Une célébration authentique du patrimoine Porsche

    La 911 Spirit 70 n’est pas qu’une série spéciale de plus : elle incarne la capacité unique de Porsche à faire dialoguer passé et présent, tradition et innovation. Chaque détail, du badge à la sellerie, témoigne d’une volonté méticuleuse de rendre hommage aux racines sportives de la marque, tout en proposant une expérience de conduite et de possession profondément contemporaine.

    Avec cette troisième itération du programme Heritage Design, Porsche s’adresse autant aux passionnés d’histoire automobile qu’aux collectionneurs en quête d’authenticité. En ressuscitant l’esprit effervescent des années 1970, la 911 Spirit 70 réaffirme que, chez Porsche, l’avenir s’écrit toujours avec les lettres de la légende.

  • La renaissance du tout premier prototype Bentley Speed 8 : une pièce oubliée de l’histoire ressuscitée

    La renaissance du tout premier prototype Bentley Speed 8 : une pièce oubliée de l’histoire ressuscitée

    Dans l’univers feutré des prototypes d’endurance, rares sont les voitures qui portent à elles seules le poids d’une histoire méconnue, presque oubliée. Pourtant, sur la piste de l’aérodrome de Turweston, en Angleterre, un grondement strident a récemment brisé le silence, marquant le retour à la vie d’un fantôme de Crewe : le tout premier prototype Bentley Speed 8.

    Ce n’est ni la voiture victorieuse des 24 Heures du Mans en 2003, ni l’un des neuf autres châssis LMGTP développés par Bentley entre 2001 et 2003. Ce prototype singulier, identifié par la plaque « CHASSIS NO. RTN 001.01 » fixée sur son monocoque en carbone, est en réalité le tout premier jalon posé par Bentley dans son ambitieux retour au Mans, bien avant que le conseil d’administration de Volkswagen ne donne son feu vert officiel au projet.

    Un chant mécanique venu d’une autre époque

    À peine le moteur lancé, les spécialistes présents comprennent immédiatement que quelque chose cloche. Ce n’est pas le feutré V8 biturbo d’origine Audi qui vrombit sous la carrosserie, mais un hurlement aigu, brut, presque sauvage. En s’approchant, la confirmation est immédiate : un Ford-Cosworth DFR de Formule 1, un V8 atmosphérique à vilebrequin plat de 3,8 litres, prend place derrière le pilote. Ce moteur, construit à l’époque par Nicholson McLaren, fut choisi pour les essais initiaux du projet, avant que Bentley n’opte définitivement pour la mécanique Audi plus adaptée aux exigences de l’endurance.

    C’est cette voix rauque et survoltée qui a ressuscité la mémoire de cette voiture oubliée, après deux décennies d’immobilisation dans un entrepôt de Crewe.

    Une restauration minutieuse et un engagement passionné

    Le miracle de cette renaissance porte la signature de Shaun Lynn, gentleman driver averti et père d’Alex Lynn, pilote officiel Cadillac en Hypercar. Collectionneur passionné, Lynn possède aujourd’hui quatre des cinq Bentley Speed 8 construites pour la saison 2003, ne laissant à la marque que l’exemplaire victorieux du Mans.

    En 2018, Bentley accepte de céder ce prototype unique à Lynn, à une condition ferme : le remettre en état de marche. Une mission confiée à Progressive Motorsport, dirigée par Howden Haynes et Dave Ward, tous deux membres de l’équipe Bentley victorieuse du début des années 2000. Il aura fallu plus de 2 000 heures de travail, la reconstitution de plus de 5 500 pièces, et le respect scrupuleux des méthodes de fabrication de l’époque pour redonner vie au châssis RTN 001.01.

    « Ce projet s’est arrêté brutalement à l’époque, sans jamais être finalisé. Notre travail a consisté à tout remettre exactement comme à l’origine », explique David Brown, responsable de l’ingénierie chez Progressive.

    Une genèse complexe sous l’ombrelle Volkswagen

    À l’origine, ce prototype n’était pas destiné à Bentley. En 1999, dans la foulée de l’accident spectaculaire de Peter Dumbreck au volant de la Mercedes CLR, les règlements de l’ACO changent drastiquement. Volkswagen, qui travaille alors sur une voiture de course autour de son moteur W12 pour Le Mans, se voit contraint d’adapter sa stratégie. Le projet initial, baptisé Audi R8C et conçu chez Racing Technology Norfolk (RTN), se mue progressivement en un nouveau concept.

    Sous l’impulsion de Brian Gush, alors directeur des opérations d’ingénierie chez Bentley, et avec le soutien discret de Ferdinand Piëch, ce prototype est habillé aux couleurs de Bentley pour convaincre la direction du groupe Volkswagen. La manœuvre réussit : le projet Bentley Speed 8 est officiellement lancé.

    Conçu par Peter Elleray, le châssis du prototype se démarque par son architecture mêlant des arceaux composites avant et arrière avec une structure tubulaire acier pour le cockpit – un compromis entre les anciennes et nouvelles normes de sécurité imposées aux prototypes fermés après l’épisode des envols spectaculaires au Mans.

    Une histoire méconnue, un destin singulier

    Ce premier prototype n’a jamais couru en compétition. Il a simplement servi aux premiers essais privés, notamment à Silverstone, Monza, et sur la piste du Bugatti au Mans. Recouvert d’une livrée noire lors de ses premiers tours de roues, il sera brièvement présenté au public lors du Salon de Genève 2001 avant d’être relégué au rôle de voiture de présentation statique.

    Par la suite, Bentley met en place une stratégie plus claire : engager de véritables Speed 8 motorisées par le V8 Audi et dotées d’une boîte séquentielle Megaline. Le résultat est connu : podium dès 2001, victoire en 2003, puis retrait officiel après avoir accompli la mission de redorer le blason de la marque.

    Aujourd’hui, grâce à la vision de Shaun Lynn et au savoir-faire de Progressive Motorsport, ce chapitre oublié de l’histoire de Bentley retrouve enfin la place qu’il mérite. Son moteur hurlant a résonné à nouveau sur le circuit du Mugello lors du Mugello Classic, piloté par Max Lynn – sous les yeux attentifs de son père, qui a aligné, lui, une véritable Speed 8 de 2003.

  • Aston Martin Vantage : soixante-dix ans d’une lignée d’exception

    Aston Martin Vantage : soixante-dix ans d’une lignée d’exception

    Quel ingénieur ou responsable marketing d’Aston Martin a eu l’idée du nom « Vantage » ? L’histoire ne le dit pas. Mais ce que l’on sait, c’est qu’à la fin de l’année 1950, le constructeur britannique préparait une variante plus performante de son moteur six cylindres en ligne. Pour accompagner cette évolution, il fallait un nom évocateur, capable de séduire les clients amateurs de performances. Une liste fut dressée, et le mot « Vantage » fut retenu. Selon le dictionnaire, il désigne un état de supériorité ou d’avantage. Le ton était donné.

    Pendant près de deux décennies, le badge Vantage allait ainsi désigner les motorisations les plus puissantes des modèles Aston Martin.

    Les débuts : DB2 et premiers succès sportifs

    La première à bénéficier d’une version Vantage fut la DB2. Lors de son lancement en avril 1950, elle était équipée d’un 2.6 litres à faible taux de compression (6,5:1), développant seulement 105 ch — une contrainte imposée par les faibles qualités du carburant disponible après-guerre. Cependant, avec le retour de l’essence à haut indice d’octane et l’essor du sport automobile, une version plus pimentée était indispensable.

    Grâce à de plus gros carburateurs et à un taux de compression porté à 8,16:1, le moteur « Vantage » passait à 125 ch. Résultat : un 0 à 96 km/h (0-60 mph) amélioré, de 12,4 secondes à 10,7 secondes, et une vitesse maximale portée de 177 km/h à 188 km/h. La légende Vantage était née.

    La montée en puissance : DB4, DB5, DB6

    La continuité ne fut pas immédiate. La DB4, par exemple, ne proposa de variante Vantage qu’à partir de la série 4 en 1961. Sous le capot, le six-cylindres en ligne tout aluminium de 3,7 litres, signé Tadek Marek, gagnait en vigueur grâce à trois carburateurs SU au lieu de deux, portant la puissance de 240 ch à 266 ch. Esthétiquement, la DB4 Vantage se distinguait souvent par ses phares carénés, empruntés à la DB4 GT, lui donnant des allures de précurseur de la mythique DB5.

    Justement, la DB5 Vantage reste aujourd’hui l’une des plus prisées. Dotée d’un moteur porté à 4,0 litres et de carburateurs Weber triple corps, elle atteignait 314 ch pour une vitesse maximale de 241 km/h. Toutefois, seuls 65 exemplaires furent livrés avec la spécification Vantage d’origine — un détail qui vaut aujourd’hui un surcoût de près de 20 % sur le marché de la collection par rapport à une DB5 classique.

    À noter : la DB5 fut la première Aston à arborer physiquement un badge « Vantage », sur l’ailette d’évacuation d’air du passage de roue avant, une habitude conservée sur la DB6. Cette dernière, toujours motorisée par un 4.0 litres et trois carburateurs Weber, revendiquait 325 ch, contre 282 ch pour la version standard. Mieux encore, ce surcroît de puissance était proposé sans surcoût — une approche impensable dans le marketing automobile actuel.

    La transition vers la DBS en 1967 confirma cette politique : l’élégant coupé à quatre phares était disponible aussi bien en motorisation standard qu’en version Vantage.

    L’anomalie AM Vantage et le renouveau

    Avec le départ de David Brown en 1972, Aston Martin entamait une phase plus chaotique. La DBS V8 devint l’AM V8, tandis que la version six cylindres était rebaptisée AM Vantage. Ironiquement, le badge Vantage, autrefois réservé aux modèles les plus puissants, se retrouvait associé au modèle d’entrée de gamme. De plus, la voiture conservait des roues à rayons dépassées, à l’heure où les jantes en alliage devenaient la norme. Une courte page peu glorieuse de l’histoire Aston.

    La situation fut heureusement corrigée en 1976, avec la renaissance du véritable V8 Vantage. Cette fois, le V8 5,3 litres, équipé de quatre carburateurs Weber inversés, voyait sa puissance grimper à 370 ch. Les performances étaient d’un tout autre calibre : un 0 à 96 km/h en 5,4 secondes et une vitesse de pointe de 274 km/h. Pour accompagner cette cavalerie, Aston renforçait le châssis avec des amortisseurs télescopiques Koni, des ressorts plus courts et plus durs, une barre antiroulis plus épaisse et une voie élargie.

    Visuellement, les spoilers avant et arrière ainsi que la calandre obturée annonçaient la couleur : la Vantage devenait un véritable modèle à part entière. Mieux : elle offrait à la Grande-Bretagne son premier supercar capable de rivaliser avec la Porsche 911 Turbo et la Ferrari Berlinetta Boxer.

    En 1986, l’apparition du Vantage X-Pack, revendiquant environ 410 ch, poussa encore plus loin l’exclusivité. Cette mécanique survoltée fut également montée dans l’extrême Vantage Zagato, un coupé radical capable d’atteindre 299 km/h.

    La transition vers l’ère moderne

    À la fin des années 1980, Aston Martin renouvela toute sa gamme avec l’arrivée de la Virage, mais peina à convaincre. Ce n’est qu’en 1993 que le nom Vantage retrouva son aura avec un imposant coupé à la carrure de cuirassé : twin-supercharged V8, 550 ch et 550 lb-pi (747 Nm) de couple. Baptisé simplement Vantage, il offrait des performances stratosphériques, flirtant avec les 322 km/h dans sa version ultime V600.

    Parallèlement, la DB7, produite dans les anciens locaux de TWR à Bloxham, offrait une nouvelle approche plus légère et plus accessible d’Aston Martin. En 1999, le lancement de la DB7 Vantage, animée par un V12 de 5,9 litres développant 420 ch, permit à Aston d’atteindre 298 km/h et de redynamiser ses ventes.

    La démocratisation du nom Vantage

    Traditionnellement associé aux versions hautes performances, le badge Vantage fut attribué en 2005 au nouveau modèle d’accès de la marque. Si certains puristes ont grincé des dents, la beauté et la sportivité de la VH Vantage ont rapidement conquis les cœurs. Avec une production s’étalant sur 13 ans et un record de ventes à la clé, cette Vantage est devenue l’un des piliers du renouveau Aston Martin.

    En 2018, une nouvelle page s’ouvrit avec l’arrivée de la Vantage équipée du V8 biturbo AMG, forte de 510 ch. Bien que saluée pour son efficacité, elle divisa avec son esthétique controversée et son habitacle jugé daté.

  • Taiichi Ohno : l’homme qui a réinventé la production automobile

    Taiichi Ohno : l’homme qui a réinventé la production automobile

    Dans l’après-guerre, alors que l’industrie automobile mondiale continue de vouer un culte au modèle américain, un ingénieur japonais va discrètement poser les bases d’une révolution silencieuse. Taiichi Ohno, figure aujourd’hui incontournable de l’histoire industrielle, n’a pas cherché à copier les méthodes de Detroit : il a su en comprendre les limites pour inventer un nouveau paradigme. À travers lui, Toyota allait tracer une voie singulière, devenue l’étalon mondial de la performance industrielle.

    De la sidération à la réflexion

    Quand Taiichi Ohno débarque aux États-Unis en 1947, il n’est encore qu’un ingénieur parmi d’autres au sein de la jeune Toyota Motor Company. Fils d’un pays ravagé par la guerre et par la crise économique, il observe avec un œil critique la formidable efficacité du système Ford, notamment à l’usine de River Rouge. Là-bas, la production de masse tourne à plein régime, l’opulence semble inépuisable, et l’organisation du travail repose sur une stricte spécialisation des tâches.

    Pourtant, Ohno sent d’instinct que ce modèle ne saurait être transposé au Japon. Le marché domestique est encore embryonnaire, la diversité des besoins est immense, et l’économie vit sous la contrainte des devises étrangères rares. Surtout, les réalités sociales n’ont rien de commun avec celles des États-Unis : au Japon, l’idée d’un ouvrier interchangeable, licenciable à volonté, est culturellement inacceptable.

    Adapter l’industrie à la réalité japonaise

    Face à ce constat, Ohno n’a pas cherché à critiquer, mais à apprendre. S’il admire la puissance du système fordien, il en mesure aussi les faiblesses. Chez Ford, une presse est dédiée à la fabrication massive d’une seule pièce ; chez Toyota, où les volumes sont dérisoires, un tel investissement serait absurde. Ohno va donc s’attaquer à un problème majeur : comment adapter les outils lourds de production à des petites séries tout en maintenant une productivité élevée.

    Sa réponse ? Réduire au maximum le temps de changement des outils de presse, jusqu’à permettre aux ouvriers eux-mêmes d’effectuer ces opérations complexes. Ce processus, qui prendra des années à perfectionner, débouche sur une avancée majeure : le SMED (Single-Minute Exchange of Die), ou changement rapide d’outillage. Une innovation qui transformera radicalement la flexibilité industrielle.

    De la production de masse au flux tendu

    Plus profondément encore, Taiichi Ohno s’interroge sur l’essence même de la production. À Detroit, les lignes tournent sans interruption, les défauts s’accumulent en bout de chaîne, corrigés par des armées de retoucheurs. Cette gabegie paraît insensée dans une économie où chaque yen compte.

    Ainsi naît l’idée fondatrice du Toyota Production System (TPS) : la qualité doit être intégrée dès la production. Plutôt que de laisser filer les erreurs, chaque ouvrier est autorisé – et même encouragé – à stopper la ligne de montage s’il détecte un problème. Mieux encore, les équipes sont invitées à collaborer, à s’entraider, à analyser ensemble les causes des erreurs pour éviter qu’elles ne se reproduisent.

    Ce concept de Kaizen – amélioration continue – rompt avec les habitudes occidentales. À la spécialisation extrême et à l’isolement des ouvriers, Ohno oppose la polyvalence, la responsabilité collective et l’enrichissement du travail.

    La dimension sociale, un levier décisif

    Le Japon d’après-guerre a vu émerger un pacte social unique : l’emploi à vie, l’augmentation salariale à l’ancienneté, et un lien fort entre l’entreprise et ses salariés. Ohno intègre pleinement cette réalité dans son modèle. Les ouvriers ne sont plus des variables d’ajustement mais des acteurs de la performance de l’usine.

    En capitalisant sur l’expérience et les compétences accumulées au fil des ans, Toyota construit une culture d’entreprise où chaque travailleur est un expert en puissance, capable d’identifier les problèmes, de proposer des solutions, et d’innover sur son poste. Loin du taylorisme classique, le TPS repose ainsi sur une humanisation du travail industriel.

    Les fournisseurs au cœur du système

    Autre pilier du modèle développé par Ohno : l’organisation de la sous-traitance. Là où les industriels américains hésitent entre produire en interne ou acheter à l’extérieur (make or buy), Toyota structure son écosystème autour de partenaires de confiance. Les fournisseurs dits de « premier rang » deviennent des prolongements naturels de l’usine, formés aux mêmes méthodes de production et au même souci de la qualité.

    Ce réseau agile permet à Toyota d’optimiser ses coûts, de raccourcir ses délais, et surtout de maintenir une flexibilité inégalée face à l’évolution du marché.

    Une révolution mondiale discrète

    Le Just-In-Time, le Kaizen, le respect des opérateurs : ces concepts, encore méconnus dans les années 1960, finiront par devenir des standards mondiaux dans les décennies suivantes. Ford, General Motors, Renault, Volkswagen : tous finiront par se convertir aux méthodes de Toyota, parfois à contrecœur, souvent avec admiration.

    À travers son approche méthodique, humble et profondément humaine, Taiichi Ohno n’a pas seulement transformé Toyota. Il a prouvé qu’une industrie pouvait prospérer autrement que par la course à la quantité, en mettant la qualité, l’intelligence collective et la flexibilité au cœur du système.

  • Mercedes-Benz Classe G « Stronger Than The 1980s » : l’hommage pop d’un monument de l’automobile

    Mercedes-Benz Classe G « Stronger Than The 1980s » : l’hommage pop d’un monument de l’automobile

    C’est une légende qui ne vieillit pas. Depuis 1979, le Mercedes-Benz Classe G trace sa route sans jamais vraiment changer. Toujours aussi carrée, toujours aussi inébranlable. En 2025, il s’offre un retour aux sources avec une série spéciale baptisée – non sans une certaine audace – « Stronger Than The 1980s ». Un hommage esthétique aux premières années d’un 4×4 devenu mythe, et une célébration de son incroyable longévité.

    Aux origines du G : un projet austro-allemand aux accents militaires

    La genèse du Classe G remonte au tout début des années 1970, lorsqu’un partenariat est scellé entre Daimler-Benz et l’autrichien Steyr-Daimler-Puch. L’idée est simple : créer un véhicule tout-terrain robuste, modulable, capable de répondre aux besoins militaires comme civils. À l’époque, Mercedes n’a pas encore de 4×4 dans sa gamme. Ce projet est donc une première.

    Le cahier des charges impose une construction simple mais solide, une transmission intégrale permanente, une garde au sol généreuse et un châssis séparé, gage de durabilité. Les premiers prototypes sont testés dès 1974 dans les conditions les plus extrêmes – sable, neige, rochers – et le site de Schöckl, une montagne près de Graz en Autriche, devient rapidement le terrain de jeu officiel de la future Classe G.

    La production débute en février 1979, dans une usine spécialement aménagée à Graz. Les modèles civils – 230 G, 240 GD, 280 GE… – sont spartiates, mais efficaces. Les versions militaires, elles, partent rapidement équiper de nombreuses armées à travers le monde, dont la Bundeswehr allemande, les forces françaises (sous licence Peugeot P4), et même le Vatican, avec une version papamobile.

    Une silhouette inchangée… mais un statut métamorphosé

    Au fil des années, le Classe G reste visuellement fidèle à sa forme originelle. Pourtant, sa carrière prend un virage inattendu dans les années 1990, lorsque des célébrités et chefs d’État commencent à adopter ce véhicule rustique comme symbole de puissance et de statut social. Mercedes embrasse cette évolution, transformant son 4×4 militaire en SUV de luxe, sans jamais renier ses capacités tout-terrain.

    Aujourd’hui encore, chaque Classe G est construite à la main à Graz, sur une ligne dédiée, avec des procédés artisanaux rares dans l’industrie automobile contemporaine. Le modèle a survécu à la rationalisation de l’ère DaimlerChrysler, à la vague des SUV premium plus aseptisés et à l’électrification rampante. Preuve ultime de son ancrage : une version 100 % électrique, baptisée EQG, est désormais en développement.

    Retour vers les 80s : trois couleurs, un slogan et beaucoup de nostalgie

    C’est dans ce contexte qu’apparaît l’édition « Stronger Than The 1980s ». L’idée ? Raviver la mémoire des premières années, sans céder aux sirènes du néo-rétro pur. Ici, Mercedes-Benz ne modifie pas la plateforme ou la mécanique. Elle habille simplement le Classe G 550 (V8 4.0 biturbo de 416 chevaux) d’un costume taillé dans les années 1980.

    Trois teintes, toutes issues du nuancier historique de la marque, sont proposées :

    • Agave Green : un vert militaire discret, presque mat, très proche des premiers G civils et militaires.

    • Cream : une teinte vanille, hommage évident aux taxis allemands de l’époque.

    • Colorado Beige : un beige sable inspiré des zones désertiques, autre terrain de jeu du G.

    Le look est complété par des détails soignés : pare-buffle noir, calandre noire, clignotants oranges sur les ailes avant (très réglementaires à l’époque), bavettes estampillées « Professional », et jantes au style rétro évoquant les berlines Mercedes W123.

    Avec la teinte Agave Green, Mercedes ajoute même une galerie de toit noire, fonctionnelle et parfaitement intégrée dans l’esprit utilitaire originel.

    Un intérieur vintage… mais digitalisé

    Dans l’habitacle, l’ambiance évoque les premiers G, mais avec une nette modernisation. Les sièges sont recouverts d’un tissu écossais gris clair, rappelant les selleries des modèles des années 1980. Mais le contraste est saisissant avec le double écran numérique ultra-moderne qui occupe la planche de bord.

    Mercedes a ajouté plusieurs détails exclusifs pour cette série limitée :

    • Seuils de porte gravés de la topographie du Schöckl, montagne-test du G depuis 45 ans.

    • Logo « Stronger Than The 1980s » gravé sur la poignée passager.

    • Projecteurs de logo sur les portes, qui affichent « G – Stronger Than Time » au sol à l’ouverture.

    Tout un programme.

    Une série très exclusive pour les nostalgiques exigeants

    Seulement 460 exemplaires seront produits dans le monde. Chacun portera une plaque « 1 of 460 », bien qu’ils ne soient pas numérotés individuellement. Mercedes-Benz n’a pas encore précisé la répartition par marché, mais les premières livraisons sont prévues pour l’automne 2025, avec un prix à annoncer ultérieurement.

    À noter : cette série spéciale est basée sur le G 550 américain, toujours animé par le fameux V8 essence. L’Europe, qui a récemment vu disparaître cette motorisation au profit du G 500 six cylindres micro-hybride, pourrait être exclue de cette version spécifique – à moins d’un ajustement marketing ou réglementaire de dernière minute.

    Pourquoi ça fonctionne ?

    Parce que le Classe G est unique. Aucun autre véhicule au monde n’a connu une telle longévité sans réinvention complète. Parce qu’elle cristallise à la fois la robustesse du passé et l’exclusivité du présent. Parce que l’édition « Stronger Than The 1980s » réunit ces deux mondes : celui du G utilitaire, conçu pour la guerre froide, et celui du G statutaire, pensé pour la Croisette.

    C’est une série limitée qui ne cherche pas à plaire à tout le monde. Elle vise les connaisseurs, les collectionneurs, ceux qui savent que derrière la ligne cubique se cache un morceau d’histoire automobile.

    Et surtout, elle rappelle une vérité simple : le Classe G n’a pas seulement survécu aux années 1980. Il les a dominées, traversées… et laissées loin derrière.

  • Alfa Romeo Giulietta Berlina : 70 ans d’audace industrielle et de charme populaire

    Alfa Romeo Giulietta Berlina : 70 ans d’audace industrielle et de charme populaire

    Turin, 20 avril 1955. Sur le stand Alfa Romeo du Salon de l’Automobile, les visiteurs découvrent une berline compacte au design sobre et élégant, animée par une mécanique habituellement réservée aux voitures de sport. Ce jour-là, la Giulietta Berlina entre dans l’histoire. Soixante-dix ans plus tard, elle incarne toujours l’instant charnière où Alfa Romeo s’est muée en constructeur moderne, capable de conjuguer grande série et âme sportive. Retour sur une icône fondatrice, à la fois témoin et moteur de l’Italie renaissante d’après-guerre.

    De la course à la route, le pari de l’industrialisation

    À l’orée des années 1950, Alfa Romeo est avant tout un constructeur de prestige, auréolé de ses victoires en Formule 1 — avec Farina en 1950, Fangio en 1951 — mais encore très artisanal dans sa production. La 1900, lancée en 1950, amorce un virage vers une fabrication plus rationalisée. La Giulietta va enfoncer le clou. Pensée pour une clientèle plus large sans renier l’ADN technique de la marque au Biscione, elle va révolutionner la voiture moyenne européenne.

    Si l’histoire retient que la Giulietta Berlina a été officiellement présentée en avril 1955, c’est en réalité son alter ego plus sportif, le coupé Giulietta Sprint, qui la précède d’un an. Présentée en 1954 au Salon de Turin, la Sprint dessinée par Franco Scaglione chez Bertone fait sensation. Ses lignes fluides, son gabarit compact et surtout son moteur double arbre de 1 290 cm³ en aluminium ouvrent une nouvelle ère. C’est cette base mécanique, raffinée et performante, que l’on retrouvera sous le capot de la Giulietta Berlina.

    Une familiale qui gagne des courses

    Avec sa Giulietta Berlina, Alfa Romeo invente presque à elle seule le concept de berline sportive accessible. Son slogan ? « L’auto di famiglia che vince le corse » — la voiture familiale qui gagne des courses. Derrière cette formule audacieuse se cache une réalité mécanique : la Giulietta adopte un moteur quatre-cylindres à double arbre à cames en tête, un raffinement rare sur des modèles de grande diffusion. Développant 53 ch dans sa première version, ce bloc permet à la berline de frôler les 140 km/h, une performance remarquable pour une voiture de moins de 900 kg.

    Son comportement dynamique n’est pas en reste : propulsion, suspension indépendante à l’avant avec triangles superposés, pont arrière avec ressorts hélicoïdaux et barres Panhard, freins à tambours sur les quatre roues. La boîte de vitesses est montée sur le volant (au plancher dès 1957), et la planche de bord dégage une certaine modernité, dans le ton de l’époque.

    Une ligne discrète, mais soignée

    Esthétiquement, la Giulietta Berlina cultive une forme de retenue, surtout comparée aux exubérances américaines du moment. Dessinée en interne par le Centro Stile Alfa Romeo, elle reprend quelques éléments visuels de la Sprint, notamment dans le traitement de la face avant, esquissant déjà ce que l’on nomme aujourd’hui le family feeling. Compacte (4,1 mètres de long), elle parvient à offrir cinq vraies places et un coffre logeable, sans sacrifier ses ambitions sportives.

    Mais c’est bien sous sa robe discrète que se cachent les trésors de technologie. Le bloc moteur est en aluminium, tout comme la boîte de vitesses et le carter de différentiel. Les chemises des cylindres sont insérées sous pression dans une fonte spéciale. La distribution par double arbre à cames, alimentée par un carburateur simple corps Solex, confère au petit moteur une vivacité rare. Le vilebrequin repose sur cinq paliers, garantissant une fiabilité exemplaire.

    Une révolution industrielle silencieuse

    La Giulietta ne se contente pas de faire entrer Alfa Romeo dans les foyers italiens, elle transforme aussi profondément l’usine du Portello à Milan. Sous l’impulsion de l’ingénieur autrichien Rudolf Hruska, l’outil industriel est repensé de fond en comble. Là où la production était encore artisanale au début des années 50 (50 voitures par jour), elle passe à 200 unités quotidiennes quelques années plus tard. La Giulietta Berlina devient ainsi l’étendard d’un constructeur en voie de modernisation, et par extension, le symbole d’une Italie qui se relève.

    Une star à l’écran, une muse dans la rue

    Le succès commercial est immédiat. Plus de 130 000 exemplaires de la Giulietta Berlina seront produits entre 1955 et 1964, sur un total de 177 690 Giulietta toutes variantes confondues (Sprint, Spider, Sprint Speciale, SZ…). La Giulietta entre dans la culture populaire. Elle apparaît dans des films de Dino Risi, auprès de Mastroianni et Gassman. En 1960, le 100 001e exemplaire est remis à Giulietta Masina, muse de Fellini. En février 1956, elle trône sur la première couverture du magazine Quattroruote.

    Son nom lui-même est empreint de romantisme. Deux légendes coexistent : l’une évoque la femme du poète Leonardo Sinisgalli, l’autre un prince russe qui, lors d’un dîner parisien, aurait lancé à des dirigeants d’Alfa Romeo : « Vous êtes huit Roméo, mais pas une seule Juliette ! »

    L’héritage d’un mythe

    La Giulietta Berlina a pavé la voie à la Giulia, qui en 1962 reprend la recette avec encore plus d’efficacité et d’aérodynamisme (le fameux « coda tronca »). Mais elle demeure l’initiatrice d’une catégorie à part entière : celle des berlines sportives compactes, qui trouvera ses héritières chez BMW avec la 1600, puis 2002, ou chez Lancia avec la Fulvia Berlina.

    Aujourd’hui, à l’occasion de son 70e anniversaire, Alfa Romeo et Stellantis Heritage rendent hommage à ce modèle qui incarne tout ce que la marque sait faire de mieux : associer la rigueur mécanique à la passion latine, faire vibrer la fibre sportive sans renoncer au quotidien, et surtout, faire rêver en roulant.

  • Lancia Ypsilon : un souffle d’autonomie pour l’électrique, un sursaut d’honnêteté pour l’hybride

    Lancia Ypsilon : un souffle d’autonomie pour l’électrique, un sursaut d’honnêteté pour l’hybride

    À l’heure où l’électrification transforme la ville en terrain de chasse pour les citadines affûtées, Lancia affine les armes de son emblématique Ypsilon. Avec une autonomie portée à 425 km pour la version électrique et une communication revue sur la puissance réelle de l’hybride, la marque italienne redéfinit les contours de sa renaissance.

    En apparence, ce sont deux mises à jour techniques. En profondeur, c’est un message clair : Lancia ne revient pas simplement pour jouer les nostalgiques, elle entend bien s’imposer à nouveau comme une marque exigeante, à la croisée du style, de la technologie et de la responsabilité. L’évolution récente de la gamme Ypsilon en est le dernier témoignage.

    Une électrique qui ose l’endurance

    Il y a encore quelques mois, la Lancia Ypsilon Elettrica affichait 403 km d’autonomie WLTP. Ce chiffre, déjà plus qu’honorable pour une citadine, gagne aujourd’hui 22 kilomètres supplémentaires, pour culminer à 425 km en cycle mixte WLTP. Une progression d’environ 6 %, qui ne doit rien au hasard.

    La recette tient en deux mots : efficience et optimisation. La batterie lithium-ion NMC de 54 kWh utiles conserve sa chimie de prédilection — nickel-manganèse-cobalt — mais bénéficie de réglages affinés et d’une meilleure gestion thermique. En parallèle, le groupe motopropulseur de 115 kW (156 ch) a été retravaillé pour abaisser la consommation moyenne à 14,3 kWh/100 km, un chiffre remarquable dans le segment B premium.

    Pour ceux qui imaginent encore que l’électrique implique de longues pauses sur autoroute, Lancia rappelle que 80 % de la batterie peut être récupérée en moins de 30 minutes sur une borne rapide DC de 100 kW. De quoi redéfinir le périmètre d’usage de la voiture électrique urbaine, sans tomber dans la surenchère des SUV obèses.

    L’hybride joue carte sur table

    L’autre nouveauté de la gamme ne réside pas sous le capot, mais dans la façon dont Lancia parle de sa version hybride. Jusqu’ici annoncée à 100 chevaux, l’Ypsilon Ibrida revendique désormais 110 chevaux. Un changement sans retouche mécanique, qui anticipe simplement l’évolution réglementaire.

    En effet, à partir de novembre 2027, la norme Euro 7 imposera de communiquer la puissance combinée des véhicules hybrides — c’est-à-dire l’alliance des moteurs thermique et électrique — et non plus celle du seul moteur à combustion. Lancia prend donc de l’avance, alignant son discours sur celui déjà adopté par plusieurs constructeurs japonais et coréens.

    Derrière les chiffres, la mécanique reste inchangée : un bloc trois cylindres 1.2 turbo de 74 kW (100 ch), épaulé par une machine électrique de 21 kW (28 ch) intégrée à la transmission automatique. Le tout pour 81 kW combinés, soit les 110 ch désormais mis en avant. Les performances, la consommation et la technologie hybride demeurent identiques. Ce qui change, c’est l’honnêteté de l’étiquette.

    Reste à savoir si certains autres constructeurs, qui additionnaient simplement les puissances maximales des différentes motorisations, vont savoir s’adapter à ce changement. Car certains modèles affichaient des puissances qui n’existaient simplement pas…

    Transparence, efficience et cohérence

    Ces deux annonces ont un point commun : elles parlent vrai. Dans un marché encore souvent pollué par des valeurs d’autonomie irréalistes et des puissances affichées à géométrie variable, Lancia choisit de jouer la carte de la lisibilité. L’Ypsilon ne promet pas de révolutionner la mobilité, mais elle continue d’incarner un équilibre subtil entre modernité technologique et élégance assumée.

    Dans sa version 100 % électrique, elle devient l’une des citadines les plus efficientes du moment, sans céder aux sirènes du gigantisme. Dans sa version hybride, elle adopte une posture pédagogique, en expliquant clairement ce que le conducteur a sous la pédale.

    Un retour aux racines de Lancia… mais dans le futur

    Lancia l’affirme : l’Ypsilon est la première pierre d’un renouveau ambitieux. Avec cette mise à jour, la citadine chic italienne affirme son positionnement sur le segment B premium : plus sobre qu’une Mini, plus latine qu’une Audi A1, plus statutaire qu’une 208.

    Dans un monde automobile tiraillé entre dogmatisme écologique et nostalgie rétro, la nouvelle Ypsilon avance à pas mesurés, mais sûrs. Elle ne clame pas être l’héroïne d’une révolution, mais elle s’impose comme une alliée fiable, claire et cohérente, que l’on soit électromobiliste convaincu ou simple automobiliste en transition.

  • Essai Alfa Romeo Tonale Intensa : l’éclat d’une noblesse assumée

    Essai Alfa Romeo Tonale Intensa : l’éclat d’une noblesse assumée

    Il n’est pas si fréquent de voir une édition limitée parvenir à transcender l’exercice du marketing pour offrir une vraie montée en gamme perceptible, presque sensorielle. Avec la finition Intensa, Alfa Romeo démontre qu’un SUV peut être bien plus qu’un simple maillon de la chaîne produit. Sur les routes sinueuses et boisées des Yvelines, le Tonale hybride rechargeable en livrée Intensa a dévoilé une facette rare : celle d’un véhicule qui conjugue rigueur technologique, passion esthétique et plaisir de conduite à l’italienne.

    Une allure qui magnifie le style néo-milanais

    La première impression est toujours visuelle. Et ici, elle frappe fort. Posé sur ses jantes de 20 pouces à finition diamantée et accents dorés, le Tonale Intensa ne cherche pas à se fondre dans le paysage. Il s’impose. Le traitement des détails — sorties d’échappement noir brillant, étriers de frein ponctués d’or, logos Intensa discrets mais présents — confère à l’ensemble une noblesse presque cérémoniale, sans jamais tomber dans l’excès ostentatoire.

    La teinte Vert Montréal du modèle essayé, éclatante sous la lumière filtrée des forêts denses de Rambouillet, agit comme un rappel au passé glorieux de la marque. On pense immédiatement aux coupés Alfa des années 60, ceux qui osaient des associations chromatiques audacieuses. Ce vert profond magnifie les lignes musclées du Tonale, tandis que les inserts dorés jouent avec la lumière, clin d’œil assumé à des appellations historiques telles que Freccia d’Oro ou Quadrifoglio Oro.

    Intérieur : hommage au savoir-faire italien

    À bord, l’atmosphère est à la fois feutrée et sportive. Alcantara noir sur les sièges et le tableau de bord, surpiqûres couleur havane, éclairage d’ambiance multicolore, volant à double teinte : tout ici évoque l’artisanat d’exception et la volonté d’ancrer le conducteur dans une expérience immersive. Les logos Intensa, brodés ou embossés, ponctuent l’habitacle avec la retenue nécessaire pour éviter la surcharge.

    Le combiné d’instrumentation revu sur ce millésime MY25 affiche des graphismes nets et personnalisables, tandis que le sélecteur rotatif de transmission sur la console centrale s’inscrit dans une logique de raffinement ergonomique. Alfa Romeo a soigné chaque détail. Même la position de conduite, souvent négligée dans les SUV compacts, s’avère ici irréprochable, avec une assise basse et un volant vertical rappelant les berlines sportives de la marque.

    Mécanique Q4 : la rigueur au service de l’agrément

    Sous le capot, cette version hybride rechargeable associe un moteur essence 1.3 turbo à un bloc électrique arrière pour offrir une transmission intégrale Q4. Le tout développe 280 chevaux cumulés, transmis via une boîte automatique à six rapports. Sur le papier, rien de nouveau. Mais c’est dans la mise au point que le Tonale Intensa se distingue.

    La chaîne de traction délivre une puissance progressive mais bien présente, avec une poussée franche dès les mi-régimes. En mode « Dynamic », la réactivité s’aiguise, les suspensions pilotées raffermissent leur réponse, et le SUV se transforme en véritable compacte sportive, malgré ses 1,9 tonne. Sur les départementales tortueuses de la vallée de Chevreuse, il enchaîne les courbes avec un aplomb rassurant, en limitant les mouvements de caisse sans sacrifier le confort.

    En usage quotidien, le mode « Advanced Efficiency » favorise l’électrique, offrant jusqu’à 60 km d’autonomie réelle, de quoi couvrir la majorité des trajets urbains et périurbains sans solliciter le moteur thermique. Une transition douce, parfaitement gérée par l’interface embarquée, qui illustre le savoir-faire de Stellantis en matière d’hybridation.

    Un luxe technologique bien dosé

    L’équipement de série de la version Intensa frôle le sans-faute. Sièges chauffants à réglages électriques, système audio Harman Kardon à 14 haut-parleurs, conduite autonome de niveau 2, interface tactile fluide : tout y est, sans besoin de cocher des options supplémentaires. Le rapport prix/prestation, bien que premium (aux alentours de 58 000 € selon les configurations), reste cohérent au regard du contenu et de la sophistication perçue.

    Mention spéciale à l’ergonomie numérique : les commandes physiques sont maintenues pour la climatisation et les fonctions essentielles, un choix salutaire qui tranche avec certaines concurrentes allemandes adeptes du tout-tactile.

    Une édition limitée pleine de sens

    En nommant cette version « Intensa », Alfa Romeo aurait pu tomber dans le piège de la grandiloquence marketing. Il n’en est rien. L’intensité promise est bien là, à la fois visuelle, tactile, auditive et dynamique. Ce Tonale hybride rechargeable ne cherche pas à être le plus rapide ni le plus technologique du segment. Il vise autre chose : l’émotion.

    L’émotion de conduire un SUV qui ne renonce pas à ses racines italiennes. L’émotion d’un design pensé comme un hommage vivant à l’histoire de la marque. L’émotion d’un équilibre rare entre confort et dynamisme. L’émotion, enfin, d’avoir entre les mains une automobile qui, pour une fois, place le plaisir au cœur de sa proposition.

    Tonale, à sa juste mesure

    Dans cette version Intensa, le Tonale PHEV 280 ch devient sans conteste l’un des meilleurs SUV compacts premium du moment. Non pas parce qu’il surclasse ses rivaux sur le plan objectif — les BMW X1, Mercedes GLA ou Audi Q3 gardent certains avantages technologiques ou image — mais parce qu’il propose autre chose. Une vision différente, sensuelle, passionnée, de ce que peut être l’automobile électrifiée. Une Alfa Romeo, en somme.

  • Essai Jeep Avenger 4xe : la liberté n’est pas un slogan

    Essai Jeep Avenger 4xe : la liberté n’est pas un slogan

    Par essence, chaque voiture raconte quelque chose de son époque. Mais rares sont celles qui affirment, génération après génération, la même vision du monde. Chez Jeep, la liberté n’est pas une formule marketing. C’est une ligne de conduite.

    En Toscane, les collines ondulent comme des vagues figées dans le temps, les sentiers de terre rouge serpentent entre les oliveraies et les cyprès. Ici, la Jeep Avenger 4xe ne se contente pas de faire bonne figure. Elle s’exprime. Elle affirme. Elle revendique. Plus qu’un nouveau modèle, elle incarne une manière d’être : libre, indépendante, indocile.

    L’esprit Jeep : une philosophie, pas un badge

    Depuis que le nom est devenu un mythe, Jeep n’a cessé de rappeler au monde que l’automobile peut être un outil d’émancipation. Une machine qui ne nous enferme pas, mais qui nous envoie plus loin. Cela commence souvent par un sentier, un gué, une montée improbable. Et cela finit par un mode de vie.

    Oui, la Jeep Avenger partage des bases industrielles avec d’autres véhicules du groupe Stellantis. Mais croire qu’il suffit de greffer une transmission intégrale et quelques badges pour obtenir une « vraie Jeep », c’est passer à côté de l’essentiel. L’Avenger 4xe a été réimaginée à chaque niveau pour incarner ce qui fait la singularité de la marque : une relation quasi philosophique avec la nature, les éléments et l’inconnu.

    À Turin, à Detroit, à Auburn Hills ou ailleurs, les gens qui conçoivent les Jeep n’ont pas le même regard que ceux qui font « des SUV ». Pour eux, un chemin non carrossé est une invitation. Un sommet enneigé, un défi. Une rivière, un terrain de jeu. Et cela se sent dans chaque détail de cette Avenger.

    Une hybride sans compromis

    Avec son architecture 4xe, Jeep opère un virage stratégique et technique. Ici, le moteur thermique 1.2 turbo envoie sa puissance sur les roues avant, pendant que deux moteurs électriques (un sur chaque essieu) assurent la motricité arrière quand nécessaire. Ce n’est pas une transmission intégrale en continu, mais c’est un système redoutablement efficace, calibré pour répondre à l’appel du terrain.

    Et la surprise, c’est qu’en tout-terrain, ça fonctionne. Vraiment. Pieds dans la boue, roues dans le vide, pierres qui roulent sous la caisse… La Jeep Avenger 4xe ne tremble pas. Elle monte, elle glisse un peu, puis elle passe. Le mode « Mud » enclenché, les moteurs électriques arrière se synchronisent avec précision, même à très basse vitesse. Et lorsque l’adhérence revient, c’est comme si la voiture soufflait : je t’avais dit que je pouvais le faire.

    Bien sûr, cette Jeep est aussi faite pour la ville. Mais à l’inverse des SUV aseptisés, elle ne s’est pas laissée dompter. Elle reste sauvage, un peu rugueuse parfois, mais toujours fidèle à ce qu’on attend d’elle. Avec son look de mini-Wrangler et son assise légèrement surélevée, elle vous regarde droit dans les yeux : tu veux aller où aujourd’hui ?

    Plus qu’une voiture, une déclaration

    L’histoire de Jeep, c’est celle d’un outil militaire devenu icône populaire. D’un besoin fonctionnel devenu une envie viscérale : celle de partir, de sortir des sentiers battus, de voir ce qu’il y a derrière la colline. À ce titre, l’Avenger 4xe ne se contente pas de cocher des cases techniques. Elle perpétue un héritage.

    Dans l’industrie automobile moderne, les plateformes sont partagées, les moteurs standardisés, les styles globalisés. Mais chez Jeep, il reste cette volonté farouche de faire différent. Le badge « 4xe » n’est pas une coquetterie. C’est une porte ouverte sur le futur. Un futur dans lequel la technologie ne remplace pas l’émotion, mais la prolonge.

    Les ingénieurs Jeep — les vrais, ceux qui testent leurs prototypes sur les pistes de Moab ou dans la neige suédoise — n’ont pas fait de compromis. Ils ont mis de la boue dans le développement. Ils ont mis de la poussière dans les logiciels. Et ça change tout.

    Et la liberté, dans tout ça ?

    La liberté, ce n’est pas juste aller où l’on veut. C’est pouvoir oser. Oser sortir, oser tenter, oser vivre. Dans un monde où les voitures sont de plus en plus uniformes, la Jeep Avenger 4xe rappelle que certains noms portent un sens. Jeep n’est pas une marque comme les autres. C’est un mouvement.

    Et dans cette Toscane baignée de lumière, où les routes droites sont rares et les horizons ouverts, l’Avenger 4xe n’est pas à sa place : elle est chez elle. Parce que là où les autres voient un obstacle, Jeep voit une opportunité. Et ça, ce n’est pas une question de technologie. C’est une question d’état d’esprit.

  • Alpine A290 : première victoire, premières promesses

    Alpine A290 : première victoire, premières promesses

    Sur les routes slovènes du Mahle Eco Rally, la nouvelle Alpine A290 a signé un succès aussi discret que fondateur. Engagée en FIA EcoRally Cup pour la troisième fois seulement, la citadine électrique française ouvre son palmarès avec panache grâce au duo Manu Guigou / Emilien Le Borgne. Une victoire dans la catégorie 2 (modèles récemment commercialisés) qui donne le ton d’une saison électrique… dans tous les sens du terme.

    Il y a des victoires qui ne font pas de bruit, mais qui disent tout. En s’imposant en Slovénie lors de la troisième manche de la FIA EcoRally Cup 2025, l’Alpine A290 confirme ce que son titre de Voiture de l’Année laissait présager : elle n’est pas qu’un exercice de style néo-rétro, mais une authentique machine taillée pour la performance efficiente.

    Pour Manu Guigou, l’ambassadeur historique de la marque passé aux kilowatts, cette victoire a un goût particulier. C’est la première dans cette discipline exigeante qu’est l’EcoRally, où chaque dixième de kilowattheure consommé compte autant qu’un dixième de seconde sur une spéciale de rallye classique. « Nous venons au départ des rallyes avec notre propre voiture, posons les stickers du rallye, et partons comme à l’époque des rallyes d’antan », résume-t-il. Une simplicité apparente qui cache une redoutable complexité technique et stratégique.

    Un exercice d’équilibre entre précision et régularité

    L’EcoRally n’a rien d’un rallye de démonstration. Il s’agit ici d’allier navigation millimétrée, régularité à toute épreuve et conduite efficiente. Le départ de chaque étape se fait avec un roadbook distribué à peine trente minutes auparavant. Et sur les routes sinueuses slovènes — dont certaines avaient déjà vu passer Guigou en A110 RGT lors d’une victoire scratch en 2021 — l’erreur ne pardonne pas. D’autant que l’épreuve est jalonnée de points de contrôle secrets, interdisant tout relâchement.

    Malgré une récente opération du genou, le pilote a tenu bon sur les quelque 500 kilomètres de l’épreuve, aidé par l’agilité naturelle de l’A290. Avec 11 meilleurs temps sur 15 possibles, l’équipage français a dominé la catégorie 2 de bout en bout, devant des concurrents aguerris venus de toute l’Europe. Le score final — 1 918 points, contre 3 183 pour les seconds, les Tchèques Timura / Homolova en Hyundai Inster — illustre l’écart de niveau.

    Pour Emilien Le Borgne, copilote, la tâche n’était pas simple. « Il a fallu comprendre le fonctionnement spécifique de ce rallye pour anticiper les zones où nous pouvions gagner du temps ou de l’énergie. Face à des équipages avec plusieurs saisons d’expérience, il faut travailler deux fois plus. »

    Un laboratoire mobile pour l’Alpine A290

    Au-delà du résultat sportif, cette victoire est aussi un signal fort pour Alpine. L’EcoRally, réservé aux modèles 100 % électriques de série, impose de concourir avec des voitures conformes à la fiche technique constructeur. Aucun artifice, pas de spéciales déguisées : le véhicule est tel que le client le reçoit. Et c’est justement ce que souhaite mettre en avant la marque.

    En marge de l’épreuve, Alpine avait organisé une rencontre avec ses équipes slovènes à l’Alpine Store de Lesce, point de ralliement pour les journalistes, clients et passionnés. Essais routiers, démonstrations techniques et échanges autour de la philosophie Alpine ont jalonné la matinée, dans une ambiance résolument conviviale. « C’est très intéressant de pouvoir partager cette passion avec les conducteurs. Toutes les équipes sont très impliquées. Je ne doute pas que nous allons faire naître des vocations », confie Manu Guigou.

    L’événement s’inscrivait également dans le cadre du lancement commercial de l’A290 en Slovénie, un marché stratégique pour Alpine dans sa phase d’expansion européenne. Une manière élégante de marier sport, technologie et proximité client.

    Un calendrier qui monte en puissance

    Prochaine étape pour l’Alpine A290 : la Belgique, du 22 au 24 mai, pour une épreuve aux profils routiers bien différents. Si la Slovénie favorisait l’agilité et la gestion du relief, la Belgique exigera davantage de précision sur des routes rapides, où l’aérodynamique et la constance joueront un rôle majeur. Manu Guigou, confiant : « Ce résultat est très prometteur pour la suite de la saison. Je serai plus à l’aise physiquement et nous avons maintenant une vraie base de travail. »

    Avec ce premier succès, l’Alpine A290 pose donc un jalon. Elle prouve que l’électrification, lorsqu’elle est pensée avec exigence, peut aussi devenir un terrain de jeu. Et sur ce terrain-là, Alpine a bien l’intention de mener la danse.

    Classement FIA EcoRally Cup – Catégorie 2 (voitures récemment commercialisées)

    1. Manu Guigou / Emilien Le Borgne (FRA/FRA) – Alpine A290 – 1 918 points

    2. Petr Timura / Monika Homolova (CZE/CZE) – Hyundai Inster – 3 183 points

    3. Dejan Sirk / Vojko Fon (SLO/SLO) – Skoda Elroq – 3 857 points

  • Jeremy Clarkson traite Elon Musk d’« idiot » et jubile face aux déboires de Tesla

    Jeremy Clarkson traite Elon Musk d’« idiot » et jubile face aux déboires de Tesla

    La vieille querelle entre Jeremy Clarkson et Elon Musk connaît un nouveau chapitre. L’ancien animateur de Top Gear n’a pas mâché ses mots à l’égard du patron de Tesla, le qualifiant d’« idiot » et se délectant ouvertement des difficultés actuelles rencontrées par la marque automobile.

    Un conflit ancien remis au goût du jour

    Dans une chronique récente pour le Sunday Times britannique, Jeremy Clarkson a de nouveau ciblé Elon Musk. Ses commentaires interviennent alors que Tesla fait face à une baisse significative de ses ventes et à des actes de vandalisme visant ses véhicules et showrooms. Pour Clarkson, ces déboires sont une sorte de « retour de bâton ».

    Le conflit entre les deux hommes remonte à 2008. À l’époque, dans Top Gear sur la BBC, Clarkson avait réalisé un essai critique du premier Tesla Roadster. Le reportage montrait notamment la voiture avec des problèmes de freins et une autonomie prétendument limitée à 55 miles (environ 88 km), bien que Clarkson ait plus tard précisé dans sa chronique que le souci principal concernait la fiabilité générale, le prix élevé et la tenue de route.

    Mécontent, Elon Musk avait intenté un procès en diffamation contre la BBC, accusant Clarkson d’être partial contre les voitures électriques et d’avoir écrit sa critique avant même d’essayer la voiture. Tesla a cependant perdu ce procès en 2011, ainsi que l’appel en 2013. Selon Clarkson, Musk n’a jamais digéré cette défaite.

    De son côté, Musk avait déclaré en 2013 que Top Gear privilégiait le divertissement à l’information factuelle.

    Clarkson savoure sa « victoire »

    Aujourd’hui, face aux difficultés de Tesla – dont les ventes en Europe ont chuté de 44% le mois dernier – Clarkson ne cache pas sa satisfaction. « La décision soudaine et mondiale de ne plus soutenir Tesla et de casser les rétroviseurs d’autant de ses voitures que possible n’est pas drôle », écrit-il, avant d’ajouter : « Mais c’est aussi plutôt hilarant. Surtout si vous êtes moi. »

    Il enfonce le clou : « J’adorerais rappeler à tous les conducteurs de Tesla que je vous avais prévenus il y a 17 ans que rien de bon ne sortirait de votre choix d’achat. Mais vous n’avez pas écouté. Vous avez choisi de croire M. Musk. »

    Clarkson rapporte même une anecdote cinglante : un de ses amis aurait apposé un autocollant sur sa propre Tesla indiquant « qu’il l’avait achetée avant de savoir que Musk était un idiot ».

    Faisant référence à une autre polémique où Musk avait traité de « pedo guy » un spéléologue britannique impliqué dans le sauvetage d’enfants en Thaïlande (affaire pour laquelle Musk a été poursuivi mais a gagné), Clarkson ajoute : « J’aurais vraiment dû le poursuivre en retour [pour l’affaire Top Gear], mais je craignais qu’il ne me traite de pédophile, alors j’ai simplement attendu sur la rive que son corps flotte jusqu’à moi. Et maintenant, c’est le cas. »

    Pour Jeremy Clarkson, les problèmes actuels de Tesla sont directement liés à la personnalité et aux prises de position publiques de plus en plus controversées d’Elon Musk. L’animateur britannique semble savourer ce qu’il perçoit comme une revanche tardive, se sentant validé dans ses critiques initiales émises il y a près de deux décennies. L’avenir dira comment la double casquette d’Elon Musk, entre affaires et politique, influencera durablement la réputation et les performances de Tesla.

  • Lotus 97T à Estoril : Bruno Senna célèbre les 40 ans de la première victoire d’Ayrton en F1

    Lotus 97T à Estoril : Bruno Senna célèbre les 40 ans de la première victoire d’Ayrton en F1

    Le 21 avril 1985, sous une pluie diluvienne qui noya les repères et révéla les légendes, un jeune Brésilien du nom d’Ayrton Senna remportait son tout premier Grand Prix de Formule 1 au volant d’une Lotus 97T noire et or. Quarante ans plus tard, cette même voiture s’apprête à faire son retour sur le circuit d’Estoril, guidée par les mains de son neveu, Bruno Senna. Une boucle bouclée, hommage vibrant à une époque d’audace technique et de pilotage pur.

    Une célébration au cœur de l’histoire

    Ce retour sur la piste portugaise s’inscrit dans une double commémoration : le 40e anniversaire de cette victoire fondatrice, mais aussi les 75 ans du championnat du monde de Formule 1. Lotus, marque indissociable de l’évolution technologique de la discipline, saisit l’occasion pour rappeler son influence décisive sur la scène mondiale, et le rôle central qu’y joua Ayrton Senna, ne serait-ce que le temps de trois saisons.

    À Estoril, le 21 avril 1985, le jeune Brésilien livra ce que beaucoup considèrent comme le plus grand chef-d’œuvre de sa carrière. Parti en pole position, il mena la course de bout en bout sous une pluie torrentielle, infligeant un tour de retard à tous ses concurrents, à l’exception de Michele Alboreto. C’est pourtant sa propre appréciation de cette performance qui en dit le plus long. Interrogé plus tard sur sa légendaire démonstration de Donington 1993, souvent qualifiée de « tour parfait », Senna balaya l’idée :

    « Non, pas du tout. À Donington, j’avais le contrôle de traction. C’était une belle victoire, mais comparée à Estoril 85, ce n’était rien. »

    Lotus 97T : pionnière et charismatique

    Développée sous la direction de Gérard Ducarouge, la Lotus 97T marquait un tournant technique. Son V6 turbo Renault délivrait près de 850 ch en qualification, mais c’est surtout son aérodynamique qui la plaça en avance sur son temps. Elle fut notamment l’une des premières F1 à intégrer des déflecteurs verticaux derrière les roues avant — les prémices des bargeboards qui deviendront, des décennies plus tard, un élément incontournable des monoplaces contemporaines.

    Avec son design agressif, son équilibre délicat et sa livrée noire et or sponsorisée par John Player Special, la 97T demeure un objet de culte. Elle incarne une époque où la performance brute rencontrait encore l’élégance visuelle, et où le rôle du pilote restait prépondérant dans la maîtrise des machines.

    Bruno Senna à la manœuvre : l’émotion en héritage

    Le 21 avril 2025, c’est donc Bruno Senna qui prendra place dans le baquet de la 97T. Pour l’ancien pilote de F1, ce moment dépasse le cadre du simple hommage :

    « Ce sera une sensation incroyable de piloter cette voiture iconique, qui marque le début d’une série de victoires et d’exploits de mon oncle. Cet événement va rassembler des fans du monde entier et montre combien Ayrton reste une figure forte du sport automobile, mais aussi une source d’inspiration pour de nombreuses initiatives éducatives ou sociétales. »

    Clive Chapman, directeur de Classic Team Lotus et fils du fondateur Colin Chapman, ne cache pas son émotion :

    « L’arrivée d’Ayrton chez Team Lotus fut un moment clé. Son talent, sa compréhension technique et sa volonté farouche ont tiré toute l’équipe vers le haut. Cet anniversaire est l’occasion de revivre cette magie. »

    Goodwood en avant-première

    Avant de retrouver le bitume portugais, la Lotus 97T s’offrira un premier tour d’honneur lors du 82e Goodwood Members’ Meeting, les 12 et 13 avril. Une répétition prestigieuse pour cette voiture mythique, dont les apparitions en piste se font désormais rares. Le Duc de Richmond, maître des lieux, s’en réjouit :

    « Goodwood célèbre les grandes figures du sport automobile, et c’est un honneur d’accueillir la 97T avant son retour à Estoril. La voir à nouveau en piste sera un hommage émouvant à l’héritage d’Ayrton Senna. »

    Une icône transgénérationnelle

    L’événement d’Estoril ne se veut pas seulement une commémoration. Il incarne aussi une transmission : celle d’un esprit de compétition, d’innovation et d’humanité. Lotus promet de partager cette aventure sur ses réseaux sociaux, avec des images captées pour la télévision, notamment par Sky Sports F1.

    En ramenant la Lotus 97T sur les lieux de son triomphe le plus fondateur, Bruno Senna ne cherche pas à imiter — il fait vivre une mémoire. Celle d’un pilote hors norme, d’un constructeur visionnaire, et d’un moment d’exception figé à jamais dans l’histoire de la F1.