Auteur/autrice : Rédaction

  • Toyota invente le « Duolingo de la recharge » pour ses hybrides rechargeables

    Toyota invente le « Duolingo de la recharge » pour ses hybrides rechargeables

    À l’expiration des premiers contrats de leasing du Mitsubishi Outlander PHEV, une blague circulait dans les concessions : on pouvait parfois retrouver le câble de recharge encore intact, jamais sorti de son emballage. Une façon de rappeler qu’une large partie des conducteurs d’hybrides rechargeables n’utilisaient jamais la fonction essentielle de leur véhicule : la recharge électrique. Résultat, un PHEV (Plug-in Hybrid Electric Vehicle) utilisé sans recharge devient simplement une voiture à essence lestée de centaines de kilos de batteries inutilisées.

    Pour Toyota, qui figure aujourd’hui parmi les plus gros acteurs mondiaux de l’automobile, le problème est stratégique. Un PHEV correctement rechargé peut être redoutablement efficient, parcourir de longues distances en mode électrique et abaisser drastiquement la consommation de carburant. Mais encore faut-il inciter l’utilisateur à brancher sa voiture au quotidien.

    Quand l’auto apprend du numérique

    C’est là qu’intervient ChargeMinder, une nouvelle application développée par Toyota. L’idée : s’inspirer des mécaniques de motivation issues du numérique, à la manière de Duolingo, l’application d’apprentissage des langues. ChargeMinder ne se contente pas d’envoyer une alerte générique. Elle utilise la géolocalisation pour déclencher des rappels « just in time » – par exemple, lorsqu’un conducteur gare son PHEV à proximité d’une borne de recharge au bureau ou au supermarché.

    En parallèle, l’application valorise les comportements vertueux. Chaque recharge réussie alimente une série, une « streak » comme sur Duolingo, qui devient vite addictive : personne ne veut voir sa suite de jours consécutifs s’interrompre. Des messages d’encouragement et des bilans hebdomadaires viennent compléter le dispositif, rendant la recharge presque ludique.

    Des résultats mesurables

    Les premiers essais menés aux États-Unis montrent une hausse de 10 % du nombre de recharges chez les utilisateurs de ChargeMinder. Au Japon, l’application va encore plus loin : elle a permis de décaler 59 % des sessions de recharge vers les plages horaires les plus favorables aux énergies renouvelables. À la clé, près de 30 minutes de recharge supplémentaire par jour et par véhicule en période diurne, ce qui contribue à lisser la demande énergétique et à améliorer l’empreinte carbone.

    Une idée… qui n’est pas si nouvelle

    L’approche séduit par son efficacité, mais Toyota n’est pas le seul constructeur à s’intéresser au sujet. Stellantis, de son côté, propose depuis plusieurs années déjà un rappel de recharge directement intégré à l’écran de ses véhicules hybrides rechargeables. Une solution plus discrète, mais qui vise le même objectif : rappeler à l’utilisateur que son PHEV n’est efficient que s’il est utilisé comme prévu, c’est-à-dire branché régulièrement.

    Un enjeu d’image et de crédibilité

    Pour l’industrie, ces initiatives sont loin d’être anecdotiques. Les hybrides rechargeables sont régulièrement critiqués pour leur consommation réelle, bien supérieure aux chiffres officiels lorsque les batteries ne sont pas utilisées. Les pouvoirs publics européens ont déjà commencé à revoir les conditions d’homologation et les avantages fiscaux de ces modèles.

    Encourager la recharge quotidienne est donc un moyen, pour les constructeurs, de protéger la crédibilité du PHEV et de maintenir sa pertinence dans un marché où l’électrique à batterie pure gagne rapidement du terrain.

    Vers une gamification de l’automobile ?

    Avec ChargeMinder, Toyota emprunte un chemin inattendu : celui de la gamification. Les leviers psychologiques issus du monde des applis mobiles – séries, récompenses, notifications contextualisées – pourraient bien devenir les alliés inattendus de l’électrification. Après tout, si Duolingo parvient à faire réviser l’espagnol à des millions d’utilisateurs chaque soir, pourquoi une application ne parviendrait-elle pas à faire brancher un câble de recharge à un automobiliste pressé ?

    La prochaine étape pourrait consister à intégrer ces logiques directement dans l’infotainment des véhicules, à l’image de ce que Stellantis propose déjà avec ses rappels intégrés. Entre pédagogie douce et incitation ludique, la voiture connectée semble avoir trouvé un nouveau terrain d’expérimentation : celui de la discipline énergétique au quotidien.

  • Stelvio : 200 ans de virages, de légendes et de moteurs

    Stelvio : 200 ans de virages, de légendes et de moteurs

    Un surrégime aide, forcément. Première, seconde, troisième, on rétrograde avant le prochain épingle. Le compte-tours s’affole, la roue intérieure crisse ou patine selon votre différentiel, et le souffle se raccourcit. Le Stelvio ne pardonne rien, mais il offre en retour une expérience unique. C’est l’un des cols les plus mythiques des Alpes, célébré par des générations de cyclistes, de motards et d’automobilistes. Et en 2025, il fête ses deux siècles d’existence.

    La grande œuvre de Carlo Donegani

    À 2 757 mètres d’altitude, le Stelvio – Stilfserjoch pour les Autrichiens – est le plus haut col routier de l’Est alpin. Sa construction débute en 1820 sous l’autorité de l’ingénieur Carlo Donegani, avec pour mission de relier le Tyrol autrichien à la Lombardie, récemment annexée par Vienne après le Congrès de 1815. L’ouverture de cette voie stratégique, en 1825, fut un exploit technique : tunnels taillés dans la roche, virages numérotés, murs de soutènement de pierre… Le Stelvio devint une fierté impériale, un outil politique autant qu’un chef-d’œuvre d’ingénierie.
    L’histoire géopolitique bouleversera cependant son rôle. À l’issue de la Première Guerre mondiale et du traité de Saint-Germain, les deux versants passent sous souveraineté italienne. Le col perd alors sa valeur stratégique, mais gagne une nouvelle destinée : celle de devenir un symbole de conquête sportive et mécanique.

    Le théâtre de la « guerre blanche »

    Pendant la Grande Guerre, le Stelvio est au cœur d’un front extrême : celui de la « guerre blanche ». Les troupes italiennes et austro-hongroises s’affrontent sur ces glaciers d’altitude, dans un enfer de neige et de glace. Les échanges d’artillerie sont si proches de la frontière suisse que les deux camps durent s’entendre : tirer uniquement selon des angles prédéfinis pour éviter que les obus ne tombent en territoire neutre. Une singularité tragique, qui ajoute encore à la légende du lieu.

    Des courses de côte aux rallyes mythiques

    Malgré sa renommée, le Stelvio n’a jamais été un haut lieu du sport automobile comme le Nürburgring ou Pikes Peak. Il a pourtant accueilli entre 1926 et 1939 la Corsa Internazionale dello Stelvio, une spectaculaire course de côte, et reste associé à des épreuves de longue haleine comme le Liège-Rome-Liège ou le Liège-Brescia-Liège. Côté cyclisme, son histoire s’écrit depuis 1953 avec le Giro d’Italia, dont il constitue régulièrement l’un des juges de paix.

    Mais l’automobile a toujours su s’y ménager une place. Jeremy Clarkson et ses compères de Top Gear y ont tourné une séquence restée célèbre, consacrant le Stelvio comme « la plus belle route du monde ». Alfa Romeo a baptisé son SUV du nom du col – même si la présentation initialement prévue sur place dut être délocalisée… faute d’accès, bloqué par la neige. Moto Guzzi a suivi la même logique, avec un trail routier portant fièrement l’écusson « Stelvio ».

    Les anecdotes de légendes

    Si le Stelvio attire chaque année des milliers de passionnés, certains y ont écrit des histoires hors normes. L’Américain Bobby Unser, triple vainqueur des 500 Miles d’Indianapolis et recordman de Pikes Peak, participa en 1990 au Pirelli Classic Marathon. Au volant d’une Jaguar Type E préparée par Lister, il réalisa l’ascension une minute plus vite que tous ses concurrents. L’exploit aurait été parfait… sans une rencontre malheureuse avec un bus scolaire en travers d’un village.
    Plus modestement, nombre d’amateurs y ont laissé des souvenirs mémorables. Comme ce Triumph TR3a de rallye historique, qui surchauffa trois fois en plein 15 août italien derrière un antique autocar fumant, décoré d’un sticker « One Life, Live It ». Ou encore ces motards allemands dont les BMW GS s’allongèrent au sol dans une épingle, relevées par une bande de Londoniens en Vespa. Le Stelvio, c’est un théâtre permanent, mélange de drame mécanique et de comédie humaine.

    Une route surpeuplée mais unique

    Selon les comptages, le col comporte entre 75 et 88 virages en épingle, surtout resserrés sur le versant nord. En plein été, c’est une procession ininterrompue de voitures de sport, de camping-cars, de cyclistes haletants et de motards intrépides. On y croise aussi bien des supercars rugissantes que des caravanes en trois points, des Minis anciennes par dizaines, ou… un muskrat surgissant de nulle part pour disparaître tel la taupe des Thunderbirds.
    L’expérience reste marquante, à condition de s’y préparer. Les 30 % d’oxygène en moins sollicitent autant les moteurs que les poumons. Les freins chauffent, les radiateurs bouillent, les conducteurs s’impatientent. Et au sommet, le charme est parfois terni par les parkings saturés et les boutiques à souvenirs. Le vrai secret consiste à s’arrêter un peu plus bas, dans l’une des auberges discrètes aux vues imprenables, bien plus authentiques que le tumulte du col.

    Les règles d’or pour un Stelvio réussi

    Les habitués le répètent : le Stelvio se mérite. Avant de s’élancer, il faut respecter quelques règles simples. Vérifier que le col est bien ouvert, partir à l’aube pour éviter les embouteillages, prévoir des vêtements chauds, faire le plein, et accepter l’imprévu – du bus qui bloque la route au cycliste qui chute juste devant vous. On ne va pas au Stelvio pour chasser le chrono, mais pour embrasser une expérience totale. Et si l’on veut vraiment retrouver la magie des pionniers, mieux vaut partir tôt, au lever du soleil, lorsque le silence règne encore sur les 48 épingles du versant nord.

    Deux siècles d’histoire et d’imaginaire

    Deux cents ans après son inauguration, le Stelvio demeure bien plus qu’une route : un mythe. Il concentre en lui l’audace de ses bâtisseurs, la rudesse des guerres alpines, la passion des cyclistes et l’imaginaire des automobilistes. Pour les uns, c’est une torture mécanique, pour les autres une apothéose du voyage. Tous, pourtant, repartent avec la même impression : avoir franchi un monument.

    Alors joyeux anniversaire, Stelvio. Et que tes virages continuent d’envoûter les moteurs comme les âmes.

  • La nostalgie comme refuge face aux turbulences de l’automobile

    La nostalgie comme refuge face aux turbulences de l’automobile

    La nostalgie est un abri commode quand tout semble chahuté autour de nous. J’ai pourtant toujours été de ceux qui mettent en garde contre une vision trop enjolivée du passé. Les anciennes tombaient en panne sans prévenir, leurs freins étaient médiocres, la rouille grignotait chaque recoin de carrosserie, et les gaz d’échappement suffisaient à nous asphyxier derrière un simple bus scolaire. Toits ouvrants qui fuient, directions approximatives… non, vraiment, Google Maps vaut mieux que les cartes Michelin tachées d’huile ou pleines de miettes.

    D’ordinaire, les rassemblements de voitures anciennes me rendent nerveux. C’est un peu comme revoir une vieille sitcom des années 1970 ou un épisode de Top of the Pops : pour chaque moment de joie, il y a toujours une gêne qui surgit. Et inutile de me lancer sur la mode des restomods électriques…

    Pourtant, ces derniers temps, plusieurs expériences m’ont forcé à reconsidérer ma position. La rencontre avec les propriétaires des vieilles Alfa Romeo sur un ancien circuit de F1, par exemple. Leur enthousiasme est communicatif, leur connaissance impressionnante. Ce ne sont pas des passéistes obstinés : ils vivent avec un pied dans le monde moderne et l’autre dans l’héritage automobile. Et surtout, leurs autos ne sont pas que des objets de collection : elles rappellent l’importance des fondamentaux. Des intérieurs clairs et ingénieux, une mécanique simple mais efficace, juste ce qu’il faut de puissance, sans gadgets superflus.

    Ce n’est pas seulement une impression personnelle : une partie de l’industrie automobile semble elle aussi s’être laissée accrocher à ce clou de la nostalgie. Gilles Vidal, brillant designer chez Peugeot, a quitté Renault après une parenthèse éclair pour revenir au sein de Stellantis. McLaren s’est entourée de deux figures légendaires du management : Luca di Montezemolo, artisan du renouveau Ferrari dans les années 1990, et Torsten Müller-Ötvös, qui a transformé Rolls-Royce en référence de créativité et de succès commercial.

    Chez Volvo, le parfum de déjà-vu est encore plus marqué : Håkan Samuelsson reprend temporairement les commandes, tandis que Thomas Ingenlath – ex-directeur du design de la marque, puis patron de Polestar – retrouve le giron de Geely dans une fonction créative. Difficile de ne pas voir dans ces retours une forme de rappel aux bases, une volonté de rééquilibrer une transition qui semblait jusqu’ici précipitée.

    Car c’est bien cela, le contexte : une industrie bousculée par l’électrification, par la montée en flèche des coûts, par l’arrivée de nouveaux constructeurs venus de Chine qui remettent en cause nos certitudes d’Européens convaincus d’être les « experts » de l’automobile. Peut-être que personne ne saura jamais ce qui s’est réellement tramé à Göteborg ou à Wuhan, mais le résultat est tangible : un retour de dirigeants et de designers qui savent ce que Volvo représente, et qui ont déjà su traduire cette philosophie dans la tôle et le verre. Car Volvo est sans doute la marque qui a le plus perdu son âme ces derniers temps… Oups, j’oubliais JLR.

    On répète souvent que le passé n’est pas fait pour être copié – ni ses chromes, ni ses ailerons – mais pour éviter de refaire les mêmes erreurs. On ne peut pas effacer les errements d’hier, mais il semble que l’industrie soit entrée dans une parenthèse, un moment où la frénésie de l’électrification totale s’est légèrement apaisée. Le calendrier se desserre, laissant une opportunité rare : aborder la transition avec plus de mesure.

    Si cela ouvre la voie à des voitures qui retrouvent l’esprit de la Giulietta Sprint, le confort quotidien et rassurant d’un XC90, ou l’agilité légère d’une Mini, sans dépasser les 2,5 tonnes sur la balance, alors nous tenons là une chance unique. Oui, il est temps de se retourner un peu, de regarder en arrière et de décider ce que nous voulons réellement préserver des automobiles récentes.

  • Quelles Mercedes roulent avec un moteur Renault ?

    Quelles Mercedes roulent avec un moteur Renault ?

    L’automobile n’a jamais été un monde figé. Sous une carrosserie frappée d’un blason prestigieux, on peut parfois découvrir des éléments techniques issus d’une autre marque. Ce phénomène n’a rien de nouveau : une Škoda abrite de l’ingénierie Volkswagen, un Lamborghini Urus partage une bonne partie de ses organes avec des Audi, et certaines Aston Martin ont longtemps tourné grâce à des V8 AMG. Mais l’idée qu’une Mercedes puisse cacher un moteur Renault surprend encore nombre de passionnés. Et pourtant, c’est bien une réalité.

    Mercedes, spécialiste des gros moteurs

    Historiquement, Mercedes-Benz s’est concentré sur des motorisations de moyenne et grosse cylindrée : des quatre-cylindres costauds, des six-cylindres en ligne, des V8 puissants et, pour les clients les plus exigeants (et les plus proches de leur pompiste), le légendaire V12. Ces blocs, conçus pour des implantations longitudinales, privilégient la propulsion ou la transmission intégrale sophistiquée des modèles de la Classe C et au-delà.

    Mais en dessous de ce segment, Mercedes a dû s’adapter. Sur le marché des compactes, où les volumes se jouent en A, B, CLA et GLA, une offre moteur plus modeste est indispensable. Développer un petit bloc spécifique aurait coûté cher pour un rendement limité. C’est là que le partenariat avec Renault est entré en jeu. Le constructeur français, spécialiste des moteurs conçus pour une implantation transversale et pour des modèles grand public, est venu combler ce vide.

    Les compactes Mercedes concernées

    La « famille compacte » de Mercedes – Classe A, Classe B, CLA et GLA – repose sur une architecture différente de celle des modèles supérieurs. Ici, moteur transversal et traction avant dominent. C’est précisément dans cette catégorie que l’on retrouve les motorisations issues de Renault.

    OM 607 – le diesel 1.5 dCi

    Première incursion notable du losange sous le capot d’une étoile : le 1,5 litre diesel, bien connu chez Renault et commercialisé sous l’appellation OM 607 chez Mercedes. Ce bloc a animé nombre de Classe A et B, mais aussi des CLA et GLA, principalement dans les versions « 180 ». Attention : seules les déclinaisons avec boîte manuelle étaient équipées du moteur Renault.

    Exemples :

    • A 180 CDI (109 ch) de 2012 à 2015
    • B 180 CDI (109 ch) de 2011 à 2014
    • CLA 180 CDI (109 ch) de 2013 à 2016
    • GLA 180 d (109 ch) de 2014 à 2017

    Un indice infaillible : la cylindrée de 1 461 cm³ signe toujours un moteur Renault.

    OM 608 – l’évolution du diesel Renault

    Successeur du précédent, l’OM 608 est apparu en 2018. Toujours un 1,5 litre, porté à 116 ch et 260 Nm. Mais à cette époque, le diesel était déjà en net recul dans les compactes premium. Ce moteur se retrouve dans quelques Classe A, B et CLA produites entre 2018 et 2021.

    OM 282 – le 1.33 turbo essence co-développé

    Côté essence, Mercedes a intégré un moteur développé conjointement par Renault, Nissan et Daimler : le fameux 1,33 litre turbo, baptisé OM 282. Bien que les appellations commerciales (A 180, A 200, B 200, CLA 200…) puissent laisser croire à des cylindrées plus importantes, il s’agit toujours du même bloc, décliné en plusieurs puissances (109 à 163 ch).

    On le retrouve également dans les versions hybrides rechargeables A 250 e, B 250 e, CLA 250 e et GLA 250 e, où il sert de base thermique.

    La Citan – un Kangoo étoilé

    Enfin, impossible de passer à côté de la Citan. Plus qu’un moteur, c’est tout le véhicule qui vient de Renault. Le ludospace Mercedes n’est en réalité qu’une version rebadgée du Kangoo, tant dans sa première génération (W415, 2012–2021) que dans l’actuelle (W420, depuis 2021). On y trouve naturellement les moteurs Renault, en essence comme en diesel.

    Un partenariat pragmatique

    Pour Mercedes, recourir aux blocs Renault n’a rien de honteux : il s’agit d’une stratégie industrielle logique, dictée par la rationalisation des coûts et la nécessité d’élargir la gamme vers le bas sans dilapider des ressources de développement. Du côté de Renault, fournir des moteurs à un constructeur premium renforce la légitimité technique de ses propres blocs.

    Mais pour les clients, la perception est plus complexe.

    Le choc psychologique d’une « Mercedes à moteur Renault »

    Acheter une Mercedes, c’est souvent acquérir un symbole : celui de la réussite sociale, de la rigueur allemande et d’une mécanique réputée robuste. Découvrir que son véhicule partage le cœur mécanique d’une Clio ou d’un Kangoo peut donc être déstabilisant. Dans les concessions, le sujet a longtemps été traité avec une certaine prudence. Les vendeurs préféraient insister sur l’efficience, les faibles émissions de CO₂ et la sobriété des moteurs plutôt que de rappeler leur provenance.

    Cette question de perception illustre parfaitement la tension entre l’image de marque et la réalité industrielle. Pour le client rationnel, savoir que son A 180 d consomme peu et coûte moins cher à entretenir est un avantage. Pour le client passionné ou attaché au prestige, l’idée d’une motorisation Renault dans une Mercedes pouvait être vécue comme une forme de trahison symbolique.

    En pratique, peu de propriétaires ont rencontré de réels problèmes avec ces blocs. Au contraire, leur fiabilité s’est montrée honorable, et leur diffusion massive chez Renault a assuré une maintenance simplifiée. Mais dans l’imaginaire collectif, une « vraie » Mercedes doit conserver une mécanique conçue à Stuttgart, pas à Boulogne-Billancourt.

    L’avenir de ces collaborations

    Aujourd’hui, alors que Mercedes accélère sa transition vers l’électrique, la question du partage de moteurs thermiques devient moins centrale. Les compactes de demain seront avant tout définies par leur plateforme électrique et leurs logiciels. Dans ce contexte, les débats sur la provenance d’un 1,5 diesel ou d’un 1,33 turbo paraîtront bien anecdotiques.

    Mais cette période reste un chapitre fascinant de l’histoire récente de l’automobile : celui où un constructeur premium allemand et un généraliste français ont uni leurs forces pour répondre aux contraintes réglementaires et aux réalités du marché. Et où, le temps d’une décennie, certains clients ont eu le privilège – ou le dilemme – de rouler dans une Mercedes… à moteur Renault.

  • Dieselgate : dix ans après, la mort annoncée du diesel ?

    Dieselgate : dix ans après, la mort annoncée du diesel ?

    Il y a tout juste dix ans, le 18 septembre 2015, l’Agence de protection de l’environnement américaine (EPA) publiait un rapport qui allait ébranler l’industrie automobile mondiale. Le scandale qui s’ensuivit, rapidement baptisé Dieselgate, ne se limita pas à un simple dossier technique : il marqua un tournant majeur pour la crédibilité des constructeurs, la réglementation environnementale et l’avenir même du moteur diesel. Une décennie plus tard, une question demeure : le Dieselgate a-t-il accéléré la fin du diesel en tant que carburant de masse ?

    Le cœur du scandale

    Entre 2008 et 2015, Volkswagen avait équipé plusieurs millions de ses modèles de logiciels dits défectueux, capables de détecter les conditions d’un test d’homologation et d’adapter temporairement le fonctionnement du moteur. Résultat : des émissions d’oxydes d’azote (NOx) réduites en laboratoire, mais jusqu’à quarante fois supérieures aux normes en conditions réelles.

    Le dispositif visait à préserver un argument commercial clé du diesel : sa sobriété en carburant. Car les technologies permettant de réduire efficacement les émissions — pièges à NOx ou systèmes SCR à injection d’urée — alourdissaient les coûts et dégradaient parfois la consommation. Volkswagen avait donc choisi de tricher pour rester compétitif face à une réglementation de plus en plus stricte, notamment avec les normes Euro 5 (2011) et Euro 6 (2015).

    Si VW fut la cible principale, il n’était pas seul. Des enquêtes menées depuis ont révélé que d’autres constructeurs avaient, eux aussi, flirté avec les limites de la légalité, voire les avaient franchies. Le scandale s’est vite mué en crise systémique pour l’ensemble du secteur.

    Un coût colossal

    Au-delà du choc réputationnel, Dieselgate a eu un coût financier astronomique. Pour le seul groupe Volkswagen, l’addition a dépassé les 33 milliards de dollars en amendes, indemnisations et rappels. D’autres constructeurs, de Mercedes-Benz à Renault en passant par Nissan, continuent à affronter des procédures judiciaires ou des recours collectifs.

    Le choc fut tel qu’il redessina les priorités stratégiques des groupes automobiles. Beaucoup se sont engagés dans une simplification radicale de leurs gammes, une sorte « d’iPhoneification » selon l’expression de Philip Nothard (Cox Automotive), afin de réduire les coûts de développement et d’industrialisation. Dieselgate a aussi accéléré l’adoption de cycles d’homologation plus réalistes, comme le WLTP entré en vigueur en 2017.

    Le diesel, victime collatérale ?

    En Europe, le diesel représentait encore plus de la moitié des ventes de voitures neuves en 2015. Dix ans plus tard, il pèse moins de 15 %. Si la transition énergétique et l’essor des hybrides et des électriques expliquent en grande partie ce déclin, Dieselgate a clairement servi de catalyseur. La méfiance à l’égard des motorisations à gazole s’est installée, renforcée par les politiques publiques de restriction de circulation et par une fiscalité moins favorable.

    Pourtant, sur le plan technique, le diesel n’a jamais été aussi propre qu’aujourd’hui. Les systèmes de dépollution modernes réduisent drastiquement les émissions de NOx, au point que certains experts considèrent les diesels récents plus vertueux que leurs équivalents essence en matière de pollution locale. « Dieselgate a terni une technologie qui, dans sa forme actuelle, est extrêmement propre », rappelle Nick Molden, fondateur d’Emissions Analytics.


    Un impact sanitaire

    Le scandale ne se limite pas à une tricherie comptable ou à une bataille juridique. Plusieurs études ont estimé que l’excès d’émissions de NOx lié aux logiciels truqueurs aurait contribué à des milliers de décès prématurés en Europe, notamment en raison des maladies respiratoires.


    La confiance des automobilistes en question

    Sur le plan de l’opinion publique, l’effet est plus nuancé. Le recul du diesel semble davantage lié aux contraintes réglementaires et au manque d’offre que proprement à la défiance des consommateurs. Beaucoup d’automobilistes reconnaissent encore l’avantage du diesel pour les gros rouleurs, notamment en matière d’autonomie et de consommation.

    Volkswagen, un géant qui a survécu

    Ironie de l’histoire, le groupe Volkswagen est resté le premier constructeur européen et affiche une santé financière solide. Le Dieselgate fut un traumatisme, mais aussi un accélérateur de transformation : gouvernance renforcée, milliers de collaborateurs formés aux nouvelles pratiques de conformité, et surtout un virage stratégique massif vers l’électrique, incarné par la gamme ID.

    « Dieselgate représente un tournant majeur de l’histoire du groupe », déclarait récemment un porte-parole de Volkswagen, soulignant les progrès accomplis en matière de transparence et d’éthique.

    Une page tournée ?

    Dix ans après, le Dieselgate reste un cas d’école. Pour l’industrie automobile, il aura agi comme un révélateur et un accélérateur : révélateur des failles dans la relation de confiance entre constructeurs et clients ; accélérateur dans la marche vers une mobilité plus propre, que ce soit par contrainte ou par opportunisme.

    Le diesel n’est pas mort, mais il a perdu sa légitimité en tant que technologie dominante. Cantonné désormais aux véhicules lourds, aux utilitaires ou aux gros SUV, il a laissé la voie libre à l’hybride et à l’électrique. La fraude de Volkswagen aura donc, paradoxalement, contribué à précipiter une mutation historique dont nous vivons encore les répercussions.

  • BMW 550i Touring E61 et autres plaisirs discrets : quand l’underdog a plus de saveur que la star

    BMW 550i Touring E61 et autres plaisirs discrets : quand l’underdog a plus de saveur que la star

    Depuis son lancement dans les années 1980, la BMW M5 s’est imposée comme la référence ultime de la Série 5. Puissance démesurée, comportement affûté, aura mythique : elle a toujours incarné le sommet de la gamme. Mais avec le temps, le statut de Q-car — cette élégance discrète qui cachait une mécanique volcanique — s’est dilué. Les dernières générations sont devenues si extrêmes qu’elles en perdent une partie de leur charme originel. Plus lourdes, plus complexes, difficilement exploitables au quotidien… et désormais proposées à plus de 110 000 €. De quoi redonner une vraie légitimité aux versions dites « inférieures », bien plus vivables.

    La surprise d’un parking : une 550i au lieu d’une banale 520d

    C’est en apercevant, dans un simple parking, une Série 5 Touring E61 chaussée de jantes imposantes qu’un doute est né. De loin, on pense à une sobre 520d. Mais en s’approchant, la découverte est autrement plus enthousiasmante : il s’agit d’une 550i. Un modèle pour lequel beaucoup ont toujours eu un faible. Pourquoi ? Parce qu’il concentre presque toutes les qualités d’une M5… sans ses excès.

    Quand la M5 se montrait trop excessive

    Au milieu des années 2000, la M5 E60 faisait figure de bête sauvage. Un V10 5,0 litres hurlant à 8250 tr/min, une boîte robotisée SMG mal-aimée et une soif insatiable pour le sans-plomb 98. Lors d’un essai presse en 2005, l’auto n’avait tenu qu’une centaine de kilomètres sur un circuit routier avant qu’une équipe d’assistance ne soit contrainte de refaire le plein, son réservoir étant identique à celui d’une 520d. Puissante, démoniaque, mais peu adaptée au quotidien.

    Face à elle, la 550i jouait la carte du V8 atmosphérique de 4,8 litres. Moins extrême, plus souple, bien plus endurante sur route, et disponible avec une boîte automatique classique ou même une manuelle. Avec ses 361 chevaux, elle offrait des performances largement suffisantes, un confort accru et, surtout, une discrétion bienvenue face aux regards indiscrets… ou à l’attention des forces de l’ordre.

    L’attrait des secondes lignes

    La 550i Touring E61 n’est pas un cas isolé. Dans l’histoire automobile, les modèles juste en dessous du sommet ont souvent un charme particulier.

    • Volkswagen Golf GTI vs Golf R : la GTI se montre plus légère, plus joueuse, moins coûteuse à entretenir.
    • Peugeot 205 XS vs 205 GTi : la XS, avec son 1.4 vif et sa boîte courte, exige de conserver l’élan, offrant une expérience de pilotage plus pure qu’une GTi.
    • Ford Fiesta XR2i vs RS Turbo : quand la XR2i reste homogène et agréable, la RS Turbo sombre dans un torque steer caricatural.
    • Audi R8 V8 vs V10 : plus équilibrée et plus agile, la version huit cylindres séduit les puristes davantage que sa déclinaison V10 trop lourde.
    • BMW M340i vs M3 : aujourd’hui, la M340i s’impose comme l’héritière spirituelle de la fameuse 335d reprogrammée, en conjuguant performances de haut niveau et polyvalence.

    Dans chaque cas, les versions « en dessous » parviennent à séduire par leur authenticité, leur facilité d’usage et leur rapport plaisir/quotidien imbattable.

    La rareté comme ultime atout

    Il existe aussi un paradoxe de la collection : la star survit souvent mieux que son ombre.

    L’éloge de l’underdog

    Les versions phares brillent par leurs chiffres de puissance, leurs performances brutes et leur statut. Mais elles s’avèrent souvent trop chères, trop lourdes, trop compliquées, trop tape-à-l’œil. Les variantes juste en dessous, elles, combinent équilibre, discrétion et authenticité. Elles incarnent ce que l’automobile peut avoir de plus attachant : de la performance suffisante, du plaisir de conduite réel, et ce petit supplément d’âme qui naît quand on choisit l’underdog.

    Alors oui, toutes nos félicitations à la BMW 550i Touring E61, et à toutes ces « secondes meilleures » qui, au quotidien, se révèlent parfois bien plus désirables que les reines de la gamme.

  • Munich 2025 : l’Europe monte au front face à la déferlante chinoise

    Munich 2025 : l’Europe monte au front face à la déferlante chinoise

    Dès l’ouverture de la journée presse, l’effervescence était palpable au salon de Munich. Sourires, retrouvailles, odeur familière des halls d’exposition : les vétérans retrouvaient ce parfum de « vrai » salon automobile, absent depuis trop longtemps. Pourtant, derrière cette façade d’enthousiasme, un parfum de gravité flotte. Munich n’est pas seulement une fête de l’automobile. C’est un champ de bataille.

    Dans cette capitale de l’industrie allemande, l’Europe automobile est venue montrer ses muscles. L’objectif : prouver que ses constructeurs savent se réinventer et défendre leur marché intérieur contre la vague montante des marques chinoises. Ces dernières, contraintes par une surcapacité colossale — 50 millions de voitures produites chaque année pour un marché domestique plafonnant à 28 millions — cherchent de nouveaux débouchés. Résultat : 22 millions de véhicules par an doivent trouver preneurs à l’étranger, Europe en tête, malgré les incertitudes liées aux droits de douane.

    Les Européens serrent les rangs

    La réponse des constructeurs européens est nette : il s’agit de réaffirmer leur identité et leur pertinence. Audi a frappé fort avec un spectaculaire coupé électrique conceptuel, héritier spirituel du TT. Massimo Frascella, son nouveau patron du design, reconnaît que la marque « s’était égarée » et veut initier une ère stylistique audacieuse et épurée.

    BMW a choisi Munich pour dévoiler la nouvelle iX3, annonciatrice de la famille Neue Klasse, qui comptera 40 modèles électriques à terme. Plus qu’un SUV, c’est une démonstration de stratégie : rationaliser la production, améliorer la rentabilité et redonner de l’attrait à la gamme.

    Chez Mercedes, les slogans « WELCOME HOME » s’affichent partout. Le constructeur veut rassurer ses fidèles, réactiver les valeurs de la marque. Pourtant, la tonalité est surprenante, très éloignée du fameux « Engineered like no other car » qui avait forgé l’image d’excellence technique.

    Volkswagen, lui, regarde en arrière pour mieux avancer. L’offensive porte sur une gamme de petites électriques censées renouer avec « l’esprit VW » et répondre à une clientèle lassée de SUV interchangeables et de berlines surpuissantes. L’idée est claire : revenir à la simplicité et à l’accessibilité.

    La montée en puissance des Chinois

    Si l’Europe se montre en ordre de bataille, c’est aussi parce que la concurrence est déjà sur place, nombreuse. Munich 2025 compte plus de marques chinoises exposées que de constructeurs européens. Mais leurs stands sont relégués en périphérie des six halls, noyés parmi les équipementiers.

    Difficile de les ignorer pourtant : Changan, Xiaomi, Aito — ce dernier soutenu par Huawei — alignent des nouveautés séduisantes. Les ambassadeurs de marque, jeunes et souriants, n’ont rien de conquérants menaçants : ils incarnent une autre vision, pragmatique, celle d’un marché mondialisé où acheter une voiture chinoise devient un choix de bon sens économique. Car, face à une offre compétitive et de plus en plus qualitative, difficile de reprocher à l’automobiliste européen de chercher le meilleur rapport qualité-prix.

    Un salon sans fioritures, mais lourd de sens

    Autre différence avec les salons d’antan : pas de shows grandiloquents, pas de danseurs ni de musique tonitruante. Les présentations vidéo géantes sont là, mais dans un registre sobre. « Comme les voitures électriques elles-mêmes : pas de bruit, pas de vibe », lâche un visiteur désabusé.

    Cette sobriété n’est pourtant pas synonyme de fadeur. Au contraire, elle souligne l’importance du moment : derrière la mise en scène contenue, des avancées majeures se révèlent. Design renouvelé, autonomie accrue, modèles plus rationnels… Les Européens exposent leur riposte avec sérieux. Et les Chinois, avec leurs modèles au style parfois anonyme mais redoutablement efficaces, démontrent qu’ils sont désormais incontournables.

    La bataille pour l’âme de l’automobile européenne

    Munich 2025 restera comme un jalon. Ce n’est plus un simple salon, c’est une déclaration de guerre économique et culturelle. L’Europe se mobilise pour protéger son industrie, son savoir-faire, mais aussi sa place dans l’imaginaire collectif de l’automobile. En face, la Chine avance calmement, sûre de sa force de frappe industrielle.

    La bataille ne fait que commencer. Elle ne se jouera pas seulement sur le terrain de la technique ou des prix, mais aussi sur celui de l’identité. Car si les voitures électriques finissent par se ressembler, que restera-t-il du caractère européen face à l’uniformisation mondiale ? C’est là que réside, plus que jamais, l’enjeu : défendre non seulement des parts de marché, mais une culture automobile.

  • Rolls-Royce Corniche Halcyon : le restomod qui ne sert à rien… mais qui a tout d’attachant

    Rolls-Royce Corniche Halcyon : le restomod qui ne sert à rien… mais qui a tout d’attachant

    Soyons honnêtes : la plupart des restomods ne servent à rien. Ces transformations, qui consistent à électrifier ou moderniser des icônes du passé, se justifient rarement autrement que par une surenchère esthétique ou technologique. Elles trahissent souvent l’esprit originel de la voiture, tout en surfant sur la nostalgie et la spéculation.

    Et pourtant, face à la Rolls-Royce Corniche électrifiée par Halcyon, difficile de rester insensible. Il y a dans ce projet britannique quelque chose de décalé, d’attachant, presque théâtral. On l’imagine volontiers au bras d’Elton John, posée devant une villa de la Côte d’Azur, incarnant à la fois l’excentricité et l’élégance d’une époque révolue.

    Une Corniche qui cache 500 chevaux électriques

    Le projet est signé Halcyon, start-up de Guildford. Sur la base des Corniche et Silver Shadow, les ingénieurs ont conçu une architecture électrique entièrement maison. Le vénérable V8 6,75 litres disparaît, remplacé par un moteur électrique arrière délivrant jusqu’à 500 ch dans la version Long Range. La batterie occupe l’espace du moteur d’origine, complétée par un second pack prenant la place du réservoir.

    Résultat : un poids de 2,2 tonnes, toujours équilibré par une répartition 53/47. L’autonomie oscille entre 200 et 300 miles (320 à 480 km), selon la version, grâce à une plateforme 800 V acceptant jusqu’à 230 kW de puissance de charge. De quoi passer de 10 à 80 % en quarante minutes, là où d’autres restomods se contentent d’une recharge mollassonne.

    Un luxe qui se veut contemporain

    Halcyon ne s’est pas contenté d’électrifier la Corniche : l’habitacle a été totalement repensé. Le mot d’ordre est l’équilibre entre tradition et modernité. Les boiseries côtoient un combiné d’instruments à aiguilles redessinées, enrichi d’un affichage numérique discret. Les équipements contemporains sont bien présents, mais volontairement cachés : Apple CarPlay sans fil, caméra de recul, climatisation numérique, le tout dissimulé jusqu’à ce qu’un bouton réveille les écrans.

    On retrouve aussi trois modes de conduite — Drive, Spirited, Touring — afin d’exploiter la bande passante de ce châssis modernisé. Plus ferme, plus réactif, le comportement reste cependant fidèle à l’esprit Rolls : une voiture qui « flotte sur un nuage », comme le décrit Matthew Pearson, cofondateur et PDG d’Halcyon.

    60 exemplaires, et pas un de plus

    Le projet reste exclusif : 60 voitures seulement seront produites, Corniche cabriolet et coupé, ainsi que Silver Shadow. Prix estimé : environ 400 000 £ hors coût du véhicule donneur, soit plus de 450 000 € pour une Corniche électrifiée. Autant dire que la clientèle visée n’aura aucun mal à signer un chèque de plus pour transformer une icône en objet hybride entre patrimoine et gadget.

    Inutile, donc indispensable ?

    On pourra toujours arguer que cette transformation est un sacrilège : ôter son moteur à une Rolls-Royce, c’est retirer une partie de son âme. Mais dans le cas de cette Corniche Halcyon, le résultat a quelque chose d’irrésistible. Peut-être parce que la voiture n’a jamais été pensée comme une machine de performance, mais comme une icône du style et du paraître.

    Dans ce rôle, elle excelle encore aujourd’hui. Électrifiée ou pas, cette Rolls conserve son allure nonchalante et baroque, sa silhouette de diva intemporelle. Le restomod ne sert peut-être à rien… mais comme une chanson pop exubérante, il nous arrache un sourire. Et c’est peut-être ça, sa plus belle réussite.

  • Ford Supervan : quand le Transit se prend pour une supercar

    Ford Supervan : quand le Transit se prend pour une supercar

    Dans l’univers automobile, certains projets naissent presque par provocation, d’autres par pur génie marketing. Le Ford Supervan appartient aux deux catégories. Depuis plus de cinquante ans, la silhouette utilitaire du Transit cache régulièrement une mécanique de compétition, transformant le « fourgon de plombier » en monstre de puissance. Une saga unique, née en 1971 dans les paddocks britanniques et qui continue aujourd’hui de repousser les limites, à l’ère électrique.

    Le coup de folie de Terry Drury (1971)

    Tout commence avec Terry Drury, ingénieur chez Ford UK, pilote amateur et passionné de sport automobile. En 1971, il fonde sa propre équipe, Terry Drury Racing (TDR), et imagine une idée aussi saugrenue que géniale : installer un moteur de course sous la carrosserie d’un Ford Transit. L’occasion se présente lors du traditionnel meeting de Pâques à Brands Hatch.

    Le premier Supervan voit le jour : un châssis de Cooper Monaco, un moteur Ford V8 de 4,95 litres développant 441 chevaux et une vitesse de pointe de 240 km/h. Un dragster déguisé en utilitaire ! Le problème, c’est que la carrosserie en acier issue de la série faisait office de mur face au vent. En ligne droite, l’engin impressionnait. Mais en courbe, l’aérodynamique le condamnait.

    Supervan 2 : l’âge d’or des années 1980

    Ford UK reprend le projet à son compte et pousse l’idée bien plus loin. En 1984, le Supervan 2 fait sensation. Le châssis est celui d’une Ford C100 de Groupe C, l’une des catégories reines de l’endurance. Le dessin est confié à Tony Southgate, figure de la Formule 1 et du Mans. La carrosserie, en fibre de verre, reproduit la silhouette d’un Transit Mk2, mais rabaissée et affinée. Sous le capot, un V8 Cosworth DFL de 600 chevaux propulse ce van hors normes à 280 km/h sur le circuit de Silverstone.

    Là où le premier Supervan faisait sourire, le second impose le respect. Ford en fait un outil de communication redoutable : montrer qu’un banal fourgon peut cacher le cœur d’une voiture de course.

    Supervan 3 : l’excès assumé (1994)

    Dix ans plus tard, Ford récidive avec le Supervan 3, construit pour accompagner le restylage du Transit Mk3. Plus qu’une évolution, c’est une véritable mutation. Le moteur, un V8 Cosworth de 3 litres, délivre 660 chevaux. La silhouette reste celle d’un Transit, mais à l’échelle 7/8e : un utilitaire compressé, plus court d’un mètre, entièrement pensé pour la performance.

    Le Supervan 3 devient rapidement une icône publicitaire. On l’aperçoit dans des démonstrations, des salons, et il revient même sur le devant de la scène en 2004, lors d’un lifting pour célébrer la nouvelle génération de Transit.

    Supervan 4 : l’ère électrique (2022)

    L’histoire aurait pu s’arrêter là, cantonnée à quelques délires mécaniques des années 1970-1990. Mais Ford choisit de relancer la saga à l’ère des moteurs électriques. En 2022, le Supervan 4 est dévoilé. Aux commandes du design, Ernesto Rupar pour l’extérieur et Sebastian Todderroth pour l’intérieur.

    Sous sa carrosserie futuriste, il cache quatre moteurs électriques cumulant 1 903 chevaux. Le 0 à 100 km/h tombe sous la barre des deux secondes. De quoi faire rougir bien des hypercars. Seul bémol : une autonomie limitée à 35 kilomètres. Mais qu’importe, le message est clair : le Transit aussi peut entrer dans le futur radical de la mobilité.

    Supervan 4.2 : la bête de course (2023)

    Un an plus tard, Ford affine son prototype. Le Supervan 4.2 adopte trois moteurs électriques, mais sa puissance grimpe à 2 040 chevaux. Cette fois, l’objectif est clairement défini : les courses de côte.

    Avec Romain Dumas, spécialiste des records en tout genre, l’engin s’aligne au départ du mythique Pikes Peak International Hill Climb. Résultat : deuxième au général, premier de sa catégorie. Le Supervan enchaîne ensuite les démonstrations à Bathurst, à Goodwood, et prend une place d’honneur dans les célébrations des 60 ans du Transit.

    Un objet marketing devenu légende

    Au fil du temps, le Supervan a dépassé sa fonction initiale de vitrine technologique. Il est devenu un objet de culte, symbole de l’esprit décalé et audacieux de Ford UK. L’idée de transformer un fourgon utilitaire en machine de compétition aurait pu rester une blague. Mais elle s’est inscrite dans l’histoire de la marque comme une démonstration flamboyante de créativité.

    Du V8 hurlant des années 1970 aux moteurs électriques survoltés d’aujourd’hui, le Supervan illustre l’évolution de la performance automobile et du rôle de la communication dans l’industrie. Plus qu’un démonstrateur technique, il est une icône culturelle, témoin de cinq décennies d’expérimentations.

    Et à chaque fois, la même conclusion : dans l’ADN du Transit, il y a toujours eu un peu de course.

  • Le paradoxe de Monty Hall : quand un jeu télévisé et une voiture ont changé les mathématiques

    Le paradoxe de Monty Hall : quand un jeu télévisé et une voiture ont changé les mathématiques

    Dans l’Amérique des sixties et des seventies, l’automobile était plus qu’un moyen de transport : elle incarnait le rêve, la prospérité et l’aboutissement d’un idéal de société. Les chromes étincelants, les carrosseries interminables et les V8 grondants faisaient partie de l’imaginaire collectif. Rien d’étonnant alors que la télévision, ce nouveau temple de la culture populaire, ait fait de la voiture son trophée ultime. C’est ainsi qu’un jeu télévisé est entré dans la légende, non seulement pour ses mises en scène spectaculaires, mais aussi parce qu’il a donné naissance à l’un des paradoxes mathématiques les plus célèbres du XXe siècle : le paradoxe de Monty Hall.

    Let’s Make a Deal : l’Amérique du spectacle et de l’abondance

    Créée en 1963 par le producteur Stefan Hatos et l’animateur canadien Monty Hall, l’émission Let’s Make a Deal devient rapidement un phénomène de société. Le principe est simple : le public, déguisé en costumes extravagants, participe à un jeu de hasard orchestré par Monty Hall, qui multiplie les offres et contre-offres. Les participants peuvent repartir avec quelques dollars, des objets absurdes ou… une automobile flambant neuve, exposée sur le plateau comme un Graal.

    Les voitures offertes reflètent alors la puissance de l’industrie américaine. Pontiac GTO, Ford Mustang, Cadillac Eldorado ou encore Buick Riviera : ces modèles symbolisent à la fois le succès et l’horizon d’une vie meilleure. L’image d’un candidat ouvrant une porte pour découvrir derrière elle une berline de Detroit à la peinture métallisée et aux sièges en cuir est devenue l’icône d’un âge d’or télévisuel.

    Mais c’est une mécanique bien particulière du jeu qui a retenu l’attention des mathématiciens, des statisticiens et… des amateurs de paradoxes.

    Trois portes, une voiture et deux chèvres

    L’un des moments phares du show consistait à choisir entre trois portes. Derrière l’une d’elles, une automobile de rêve. Derrière les deux autres, des lots de consolation, souvent des chèvres vivantes. Monty Hall, avec son sourire espiègle et son sens du suspense, proposait au joueur d’ouvrir une porte. Puis, sachant ce qui se cachait derrière chacune, il dévoilait une autre porte contenant forcément une chèvre. Et enfin, il posait la question fatidique : « Voulez-vous changer de porte ? »

    À première vue, le dilemme paraît équitable. Deux portes, une voiture : une chance sur deux, pense-t-on spontanément. Mais la réalité mathématique est tout autre. En conservant son choix initial, le joueur n’a qu’une chance sur trois de gagner. En revanche, en changeant, il double ses chances pour atteindre deux chances sur trois. Ce résultat, contre-intuitif, deviendra le fameux paradoxe de Monty Hall.

    De la télévision aux mathématiques

    Le problème a longtemps circulé comme une curiosité probabiliste parmi les amateurs de jeux et les étudiants en statistiques. Mais il a explosé dans l’opinion publique à la fin des années 1980, lorsqu’une lectrice posa la question dans la rubrique de Marilyn vos Savant, considérée comme la femme la plus intelligente du monde par le Guinness Book. Dans son magazine, elle expliqua que la stratégie gagnante était bien de changer de porte. Tollé général. Des centaines de lecteurs, dont des professeurs de mathématiques et des chercheurs, lui écrivirent pour la contredire. Pourtant, les expériences répétées et les simulations informatiques confirmèrent son raisonnement : Monty Hall avait, bien malgré lui, popularisé une démonstration implacable des lois des probabilités.

    La voiture comme symbole

    Si le paradoxe a marqué autant les esprits, c’est aussi parce qu’il mettait en jeu une automobile. Dans l’Amérique de Let’s Make a Deal, gagner une voiture n’était pas un simple prix : c’était un changement de vie. Devenir propriétaire d’une Cadillac flambant neuve représentait un ascenseur social en accéléré, un signe extérieur de réussite. La tension dramatique venait de là : derrière une porte, une existence transformée ; derrière les deux autres, une chèvre broutant placidement la moquette du plateau.

    Le parallèle entre le rationnel (les probabilités) et l’émotionnel (le désir de la voiture) est sans doute ce qui a rendu le paradoxe de Monty Hall aussi marquant. Les spectateurs se mettaient à la place du joueur : aurais-je osé changer de porte, quitte à perdre ce que j’avais déjà désigné ? Ou serais-je resté fidèle à mon premier choix, au risque de passer à côté du rêve automobile ?

    Monty Hall, malgré lui, éternel

    Ironie de l’histoire, Monty Hall lui-même n’aimait pas que son nom soit attaché à ce paradoxe. Il estimait que le raisonnement mathématique ne traduisait pas parfaitement la réalité de son jeu, où les candidats étaient influencés par sa manière d’animer, ses hésitations feintes ou ses incitations subtiles. Mais le mal était fait : son nom restera à jamais lié à l’une des énigmes les plus célèbres de la culture populaire.

    Entre probabilité et passion

    Le paradoxe de Monty Hall est plus qu’un problème mathématique. C’est une histoire où se croisent la télévision, la culture populaire américaine, le rêve automobile et la rationalité scientifique. Il nous rappelle qu’une voiture, bien plus qu’un objet mécanique, peut devenir le pivot d’un récit collectif, d’une tension dramatique et d’un apprentissage intellectuel.

    Alors, si vous vous retrouviez un jour devant trois portes, avec une Cadillac des sixties derrière l’une d’elles et deux chèvres derrière les autres… que feriez-vous ?

  • Jacques Séguéla, la publicité et l’automobile : une histoire française

    Jacques Séguéla, la publicité et l’automobile : une histoire française

    « Ne dites pas à ma mère que je suis publicitaire, elle croit que je suis pianiste dans un bordel. » La formule de Jacques Séguéla est restée dans toutes les mémoires. Elle illustre à la fois l’irrévérence et le sens de la formule d’un homme qui a profondément marqué la communication en France. Si son nom est souvent associé à la politique, Jacques Séguéla a aussi construit une part considérable de sa légende en façonnant l’image des constructeurs automobiles. De Citroën à Peugeot, de Renault à la mythique DS, il a su donner à la voiture un supplément d’âme en racontant des histoires plutôt qu’en vantant des caractéristiques techniques.

    La publicité automobile avant Séguéla

    Dans les années 1960 et 1970, la publicité automobile reste dominée par une approche descriptive : puissance du moteur, volume du coffre, confort des sièges. Le discours est fonctionnel, rarement émotionnel. Séguéla, avec son talent pour la narration et son flair pour les symboles, va renverser cette logique. Il ne vend pas une voiture, il vend une image, une envie, presque un mythe.

    L’ère Citroën : la marque en orbite

    L’un des plus grands coups de Jacques Séguéla reste sans doute son travail avec Citroën. La marque aux chevrons, déjà célèbre pour son audace technique, trouve en lui un interprète à la hauteur de son histoire. Dans les années 1980, Séguéla imagine des campagnes qui marquent les esprits par leur dimension quasi cinématographique.

    Qui n’a pas en mémoire les Citroën sur un porte-avions ou sur la Grande Muraille ? L’automobile devient spectacle, la publicité devient événement.

    Avec la BX, lancée en 1982, Séguéla ose une promesse de modernité qui colle parfaitement à l’esprit d’innovation de la marque. Ces campagnes vont ancrer Citroën dans une dimension presque futuriste, héritière de la DS et de son aura de vaisseau spatial sur roues.

    Le choc de l’image

    L’une des forces de Séguéla réside dans son usage magistral des symboles. Pour lui, la publicité automobile doit d’abord frapper l’imagination. C’est ainsi qu’il choisit des décors extrêmes – porte-avions, gratte-ciel, paysages lunaires – pour rappeler que la voiture n’est pas seulement un moyen de transport, mais un objet de désir. Cette vision tranche radicalement avec l’approche rationnelle qui dominait jusque-là.

    L’homme derrière les campagnes

    Publicitaire de génie pour les uns, manipulateur d’images pour les autres, Jacques Séguéla ne laisse jamais indifférent. Son approche repose sur la conviction que la voiture, produit industriel par excellence, est aussi un objet culturel. Dans ses campagnes, on retrouve une lecture très française de l’automobile : une machine qui parle d’avenir, de liberté et de style.

    Un héritage encore vivant

    Aujourd’hui, à l’heure où les constructeurs communiquent sur l’électrification, la durabilité et les technologies embarquées, l’influence de Séguéla reste perceptible. Ses campagnes ont installé l’idée que l’automobile ne s’achète pas seulement pour ce qu’elle est, mais pour ce qu’elle raconte de nous. La dimension émotionnelle, devenue un standard dans la communication automobile mondiale, trouve une part de ses racines dans ce qu’il a inventé pour Citroën et consorts.

    Séguéla, conteur de voitures

    La carrière de Jacques Séguéla dans la publicité automobile témoigne d’une époque où la voiture était encore le symbole ultime de liberté et de modernité. En magnifiant ces valeurs, il a non seulement servi les marques françaises, mais aussi contribué à façonner l’imaginaire collectif autour de l’automobile. Ses campagnes restent des repères culturels, des moments de télévision gravés dans les mémoires. Au-delà des slogans et des images spectaculaires, Séguéla a rappelé que la publicité automobile n’est pas un exercice de description technique, mais un art de raconter des histoires.

  • Porsche 911 Targa : l’icône à ciel ouvert fête ses 60 ans

    Porsche 911 Targa : l’icône à ciel ouvert fête ses 60 ans

    Il y a soixante ans, en septembre 1965, Porsche présentait au Salon de Francfort une nouvelle déclinaison de la 911 qui allait devenir un symbole à part entière : la Targa. Ni cabriolet, ni coupé, mais un peu des deux, elle incarnait une solution audacieuse à un défi réglementaire et technique. Aujourd’hui, l’arceau Targa est plus qu’un élément de carrosserie : c’est une signature intemporelle, qui a traversé toutes les générations de la 911.

    Une idée née dès la 901

    Dès le développement de la Porsche 901 – qui deviendra la 911 –, les ingénieurs et designers savaient qu’une version ouverte devrait compléter la gamme. En 1962, Porsche, Reutter et Karmann envisagent trois options : un cabriolet classique, un roadster à structure allégée et un cabriolet doté d’un arceau fixe. C’est ce dernier concept qui s’impose, même si le projet reste dans les cartons, faute de moyens.

    Lorsque les États-Unis imposent des règles de sécurité plus strictes au milieu des années 1960, Porsche dispose déjà de la réponse : un cabriolet sécurisé par un arceau en acier inoxydable brossé, intégré au design. Une idée qui combine style, technologie et sécurité.

    La première Targa : liberté et sécurité

    La 911 Targa est dévoilée en 1965, suivie de la 912 Targa en 1967. Le concept séduit immédiatement : un toit amovible au-dessus des sièges avant, une lunette arrière souple en plastique que l’on pouvait replier ou retirer, et quatre configurations possibles. Porsche résume la promesse dans une formule devenue culte :
    « La liberté du cabriolet, la sécurité d’un coupé. »

    Le nom, proposé par Harald Wagner, directeur des ventes de l’époque, rend hommage à la course sicilienne Targa Florio, où Porsche s’illustrait régulièrement. Et sous le crayon de Ferdinand Alexander Porsche, l’arceau n’est pas qu’un élément fonctionnel : il devient un signe distinctif, fusion parfaite de la forme et de la fonction.

    Des évolutions techniques et stylistiques

    Dès 1969, la lunette arrière souple est remplacée par un grand vitrage fixe, mais le principe reste inchangé : arceau fixe + toit amovible. Cette formule perdure jusqu’à la génération 964 (1989-1993).

    En 1995, la 911 993 introduit une rupture : la Targa adopte un toit vitré coulissant, soutenu par des montants longitudinaux. L’arceau disparaît, la ligne se rapproche du coupé, mais le modèle conserve son nom. Les générations 996 et 997 poursuivent cette formule, séduisant une clientèle appréciant la luminosité et l’originalité du grand toit panoramique. Pourtant, pour les passionnés, quelque chose manque : la Targa sans arceau n’a pas tout à fait le même charisme.

    Le grand retour de l’arceau

    En 2014, avec la 911 type 991, Porsche opère un virage décisif : l’arceau Targa fait son grand retour. L’arrière s’habille d’une lunette panoramique sans montants latéraux, et un mécanisme spectaculaire orchestre l’ouverture et la fermeture du toit en quelques secondes. La capote se replie derrière les sièges arrière, dans une chorégraphie digne d’un ballet mécanique.

    Ce retour aux origines, salué par les puristes, repositionne la Targa comme un modèle à part entière, distinct du cabriolet et du coupé. La génération actuelle, la 992 Targa, conserve cette architecture, tout en y associant les dernières évolutions techniques, de la transmission intégrale aux motorisations les plus modernes.

    Une icône de style et d’ingénierie

    La Targa a toujours incarné une philosophie singulière chez Porsche : conjuguer l’ouverture et la protection, la liberté et la rigueur technique. Elle a inspiré d’autres modèles de la marque – la 914, la Carrera GT – et influencé plusieurs constructeurs tentés par l’idée d’un cabriolet plus sûr et plus utilisable au quotidien.

    Mais chez Porsche, la Targa n’a jamais été un simple compromis. Elle est devenue un marqueur identitaire, au même titre que les phares ronds ou la poupe inclinée. C’est une 911 immédiatement reconnaissable, que l’on aime pour son mélange de tradition et d’innovation.

    60 ans et toujours unique

    En 2025, Porsche célèbre les 60 ans de la 911 Targa. Rarement un concept technique a su traverser six décennies tout en s’adaptant aux évolutions réglementaires, stylistiques et technologiques. De l’arceau inox brossé de 1965 au mécanisme électrique de la 992, la Targa incarne l’ingénierie allemande autant que l’art du détail.

    Elle n’est pas qu’une déclinaison : elle est devenue un modèle en soi, apprécié de ceux qui veulent conjuguer élégance, sportivité et plaisir de conduite à ciel ouvert.

    La Targa, c’est la preuve que l’ouverture peut être pensée avec substance. Et qu’à Zuffenhausen, l’émotion se conjugue toujours au présent.